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Progrès en urologie (2015) 25, 549—554
Disponible en ligne sur
ScienceDirect
www.sciencedirect.com
ARTICLE ORIGINAL
Chimiothérapie néoadjuvante dans le
cancer de vessie infiltrant le muscle :
complications et conséquences sur la
réalisation de la cystectomie
Neoadjuvant chemotherapy in muscular invasive bladder cancer:
Complications and consequences on cystectomy
S. Benadiba a,∗,1, H. Gauthier b,1, G. Ploussard a,1,
P. Mongiat-Artus a,1, L. Froger a,1, V. Basset a,1,
P. Pashootan a,1, E. Chartier c, D. Dadoun d, F. Jacob d,
V. Ravery e,1, S. Culine d,1, F. Desgrandchamps a,1
a
Service d’urologie, hôpital Saint-Louis, 75011 Paris, France
Service d’oncologie médicale, hôpital Saint-Louis, 75011 Paris, France
c
Service d’urologie, centre hospitalier, 77100 Meaux, France
d
Cabinet d’urologie, 77100 Mareuil-les-Meaux, France
e
Service d’urologie, hôpital Bichat, 75018 Paris, France
b
Reçu le 11 août 2014 ; accepté le 21 avril 2015
Disponible sur Internet le 26 mai 2015
MOTS CLÉS
Chimiothérapie
néoadjuvante ;
Cancer de vessie
envahissant le
muscle ;
Cystectomie
∗
1
Résumé
Introduction. — La crainte de la détérioration de l’état du patient liée à la toxicité de la
chimiothérapie néoadjuvante est un frein à son développement. Cette étude descriptive, rétrospective, multicentrique a eu pour but de présenter les effets secondaires de la chimiothérapie
néoadjuvante et ses conséquences sur la réalisation de la cystectomie.
Patients et méthode. — Les patients atteints d’un carcinome urothélial classé cT2 à cT4a
N0M0 ont été inclus. Une chimiothérapie comportant 6 cycles de MVAC (méthotrexate, vinblastine, doxorubicine, cisplatine) suivie d’une cysto-prostatectomie ou d’une pelvectomie
antérieure était programmée.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (S. Benadiba).
Centre expert AP—HP d’onco-urologie Paris-Nord.
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.04.004
1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
550
S. Benadiba et al.
Résultats. — Au total 32 patients ont été inclus. Quatre cycles de chimiothérapie ont pu être
réalisés chez 27 patients (84,3 % de l’effectif). Les six cycles de chimiothérapie néoadjuvante
ont été délivrés chez 11 patients. Les causes d’arrêt précoce de la chimiothérapie ont été la toxicité dans 85 % des cas. Une cystectomie a été réalisée chez 26 (87 %) patients. Quatre patients
n’ont pas été opérés en raison d’une altération de l’état général (2 cas) ou d’un refus (2 cas).
La cystectomie n’a pas été réalisée chez 2 autres patients en raison d’une maladie avancée
constatée au cours de l’intervention. Des complications de grades 3 et 4 selon la classification
de Clavien et Dindo sont survenues chez respectivement 15,3 % et 11,5 % des patients. Aucun
décès toxique n’est survenu.
Discussion. — Cette étude rapporte des résultats proches de ce qui est retrouvé dans la littérature concernant les conséquences de la chimiothérapie néoadjuvante sur la réalisation de la
cystectomie, mais elle présente des limites : d’une part, l’analyse rétrospective des données
concernant les interventions chirurgicales, d’autre part, l’absence de groupe témoin. De plus,
le court recul ne permet pas de connaître encore les résultats oncologiques à long terme.
Conclusion. — Cette étude étaye le fait que la réalisation d’une chimiothérapie néoadjuvante
ne semble pas être à l’origine d’un risque important de non-réalisation de la cystectomie.
Niveau de preuve.— 4.
© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Neoadjuvant
chemotherapy;
Muscle-invasive
bladder cancer;
Cystectomy
Summary
Introduction. — The fear of the deterioration of the patient’s condition related to the toxicity
of neoadjuvant chemotherapy is a barrier to its development. This multicenter retrospective
study aims to present the secondary effects of neoadjuvant chemotherapy and its impact on
the achievement of cystectomy.
Materials and methods. — Patients with urothelial carcinoma classified cT2 to cT4a N0M0 were
included. Chemotherapy with 6 cycles of MVAC (methotrexate, vinblastine, adriamycin, and
cisplatin) followed by a cysto-prostatectomy or anterior pelvectomy was scheduled.
Results. — A total 32 patients were included. Six cycles of neoadjuvant chemotherapy were
performed in all 11 patients. Shutdown causes were toxicity in 85% of cases. Cystectomy was
performed in 86.6% of patients. Surgery was not performed in 6 patients. The reasons were the
alteration of the general condition in 2 cases, 2 patients had advanced cancers diagnosed intraoperatively, and 2 refused surgery. Complications of grades 3 and 4 according to the classification
of Clavien and Dindo had occurred respectively in 15.3% and 11.5%.
Discussion. — This study reports results close to what is found in the literature on the effects of
neoadjuvant chemotherapy on achieving cystectomy, but it has some limitations: the retrospective analysis of data on surgery and the lack of control group. In addition, the short follow-up
does not yet allow to know the long-term oncological results.
Conclusion. — This study supports the fact that the toxicity of neoadjuvant chemotherapy does
not seem to cause a significant risk of non-completion of cystectomy.
Level of evidence. — 4.
© 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
Le cancer de vessie est responsable de 3 % des décès par
cancer et se situe au 7e rang des cancers en incidence
[1]. Le traitement de référence des tumeurs de vessie
infiltrant le muscle sans extension à distance est la pelvectomie antérieure chez la femme et la cystoprostatectomie
chez l’homme avec curage ganglionnaire pelvien étendu
[2]. Les résultats de survie spécifique à 20 ans rapportés
après cystectomie sans chimiothérapie néoadjuvante sont
pour les stades T2 a/b de 64,9 % et pour les stades T3 a/b
de 50,7 % [3].
L’impact bénéfique de la chimiothérapie néoadjuvante
(CNA) avant cystectomie sur la survie globale a été démontré
[4,5]. Une méta-analyse des essais thérapeutiques randomisés a mis en évidence un bénéfice absolu en survie de 5 %
à 5 ans et une diminution du risque de décès de 14 % [6,7].
Ces résultats ont été obtenus avec des associations cytotoxiques à base de cisplatine, principalement le protocole
MVAC (méthotrexate, vinblastine, doxorubicine, cisplatine).
Malgré ces données, la réalisation effective d’une CNA avant
cystectomie est loin d’avoir intégré les pratiques courantes.
Elle a ainsi progressé très modestement aux États-Unis de
2003 à 2007 pour atteindre environ 13 % des patients éligibles
Chimiothérapie néoadjuvante dans le cancer de vessie infiltrant le muscle
[7]. L’un des motifs de réticence est la crainte de détériorer l’état préopératoire du patient, avec au final un retard
voire une annulation de l’intervention. La présente étude a
eu pour objectif d’évaluer les conséquences d’une CNA sur
la réalisation de la cystectomie.
Patients et méthode
Tableau 1
551
Caractéristiques initiales des patients.
Paramètre
Caractéristiques
Nombre de
patients (%)
Sexe
Homme
Femme
27 (84,4)
5 (15,6)
Symptômes
initiaux
Hématurie
19 (59,5)
Douleurs
pelviennes
Impériosités
mictionnelles
Dysurie
Douleurs
lombaires
Découverte
fortuite
1 (3,3)
Non
19 (59,4)
Droite
Gauche
Bilatéral
4 (12,5)
5 (15,6)
4 (12,5)
Non
22 (68,8)
Droite
Gauche
Bilatéral
Échec
3
2
4
1
cT
T1
T2
T3
T4
4 (12,5)
20 (62,5)
6 (18,7)
2 (6,3)
cN
Nx
N1
N2
N3
28 (87,5)
3 (9,4)
1 (3,1)
0
pT (post-RTUV)
T0
T1
≥ T2
0
2 (6,2)
30 (93,8)
CIS
Oui
Non
26 (81,3)
6 (18,7)
Population
Entre avril 2010 à février 2013, les patients issus de 4 centres
(hôpital Saint-Louis, hôpital Bichat, centre hospitalier et
clinique Saint-Faron de Meaux) et atteints d’un carcinome
urothélial de stade cT2 à cT4a N0M0 ont étés inclus consécutivement. Une résection maximale endoscopique de vessie
était réalisée. Les patients présentant un statut de performance (PS) supérieur à 2 ou une altération de la fonction
rénale ont été exclus. Pour l’ensemble des patients, un
TDM thoraco-abdomino-pelvien était réalisé comme le bilan
d’extension et une réunion de concertation pluridisciplinaire a validé l’indication de CNA suivie de cystectomie.
Chimiothérapie néoadjuvante
Une chimiothérapie comportant 6 cycles de MVAC accéléré
(MVACa), délivrés tous les 14 jours, était programmée. Une
évaluation des effets indésirables (avec cotation de leur
intensité selon l’échelle NCI CTCAE v4.0) et une éventuelle
adaptation des doses étaient réalisées à chaque cycle. Un
TDM thoraco-abdomino-pelvien était pratiqué au décours du
4e cycle pour évaluer la réponse au traitement et planifier
le traitement chirurgical.
Traitement chirurgical
Au décours de la chimiothérapie, l’intervention pratiquée
était pour les hommes une cysto-prostatectomie totale, et
pour les femmes, une pelvectomie antérieure, associées à
un curage pelvien par voie ouverte. Une entéro-cystoplastie
de remplacement ou une dérivation cutanée de type Bricker étaient réalisées selon la décision prise par l’opérateur
après discussion avec le patient.
Suivi postopératoire
L’analyse des dossiers médicaux a permis de collecter
rétrospectivement les complications survenues au cours
du suivi postopératoire puis dans les 90 jours suivant
l’intervention, selon la classification de Clavien-Dindo, la
durée d’hospitalisation ainsi que le mode de sortie et le
mode d’hébergement à 3 mois.
Résultats
Un total de 32 patients a été inclus, d’âge médian 65 ans
(extrêmes, 58—74). Les caractéristiques de la population
avant le début de la chimiothérapie sont présentées dans
le Tableau 1.
Quatre cycles de chimiothérapie ont pu être réalisés chez
27 patients (84,3 % de l’effectif). Les 6 cycles ont pu être
Dilatation du
haut appareil
Dérivation du
haut appareil
3 (9,3)
3 (9,3)
3 (9,3)
3 (9,3)
(9,4)
(6,2)
(12,5)
(3,1)
administrés chez 11 (34,4 %) patients. Les causes d’arrêt ont
été la toxicité dans 85 % des cas, avec une prédominance
d’effets secondaires digestifs. Trois patients ont présentés
des problèmes médicaux non liés directement à la chimiothérapie et un patient a refusé de poursuivre le traitement
(Tableau 2). Aucun traitement n’a été interrompu en raison
d’une progression diagnostiquée lors de la réévaluation au
décours du 4e cycle. Une hospitalisation en soins intensifs en
cours de chimiothérapie a été nécessaire pour un patient.
Aucun décès n’est survenu.
Le délai médian entre la fin de la chimiothérapie et la
réalisation du geste chirurgical a été de 39 jours (extrêmes,
31—45). Le score OMS était de 0 pour 65 % des patients
avant chimiothérapie. Lors de l’évaluation réalisée après
552
Tableau 2
S. Benadiba et al.
Déroulement de la chimiothérapie.
n (%)
Causes d’arrêt avant la fin
des 6 cycles
Toxicité
Progression
Refus du patient
Autre
Patients ayant nécessité
une réduction des doses
de chimiothérapie
C1
C2
C3
C4
C5
C6
Caractéristiques des patients opérés.
Caractéristiques
18 (85)
0
1 (5)
2 (10)
3/32
3/32
6/28
4/27
5/20
3/11
Tableau 3
(9,38)
(9,38)
(21,43)
(14,81)
(26,32)
(27,27)
chimiothérapie, 50 % des patients avait un statut OMS 1,
30 % un statut OMS 2 et 10 % un statut OMS 3. La médiane
de la clairance de la créatinine calculée selon MDRD
était de 83,0 mL/min avant chimiothérapie [74,2—93,5], de
81,45 mL/min [70,7—93,2] au 4e cycle et de 84,0 mL/min
[76,0—111,0] chez les 11 patients ayant reçu les 6 cycles de
MVAC.
Dans 2 cas, une altération de l’état général n’a pas
permis la réalisation de la cystectomie prévue. Deux
patients qui ne présentaient pas de contre-indication à la
réalisation d’un traitement chirurgical ont refusé la chirurgie (parmi eux, 1 a été traité par radio-chimiothérapie).
Une cystectomie a été réalisée chez 26 des 28 patients
28 opérés. Un patient présentait un blindage pelvien découvert en peropératoire rendant l’intervention impossible
en marge saine. Une dérivation trans-iléale et un traitement par radio-chimiothérapie ont été réalisés. Chez
le deuxième patient, une carcinose péritonéale a été
découverte.
Les données concernant les caractéristiques des patients
opérés et les résultats anatomo-pathologiques sont rapportées Tableau 3. La médiane de l’hémoglobine préopératoire
était de 10,3 g/dL [10,2—11,8]. Une transfusion périopératoire a été nécessaire chez 63,64 % des patients. La durée
opératoire médiane a été de 330 ± 79 minutes. La durée
médiane d’hospitalisation a été de 16 jours.
Des complications de grades 3 et 4 selon la classification de Clavien et Dindo sont survenues respectivement
chez 15,3 % et 11,5 % des patients. Dans tous les cas, les
complications étaient urinaires, avec 4 patients drainés pour
des fistules urinaires, alors qu’un patient a présenté une
pyélonéphrite obstructive. Une prise en charge en soins
intensifs a été nécessaire pour 3 patients. À 3 mois, 31,6 %
des patients avaient eu des complications : 4 patients des
infections urinaires, un patient une phlébite et un patient
une éventration sur l’incision abdominale. Aucun décès n’est
survenu au cours de cette période. Un retour à domicile a
été possible dans 65 % des cas et un séjour en soins de suite
a été nécessaire pour les autres patients. À 3 mois, 86 % des
patients étaient au domicile (Tableau 4).
n = 28 (%)
PS (OMS)
0
1
2
3
2
12
12
2
(7,2)
(42,8)
(42,8)
(7,2)
Nombre de cures réalisées
1
2
3
4
5
6
28
28
25
20
17
10
(100)
(100)
(89,3)
(71,4)
(60,7)
(35,7)
n = 26 (%)
ypT
0
1
2
3
4
11
2
1
9
3
(42,3)
(7,7)
(3,9)
(34,6)
(11,5)
ypN
0
1
2
3
22
1
1
2
(84,7)
(3,8)
(3,8)
(7,7)
ypCIS
Oui
Non
4 (15,4)
22 (84,6)
Marges opératoires
0
1
2
23 (88,5)
1 (3,8)
2 (7,7)
Type de reconstruction
Entérocystoplastie
Bricker
Urétérostomie
13 (50,0)
12 (46,2)
1 (3,8)
Tableau 4 Complications postopératoires selon la classification de Clavien.
Grade n (%)
1
2
3
4
7 (26,9)
14 (53,8)
2 (7,8)
3 (11,5)
Type de complication n (%)
Infection urinaire
Fistule/sténose urinaire
Abcès paroi
Fistule digestive
Syndrome coronarien
Thrombose veineuse profonde
Embolie pulmonaire
13 (50,0)
7 (26,9)
3 (11,5)
3 (11,5)
1 (3,8)
0
0
Chimiothérapie néoadjuvante dans le cancer de vessie infiltrant le muscle
Discussion
Plusieurs études prospectives soutiennent l’intérêt de la
chimiothérapie néoadjuvante avant réalisation d’une cystectomie. Grossman et al. ont rapporté au nom du South
West Oncology Group (SWOG) une amélioration de la survie
globale, avec une survie médiane de 46 mois versus 77 mois
pour le groupe ayant reçu la CNA (3 cycles de MVAC). La
différence était significative pour les lésions cT2 (75 mois
versus 105 mois, p = 0,05) mais également cT3/cT4 (24 mois
versus 65 mois, p = 0,005) [4]. De même, l’essai thérapeutique randomisé réalisé par l’European Organization for
Research and Treatment of Cancer (EORTC) a rapporté une
réduction du risque de décès de 16 % dans le bras CNA
(p = 0,037), avec un recul de 8 ans dans une population de
1166 patients ayant reçu ou non une CNA selon le protocole
CMV (cisplatine, méthotrexate, vinblastine) [5].
Malgré les résultats de ces études, l’usage de la CNA
demeure limité [4]. Les motifs de réticence incluent la
crainte, d’une part, de détériorer l’état préopératoire du
patient en raison de la toxicité engendrée par la CNA,
d’autre part, de laisser évoluer la maladie, avec au final un
retard voire une annulation de l’intervention. Les essais randomisés du SWOG et de l’EORTC n’ont en fait pas retrouvé de
différence significative dans la faisabilité de la cystectomie
ni de majoration du risque de complications postopératoires
[4,8]. L’étude américaine rapporte que 87 % des patients ont
reçu l’intégralité des doses de MVAC sur les 3 cycles prévus,
sans détailler les pourcentages des réductions de doses ni les
causes d’arrêt avant la fin du traitement [4]. Dans l’essai
de l’EORTC, près de 80 % des patients ont reçu la totalité
des cycles prévus. Des réductions de doses ont été nécessaires chez 10 % des patients pour la vinblastine, 20 % pour
le méthotrexate et 60 % pour le cisplatine. Un décès toxique
a été observé chez 1 % des patients [5].
Les résultats de notre étude sont en accord avec
les données des essais randomisés, alors que le schéma
d’administration, dit accéléré, du protocole MVAC était différent. Environ un tiers des patients ont pu recevoir les
6 cycles de chimiothérapie programmés. Des modifications
de doses, voire l’arrêt du traitement, ont été nécessaires
chez deux tiers des patients. Une dégradation de l’état
général a été observée en cours de CNA, avec un PS 2 chez
respectivement 11 % et 20 % des patients au décours des 4e
et 6e cycles. L’altération de l’état général a contre-indiqué
la chirurgie dans 2 cas. Parmi les 32 patients initialement
inclus, 28 ont été opérés, 2 patients opérables sur des critères d’imagerie ayant refusé le traitement chirurgical. Une
cystectomie a pu être réalisée chez 26 d’entre eux (81 %).
Ces résultats sont tout à fait similaires à ceux rapportés dans
l’étude du SWOG, au cours de laquelle la cystectomie a été
réalisée chez 82 % et 81 % des patients randomisés dans les
bras avec et sans chimiothérapie néoadjuvante, respectivement [4]. Il ne semble donc pas qu’il ait de majoration du
risque de ne pas accéder à la chirurgie lié au retentissement de la chimiothérapie. Les deux patients pour lesquels
la cystectomie n’a pu être réalisée pour des raisons carcinologiques avaient des maladies d’emblée très agressives et
n’auraient pas bénéficié d’une cystectomie première. Enfin,
la survenue de complications grades 3 et 4 a été de 19 %. La
comparaison avec les principale séries est rendue difficile
par l’absence d’utilisation d’échelle validée [9—11].
553
Cette étude rapporte donc des résultats proches de ce qui
est retrouvé dans la littérature concernant la tolérance et
les conséquences de la chimiothérapie sur l’indication opératoire, mais elle présente des limites : d’une part, l’analyse
rétrospective des données concernant les interventions chirurgicales, d’autre part, l’absence de groupe témoin. De
plus, le court recul ne permet pas de connaître encore
les résultats oncologiques à long terme. Néanmoins, il n’a
pas été retrouvé de lésions résiduelles sur la pièce opératoire chez 42,3 % des patients. Ce taux de réponse complète
pathologique était de respectivement 38 % et 32 % dans les
bras CNA des essais randomisés américains et européens,
soit plus de deux fois supérieur à celui observé dans les
bras sans CNA [4,5]. Hors ce paramètre est associé à une
meilleure survie, avec une réduction du risque de décès de
55 % par rapport aux patients chez les lesquels persistent
des lésions infiltrantes dans une méta-analyse récemment
publiée (HR = 0,45 [0,36—0,56], p < 0,00001) [9].
Conclusion
La réalisation d’une CNA ne semble pas être à l’origine d’un
risque important de non-réalisation de la cystectomie, alors
même que l’amélioration des résultats sur la survie globale
est rapportée par de nombreuses études. La toxicité induite
par la CNA impose une adaptation individuelle des doses et
du nombre de cycles délivrés. Si elle n’est actuellement pas
recommandée de façon systématique, la CNA dans le cancer
de vessie envahissant le muscle doit être proposée dès lors
que l’état initial du patient le permet.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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