1 Prédication à Reims le 8 décembre 2013 Esaïe 1, 18-31 , Esaïe 11,1-9 et Romains 15,4-13 Chères sœurs, chers frères, Nous avons ces magnifiques textes de l’Ancien Testament dans lesquels le prophète Esaïe développe à la fois une critique de la mauvaise gouvernance du royaume d’Israël et de la corruption de ses dirigeants, et une espérance pour ceux qui se repentent, se détournent du mal et pratiquent la justice au nom du Dieu Unique d’Israël et de tous les peuples de la terre Je vais d’abord méditer sur Esaïe 1. L’auteur dénonce des comportements qui nuisent aux habitants d’Israël et au vivre ensemble ; il trace un chemin nouveau pour retrouver l’équité et la justice. En deuxième lieu, je parlerai avec Esaïe 11 de la venue prochaine d’un nouveau David. Enfin, je conclurai par les paroles de l’apôtre Paul sur le Dieu de l’espérance L’auteur d’Esaïe 1 commence ces versets par une promesse : « Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, ils deviendraient blancs comme la neige ; quand ils seraient rouges comme le cramoisi, ils deviendraient comme la laine » (verset 18). Ces paroles disent la puissance de pardon de Dieu aux habitants de Jérusalem à condition qu’ils écoutent dans leur cœur sa parole de vie et qu’ils se repentent de leurs péchés. Les métaphores pour décrire les péchés sont parlantes. Est associée au péché la couleur rouge qui est à la fois symbole de vie et symbole du sang versé ; quant à la neige, elle symbolise la pureté. Toutefois, si Dieu par Esaïe parle de pardon aux habitants de Jérusalem, il nous parle à nous aussi, aujourd’hui, de pardon, à nous habitants des cités. En effet, la ville de Jérusalem est la cité du peuple élu. Mais parfois nous ne comprenons pas pourquoi il y a eu élection de cette cité. Dieu a choisi cette ville et ce peuple pour qu’ils soient référence de son action pour toutes les villes et pour tous les peuples de la terre. Il a choisi Jérusalem pour qu’à travers elle soit citée la Jérusalem céleste où régnera l’équité et la justice de Dieu et dans laquelle nous pouvons choisir de demeurer en esprit et en vérité 2 Mais revenons à Jérusalem : cité fidèle, elle est devenue une prostituée. Trahir la fidélité de Dieu équivaut pour l’auteur à se tourner vers d’autres dieux comme une femme qui se tournerait vers d’autres hommes que son mari. Souvent la Bible prend une image des relations conjugales pour exprimer la relation qu’il peut y avoir entre Dieu et l’être humain, entre Dieu et un peuple, ou entre Dieu et les habitants d’une ville. Mais, quels étaient les péchés de Jérusalem à l’époque du roi Josias ? Le prophète qualifie les habitants de meurtriers: ils frelatent le vin, leurs chefs sont complices des voleurs, leurs pratiques commerciales sont douteuses, tous aiment les pots de vins et courent après les récompenses, précise l’auteur. Cette mauvaise gouvernance a pour conséquence de creuser l’écart entre les pauvres et les riches. Dans ce récit, Dieu intervient auprès des habitants par le châtiment des rebelles et de ceux qui se seront détournés de lui. Pourtant, Dieu y exprime aussi sa fidélité par la justice et l’équité. C’est ce chemin et ce chemin seul qui est à même de libérer ses habitants de la haine et de la corruption. Soyons conscients qu’aujourd’hui seules la justice et l’équité sont facteurs de libération pour nous croyants de la terre habitées Dieu renouvelle à nouveau son alliance et envoie à Jérusalem des juges et des conseillers susceptibles de guider son peuple. Dieu est toujours fidèle en dépit de notre infidélité ; aujourd’hui encore, il nous envoie des conseillers et des juges susceptibles de nous guider. Ce sont celles et ceux qui, parmi nous, reçoivent de Dieu cette capacité à discerner, à comprendre et à conseiller parce qu’ils se laissent guider par l’Esprit de Dieu, Esprit de conseil et de vérité. Retenons aussi cette autre image des térébinthes au feuillage flétri ou du jardin privé d’eau : nous pourrions leur ressembler si nous nous détournons de Dieu. Quant au puissant et à son action, si l’auteur les compare à une étincelle qui les brulent tous les deux, c’est pour nous dire que disparaissent ceux qui ont exercé un pouvoir et sont corrompus. Cette façon très imagée et parlante pour les personnes de l’époque est une manière pour l’auteur de prévenir les rebelles de ce qui risque de leur arriver s’ils persévèrent à ne pas vouloir établir plus de justice et d’équité dans la ville. La corruption des puissants est un 3 thème universel et, malheureusement, ses conséquences sont dramatiques tant sur un plan individuel que sur un plan collectif Le projet de Dieu est dans la justice et l’équité, il n’y a pas d’autre bonne gouvernance que celle qui les promeut. Le deuxième passage du livre d’Esaïe (Esaïe 11) est un texte qui est véritablement un texte de l’Avent car il nous annonce la naissance de Jésus de façon très suggestive. Le premier verset du chapitre recourt à des images tirées de la nature : « alors un rameau sortira du tronc de Jessé, un rejeton de ses racines sera fécond » (verset 1). Cette métaphore n’évoque ni la rupture, ni la mort mais la renaissance, le renouveau. Elle parle de continuité, d’une continuité qui est celle de l’alliance de Dieu pour son peuple, une alliance que renouvelle la naissance d’un nouveau David, d’un roi, le Messie, Jésus le Christ. Est donc évoquée la fécondité de ce renouveau. Cela nous amène à parler de la multitude des témoins du Messie et nous en faisons partie, nous qui vivons de cette parole de Dieu transmise de façon nouvelle puisqu’incarnée par Jésus Suivent alors six qualificatifs du souffle de l’Esprit dont le nouveau David sera comblé : la sagesse, l’intelligence, le conseil, la vaillance, la connaissance et la crainte du Seigneur. Ces qualités qui sont dons de Dieu se traduisent par le fait qu’il « ne jugera pas sur l’apparence, il n’arbitrera pas sur un ouï dire » (verset 3). Et, si nous réfléchissons à ces paroles, les mettre en pratique est éminemment précieux dans nos relations interindividuelles. Comme il est facile de juger sur l’apparence, comme nous sommes imprudents lorsque nous prenons pour comptant ce que nous dit quelqu’un ! Beaucoup plus difficile est de prendre le temps de comprendre, de connaître la personne, de cheminer avec elle. Il n’y a pas loin entre le jugement et la condamnation. Or cela apporte forcément de l’exclusion. Ce nouveau David Jugera les pauvres avec justice ; dit d’une autre façon, « il arbitrera avec droiture les affligés ». En effet, comment le mensonge pourrait-il nous amener à un bon jugement ? L’apôtre Paul identifiera ce descendant de David à Jésus, celui qui, comme le décrit le prophète Esaïe, ira vers les pauvres et les affligés. Ces petits pour qui la justice et l’arbitrage honnêtes sont si importants. Oui, comme le dit Isaïe, la justice est si essentielle qu’elle est associée à un accessoire vestimentaire très 4 important, la ceinture. L’image est, en effet, utilisée pour insister sur l’importance de mettre en pratique la justice et la probité : « la justice sera la ceinture de ses reins et la probité, la ceinture de ses hanches » (verset 5). Vient en final de ce passage une grande fresque symbolique, une vision apaisante et réconfortante : « le loup séjournera avec le mouton, la panthère se couchera avec le chevreau, le taurillon, le jeune lion et les bêtes grasses seront ensemble et un petit garçon les conduira » (verset 6). Cette vision trés connue symbolise une réconciliation universelle entre les animaux entre eux et entre les animaux et l’humain. Cette vision nous indique que ce rejeton, ce nouveau David supprimera toute violence sur terre ; l’humain cessera d’haïr son frère et d’être craint par les espèces animales. Effectivement, Jésus-Christ nous montrera la règle qui doit régir notre conduite envers ceux qui nous entourent : chercher un chemin de paix par lui, lui qui est sorti victorieux des puissances du mal et de la mort. Et, terminons par cette vision qui porte notre espérance en un monde nouveau : « Il ne se fera aucun mal, il n’y aura aucune destruction dans toute ma montagne sacrée, car la connaissance du Seigneur remplira la terre comme les eaux recouvrent la mer » (verset 9). Nous avons à nous engager en tant que témoins de ce nouveau David à faire advenir ce règne de Dieu en luttant pour qu’adviennent plus de justice et de probité dans tous les domaines et d’abord et déjà dans notre environnement proche. Dieu est toujours en action dans notre monde par son saint Esprit. Mais nous doutons de l’espérance en ce monde nouveau toujours en devenir Soyons toujours des porteurs d’espérance et gardons en mémoire cette vision d’un monde à venir qui est à la fois interpellation et source d’encouragement pour chacune et chacun d’entre nous, et particulièrement pour tous ceux qui traversent une situation d’épreuve Comme le dit très bien l’apôtre Paul dans l’épitre aux Romains (Romains 15), « tout ce qui a été écrit autrefois a été écrit pour notre instruction afin que par la persévérance et par l’encouragement des Ecritures nous ayons l’espérance » (verset 4). Oui, cherchons dans les Ecritures la source de notre espérance. Ce sont elles qui nous enseignent et nous encouragent à persévérer dans la foi en celui qui a vaincu toutes puissances de mort.