AMOS CHAPITRE V 1 Écoutez cette parole que moi j’élève sur vous [en] chant funèbrea, maison d’Israël : 2 « Elle est tombée, elle ne pourra plus se releverb, la vierge d’Israël, elle gît sur son sol, personne ne la relève ! » 3 Car ainsi a parlé [le] Seigneur Jéhovahc : « La ville qui sort mille, garderad cent, et celle qui sort cent, gardera dix, pour la maison d’Israël. » 4 Car ainsi a parlé Jéhovah à la maison d’Israël : « Cherchez-moi et viveze ! 5 Ne cherchez pas Béthel, au Guilgal ne venez pas, et Béer-Schéva ne traversez pas,f car le Guilgal sera assurément exilég et Béthel deviendra néanth. 6 Cherchez Jéhovah et vivez, a Ou « complainte », « chant de deuil ». DHAB : 331. ֹא־תֹוסיף קּום ִ ל: plus litt. « elle ne continuera pas à se lever ». ( יסףau qal, ou comme ici au hifil) + infinitif construit = continuer à (DHAB : 161). c L’apparat indique : « huc tr לבית יׂשראלex 3b, cf 4a », i.e. : ici les éditeurs proposent de transposer l’expression לבית יׂשראל, « pour la maison d’Israël », d’après la deuxième partie du verset courant, et la première partie du verset suivant. d Litt. « subsistera », « restera » (DHAB : 373). e וִ ְחיּו: le waw précédant cet impératif peut s’entendre de manière consécutive : « pour vivre » ou « et vous vivrez » (cf. Joüon §166 f). Cette consécution est d’ailleurs formellement explicitée par לְ מַ ַען ִתחְ יּוen 5.14. f Le verset présente trois négations consécutives, la première introduite par אַ ל, et les deux autres par ל ֹא: « If there be several neg. clauses ל ֹאis often used after the first », A. B. Davidson, Introductory Hebrew Grammar Hebrew Syntax (3e éd.; Edinburgh: T. & T. Clark, 1902) : 88. g Difficile de rendre l’assonance dans l’expression הַ גִ לְ גָּל גָֹּלה יִ גְ לֶה. La BFC fait cette tentative : « je dis du Guilgal : ‘Qu’il galope vers l’exil !’ ». h יִ ְהיֶה לְ אָּ וֶן: la LXX traduit cette expression par ἔσται ὡς οὐχ ὑπάρχουσα, « sera comme n’existant pas ». Le terme ָ֫ ָּאוֶןdésigne ordinairement, le malheur, l’iniquité, la tromperie, la désillusion, l’idolâtrie (cf. DHAB : 24, ST : 13). Mais il signifie aussi quelque chose de vide, le néant, l’inexistant (cf. Is 41.29 ; HALOT : 22). La Vulgate approche ce sens : « erit inutilis ». b 1 de peur qu’il ne se précipitea comme le feu, maison de Jacob, ne dévore, et qu’il n’y ait personne pour éteindre Béthelb. 7 Eux quic changent le jugement en absinthe, et font reposerd à terre la justice. 8 [Celui qui]e fait les Pléiades et Orion, qui change en matin l’obscurité épaissef, fait s’obscurcir le jour en nuit, appelle les eaux de la mer et les répand sur la surface de la terre, Jéhovah est son nom. 9 [C’est] lui qui fait tomberg la ruine sur le forta, יִ צְ לַח: qal inaccompli 3MS du vb. צלח. Le sens de ce verbe est incertain (cf. DHAB : 318). Au qal, il signifie habituellement se précipiter, pénétrer, réussir ou être utile (ibid.). Certains ont proposé de traduire ainsi : « de peur que sa colère n’éclate comme le feu dans la maison de Joseph, ou qu’il ne fende, brise, la maison, etc. » (ST : 616). HALOT propose comme autres sens : to have an effect, to stride throught, to break in, to force entry/to enter with fire et to set ablaze (HALOT : 1025). La LXX rend généralement ce terme par εὐοδόω, diriger heureusement (i.e. conduire au succès). Ici néanmoins, le verbe employé est ἀναλάμπω, s’enflammer (Bailly : 128). Idem dans la Vulgate, qui emploie le verbe conburo, brûler entièrement, consumer (Gaffiot : 347). L’apparat de la BHS fait trois propositions : « prp יְ שַ לַח באשaut ְ יצלח באש בaut » יצלח לְ הַ ב אש ב, « n’envoie dans un feu ou ne se précipite dans un feu contre ou ne précipite une flamme de feu contre ». b et qu’il n’y ait personne pour éteindre Béthel : ין־מכַבֶ ה לְ בֵ ית־אֵ ל ְ ֵוְ א, plus litt. et il n’ya personne éteignant [participe piel] pour Béthel. c Litt. « ceux qui ». d Ou « font mettre », הִ נִ יחּו: hifil accompli 3MP du vb נוח, placer, poser, se reposer. e L’apparat signale que le commencement de cette phrase manque. Sans doute l’article ָּה. f צַ לְ ָ֫ ָּמוֶת: obscurité plus épaisse que ( חֹ שֶ ְךHALOT : 1029). Certains ont traduit ce mot sur la base d’une étymologie populaire, mais erronée ( צֵ ל, ombre et מָּ וֶת, mort), comme les traducteurs de la LXX [σκῖα Θανάτου] (DHAB : 318) ou, plus récemment, É. Dhorme, « ombre de la mort ». g הַ מַ ְבלִ יג: art. + participe hifil MS du vb בלג. Son sens est incertain : « ? faire luire (un éclair) Am 5,9 » (DHAB : 61) d’où p.ê. celui qui illumine (cf. LEH, art. διαιρέω). Ailleurs il prend le sens de manifester de la joie ou reprendre courage, consoler (cf. ST : 67). L’apparat critique indique : « G ὁ διαιρῶν, prp המפליג, al » הַ מַ פִ ילi.e. la Septante porte celui qui distribue, d’où les éditeurs proposent de lire המפליג, (du vb )פלגcelui qui sépare, divise, distribue. D’autres optent pour la forme הַ מַ פִ יל, celui qui fait tomber (art. + participe hifil MS du vb )נפל. a 2 et venirb la ruinec dans la forteresse ! 10 Ils ont haï celui qui, à la ported, rend la justice et celui qui parle avec intégritée, ils abominentf. 11 C’est pourquoi, puisque vous avez accablé le faible de l’impôtg, que, sur luih, vous prélevez le bléi, vous avez bâti des maisons en pierre de taille, mais vous n’y habiterez pasj ; vous avez planté des vignes attrayantesk, mais vous ne boirez pas de leur vin. 12 Car je connais vos multiples révoltesl, L’apparat indique que la LXX rend l’expression ( שֹ ד עַל־ ָּעזla ruine sur le fort) par συντριμμὸν ἐπ̓ ἰσχὺν (la ruine sur la force) et propose de lire ( שֶ בֶ ר עַל־עֹ זle ruine sur la force ; sur שֶ בֶ ר, action de briser, ruine, dévastation, etc., cf. ST : 728). À la place de ( שֹ דle fort, le puissant) l’apparat propose « שֹ ר, taurus » = le taureau, et à la place de ָּעז, « עֵז capella », la chèvre. b TM : « et la ruine vient dans la forteresse ». L’apparat, que nous suivons, indique : « prb l יביא ִ cf Vrs », i.e. il faut plus probablement lire le verbe au hifil : « il fait venir », ainsi que font la plupart ou toutes les versions (Vrs). c Bizarrement, la LXX traduit (apparemment) שֹ דune fois par son équivalent συντριμμὸν, et une autre fois par ταλαιπωρίαν (malheur, affliction, ruine). d i.e. la porte de la ville, le tribunal. C’est en effet à la porte d’une ville qu’étaient généralement rendues les décisions judiciaires (cf. Dt 25.7, Ps 127.5, Jb 5.4, Is 29.21, etc.). e L’adjectif תָּ ִמיםse réfère au sujet (implicite) du verbe דֹ בֵ ר, i.e. « celui qui, intègre, dit [la vérité] ». On peut le faire fonctionner comme un adverbe : celui qui parle véridiquement, ou avec intégrité. f יְ תָּ ֵעבּו: piel inaccompli 3MP du vb תעב. Au piel, abominer, considérer comme abominable. g בֹושַ ְסכֶם: poel infinitif construit de ]?[ בשס+ suffixe 2MP (cf. HALOT : 165, Joüon §59). Le sens du verbe (hapax) בשסest incertain (DHAB : 72, ST : 86, 58). Certains suggèrent fouler, piétiner d’après la lecture conjecturale בּוסכֶם ְ , (< )בוסque signale l’apparat. D’autres, sur la base d’un terme accadien apparenté, proposent lever une taxe agricole (cf. H. R. Cohen, Biblical Hapax Legomena in the Light of Akkadian and Ugaritic, BLDS 49 et S. M. Paul, Amos, Hermeneia : 172–73). Cette dernière option est la plus vraisemblable au vu du contexte. h Litt. « d’auprès de lui ». i Litt. « et que le prélèvement du blé vous prenez de lui ». Le sens de מַ ְׂשאֵ תn’est pas certain : prélèvement, contribution (DHAB : 229), fardeau, tribut, voire don, présent (ST : 410). j Litt. « vous n’habiterez pas en elles ». k כ ְַרמֵ י־חֶ מֶ ד: litt. des vignes d’attrait ou d’excellentes vignes. l Ou « vos nombreuses révoltes », « la multitude de vos révoltes ». a 3 et vos nombreuxa péchés,b [vous], oppresseurs du juste, preneurs de pot-de-vinc, qui, à la porte, faites s’écarterd les sans-défensee. 13 C’est pourquoi l’homme aviséf, en ce temps, gardera le silenceg, car ce [sera] un temps de malheur. 14 Cherchez le bon, et non le mal afin que vous viviez et qu’il en soit ainsi – Jéhovah Dieu des Armées avec vous – comme vous l’avez dit. 15 Haïssez le mal, et aimez le bon et, à la porte, faites une placeh au jugementi. Peut-être Jéhovah Dieu des Armées fera-t-il grâce auj reste de Joseph. 16 C’est pourquoi, ainsi a parlé Jéhovah Dieu des Armées, [le] Seigneur : « Dans toutes les places, lamentation, et dans toutes les rues ils diront : ‘Hélas, hélas !’ Ils appelleront le laboureurk aul deuil et vers la lamentationa ceux qui connaissent la plainteb. L’adjectif עָּצּוםdésigne la force, la puissante, et par extension le grand nombre, la multitude (i.e. l’importance, l’énormité). LXX : ἰσχυραὶ αἱ ἁμαρτίαι ὑμῶν. b Ou « vos énormes péchés ». c Cf. DHAB : 184. Le terme désigne aussi la rançon pour se racheter (couvrir ses fautes, cf. )כפר, ou la caution. d L’idée est que les oppresseurs refusent des procès équitables, voire l’exercice du droit, aux petites gens. ST 447 : « Amos 5.12, ils font violence au droit du pauvre, au tribunal ». e ceux qui sont sans défense : ( אֶ בְ יֹונִ יםcf. DHAB : 18), ou : les nécessiteux, les malheureux, les affligés (ST : 3). NBS : « les petites gens ». f מַ ְׂשכִ יל: participe hifil MS du vb ׂשכל, comprendre, être intelligent, d’où l’homme intelligent, le perspicace. g Ou « sera silencieux », « se taira ». h Ou « laissez place ». i Ou « à la justice ». j Ou « témoignera de la faveur à», i.e. prendra en pitié. k ִאכָּר: celui qui cultive la terre, mais n’en est pas propriétaire ; le serf (DHAH : 33). l Litt. vers. a 4 17 Dans toutes les vignes, lamentation, car je passerai au milieu de toi », a dit Jéhovah. 18 Malheur à ceux se languissentc du jour de Jéhovah ! Qu’est-ce que ce sera, pour vousd, le jour de Jéhovah ? Il sera obscurité, et non lumière. 19 Comme [quand] un homme fuite devant le lion, mais l’ours le rencontre, et il entref dans sag maison, appuie sa main sur le mur, mais le serpent le mord ! 20 Ne sera-t-il pas obscurité, le jour de Jéhovah, et non lumière ? obscurh, et non clarté, pour lui ? 21 Je haisi, je rejettej vos fêtes, et je ne veux plus sentir l’odeurk dans vos assemblées. 22 Même si vous faites monter à moi vos holocaustes et offrandesl, je n’y prends pas plaisir, et le sacrifice de vos bêtes engraissées, je ne veux pas [le] voirm. 23 Écartea d’auprès de moi le bruit de tes chants, TM : ּומ ְספֵד אֶ ל ִ , « et la lamentation vers ». L’apparat suggère qu’il faut plus probablement lire וְ אל־מספד, comme la version syriaque. b i.e. ceux qui connaissent les gémissements des rites funèbres. c הַ ִמ ְתאַ ִ ִּּ֖וים: art. + participe hithpael MP du vb אוה. Ou « ceux qui désirent [ardemment] ». d לָּמָּ ה־זֶה ָּלכֶם יֹום יְ הוָּה: litt. « pourquoi cela, pour vous, le jour de Jéhovah ? », i.e. que signifiera-t-il pour vous, le jour de Jéhovah ? e Sur l’emploi du présent, cf. Joüon § 119 q. f i.e. « il se réfugiera ». g Litt. « [dans] la maison ». h אָּ פֵל: adjectif (hapax) formé d’après ( ֲא ֵפלָּהténèbres, obscurité, calamité). i Les verbes statifs (ou quasi statifs) au qal se traduisent par le présent en français (cf. Joüon §112 f, Arnold & Choi : 55. j Ou « je rejette avec mépris ». k ַ אָּ ִריח: hifil inaccompli 1MS du vb רוח, sentir l’odeur. Au hifil, le sens est celui d’agréer, accepter [un sacrifice]. Le français possède un idiotisme apparenté : sentir ou ne pas sentir quelque chose ou quelqu’un. l vos holocaustes et offrandes : litt. des holocaustes et vos offrandes. m אַ ִביט: hifil inaccompli 1MS du vb נבט. Au hifil, regarder, observer. a 5 et le son de tes instrumentsb, je n’écouterai pas ! 24 Et que s’écoulec, telles les eaux, le jugement ainsi que la justice, tel un torrent intarissabled ! 25 Sacrifices et offrande, avez-vous fait approcher vers moi dans le désert, durant quarante ans, maison d’Israël ? 26 Et vous avez porté Sikkouthe votre roif et Kiyyoung, vos imagesh, l’étoile de votre dieu, celui que vous avez fait pour vousi. 27 Je vous déporterai en exilj au-delà de Damas », a dit Jéhovah, Dieu des Armées [est] son nom. Impératif hifil. Le sujet passe de 2MP à 2MS. L’apparat propose donc הָּ ִסירּו. Idem pour les deux substantifs qui suivent יריכֶם ֵ ִשet נִ בְ לֵיכֶם. Certains pensent qu’un individu ou un groupe en particulier au sein de la nation est en vue ici. b ֵָ֫נבֶ ל: instrument de musique à cordes indéterminé, que certains pensent être la harpe, le luth ou la guitare. c וְ יִ גַל: conjonction + nifal inaccompli 3MS du vb גלל, rouler ; au nifal, le sens réfléchi donne se dérouler, i.e. couler pour des eaux. Pour rendre la nuance modale, on peut proposer « s’écoule ». d Litt. qui coule en permanence. e Probablement la divinité mésopotamienne Sakkuth, le terme étant vocalisé sur ִשּקּוץ (chose détestable, abomination). Plusieurs versions anciennes, comme la LXX et la traduction de Symmaque, portent ici τὴν σκηνήν, la tente ou tabernacle (d’après p.ê. l’hébreu ) ֻסכַת. f Le texte traduit par la LXX semble différer du TM, puisque celle-ci rend ( מַ לְ כְ כֶםvotre roi) par Μολοχ (la divinité Moloch). g La LXX semble lire un texte qui porte כֵיוָּןou ( כִ ּיּוןdivinité assyrienne, Saturne) : Ραιφαν. h Ou « idoles », « statuettes ». LXX : τύπος, image, statut, idole. i Tout le verset a plus de sens dans la LXX : « Vous avez élevé le tabernacle de Moloch, et l'étoile de votre dieu Raiphan, et leurs images que vous aviez fabriqués. » (trad.Giguet). C’est d’ailleurs d’après la LXX que ce passage d’Amos est cité en Actes 7.43. j ֵיתי ִ֥ ִ ִהגְ ל: hifil inaccompli 1MS du vb גלה, ici déporter en exil. a 6