Histoire, sociologie et politique de la mémoire Ce séminaire mobilise des références relevant de l’histoire, de la sociologie et de la sociologie politique. Si, en France notamment, ce sont le plus souvent les historiens qui se sont saisis de l'objet «mémoire» et ont ainsi qualifié de nombreuses recherches sur les usages politiques du passé ou de l'histoire, la problématique de la mémoire trouve son origine dans la réflexion sociologique tandis que les développements récents du phénomène mémoriel interpellent directement les politistes. « On n'est pas encore habitué à parler de la mémoire d'un groupe, même par métaphore» : le rappel du constat qui engage la réflexion de Maurice Halbwachs sur « mémoire collective et mémoire historique» souligne d'emblée que la notion de mémoire - collective - a une histoire. Notion fluide, polysémique, elle a aujourd'hui acquis un caractère d'évidence. Qu'on parle de l'Argentine et du Chili, de l'Afrique du Sud et du Maroc et des nécessités de la réconciliation, de la guerre dans l'exYougoslavie ou au Liban, des pays de l'Europe post-communiste et des crimes du communisme, des débats provoqués en Allemagne par toute évocation et interprétation du nazisme, de la France de Vichy ou, en deçà des drames et fractures de l'histoire du siècle, des mondes paysans et ouvriers disparus ou en voie de dilution, du patrimoine local ou des identités nationales et régionales, le « présent du passé » est régulièrement constitué en enjeu ou en ressource politique et la « mémoire », phénomène largement internationalisé pour ne pas dire globalisé, est régulièrement constituée en objet d’analyse. Souvenirs de l'expérience vécue, commémorations, archives et musées, mobilisations politiques de l'histoire ou «invention de la tradition », monuments et historiographies, conflits d'interprétation, mais aussi oublis, symptômes, traces incorporées du passé, occultations et falsifications de l'histoire: la « mémoire» embrasse pourtant trop et signale par-là même le caractère métaphorique de son usage. Ce séminaire se donne pour ambition de fournir des éléments théoriques de base, d’éclairer les diverses approches qui en histoire, en sociologie et en sociologie politique se sont données la mémoire pour objet, de fournir un cadre opératoire. Si le cas français sera privilégié, parce qu’il permet de mobiliser un ensemble conséquent de références théoriques et historiographiques en même temps que nombre d’analyses sur le phénomène mémoriel, la réflexion s’appuiera également sur des enquêtes et travaux relevant de divers contextes nationaux. Les thèmes ci-dessous constitueront les axes majeurs du séminaire. Pratiquement, ils seront traités sous la forme d'un va et vient entre textes théoriques sur la notion de mémoire et cas empiriques (français et étrangers). Histoire et mémoire. L'émergence de la notion de mémoire: définitions, connotations, polysémie. Les textes fondateurs. La mémoire comme usage public et politique du passé. Les échelles de la mémoire Mémoire nationale, mémoires sociales, mémoires individuelles. Pertinence de la notion de « mémoire collective » ? La mémoire comme « présent du passé » Choix ou poids du passé, reconstruction ou reconduction du passé? Mémoire et tradition. Mémoire et identité. La mémoire comme catégorie de l’action politique Politiques de la mémoire et représentations partagées du passé Peut-on influencer la mémoire? Comment envisager les situations post-conflictuelles ?