Progrès en urologie (2015) 25, 555—556 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com COMMENTAIRE À. . . Chimiothérapie néoadjuvante dans le cancer de vessie infiltrant le muscle : complications et conséquences sur la réalisation de la cystectomie Neoadjuvant chemotherapy for muscle-invasive bladder cancer: Complications and impact on cystectomy Y. Neuzillet Service d’urologie, hôpital Foch, université de Versaille—Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ), 40, rue Worth, 92150 Suresnes, France Disponible sur Internet le 10 juin 2015 La chimiothérapie néoadjuvante a pour objectif d’éradiquer les micrométastases et d’éviter l’implantation de cellules tumorales circulantes au moment de la chirurgie. Elle permettrait ainsi de réduire le risque de récidive et d’améliorer la survie des patients. La chimiothérapie néoadjuvante est donc prescrite chez des patients présentant une tumeur de vessie envahissant le muscle mais limitée à la vessie, sans extension aux organes de voisinage qui limiterait l’extirpabilité ni, surtout, d’atteinte ganglionnaire associée. Elle se distingue ainsi de la chimiothérapie d’induction, utilisée pour réduire le volume tumoral, notamment chez les patients présentant une atteinte ganglionnaire limitée. Il est important de distinguer ces deux situations, comme cela est fait dans les dernières recommandations de l’European Association of Urology, afin d’évaluer correctement le bénéfice—risque de la chimiothérapie préopératoire en fonction de son indication. DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.purol. 2015.04.004. Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.04.008 1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Pragmatiquement, dans le cas de la chimiothérapie néoadjuvante, le bénéfice escompté dépend de la chimiosensibilité de la tumeur, élément pour lequel nous ne disposons pas de marqueur biologique prédictif validé. La question est de savoir si, du fait du temps nécessaire à la chimiothérapie et de ses conséquences sur l’état général, le patient ne va pas avoir un retard à la cystectomie et si la cystectomie ne sera pas plus morbide. Dans le cas de la chimiothérapie d’induction, le traitement chirurgical seul a une très faible probabilité d’être curatif. Une chimiothérapie périopératoire est donc le plus souvent nécessaire. La question est alors de déterminer le meilleur moment pour administrer le traitement systémique, avant ou après la chirurgie, immédiatement (traitement adjuvant) ou de façon différé lors du diagnostic de récidive. Les résultats de l’étude EORTC 30994, comparant la chimiothérapie adjuvante à la chimiothérapie à la récidive, qui ont été récemment publiés [1], répondent à une partie de la question puisque la survie globale après chimiothérapie adjuvante n’a été améliorée que chez les patients présentant une tumeur pT3-4 pN0. Les patients métastatiques ganglionnaires au moment de la cystectomie peuvent 556 donc attendre de récupérer de leur intervention avant de recevoir le traitement sans impacter le pronostique. La problématique de la capacité physique du patient à recevoir le traitement complet, chimiothérapie et chirurgie, est présente quelle que soit la séquence thérapeutique et est récurrente dans les discussions de RCP : la cystectomie altère-t-elle l’état général des patients au point de les rendre inaptes a recevoir une chimiothérapie postopératoire ? La chimiothérapie préopératoire grève-t-elle la faisabilité et augmente-t-elle la morbimortalité de la cystectomie ? Pour répondre à cette deuxième question, l’étude publiée par les équipes de l’hôpital Saint-Louis, l’hôpital Bichat, le centre hospitalier et la clinique Saint-Faron de Meaux a évalué les conséquences d’une chimiothérapie préopératoire sur la réalisation de la cystectomie. Cette initiative mérite donc d’être saluée. La méthodologie est rigoureuse mais demeure basée sur une analyse rétrospective de dossier, avec le risque de biais inhérents, et repose sur un nombre limité de cas, puisque seulement 32 patients ont été étudiés. En outre, la distinction entre indication chimiothérapie néoadjuvante et chimiothérapie d’induction n’a pas été étudié. Respectivement, 8 et 4 patients étaient Y. Neuzillet cT ≥ 3 et cN1-2, et correspondaient donc des indications d’induction, les autres entrant, a priori, dans les critères du traitement néoadjuvant. La stratifications des résultats de l’étude en fonction de ces indications eu été intéressante mais de peu de sens au plan statistique, eue égard au faible nombre de cas. Cette étude est donc une belle introduction en attendant les résultats de l’étude AFU-GETUG V05, dite VESPER, qui délivrera d’avantage d’informations. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Référence [1] Sternberg CN, Skoneczna I, Kerst JM, Albers P, Fossa SD, Agerbaek M, et al. Immediate versus deferred chemotherapy after radical cystectomy in patients with pT3-pT4 or N+ M0 urothelial carcinoma of the bladder (EORTC 30994): an intergroup, open-label, randomised phase 3 trial. Lancet Oncol 2015;16: 76—86.