Nombres complexes — Forme polaire Algèbre linéaire I — MATH 1057 F Julien Dompierre Département de mathématiques et d’informatique Université Laurentienne Sudbury, 3 avril 2011 Forme polaire Le nombre complexe z = a + bi est ℑ représenté par un point dans le plan complexe. Ce point a (a, b) pour coordonnées cartésiennes. On peut aussi le donner par b ses coordonnées polaires qui sont le module de z, r = |z| ≥ 0 et l’argument de z, θ = arg(z). z = a + bi r θ La représentation d’un nombre complexe a par ses coordonnées polaires (r , θ) est appelée la forme polaire de ce nombre. Si la forme polaire (r , θ) d’un nombre complexe est connue, sa forme cartésienne (a, b) est alors donnée par a = r cos θ, b = r sin θ. ℜ Conventions pour les coordonnées polaires Si r > 0, l’argument θ est unique modulo 2π ; ça signifie que deux valeurs de l’argument qui diffèrent par un multiple entier de 2π sont considérés comme équivalents. Pour obtenir une représentation unique, la convention est de choisir θ dans l’intervalle ] − π, π], c’est-à-dire −π < θ ≤ π. Si r = 0, toute valeur de θ détermine le même nombre. Pour obtenir une représentation unique dans ce cas, la convention est de choisir arg(0) = 0. Conversion de la forme polaire à la forme cartésienne Exemples : A) Quel est le nombre complexe qui a pour forme polaire (5, 0) ? a = r cos θ = 5 cos(0) = 5 b = r sin θ = 5 sin(0) = 0 z = a + bi = 5. B) Quel est le nombre complexe qui a pour forme polaire 2, π/2 ? a = r cos θ = 2 cos(π/2) = 0 b = r sin θ = 2 sin(π/2) = 2 z = a + bi = 2i . C) Quel est le nombre complexe qui a pour forme √ polaire 6, −π/4 ? a = r cos θ = 6 cos(−π/4) = 3 2 √ b = r sin θ = 6 sin(−π/4) = −3 2 √ √ z = a + bi = 3 2 − 3 2 i . Ce qu’il faut retenir en trigonométrie Angle 0 (0◦ ) π/6 (30◦ ) π/4 (45◦ ) π/3 (60◦ ) π/2 (90◦ ) sin 0 √0.5 √2/2 3/2 1 cos √1 √3/2 L’unité utilisée en trigonométrie 2/2 pour les angles est le radian (noté 0.5 rad). πrad = 180˚. 0 Conversion de la forme cartésienne à la forme polaire On suppose connue la forme cartésienne (a, b) d’un nombre complexe. Sa forme polaire (r , θ) est alors donnée par p r = a2 + b 2 arctan(b/a) si a > 0, arctan(b/a) + π si a < 0 et b ≥ 0, arctan(b/a) − π si a < 0 et b < 0, θ = +π/2 si a = 0 et b > 0, −π/2 si a = 0 et b < 0, 0 si a = 0 et b = 0. La formule précédente nécessite de distinguer plusieurs cas. Cependant, de nombreux langages de programmation fournissent une variante de la fonction arc tangente, qui est souvent appelée atan2(b,a), et qui traite les différents cas à l’interne. Ce qu’il faut retenir en trigonométrie (suite) Angle 0 (0◦ ) π/6 (30◦ ) π/4 (45◦ ) π/3 (60◦ ) π/2 (90◦ ) 2π/3 (120◦ ) 3π/4 (135◦ ) tan 0√ 1/ 3 √1 3 +∞ √ − 3 −1 Conversion de la forme cartésienne à la forme polaire Une formule utilisant la fonction arccos nécessite de distinguer moins de cas : + arccos(a/r ) si b ≥ 0 et r 6= 0, θ= − arccos(a/r ) si b < 0, 0 si r = 0. Exemples de forme polaire 1) Soit z = −2 + 2i en forme cartésienne. Trouvez la forme polaire. Le rayon est donné par r= L’angle est donné par q (−2)2 + (2)2 = 2 −2 θ = arctan +π = √ 8. 3π (= 135◦ ). 4 2) Soit z = −4i en forme cartésienne. Trouvez la forme polaire. Le rayon est donné par r= q (0)2 + (−4)2 = 4. On est dans le cas a = 0, b < 0 donc l’angle est donné par −π θ= (= −90◦ ). 2 Notation de la forme polaire Quand la forme polaire est notée z = r (cos θ + i sin θ) on l’appelle la forme trigonométrique. Il existe une autre forme, la forme exponentielle. Rappel sur les exponentiels : e x e y = e x+y e −x = 1 ex e0 = 1 Exponentielles complexes On peut prendre comme définition de l’exponentiel complexe la formule d’Euler (1748) ei θ = cos θ + i sin θ. Le nombre complexe dont la forme trigonométrique est z = r (cos θ + i sin θ) s’écrit alors z = r ei θ , qui est la forme exponentielle. Exemple de forme polaire 2) Soit z = −4i en forme cartésienne. Trouvez la forme polaire. Le rayon est donné par r= q (0)2 + (−4)2 = 4. On est dans le cas a = 0, b < 0 donc l’angle est donné par θ= −π (= −90◦ ). 2 La forme trigonométrique est −π −π z = 4 cos + i sin 2 2 et la forme exponentielle est z = 4 e −i π/2 . Exemple de forme cartésienne 3) Soit z = 2e i π/3 en forme polaire. Trouvez la forme cartésienne. On a que le rayon est r = 2 et que l’angle est θ = π/3. La partie réelle a est donnée par a = r cos θ = 2 cos 1 π = 2 = 1. 3 2 La partie imaginaire b est donnée par √ π 3 √ b = r sin θ = 2 sin = 2 = 3. 3 2 La forme cartésienne est donc z =1+ √ 3 i. Multiplication utilisant la forme polaire La propriété des exponentielles e x e y = e x+y s’étend au cas des exponentielles complexes. ei θ1 ei θ2 = ei (θ1 +θ2 ) On peut le montrer avec la trigonométrie : ei θ1 ei θ2 = (cos θ1 + i sin θ1 )(cos θ2 + i sin θ2 ) = (cos θ1 cos θ2 − sin θ1 sin θ2 ) + i (cos θ1 sin θ2 + sin θ1 cos θ2 ) = cos(θ1 + θ2 ) + i sin(θ1 + θ2 ) = ei (θ1 +θ2 ) La multiplication de deux nombres complexes est plus facile en forme polaire qu’en forme cartésienne : i θ2 i θ1 = r1 r2 ei (θ1 +θ2 ) . r2 e z1 z2 = r1 e Exemple de multiplication en forme polaire 4) Multipliez z = 1 − i et w = 1 + polaire. √ 3 i en utilisant la forme On a que les formes polaires de z et w sont √ z = 2 e −i π/4 et w = 2 e i π/3 . Alors le produit de z par w est donné par √ √ zw = ( 2)(2)e i ((−π/4)+(π/3)) = 2 2 e i π/12 . Division utilisant la forme polaire Suivant la même idée que sur le transparent précédent, la division de deux nombres complexes est beaucoup plus facile en forme polaire qu’en forme cartésienne : z1 r1 ei θ1 r1 = = ei (θ1 −θ2 ) i θ 2 z2 r2 e r2 Notez aussi que z = a − bi = re −i θ . le conjugué est le complexe de même module, mais d’argument opposé. Exemple de division en forme polaire 5) Divisez z = 1 − i par w = 1 + √ 3 i en utilisant la forme polaire. On a que la forme polaire de z et w sont √ z = 2 e −i π/4 et w = 2 e i π/3 . Alors la division de z par w est donnée par √ √ 2 i ((−π/4)−(π/3)) 2 −i 7π/12 z = e = e . w 2 2 Puissances utilisant la forme polaire La forme polaire facilite aussi le calcul des puissances entières selon la formule de De Moivre (1730), (cos θ + i sin θ)n = cos(nθ) + i sin(nθ). En notation exponentielle, c’est plus évident n ei θ = ei (nθ) . Pour un complexe z = r ei θ quelconque, on obtient z n = (r ei θ )n = r n (ei θ )n = r n einθ Exemple d’une puissance en utilisant la forme polaire 6) Soit z = −1 + √ 3 i . Trouvez z 12 = (−1 + √ 12 3 i) . La forme polaire de z est z = 2 e i 2π/3 . Alors z 12 = 212 e i (12)(2π/3) = 4096e i 8π = 4096 e i 0 = 4096. Relation à la trigonométrie La formule d’Euler procure un lien puissant entre l’analyse et la trigonométrie, et permet d’interpréter les fonctions sinus et cosinus comme des sommes pondérées de fonctions exponentielles. Si on additionne ou soustrait les formules d’Euler : ei θ = cos θ + i sin θ, e−i θ = cos θ − i sin θ, et on résout soit le sinus, soit le cosinus, on obtient cos θ = ei θ + e−i θ , 2 sin θ = ei θ − e−i θ . 2i Ces relations peuvent même servir de définition aux fonctions trigonométriques avec un argument complexe θ. Par exemple, soit θ = i ϕ, on a : cos(i ϕ) = e−ϕ + eϕ = cosh(ϕ), 2 sin(i ϕ) = e−ϕ − eϕ = i sinh(ϕ). 2i Identité d’Euler eiπ + 1 = 0 L’identité d’Euler, ei π + 1 = 0 , est remarquable pour sa beauté mathématique. Trois fonctions arithmétiques de base sont présentes exactement une fois : addition, multiplication, et l’exponentiation. Aussi, l’identité relie cinq constantes mathématiques fondamentales : Le nombre 0. Le nombre 1. Le nombre π, qui est omniprésent en trigonométrie, en géométrie euclidienne et en analyse mathématique. Le nombre d’Euler e, base des logarithmes népériens, qui apparaı̂t souvent en analyse mathématique. Le nombre i , l’unité imaginaire des nombres complexes. Un vote des lecteurs mené par Mathematical Intelligencer a nommé cette identité “the most beautiful theorem in mathematics”. Un autre vote mené par Physics World en 2004 l’a nommé “the greatest equation ever”, à égalité avec les équations de Maxwell.