Caribou des bois 101 : Comment gérer une espèce menacée dans la forêt boréale Ian Thompson Chercheur scientifique Ressources naturelles Canada Service canadien des forêts Centre de foresterie des Grands Lacs Caribou des bois 101 : comment gérer une espèce menacée dans la forêt boréale Ian Thompson Service canadien des forêts Sault-Sainte-Marie (Ontario) 2 février 2017 Le caribou des bois – une « espèce menacée » à l’échelle nationale Liv Vors Vince Crichton Types de caribous comme désigné par COSEPAC Caribou de Peary Caribou de montagne Caribou des bois Le caribou – notions élémentaires • Une espèce mondiale – la même espèce partout, mais comptant de nombreuses sousespèces (appelé « renne » en Europe) • Il vit dans les forêts boréales, les forêts alpestres et la toundra • Il vit essentiellement dans les vieilles forêts de conifères, les tourbières et les marais • Il peut vivre entre 10 et 15 ans et se reproduire à partir de 3 ans • Les caribous de la forêt boréale vivent seuls la plupart du temps et forment de petits groupes de 5 à 20 (ou plus) en automne et en hiver Mode de vie « lent » • Taux de reproduction fondamentalement bas : 1 petit/an • En règle générale, le taux de survie des petits est moins de 15 % • Ils ne s’accouplent pas avant l’âge de 3 ans, ne mettent jamais bas des jumeaux et ne se reproduisent pas chaque année • Le taux de survie des adultes doit être élevé pour la persistance de la population W. Duffett Chronologie de la diminution de l’aire de répartition à l’est de l’Amérique du Nord Calendrier de disparition de l’habitat : Diminution de la population de 25 à 40 %, selon la province ... et de 100 % aux États-Unis Répartition actuelle des caribous des bois au Canada Exigences du caribou en matière d’habitat • Se nourrir: - en été : 50 % de lichens et 50 % de végétation riche - en hiver : plus de 80 % de lichens, 20 % de brindilles et de mousse • S’abriter : - évite les températures trop élevées et le mauvais temps • Échapper aux prédateurs : - espace (faible densité) - terrain de mise bas (tourbières, marais) - grandes étendues de forêts, tourbières et marais avec accès limité L’habitat est choisi d’un façon hiérarchique Le caribou choisit son habitat selon une hiérarchie d’échelles spatiale et temporelle Petites échelles – ressources alimentaires Grandes échelles – refuge contre les prédateurs... zones immenses, p. ex. : 30 000 km2 pour une population Lien entre les échelles spatiale et temporelle L’échelle de la population est souvent très pertinente pour étudier la survie et la reproduction du caribou Mosaïque des types et âges de peuplements à petite échelle, à échelle fine ou à échelle approximative • L’habitat change dans le temps et dans l’espace. • Alors, l’habitat de cette année pourrait être différent de celui de l’année suivante. 20 km Déplacements saisonniers caractéristiques Aire d’été Fin de l’hiver – Aire de printemps Aire d’hivernage Sasaginngiak Lake LP (Manitoba) Lien de causalité multifactoriel et effets cumulatifs Les aires et la répartition sont touchées par les multiples aménagements, entraînant de nombreux effets directs et indirects, qui varient au sein des populations locales. Changements climatiques Aménagement forestier corridors agriculture Exploration pétrolière et minière Feu Perte de l’habitat Qualité de l’habitat Prédation Parasites Répartition du caribou chasse La perturbation écologique peut entraîner la diminution des populations Les données de la Hbc indiquent une importante diminution régionale des caribous à la suite des feux du début des années 1800, avec un rétablissement soudain entre 1850 et 1860 « le pays, de la rivière de Ouinipic jusqu’à la tête du lac d’Osnaburg n’est rien d’autre qu’une vaste étendue dévastée de forêts brûlés… » (1827) • Le commerce des fourrures de caribou de la Hbc a connu un nouveau déclin au début des années 1990 en Ontario et au Québec (d’importants feux sont survenus pendant près de 30 ans entre 1880 et 1910) Les modifications de l’habitat des populations peuvent entraîner des changements à grande échelle et sur le long terme de l’aire de répartition La forêt boréale est en constante évolution à cause des feux Légende Feux en Ontario 1921-1995 Il existe un temps de décalage entre le moment où survient la perturbation et le moment où les changements dans l’aire de répartition locale se manifestent 4 ans après le feu 5 ans après le feu Aikens Lake Feu de 1980 Forêts de 55 ans L’importance du climat, ou la raison pour laquelle les caribous ne vivent pas au Texas • Multiples adaptations au froid : - gros sabots, pelage, narines à poils, capacité à digérer les lichens, forme du corps • Les températures supérieures à 25 °C entraînent un stress thermique chez les caribous • Le climat (la température moyenne annuelle) est l’une des deux variables qui ont eu un effet important sur l’évolution de l’aire de répartition du caribou de 1950 à 2000 • Deux mécanismes associés au réchauffement climatique, mais indirects : • le ver des méninges (P. tenuis) porté par le cerf, fatal pour le caribou • la prédation accrue avec la hausse des populations de cerfs et d’orignaux Les corridors réduisent la qualité de l’habitat • Fragmentation de l’aire de répartition et perte de l’habitat • Perturbations dues au bruit • Parasites et prédateurs • Zone tampon 1 km = plus de 1 % de l’aire de répartition • Effets connus à 10 km selon le bruit La prédation – cause principale de mortalité du caribou • Normalement, les caribous et les loups sont séparés en fonction de leurs habitats préférés • L’aménagement forestier entraîne la création de routes et d’habitats qui en découlent • Cela entraîne la venue d’orignaux et de cerfs... suivis par des loups et des ours • Trop de voies d’accès ne donne aucun espoir pour le caribou L’aménagement forestier change les habitats De nombreux effets directs et indirects : • qualité de l’habitat (type de forêt, perturbation) • perte de l’habitat (type de forêt, classe d’âge) • taux de prédation élevé • routes établies pour les prédateurs • parasites transportés par les cerfs et les orignaux 95% CI Cameron Hills NWT Fitted values 40 40 50 50 Mean Recruitment (calves/100 cows) 10 10 20 20 30 30 Little Smoky Alberta Lac Joseph Labrador 0 Recrutement (petits cows) pour 100 femelles) Mean Recruitment (calves/100 60 60 Analyse de la régression effectuée par Environnement et Changement climatique Canada 0 20 40 60 pourcentage total de perturbation (industriels et brûlés ) 80 100 Pourcentage de l’aire de répartition touchée par l’ensemble des perturbations 60 60 95% CI Pour une population stable de caribous Fitted values 10 10 20 20 30 30 40 40 50 50 Mean Recruitment (calves/100 cows) 0 20 40 60 80 0 Recrutement pour 100 femelles) Mean Recruitment(petits (calves/100 cows) Analyse de la régression effectuée par Environnement et Changement climatique Canada % Total Disturbance (industrial and burned) Pourcentage de l’aire de répartition perturbée 100 L’aire de répartition locale Vastes espaces Harde de caribous des Montagnes Red Wine Lieux de mise bas 1984 Goose Bay 0 50 km Recherches actuelles entreprises au Canada Recherches récentes visant à évaluer les effets des perturbations • Les résultats confirment un taux de reproduction faible; les caribous évitent les forêts aménagées, même les forêts à l'âge de 60 ans • Les ours noirs représentent une plus grande menace que prévu • Il faut au moins 40 ans avant que les caribous ne repeuplent certains habitats après le feu • Les effets des perturbations dus au bruit s’étendent jusqu’à plus de 9 km • Les lichens représentent jusqu’à plus de 50 % de l’alimentation en été • Les changements climatiques ont des effets négatifs Comment gérer cette espèce? • La condition de l’aire de répartition détermine la persistance de la population • Le risque total de perturbations anthropique et naturelle peut uniquement être évalué et géré à l’échelle de l’aire de répartition locale • On doit limiter, et non pas seulement atténuer, l’étendue et l’intensité des perturbations • Il est essentiel d’effectuer des recherches à l’échelle locale • Alors, les décisions de conserver cette espèce, ou non, seront les décisions politiques Précautions à prendre dans un contexte d’incertitude • Peu de surveillance par le passé = incertitudes quant à la condition et aux déplacements des populations • Laps de temps insuffisant pour comprendre les effets des directives en matière de gestion – la forêt boréale pousse lentement • La gestion du caribou repose sur des hypothèses non vérifiées • Les caribous vivent longtemps, donc il y a un temps de décalage (5 à 20 ans) avant que les effets nuisibles ne soient visibles Par conséquent... Nous DEVONS ÊTRE PRUDENTS en METTANT LA CHARGE de la PREUVE sur la PERSISTANCE DU CARIBOU