la maladie du sommeil

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LA MALADIE DU SOMMEIL.
Développement de la maladie : le parasite.
I°) Présentation du parasite.
Les trypanosomes sont des protozoaires, des organismes formés d'une cellule munie
d'un flagelle. Il en existe de nombreuses formes pathogènes pour les animaux, mais il n'en
existe que deux qui le sont chez l'Homme :
 Trypanosoma cruzi, qui transmet la trypanosomiase humaine américaine. Le vecteur
de ce parasite est une punaise, et il n'existe qu'en Amérique latine.
 Trypanosoma brucei, qui transmet la trypanosomiase humaine africaine, aussi appelée
"Maladie du sommeil". Cette espèce n'est présente qu'en Afrique, et uniquement dans
les régions où vivent les glossines, mouches hématophages vecteurs de la maladie.
Au sein des Trypanosoma brucei, on distingue encore trois sous-espèces :
 T.b brucei, qui n'infecte pas l'Homme.
 T.b gambiense, qui transmet la forme la moins virulente de la Maladie du sommeil.
 T.b rhodiense qui transmet la forme la plus virulente de la maladie.
Nous nous intéresserons ici principalement au développement de T.b gambiense et T.b
rhodiense chez l'Homme et le vecteur. Ces êtres unicellulaires sont très mobiles, ils présentent
une forme allongée avec deux extrémités pointues, un kinétoplaste contenant l'ADN, une
membrane ondulante ainsi qu'un flagelle libre. La forme morphologique du parasite est
différente selon qu'il se trouve chez l'hôte ou le vecteur. L'étude morphologique est basée sur
certain critères :
 La taille du parasite (longueur et épaisseur)
 La position du noyau (central, déplacé vers l'arrière …)
 La position du kinétoplaste
 La présence ou l'absence d'un flagelle libre.
Finalement, le passage d'une forme à une autre se fait lors d'un cycle, le cycle de vie
du trypanosome. La forme du trypanosome dépend de l'hôte et de la réponse immunitaire qu'il
développe. Ainsi, on trouve dans le sang du mammifère principalement la forme longue (aussi
dite "slender", formes a sur le schéma) ainsi que la forme trapue, (aussi dite "stumpy", formes
c), auxquelles s'ajoutent des formes intermédiaires (formes b sur le schéma).
Différentes formes de trypanosomes chez le mammifère.
Chez la glossine, on trouve dans l'intestin la forme "procyclique" (formes e sur le
schéma), une forme longue, et deux formes différentes dans les glandes salivaires : la forme
"épimastigote" (formes f sur le schéma) et la forme "métacyclique" (formes g sur le schéma).
Différentes formes de trypanosomes chez la glossine.
II°) Développement du parasite chez le vecteur.
1°) Le vecteur.
Le vecteur de la maladie est la glossine : une mouche hématophage qui prend ses repas
aux heures chaudes de la journée. On la reconnaît à sa trompe piqueuse, ses ailes en ciseaux
au repos, et aux bandes sombres de son abdomen. Il existe deux groupes dans lesquels sont
réparties les différentes sous-espèces de glossines :
 Le groupe palpalis, qui transmet T.b gambiense. On le trouve principalement en
Afrique de l'Ouest, dans l'ombre fraîche et humide des forêts .
 Le groupe morsitans, qui transmet T.b rhodiense et que l'on rencontre sur les grands
Plateaux d'Afrique de l'est.
Anatomie d'une glossine.
2°) L'infection.
L'infection débute lors d'un repas sanguin pris chez un hôte vertébré infecté, et est plus
aisée si le vertébré est en début de maladie.
3°) Etablissement de la colonie dans l'intestin de la mouche.
Le sang ingurgité par la mouche remplit peu à peu son jabot (la tsé-tsé peut prendre
entre 30 milligrammes et 80 milligrammes de sang). C'est ici que le sang est stocké avant de
passer dans l'intestin, et donc les trypanosomes s'y trouvent aussi. A ce moment, les parasites
perdent leur enveloppe glycoprotéique de surface, et sont donc sous la forme procyclique.
La digestion débute : peu à peu, le jabot se vide, et le sang remonte, avec les
trypanosomes, vers le proventricule, passe de l'intestin dans la membrane péritrophique. Dans
le tube digestif sont sécrétées des lectines qui, en temps normal, tuent les trypanosomes.
Cependant, chez les mouches tsé-tsé, un micro-organisme présent dans le tube digestif exerce
une action inhibitrice sur ces lectines, ce qui permet aux trypanosomes de proliférer. Les
mouches jeunes sécrétant peu de lectines, cette sécrétion est aisément inhibée. Au contraire,
les mouches âgées sécrètent des lectines en quantités suffisantes pour que leur action ne soit
pas inhibée.
Située dans l'estomac, la membrane péritrophique est un film muqueux qui se solidifie
autour du sang ingéré. Sécrétée en permanence par le proventricule, elle sert à contenir le
sang. C'est dans l'espace ectopéritrophique, situé entre la membrane et la paroi de l'estomac,
que vont se multiplier activement les trypanosomes alors sous forme épimastigote. On note
une concurrence entre les clones de parasites qui luttent, dans l'intestin, pour l'accès aux
ressources énergétiques. Au final, d'une manière générale, seul un clone réussit à établir une
colonie dans l'estomac.
Voyage du sang dans l'intestin de la glossine.
4°) Migration et multiplication dans les glandes salivaires.
Le voyage des trypanosomes de l'intestin vers les glandes salivaires n'est pas encore
totalement élucidé. Cependant, il semble que la seule voie d'accès pour atteindre les glandes
salivaires soit de descendre jusqu'au bout de la trompe (par le prosboscis) pour pénétrer
l'hypopharynx (canal excréteur des glandes salivaires) et ensuite arriver dans les glandes
salivaires.
Dans l'intestin, les trypanosomes sont présents sous forme épimastigote, ce qui leur
permet de survivre dans les milieux pauvres de la glossine. On distingue parmi les
épimastigotes deux populations : les longs et les courts. Les épimastigotes longs, mobiles,
vont faire route vers les glandes salivaires via le proventricule, la trompe et l'hypopharynx.
C'est dans les glandes salivaires que leurs descendants, plus courts et donc sédentaires, se
fixent, environ 8 jours après le repas infectant. Les trypanosomes infectants pour les vertébrés
(forme métacyclique) sont les descendants de ces formes courtes.
5°) Contamination.
Il existe certaines conditions pour qu'une mouche devienne infectante :
 Des repas réguliers (au moins toutes les 48 heures) pendant le cycle de reproduction
des épimastigotes.
 La glossine doit être jeune.

La glossine doit survivre 15 à 20 jours, car c'est à partir de ce laps de temps
qu'apparaissent les trypanosomes métacycliques dans les glandes salivaires.
Une mouche infectante le reste toute sa vie. Il suffit d'une injection de 300 à 500
trypanosomes pour transmettre la maladie à l'Homme, mais une telle dose n'est pas toujours
injectée par les glossines.
Localisation des trypanosomes dans les glandes salivaires et contamination
III°) Développement du parasite chez l'Homme.
1°) La transmission.
Le parasite peut-être transmis aux êtres humains par :
 La piqûre d'une glossine remplissant les conditions précédentes (II, partie 5)
 L'injection de sang parasité.
 Passage transplantaire.
 La piqûre d'un insecte hématophage (sauf la glossine) ayant piqué un sujet infecté
quelques minutes auparavant.
Cependant, la glossine reste le vecteur principal.
2°) Stade hématolymphatique et réponse immunitaire.
Les trypanosomes se multiplient dans un premier temps dans le derme, à l'endroit, de
la piqûre. Les trypanosomes atteignent ensuite le sang par drainage lymphatique, ou par
effraction de la paroi des veinules. Le parasite qui envahit le sang est grand consommateur de
glucose, qui le sert à ses déplacements et à sa multiplication (une toutes les six heures).
D'un point de vue immunitaire, le trypanosome peut être considéré comme un
assemblage de milliers d'antigènes invariables entourés par environ 10 millions de copies d'un
antigène variable de surface (VSG). Le trypanosome est aussi entouré d'un épais manteau de
glycoprotéines variables dont le répertoire mobilise de 5 à 10% du génome.
Lorsque le parasite envahit le sang, il commence à s'y multiplier. Mais l'organisme
développe une réponse immunitaire, amplifiée environ 3 à 4 jours après l'infection, basée sur
des anticorps qui vont détruire les trypanosomes : les anticorps anti-VSG. Ces anticorps
parviennent à détruire jusque 90% des parasites. Cependant, les antigènes variables de surface
libérés dans le sang par la destruction des trypanosomes provoque un profond dérèglement de
la réponse immunitaire. De plus, les trypanosomes survivants développent un nouvel antigène
variable de surface, ce qui mène à une nouvelle vague parasitémique. Cette vague est alors
stoppée par la production de nouveaux anticorps anti-VSG, et le cycle recommence.
Evolution du nombre de parasites par mL de sang en fonction du temps.
2°) Stade nerveux.
Lors du stade hématolymphatique, les trypanosomes véhiculés par le sang peuvent
atteindre tous les organes, mais ne peuvent pas franchir la "barrière" hématoencéphalique
(BHE) du malade, encore mal définie et mal localisée. Cependant, à mesure que la maladie
progresse, les parasites, les endotoxines microbiennes d'infection et certaines sécrétions
immunes de l'organisme endommagent cette barrière, ce qui permet aux parasites de la
franchir. Ainsi réfugié dans le système nerveux, le trypanosome est à l'abri des défenses, car
ce site est inaccessible aux anticorps et à de nombreux médicaments qui ne peuvent franchir la
BHE.
Le début du stade nerveux est marqué par la présence dans le liquide céphalorachidien
de cellules inflammatoires accompagnées ou non de trypanosomes. Ce deuxième stade de la
maladie est marqué par une inflammation des tissus du cerveau : l'encéphalite. L'invasion par
les trypanosomes des vaisseaux de l'encéphale va entraîner une infiltration de leur paroi. Le
sang va alors circuler plus difficilement et les centres nerveux seront mal nourris. Il s'ensuit
une inflammation de l'encéphale qui peut être due à la production de toxines par les
trypanosomes, ou par les trypanosomes eux-mêmes.
IV Glossaire
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Kinétoplaste : Corpuscule allongé situé en général à la base du flagelle contenant une
quantité importante d'ADN.
Proventricule : c'est un organe musculaire faisant office de sphincter, et qui sécrète en
continu la membrane péritrophique.
Membrane péritrophique : sécrétée en continu par le proventricule, la membrane
péritrophique est un tube extensible, semi perméable situé dans l'intestin. Elle a pour
but de contenir le sang durant la digestion.
Espace ectopéritrophique : espace situé entre la membrane péritrophique et la paroi de
l'estomac.
Jabot : Chez la glossine, le jabot est une poche extensible à l’intérieur de l’abdomen,
qui stocke le sang prélevé au cours du repas avant que celui-ci ne repasse dans
l’intestin.
Hypopharynx : canal servant à l'injection de salive pendant la piqûre.
Anticorps : (aussi dit "immunoglobuline") : protéine sécrétée par les lymphocytes B
sécréteurs en réponse à la présence d'un antigène spécifique et capable de le
neutraliser en se liant à lui.
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