Sainte colère Fabienne Bergmann www.traduc71.com L'expression de la colère peut prendre en hébreu bien des formes. On peut לרגוז (lirgoz), ( להתרגזlehitragez), ( לזעוםliz'om), ( לקצוףliktzof), ( לרתוחlirtoah), להתרעם (lehitraem), ( להביע תרעומתlehabïa tar'omèt), ( להתמלא חמהlehitmalé héma), להזעיף פנים (lehaz'if panim). On se souvient de la réaction d'Assuérus quand Vashti refusa de se présenter à lui devant ses convives (Esther, I : 12) : ַוחֲמָ תֹו בָ ע ֲָרה בֹו,וַיִּ קְ צֹ ף הַ מֶּ לְֶּך ְמאֹ ד (Vayiktsof hameleh meod vehamato baara bo = le roi en fut très irrité, et sa colère s'enflamma). Les deux verbes ( קצףkatsaf) et ( בערbaar) sont liés à la chaleur ou au feu. Il en est de même des ( חמומי מוחhamoumé moah), ces "cervelles brûlées", ces emportés dont les débordements sont hautement décriés par les media. L'expression talmudique ( ְבעִּ ְדנָא ְד ִּר ְתחָ אbeïdna deritha), dans un moment de colère, est souvent employée par les avocats qui ne trouvent pas d'autre circonstance atténuante pour disculper leur client, qui par ailleurs serait le meilleur des hommes… Certains termes exprimant la colère évoquent les forces de la nature. Il en est ainsi du verbe ( זעףzaaf) du livre de Jonas (I : 15) : ִּמזַעְ ּפֹו,( ַו ַיעֲמֹ ד הַ יָםvayamod hayam mizaafo = la fureur de la mer se calma) ou des גשמים שירדו בזעף, ces "pluies de la colère" qui tombèrent après le fameux défi de Honi Hameaguel (Michna, Taanit III, 8) d'où nous vient l'expression ( גשם זלעפותguechem zal'afot), ces pluies diluviennes que nous annonce parfois la météo en hiver. De même, du mot tonnerre – ( רעםraam) – sont issus le verbe ( התרעםhitraem, s'indigner, se mettre en colère) et ( תרעומתtar'omèt, le ressentiment ou le grief). De quelqu'un qui ne sait se contenir, on dit couramment aujourd'hui ( יצא מהכליםyatsa mihakélim) = il a perdu contenance, ( התפרץhitparetz) = est sorti de ses gonds, s'emporter, ou ( התעצבןhit'atsben) = s'énerver, ( התרתחhitratéah) ou plus familièrement ( רתחratah) = bouillir, de même qu'on dira de quelqu'un qui ne se contrôle plus : הדם ( עלה לו לראשhadam ala lo laroch), littéralement : le sang lui est monté à la tête ou encore ( תפס קריזהtafas crisa), il a piqué une crise. Dans la Bible, les verbes les plus courants pour désigner la colère sont חרה אַ פו ָ (hara apo) et ( קצףkatsaf), employés en général pour désigner la colère de Dieu. Le verbe le plus usuel aujourd'hui, ( כעסkaas), est courant dans la langue des Sages mais apparait rarement dans la Bible. De la racine '( כ'ע'סkaf, ayin, sameh), celle-ci connait surtout la forme hif'il du verbe, soit ( להכעיסlehakhis), terme employé aujourd'hui pour décrire un acte (originellement la transgression d'une injonction religieuse) qu'on fait non dans l'intention d'une jouissance ou d'un bénéfice, mais dans le seul but d'exaspérer autrui. Manger ostensiblement en public un sandwich au jambon-fromage à Yom Kippour ou à Pessah est un paradigme de ce déplorable phénomène. Mais même si on n'a que l'embarras du choix pour l'exprimer, ne vaut-il pas mieux ( לכבוש את הכעסlikhboch èt hakaas), maitriser sa colère ?