Le monole magnétique:
Origine, théorie, expériences,
et applications
G L
« Je crois que cette nouvelle orientation de la théorie des phénomènes
quantiques nous donne une image exacte de la coexistence des ondes et des
particules et j’espère quelle pourra nous conduire à mieux comprendre et
à mieux prévoir ces phénomènes, car la vérité est nalement toujours
féconde».
L  B
Georges Lochak à l’Institut Louis de Broglie le 1er octobre 2011
sumé: Le monopôle magnétique est une particule portant une seule
charge magnétique nord ou sud, et non pas deux charges opposées comme un
aimant. Ce monopôle nest peut-être pas celui quon attendait. On l’attendait
lourd, et il est léger ; on attendait excusez ces barbarismes ! « unboson
doué dinteractions fortes», alors que c’est « un fermion doué dinteractions
faibles». Mais cette théorie s’accorde avec l’expérience, nous le montrerons en
termes simples.
Revue des Questions Scienti ques, ,  () : -

   
Encadré no 1: Quelques rappels d’histoire
Sans remonter jusqu’aux Grecs, la chimie pour Dalton, au début du e siècle,
c’était latome ; la chaleur pour Carnot, c’était latome. À la n du siècle,
chimistes et physiciens n’en voulaient plus: « Un sabbat de sorcières », dit lun
deux. Mais les atomes triomphèrent et envahirent la physique du e siècle.
La lumière vit une semblable alternance. Pour Huygens, la lumière c’était des
ondes. Pour Newton c’était plutôt des particules mais sans oublier les ondes:
il était un précurseur du dualisme. Ce sont ses successeurs qui bannirent les
ondes, mais celles-ci revinrent avec Fresnel et Maxwell et cette fois ce sont les
particules qui furent bannies: encore une fois par la faute des épigones car
Fresnel mettait ses espoirs dans latomisme dont Maxwell fut plus tard lun des
fondateurs, avant de découvrir la théorie électromagnétique de la lumière.
Enn, en , les particules revinrent avec Einstein, qui t scandale avec le
photon, particule de lumière que personne nattendait. Mais, avec Louis de
Broglie, les ondes s’unirent aux particules dans la lumière comme dans la ma-
tière et elles sont ensemble à la base des théories quantiques.
1. Le monopôle magnétique leptonique
Le monopôle magnétique fut le rêve de quelques-uns, nié par beaucoup
et lobjet de toute une littérature. s le e siècle, Coulomb y pensait ;
sans avoir pu lobserver, il détermina par un artice sa force magnétique et
trouva la même loi en 1/r qu’il avait trouvée pour l’électricitéet que Newton
avait mise à la base de la gravitation. Au e siècle, Maxwell qui, lui non
plus, n’a pas vu le monopôle, le mit à la base du magnétisme. Et surtout, il
comprit que la force magnétique na pas la symétrie d’une èche, comme la force
électrique, mais celle dun tire-bouchon. En 1894, Pierre Curie, décrivit les lois
générales de la symétrie de l’électricité et du magnétisme, et le rôle capital de
la chiralité (du grec keir:main), qui distingue la gauche de la droite. La chira-
lité avait été lune des plus grandes découvertes de Pasteur qui montra qu’elle
est le propre de la vie et que – le mot est de lui– « L’univers n’est pas égal à son
image dans un miroir».
Pierre Curie a décrit « le magnétisme libre», donc le monopôle, et a prédit
quil devait être chiral. Nous verrons qu’on l’a conrthéoriquement et
prouvé par l’expérience. Mais on savait déjà, depuis , grâce à Lee et Yang
et à Mme Wu, que la radioactivité bêta et toutes les interactions faibles sont
  

chirales: c’est la non conservation de la parité. Il s’ensuit que le neutrino, une
importante particule qui leur est liée, est chiral lui aussi: gauche ou droit.
En cette même année , je travaillais chez Louis de Broglie sur lélec-
tron de Dirac et j’ai trouvé deux formules simples, mais incompréhensibles à
l’époque. Tout en faisant bien dautres choses, j’y ai rééchi pendant ans,
j’ai ni par comprendre que ces formules étaient liées à la découverte de Lee
et Yang et j’ai trouvé une équation, analogue à celle de Dirac, qui représente
non plus un électron mais un monopôle magnétique, lequel est, en quelque sorte,
lautre versant de l’électron. Les lois de Pierre Curie en découlent aussitôt.
Cette équation redonne comme cas limite classique une équation de Poincaré,
datant de l’époque héroïque de lélectron(en inversant l’électricité et le ma-
gnétisme).
Encadré n° 2
Soient
µµ
=1,...,4
( )
les matrices de Dirac.
La première invariance de phase (ou invariance de jauge) :
ei
()
laisse invariante l’équation de Dirac sans champ, de masse quelconque :
µ
µ
+
m
0
c
=0 ()
La matrice
a
dénit une seconde invariance de jauge:
e
i
e
c
5
()
qui laisse invariante léquation de Dirac sans champ, mais seulement de masse
nulle:
µ
µ
=
0
()
L’invariance de phase habituelle () permet dintroduire dans () une dérivée
covariante et une jauge locale, dans lesquelles gurent les potentiels de
LorentzA
+
µ
=
µ
i
e
c
A
µ
;
e
i
e
c
,A
µ
A
µ
+
µ
()
qui dénissent léquation de l’électronde Dirac :
µ
µ
i
e
c
A
µ
+
m
0
c
=0 ()

   
D’une façon analogue, nous avons ni, grâce à la jauge globale (), une jauge
locale et une nouvelle dérivée covariante dans lesquelles gurent des pseudo
-potentiels B
+
à la place des potentiels de Lorentz :
µ
=
µ
i
g
c
5B
µ
;
e
i
e
c
5
;B
µ
B
µ
+
µ
()
Ces relations dénissent l’équation d’un monopôle magnétique, dans la-
quelle la masse est nulle comme dans ():
µ
µ
i
g
c
5B
µ
=0 ()
Cest cette équation qui est généralement prise pour dénir le « monopôle lep-
tonique »dont les propriétés ont été vériées par lexpérience et qui entraînent
automatiquement les lois de symétrie pvues par Maxwell et Pierre Curie
(voir bibliographie).
En raison de la présence, dans () et (), de la matrice
a
pseudoscalaire, la
covariance de l’équation impose que B
+
soit un pseudo quadripotentiel et
q
une
phase pseudoscalaire. Il s’ensuit que la charge magnétique g est un scalaire comme
toutes les constantes physiques, contrairement à ce qui est admis habituelle-
ment.
La théorie étant quantique, la chiralité du magnétisme n’est pas dans la
constante de charge mais dans l’opérateur de charge qui est pseudo scalaire
comme
a
.
D’autre part, on connaissait, depuis , une formule due à Dirac, (sans
rapport avec son équation) qui montre que la charge dun monopôle magné-
tique est égale à un multiple entier de la charge de l’électron multipliée par
,: mon équation retrouve ce résultat sous une forme plus précise et elle
montre, que si le multiple est égal à zéro, donc si le monopôle n’a pas de charge
et est neutre, mes équations se simplient et coïncident exactement avec celles du
neutrino.
  

Encadré n°3 sur la formule de Dirac
Dirac a montré que, si une charge électrique interagit avec un monopôle ma-
gnétique, les deux charges e et g doivent être liées par la formule
=
n est un nombre entier. La démonstration de Dirac est basée sur un raison-
nement de jauge. Il considère une charge électrique en mouvement autour
dun monopôle xe ; nous supposons au contraire, que c’est le monopôle qui
est mobile et la charge électrique qui est un centre coulombien xe. Mais la
démonstration est la même.
Ce monopôle magnétique est une forme excitée du neutrino, d’où lhypothèse
quil doit être doué comme lui dinteractions faibles, ce que l’expérience a conr-
mé.
2. Pourquoi n’a-t-on pas vu plus tôt le monopôle magnétique?
On ne l’a pas vu parce quon ne le cherchait pas où il était. Cest le pro-
blème de la clé de voiture et du réverbère! Comme on n’avait pas d’équation
prévoyant des propriétés physiques précises, on sest engagé sur une voie dont
on ne sait pas encore si elle mène quelque part. On cherchait un monopôle
lourd, ce qui expliquait qu’il soit dicile à produire, alors que le mien est sans
masse au repos et n’a quune énergie de mouvement, ou provenant des champs
qui agissent sur lui. On cherchait un « boson», alors que le mien est un « fer-
mion».
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