Nanotechnologies et cancer Considérées comme une réponse aux défis du XXIe siècle, les nanotechnologies ouvrent des perspectives prometteuses en médecine, notamment dans le diagnostic et le traitement du cancer. Mais certains nanomatériaux pourraient eux-mêmes être cancérigènes. La Ligue contre le cancer suit avec attention l’évolution fulgurante dans ce domaine. Nanomatériaux et risque de cancer Le débat sur les risques des nanotechnologies porte avant tout sur les produits et les applications qui libèrent des nanomatériaux de synthèse. Les minuscules particules non liées peuvent en effet être absorbées par l’organisme, et leurs effets à long terme sont encore très mal connus. Absorption dans l’organisme Le poumon est la principale porte d’entrée des nanomatériaux dans l’organisme. Ceux-ci pénètrent dans les alvéoles pulmonaires par la respiration, traversent la barrière tissulaire hémato-aérienne et arrivent dans la circulation sanguine. Une petite partie parvient ainsi dans d’autres organes, comme le foie. Les nanomatériaux utilisés dans les produits cosmétiques viennent en contact avec la peau. Selon les observations faites à ce jour, une peau intacte constitue une barrière efficace. Mais en cas de blessure ou de lésion, elle laisse passer les nanoparticules. Enfin, les nanomatériaux contenus dans les denrées alimentaires peuvent pénétrer dans l’organisme par le biais du tractus gastro-intestinal. En l’état actuel nus. Il importe donc de prendre au sérieux les observations faites à ce jour et de les approfondir dans d’autres études. des connaissances, leur élimination par l’intestin semble relativement efficace. Des cancers induits par les nanomatériaux ? Les nanomatériaux sont-ils cancérigènes, et si oui, dans quelle mesure ? Actuellement, il est difficile de se prononcer. Certains ont montré un potentiel cancérigène lors d’études sur des animaux et des cultures cellulaires à partir d’une certaine dose d’exposition. Les nanotubes de carbone (« carbon nanotubes ») auraient un effet similaire à l’amiante en raison de leur forme en aiguille. Le risque pour la santé dépend des propriétés des nanomatériaux et doit être évalué de cas en cas. Quant aux effets à long terme, ils sont encore mal con- Peau Poumon Estomac/ intestin Portes d’entrée des nanomatériaux dans l‘organisme. Définition Si les définitions divergent, elles s’accordent généralement sur le fait que les nanotechnologies utilisent des matériaux de l’ordre de 1 à 100 nanomètres (nm), un nanomètre équivalant à un milliardième de mètre. Compte tenu de leur petite taille, les nanomatériaux ont des propriétés physiques et chimiques spécifiques. On trouve déjà une foule de produits contenant des nanomatériaux de synthèse sur le marché tels que produits solaires, aliments, peintures résistant aux éraflures ou textiles repoussant la saleté. Les nanotechnologies dans la médecine du cancer Les nanotechnologies offrent des perspectives intéressantes en médecine, notamment dans le domaine des médicaments, de l’imagerie ou des implants. La nanomédecine ne dispose pas encore de définition uniforme. En 2011, on en comptait près de 150 sur le marché mondial ayant au moins une dimension inférieure à 300 nm : médicaments, vaccins, instruments, etc. Une centaine de produits sont actuellement testés cliniquement ou le seront sous peu et de nombreuses applications en sont au stade de la recherche-développement. Des produits nanothérapeutiques contre le cancer Les traitements multimodaux (utilisation de nanomatériaux en association avec les thérapies existantes) et les systèmes théranostiques (applications nanomédicales combinant plusieurs modes d’action, p. ex. diagnostic, monitoring et traitement) joueront très certainement un rôle clé dans la nanomédecine de demain. Faute de recul, on craint surtout que des nanomatériaux ne subsistent dans l’organisme. Sur les produits nanothérapeutiques homologués ou en phase de développement, près de deux tiers concernent le traitement du cancer. Actuellement, les produits chimiothérapeutiques doivent être administrés à haute dose pour que le médicament atteigne efficacement sa cible, d’où des effets indésirables sur les cellules saines. Le développement de nanostructures pour transporter les principes actifs de façon ciblée vise à atteindre sélectivement les cellules et les organes malades en épargnant le tissu sain. Des nanoparticules d’oxydes de fer polyvalentes Les nanoparticules d’oxyde de fer superparamagnétiques (SPION) sont utilisées comme agent de contraste dans l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour le diagnostic et la surveillance des tumeurs. En 2011, une thérapie basée sur l’emploi de SPION a été autorisée pour la première fois pour soigner une tumeur au cerveau. Les particules sont directement injectées dans le tissu tumoral et exposées à un champ magnétique alternatif qui les chauffe. Selon la température et la durée du traitement, les cellules cancéreuses sont soit détruites, soit rendues plus sensibles en vue de la chimiothérapie ou de la radiothérapie qui suivra. Le traitement par hyperthermie est actuellement en développement pour le cancer de la prostate et du pancréas. Les SPION sont également utilisées dans la recherche de médicaments, par exemple en association avec des liposomes. Un liposome est une capsule formée d’une membrane lipidique entourant une cavité sphérique de 100 à 200 nm de diamètre. Il peut être rempli avec un médicament et dirigé de manière ciblée vers les récepteurs présents à la surface des cellules malades, toute la difficulté étant de délivrer le médicament de façon contrôlée à l’endroit visé. Des scientifiques helvétiques cherchent à piloter la libération du médicament au moyen de SPION intégrées dans le liposome. Celles-ci sont chauffées à l’aide d’un champ magnétique externe ; la membrane lipidique devient alors perméable et laisse passer le médicament. Pour en savoir plus > www.infonano.ch Site de la Confédération sur le plan d’action Nanomatériaux synthétiques, avec des informations sur les développements les plus récents en matière de nanotechnologies > www.pnr64.ch Programme national de recherche Opportunités et risques des nanomatériaux (PNR 64) > www.liguecancer.ch/nano Informations de la Ligue suisse contre le cancer sur les nanotechnologies 50 nm A Liposome d’environ 100 nm, reproduit par cryo-microscopie électronique. Les nanoparticules magnétiques contenues dans la membrane lipidique apparaissent sous forme de petites boules. B Une reconstruction en 3D montre les nanoparticules (en violet) et leur agencement dans la membrane lipidique (© Institut Adolphe Merkle). Ligue suisse contre le cancer Effingerstrasse 40, case postale 8219 3001 Berne www.liguecancer.ch Septembre 2013