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Prise en charge d’un traumatisé grave au déchoquage
Chapitre 21
Mr FAURE
L’unité de déchoquage est une unité spécifique d’accueil du polytraumatisé.
Son but principal est de permettre un bilan lésionnel rapide et un traitement des lésions engageant
le pronostic vital.
Elle se compose :
- Du réanimateur, responsable de la coordination.
- D’une, parfois 2 IDE.
- D’une aide-soignante.
- D’un interne.
L’unité de déchoquage possède la spécificité d’avoir un accès direct et immédiat au scanner et au
bloc opératoire.
A Lyon, il existe 2 unités de déchoquage (CHU).
Quelques données en 2005 :
421 patients, dont 112 femmes et 94 enfants, ont été admis sur les 2 unités de Lyon.
30% des admissions ont eu lieu le week-end.
50% se sont faites entre 16h et minuit.
Un pic de fréquence a été remarqué de mai à octobre.
57% étaient des accidentés de la route :
- 45 piétons.
- 80 accidents de 4 roues.
- 83 accidents de 2 roues.
La mortalité globale était de 4,5%.
I) Introduction
Traumatisé grave : (≠ polytraumatisé) patient présentant au moins une lésion mettant en jeu le
pronostic vital ou fonctionnel.
Traumatisé grave potentiel : patient qui présente beaucoup de lésions non-parlantes
cliniquement, mais pouvant décompenser secondairement.
Les règles essentielles lors de la prise en charge d’une traumatisé grave :
- Les lésions ne s’additionnent pas mais se multiplient.
- La sous-estimation de la gravité des lésions est un piège mortel.
- L’oubli de certaines lésions peut entraîner des conséquences vitales ou fonctionnelles.
- Le temps perdu ne se rattrape pas.
- De la qualité de la prise en charge initiale dépendra le pronostic vital et fonctionnel.
Il est primordial d’inclure la notion de violence et de mécanisme :
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MECANISME
- Ejection du véhicule.
- Décès de l’autre passager.
- Chute d’une hauteur > 6m.
- Disproportion des masses (camion contre voiture).
- Piéton.
- Véhicule lourd roulant à plus de 50 km/h.
VIOLENCE
- Fracture ouverte du fémur.
- Luxation de la hanche.
L’objectif du déchoquage est la réalisation d’un bilan complet, exhaustif et rapide afin de traiter
les détresses vitales.
Pour cela, la prise en charge fait appel à des stratégies de conditionnement et de bilantation, ainsi
qu’à des stratégies pluri-disciplinaires et pré-établies (équipe organisée, protocoles).
1) Le concept de mort évitable
Répartition des décès de traumatisés graves :
- Mort immédiate ou < 1h : 50%.
- Mort précoce < 5h : 30%.
- Mort tardive < 5 semaines : 20%.
Parmi les morts précoces et tardives, 30% des décès sont évitables.
Le nombre de morts qui auraient pu être évités est divisé par 2 lorsque le centre d’accueil et le
centre de référence sont les mêmes.
2) Le « golden hour »
Le taux de mortalité augmente si la réanimation est débutée après 1h. C’est donc une course
contre la montre qui commence dès la réception d’une traumatisé grave : le recours à des filières
spéciales, l’entraînement du personnel et la mise en place de protocoles sont donc indispensables.
Le but est de stabiliser les grandes fonctions afin de rechercher toutes les lésions.
C’est pour cela qu’il est important de rendre réflexe tout ce qui peut l’être :
- Les protocoles médicaux écrits.
- Les valises opérationnelles de matériel.
- Les sachets pré-préparés pour les bilans biologiques.
II) Physiopathologie
1) Physiopathologie du choc
1. La stimulation immunitaire primaire :
Le traumatisme, l’hypovolémie et les lésions entraînent la libération de médiateurs, provoquant,
chez 42% des traumatisés graves, un syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS) :
troubles de la micro-circulation, lésions des endothéliums, translocation bactérienne ...
2. La dépression immunitaire secondaire.
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3. Le syndrome de défaillance multiviscérale : (SDMV ou MOF)
On remarque un SDMV chez 20% des traumatisés graves et chez 30% de ceux ayant un SIRS.
La physiopathologie du choc
La stimulation immunitaire suivie
de la dépression immunitaire
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2) Physiopathologie du choc traumatique
La physiopathologie du choc traumatique
3) Evaluation de l’hypovolémie
Les traumatismes s’ajoutent :
 Fracture d’une côte
 Fracture d’une vertèbre ou de l’avant-bras
 Fracture de l’humérus
 Fracture du tibia
 Fracture du fémur
 Fracture du bassin
125 mL
250 mL
500 mL
1L
2L
500 mL à 5 L
Attention à l’induction anesthésique qui peut s’avérer dangereuse : elle risque de casser la
conduction sympathique.
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4) Objectifs de la réanimation
Avant contrôle hémorragique :
- Pression artérielle systolique (PAS) : 80 mmHg.
- Pression artérielle moyenne (PAM) : 50-60 mmHg.
- PAM du crâne : 90 mmHg.
- Pouls : < 120 / min.
- Saturation : > 96%.
- Hématocrite : 30%.
- Hémoglobine : 9 g/dL.
NB : des tests existent pour analyser le taux d’hémoglobine : les tests « Hémocue ».
Après contrôle hémorragique :
- Les constantes hémodynamiques doivent être optimisées.
- Le risque infectieux majeur doit être pris en compte (le traumatisé grave présente une
dépression immunitaire, une nécrose tissulaire, parfois une translocation voire une
perforation d’organes ... éléments importants intervenant dans le risque infectieux) : il faut
se poser tous les jours la question suivante « est-ce indispensable ? » (ex : lors de la pose
d’une SAD).
Les axes thérapeutiques de l’hypotension
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III) Prise en charge
Le principe général de la prise en charge est de déterminer rapidement si une intervention urgente
est nécessaire. Pour cela, chaque patient est classé en niveau de gravité qui définira la stratégie de
conditionnement et le bilan à réaliser.
C’est le réanimateur qui annonce le niveau de gravité, qui déclenche la procédure d’alerte et qui
prépare le matériel.
Quelque soit le niveau, le rôle IDE est le suivant :
- Branchement : scope, brassard non-invasif, saturomètre.
- Mesure : température (à la recherche d’une hypothermie), hémoglobine (à a recherche
d’une perte sanguine).
- Découpage des vêtements.
- Pose d’un collier cervical.
- Etiquetage vestiaire : ne rien jeter.
- Etiquettes patient.
- Préparation du conditionnement.
- Réalisation du bilan biologique : selon le niveau.
1) Niveau 1 : la détresse extrême
-
PAS < 80 mmHg après remplissage (5 concentrés de globules rouges ou 1,5L d’hydroxyéthyl-amidons) et administration de catécholamines.
Score de Glasgow < 8.
HIC (trouble du rythme, mydriase, pupilles asymétriques et aréactives).
Saturation < 90%, malgré l’intubation et la ventilation.
 Sénioriser la prise en charge (ne pas laisser un interne prendre le patient en charge).
 Préparer le conditionnement à l’avance :
 Médecin habillé (tablier et tenue stérile).
 Matériel à intubation et à ventilation prêt.
 Cathéter veineux et artériel fémoraux prêts.
 Capnomètre en état de marche.
 SNG et SAD sorties et prêtes à l’emploi.
 Réaliser un bilan radiologique : radio pulmonaire, radio du bassin, échographie abdominale.
 Réaliser un bilan biologique :
 2ème détermination du groupage (la 1ère étant faite par le SAMU) :
tube violet.
 ACI : tube orange.
 Hémostase et coag : tube bleu.
 NFP : tube violet.
 Biochimie (iono, enzymes hépatiques, amylases, troponine) : tube
vert.
 Gaz du sang, CRP et alcoolémie : tube rouge.
 Sérologies pré-transfusionnelles : tube rouge.
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L’objectif est de passer en niveau 2.
2) Niveau 2 : l’état précaire stabilisé
-
Score de Glasgow < 8 sans HIC.
 Conditionner : utiliser des cathéters veineux et artériels fémoraux.
 Réaliser un bilan radiologique : radio pulmonaire et radio du bassin (en salle de déchoquage),
scanner du corps entier (bodyTDM), bilan complémentaire (à la recherche d’autres fractures).
 Réaliser un bilan biologique :
 2ème détermination du groupage (la 1ère étant faite par le SAMU) :
tube violet.
 ACI : tube orange.
 Hémostase et coag : tube bleu.
 NFP : tube violet.
 Biochimie (iono, enzymes hépatiques, amylases, troponine) : tube
vert.
 Gaz du sang, CRP et alcoolémie : tube rouge.
 Sérologies pré-transfusionnelles : tube rouge.
3) Niveau 3 : le patient stable
 Conditionner selon l’appréciation du réanimateur.
 Réaliser un bilan radiologique : radio, écho abdominale, scanner déchoquage du corps entier
(selon la cinétique).
 Réaliser un bilan biologique :
 2ème détermination du groupage (la 1ère étant faite par le SAMU) :
tube violet.
 ACI : tube orange.
 Hémostase et coag : tube bleu.
 NFP : tube violet.
 Biochimie (iono, enzymes hépatiques, amylases, troponine) : tube
vert.
 Sérologies pré-transfusionnelles : tube rouge.
 CO (en cas d’incendie).
 Β-HCG (si c’est une femme < 45 ans).
 PBSi et screening HPLC (en cas de défenestration).
LE PATIENT PEUT CHANGER DE NIVEAU A TOUT INSTANT.
La mise en place de toutes ces procédures dans les services a permis de faire baisser la mortalité
immédiate de 10,9% à 2,6%.
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IV) Orientation après le déchoquage
-
Service simple de chirurgie (en surveillance).
Bloc opératoire.
Réanimation polyvalente.
Unités spécialisées (chirurgie cardiaque et neurochirurgie).
V) Le traumatisme grave du bassin
* A l’arrivée du patient, il faut placer une sangle de contention, afin
d’immobiliser le bassin.
* En cas de suspicion de plaie urétrale (en cas d’hématome de l’aile du
papillon ou en cas d’urétrorragie), il NE FAUT SURTOUT PAS
SONDER et faire appel à un urologue.
* Réaliser un scanner et rechercher des signes de plaie digestive
(rectorragies).
* Les traumatismes du bassin surviennent suite à un traumatisme
violent ou à cinétique élevée. Le plus souvent, ils sont associés à un
polytraumatisme :
- 85% de lésions orthopédiques associées.
- 62% des lésions du thorax.
- 46% du crâne.
- 12% de lésions urologique.
- 6% des gros vaisseaux.
Les 3 principaux types
de fracture du bassin
* Le taux de mortalité suite à un trauma du bassin est de 10 à 50% :
- 8-20% suite à une fracture fermée.
- > 50% après une plaie ouverte.
- 42% sont dus à une hypotension artérielle.
Les décès peuvent être précoces ou tardifs (sepsis, thrombose).
1) La prise en charge en réanimation
Les patients hospitalisés en réa pour ce type de traumatisme sont des patients qui restent
longtemps (séjours longs) et qui nécessitent une charge de travail importante (prélèvements,
nursing, kiné ...) et de nombreux transports.
Cette prise en charge concerne majoritairement des patients jeunes.
Elle présente un certain aspect affectif (la majorité des soins sont réalisés par les IDE), avec de
nombreux liens avec l’entourage familial +++.
Il est important d’anticiper l’avenir :
- Au niveau personnel, familial et social.
- Au niveau de la rééducation.
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-
Du point de vue des séquelles (mineures ou majeures)..
Par rapport au suivi à long terme.
2) La prise en charge des enfants polytraumatisés
Les situations sont généralement identiques, mais avec un paramètre supplémentaire : le stress
généré est plus important (la famille est souvent pressante).
VI) Conclusion
La prise en charge en déchoquage nécessite une équipe pluridisciplinaire entraînée et un plateau
technique important.
En effet, la prise en charge ne s’improvise pas, elle se prépare sous forme de protocoles.
C’est uniquement dans ces conditions que le taux dd mortalité pourra baisser.
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