Une maison individuelle bioclimatique à Puiseux, dans les Ardennes Par Chloë LABIAUSSE & François VANHILLE Master DAEC – Développement local durable – Cours de Madame Decoster 23/10/2012 La maison prototype en bois local, chanvre et ouate initiée par l'association Eco-territoires a été construite en cœur de village des Ardennes françaises, dans les Crêtes Préardennaises. La Communauté de communes des Crêtes a porté le projet, dans le cadre du Pôle d'Excellence Rurale dont la maison est un chantier expérimental. La philosophie de ce chantier était basée sur une mise en œuvre maximum de ressources, matériaux et savoir-faire locaux. C'est une action financée par INTERREG IV, le fonds européen de développement régional. Premier acteur : la communauté de communes des Crêtes préardennaises, porteuse du projet. Celui-ci s'inscrit par ailleurs dans l'histoire d'une coopération transfrontalière pour un écohabitat participatif. Cette coopération s'intitule « Eco-construction et Citoyens », qui est un projet animé par cinq associations franco-belges : - Terre Académie : Association de promotion de l’éco-construction. Son principal objet est la création et l’animation d’un centre didactique dédié à la formation à l’écoconstruction, aux énergies renouvelables et à l’environnement. Elle est basée à Maisoncelles (Be). - Eco-Territoires : Association agissant pour la relocalisation de l’économie et une meilleure prise en compte des impératifs écologiques et sociaux dans nos modes de production et de consommation. Elle rassemble producteurs et consommateurs autour de projets collectifs et de formations pour l’émergence de filières intégrées au territoire. Elle est originaire des Crêtes Préardennaises (Fr.) et fait le lien avec la Communauté de Communes. - Nature et Progrès Belgique : Association belge qui agit pour un plus grand respect de l’environnement ainsi que l’amélioration du bien-être social des habitants. - ALE 08 (Agence locale de l’énergie) Agence qui œuvre pour la maîtrise de l’énergie et la promotion des énergies renouvelables et donc les membres sont aussi bien des collectivités locales, des entreprises ou des particuliers. - Vents d’Houyet : Association belge ayant pour but d’inciter les citoyens à s’approprier les énergies renouvelables en promouvant essentiellement les projets éoliens citoyens. Les partenaires financiers, pour la construction de la maison : - La région Wallonie - La région Champagne Ardenne - La Communauté de Communes des crêtes préardennaises L’ADEME (Agence nationale de l'environnement et la maîtrise de l'énergie) Les partenaires du PER (cf. supra) sont : des sociétés privées du tourisme et de la filière bois, la communauté de communes de Trois Cantons, le Pays Rethélois, la Communauté de Communes de l’Argonne Ardennaise, ainsi que des associations (Agence Locale de l’Energie, Pôle Bois Ardennes, Association Eco Territoire) et la chambre d’agriculture pour les montages de projet. Enfin s’agissant uniquement de la maison, on compte également l’architecte : Alternatives Architecturales 08, une entreprise des Ardennes. Le projet de la maison bioclimatique s’inscrit dans une démarche active de développement local durable initiée depuis l’année 2000 par la communauté de communes des Crêtes préardennaises. Celle-ci a ainsi obtenu la labellisation « Pôle d’excellence rurale » (ci-après PER) en juin 2006 après avoir répondu à un appel à projets national. Le but d’un PER est de soutenir les dynamiques d’initiative rurale et d’encourager l’innovation, permettant ainsi d’accroître la capacité économique des territoires ruraux . L’attribution du label au porteur de projet permet ensuite l'établissement de conventions cadre entre celui-ci et le préfet de département, puis la prise des arrêtés attributifs de subventions pour les différentes opérations d'investissement constitutives du projet. Le projet présenté par la communauté de communes des Crêtes préardennaises et différents partenaires (telles des sociétés privées ou encore le Pays Rethélois) s’orientait autour de la valorisation locale de la ressource bois . Le coût global s’élevait à 4 462 000 euros et la subvention directement issue du PER à 774 890 euros . La maison bioclimatique de Puiseux correspond ainsi au volet construction d’habitat du projet. L’objectif était donc de valoriser la filière bois à travers un habitat dont les matériaux nécessaires à la construction seraient issus des ressources locales, qui respecterait le bâti préexistant du village et qui n’exigerait qu’une faible consommation énergétique. La mise en valeur était également touristique : la maison pouvant être visitée durant l’année, à faible fréquence cependant, le but étant que l’habitant ait les moyens financiers d’acquérir ce type de maison. Enfin, à long terme, ce projet de construction doit également développer des savoirs faire locaux dans la filière bois mais également dans une plus large échelle telle l’intégration de panneaux solaires ou l’utilisation du chanvre régional. Le respect du bâti préexistant du village s’est ainsi fait à travers des façades, des pentes, des hauteurs de toits ainsi que des dimensions des fenêtres en continuité avec la maison voisine. Le souci était donc de suivre un même langage architectural, malgré l’utilisation de matériaux complètement différents. Les matériaux justement sont donc issus des ressources locales, dont il a donc fallu développer la gestion. Aussi la technique du bois massif reconstitué a-t-elle été utilisée, permettant l’utilisation du chêne ardennais provenant d’une forêt située à moins de 20 kilomètres du site. Le chanvre régional, les pigments, mais aussi la ouate de cellulose ont pareillement été utilisés pour la construction et ont nécessité de nouveaux modes de gestion, dans le souci de développer des savoirs faire locaux, comme il a été expliqué précédemment. Enfin, afin de garantir une faible consommation énergétique, le thermicien de l’Agence Locale de l’Energie des Ardennes a simulé le fonctionnement de la maison. Cette expérience en a conclu à l’utilisation du poêle à bois plutôt que d’un chauffage central. De plus des panneaux thermiques solaires ont été installés, ainsi qu’un double flux raccordé sur un puits canadien permettant que l’air aspiré par la combustion arrive à une température moins froide, ce qui permet ensuite de récupérer les calories gratuites du sol et celles de l’air vicié extrait de la maison pour réchauffer l’air neuf. 2000 : la communauté de communes adopte une politique de développement durable. Janvier 2006 : réponse de la communauté de communes à l’appel à projet lancé par l’Etat sur la labellisation de PER. Juin 2007 à Août 2008 : durée de construction de la maison. Quatre ans après le chantier, une filière locale de transformation du chanvre paysan a effectivement été mise en place, répondant ainsi à l’objectif de développement des savoirs faire locaux à long terme et permettant par la même occasion la création d’emplois. La construction de la maison s’est faite comme convenu dans le projet: le « pari » du local a donc été tenu. La maison, dont le coût s’est élevé à 200 000 euros est toujours habitée (en location). Les visites de la maison rassemblent du monde et attirent la presse locale (l’Union) qui relaie ainsi progressivement le projet dans la région. Les prix de matériaux sont néanmoins toujours plus chers que ceux utilisés pour la construction d'un habitat « normal ». La Communauté de communes a poursuivi la construction des maisons en bois dans deux de ses communes, d’abord à Chaumont Porcien puis à Novion Porcien. Chaumont Porcien La construction de la maison de Chaumont Porcien est également arrivée à terme. D’une valeur de 240 000 euros cette fois, celle-ci a été proposée à la location dès l’année 2011 . Dans la lignée de la maison de Puiseux, sur les huit entreprises qui ont travaillé sur le chantier, quatre sont locales. De même les matériaux utilisés sont principalement ceux issus des ressources de la région (laine de bois, ouate de cellulose, paille…). Novion-Porcien L’appel à candidature a été lancé courant 2010 et le projet sélectionné en 2011. Il doit être bouclé pour la fin de l'année 2012 et pourrait voir le jour en 2013-2014 et prévoit la construction d’une dizaine de logements en habitat groupé participatif sur une surface de 0,8 hectares. La première recommandation est la responsabilisation des élus, notamment des élus ruraux, sur l’importance des ressources naturelles ainsi que leur potentiel économique. De plus le choix innovant de l’éco construction rend un territoire rural attractif. Il existe en effet des habitants soucieux de maintenir la qualité de l’habitat villageois ainsi que des propriétaires désireux de construire écologique et collectif . La seconde porte sur le rôle des associations militantes dans le développement durable. Avec ce projet se concrétise en effet ce que peut réaliser un collectif d'associations militantes. Aussi transforme-t-il : - l'économie, en valorisation des ressources locales, créatrice d'emploi et d'amélioration du cadre de vie ; l'environnement en écologie de moyens, et en moyens de faire de l'écologie (dans le sens : transmission d'un patrimoine sain aux générations futures), ce qui vaut toujours mieux que de se contenter d'un "environnement" certes agréable, mais basé sur des valeurs uniquement matérialistes et aseptisées ; - et le social, en dynamique d'échanges de savoirs et de coconstruction.