LA LAMPROIE Les lamproies ne sont pas des poissons. 1 CLASSE DES AGNATHES OU CYCLOSTOMES FAMILLE DES PÉTROMYZONTIDÉS – LES LAMPROIES Les lamproies ne sont pas des Simple plateau chez la petite lamproie, poissons. Ce sont des êtres vraiment elle est armée d'un jeu de scies chez la curieux. Au premier abord, on les lamproie fluviatile et la lamproie marine. confond avec les anguilles dont elles ont Cette langue, chez les grandes lam- l'aspect de serpents et les mouvements proies, est un instrument diabolique ; onduleux. « poissons », actionnée comme un piston d'avant en dépourvus de nageoires paires, sont arrière, elle perfore la surface du corps munis d'une bouche béante et de petits où l'animal s'est fixé. C'est ainsi qu'on trous latéraux, orifices des branchies, ce trouve des saumons, des aloses, des qui les fait reconnaître à coup sûr. poissons de mer rongés tout vifs avec Mais ces La bouche, chez les adultes, est d'affreuses et profondes blessures. Par bordée d'une lèvre circulaire portant des ailleurs, papilles sensorielles rétractiles. La cavité fonctionner comme un simple organe de buccale est une sorte d'entonnoir armé fixation quand la lamproie sans se nourrir de se laisse véhiculer par le poisson ou crochets cornés, elle fonctionne comme une ventouse. la ventouse buccale peut quand, adhérant à un support, elle Les dents cornées de la lamproie résiste au courant. Cela paraît la seule marine constituent un arsenal inquiétant, fonction de la bouche chez la petite mais elles sont disposées harmonieu- lamproie qui ne se nourrit pas à l'état sement en rangées spirales. La petite adulte. lamproie n'a qu'une dentition réduite . L'organe respiratoire des lam- La bouche des larves n'est pas proies diffère totalement de celui des édentée, la lèvre forme un bourrelet poissons. C'est une succession de sept supérieur en fer à cheval, la portion paires de sacs s'ouvrant chacun à inférieure n'est pas encore constituée. l'extérieur par un orifice propre. Ces sacs Tout le fond de l'orifice buccal est tapissé débouchent à l'intérieur dans une poche de papilles arborescentes qui, par leur commune, agitation, courant l'oesophage. Chaque sac est musculeux. entraînant les particules alimentaires qui L'eau peut pénétrer par la bouche, sont enrobées par le mucus du tube mais quand l'animal est fixé, elle entre et digestif. Ces papilles disparaissent à la ressort par les orifices latéraux. Les métamorphose. mouvements respiratoires sont remar- déterminent un l'aqueduc, allongée sous ...On voit chez les adultes, au quablement rapides. Les lamproies ont centre du disque buccal, l'extrémité de la une narine unique donnant dans un sac langue qui apparaît en profondeur. olfactif qui communique postérieurement 2 avec le tube digestif. Elles ont une lières. On les trouve sous les pierres valvule spirale dans l'intestin comme les dans la vase qu'on fouille avec les mains, sélaciens ou les ganoïdes. Leur squelette on les sent alors qui s'enroulent autour est rudimentaire, en partie cartilagineux ; des doigts. Les pêcheurs les appellent l'axe du squelette qui correspond à notre chatouilles ou lamprillons. Nous avons vu colonne vertébrale est occupé par un l'aspect de leur bouche. Leurs yeux sont cordon élastique, la corde dorsale. Cette longtemps corde est l'ébauche de l'appareil de possède la remarquable particularité de soutien des vertébrés, elle existe chez sécréter un ferment capable de digérer tous les embryons mais disparaît chez la les substances albumineuses. Peut-être plupart à l'état adulte ou bien n'est plus cette sécrétion les protège-t-elle dans la représentée -comme chez les poissons- vase contre les microbes qui y pullulent. que par des résidus entre les vertèbres L'état larvaire dure deux à quatre ans ou par un trou au centre des disques puis vertébraux. Le squelette de la lamproie comme des taches à bord bleuâtre, la est comparable embryonnaire. Les à les rudimentaires. yeux un squelette bouche se trois lamproies métamorphose. Leur apparaissent transforme, peau d'abord c'est la pondent en eau douce. Leurs larves sont La lamproie marine appartient au les ammocètes ; on a longtemps cru genre Petromyzon, les deux autres au qu'elles étaient des espèces particu- genre Lampetra. 3 La lamproie marine Petromyzon marinus L. Autres noms usuels : Grande lamproie, Lamproie marbrée, Lampresse, etc. Allemand : Meerneunauge, Lamprete, Meerpricke, etc. Italien : Lampreda di mare, Anglais : Sea lamprey Disque buccal armé de dents cornées nombreuses, disposées en rangées spirales régulières. Lame cornée supérieure presque aussi haute que large, à deux pointes rapprochées. Langue à rebord denticulé. Nageoire dorsale antérieure moins développée que la postérieure, nettement détachée. Dos et flancs marbrés brun noir ou olivâtre foncé, ventre blanchâtre. Longueur 50 cm, jusqu'à 1 m. Comparable comme proportions à l'anguille. Anguille en compagnie d'un hotu (en haut) et d'un barbeau (en bas) dans les Usses (Hte Savoie) 19 octobre 1949, Robert Hainard 4 La lamproie marine est un pré- Elle fraie au printemps, en mai, dateur. Plus exactement, c'est un para- pénétrant dans les fleuves dès avril. Les site externe se fixant sur les poissons de mâles ont le ventre rosé et un bourrelet mer dont elle dilacère les chairs, causant saillant sur le dos. Fixées sur une pierre de profondes blessures mortelles. dans le courant, les lamproies ondulent, C'est un migrateur potamotoque : s'agitent et creusent une rigole où elle pénètre dans les fleuves pour frayer. tombent les œufs avec la laitance. Des Le plus souvent, elle se laisse véhiculer observateurs ont constaté un accou- par les saumons ou les aloses. En plement des sexes qui me paraît très France, elle remonte dans la Loire, la probable, si j'en juge d'après la repro- Gironde, l'Adour, l'Hérault, le Rhône. duction de la petite lamproie. Dans le Rhône, elle fraie à l'embouchure La ponte terminée, les lamproies du Gard, près de Tarascon, près de épuisées, efflanquées, se laisser aller au Vienne. en fil de l'eau, elles sont comme des possède une qui provient de Seyssel. De morceaux de filins entraînées par le plus en plus ses anciennes frayères lui courant, des « lamproies cordées ». Le musée de Genève deviennent inaccessibles par l'installation des barrages. Elle est encore fréquente dans les affluents de la Baltique et de la mer du Nord. Cependant, capturées avant la fraie -dans des nasses- elles sont considérées comme un mets de choix 1, quoique certains les déclarent indigestes. Régions tempérées de l'océan Atlantique et fleuves qui s'y jettent, en Europe et en Amérique. En Méditerranée jusqu'à l'Adriatique. Manque dans la mer Noire. Une espèce voisine dans la Caspienne. 1 Les lamproies se consommaient au Moyen Age en galantine ou en pâté en croûte, accompagnées d'une sauce noire confectionnée avec leur propre sang. La lamproie est le seul « poisson » à être saigné vivant lors de sa préparation. Son sang est recueilli et mélangé avec un peu de vin rouge pour empêcher qu'il coagule. Le corps est découpé en tronçons et cuit avec des poireaux dans le même vin, avant de finir de mijoter pendant deux heures dans sa sauce relevé par un bouquet garni . Lors de sa présentation, cette sauce s'accompagne de croûtons aillés. Elle se pêche entre février et mars, quand elle remonte les courants de la Dordogne près de son confluent avec la Garonne. 5 La lamproie de rivière Lampetra fluviatilis L. Autres noms usuels communs : Lamprillon, Fifre, Sept-oeils, Sept-trous Allemand : Flussneunauge, Flusspricke ; pour la larve : Leinall, Querder, Italien : Lampreda di fiume, Anglais : Lampern, Fresh water lamprey Disque buccal à dents cornées beaucoup moins nombreuses. Lame cornée supérieure beaucoup plus large que haute à deux pointes nettement espacées. A la périphérie du disque un cercle plus ou moins complet d'aspérités minuscules (loupe!). Langue à arête cornée dentelée en scie, portant une pointe centrale triangulaire nette. Un espace variable sépare les deux nageoires dorsales. Cet espace est nul chez les individus en fraie. Peau non marbrée bleu ou brun foncés sur le dos, blanchâtre ventralement. Longueur : 25 à 40 cm, parfois jusqu'à 50 cm. Son genre de vie est analogue à cend alors à la mer. Sa taille à ce celui de la lamproie marine mais elle moment n'est guère supérieure à celle de pénètre plus loin dans les bassins la petite lamproie, elle mesure 13 à 15 fluviaux. Elle remontait autrefois le Rhin cm mais au contraire de celle-ci, ses jusqu'à Bâle. organes reproducteurs sont alors tout à Elle aussi cause de profondes fait rudimentaires, ils ne se dévelop- blessures à des poissons de mer tels que peront que lors de la migration au retour la morue, le hareng, le sprat. En eau de la mer. Une femelle de lamproie douce, elle se nourrirait encore de petits fluviatile peut pondre jusqu'à 40'000 animaux, mollusques ou vers, mais œufs, ils sont comme des grains de mil, bientôt elle cesse de s'alimenter. un peu ovales, d'environ 1 mm, ils se Elle abonde parfois en août et collent au sable dans la frayère. D'après septembre à proximité des côtes, sans Lauterborn, la fraie dans les ruisseaux du doute au début de la migration en eau Haut-Rhin durerait de février au premier douce. En Baltique, c'est à fin septembre tiers du mois d'avril. que les prises sont nombreuses. Comme la précédente, cette Il n'est pas possible de distinguer espèce meurt peu après la fraie. La chair sa larve de celle de la petite lamproie. en est estimée, mais le poisson est plutôt Elle se métamorphose en avril et des- utilisé comme appât. Toute la zone tempérée de l'Europe, même la mer Noire. La même espèce ou des formes voisines en Sibérie et au Turkestan jusqu'au Japon. Le long des côtes pacifiques et atlantiques de l'Amérique du Nord. Donc vaste répartition circumpolaire. En Suisse dans le bassin du Rhin, mais fort rare actuellement. (ndlr 1951) 6 La petite lamproie Lampetra planeri (Bloch) Autres noms usuels : ceux de la lamproie de rivière, en outre, Chatouille, Sucet, Suce-pierre, etc. Allemand : Bachneunauge, Uhle, Steinbeisser, etc., Italien : Piccola lampreda, Anglais : Sand-piper, Pride, Lesser lamprey, Brook lamprey Les lames cornées supérieure et inférieure du disque buccal analogues à celles de la lamproie de rivière, mais à pointes mousses. Trois groupes de dents latérales, les médianes à trois tubercules, en outre quelques petites aspérités réparties plus ou moins régulièrement sur le disque et un cercle incomplet de pointes minuscules près de la couronne périphérique de tentacules (loupe!). La deuxième nageoire dorsale contiguë à la première. Couleur vert bouteille ou olivâtre, ventre clair plus ou moins argenté. La larve nettement plus terne. Dimension moyenne : 12 cm environ. Petites lamproies sur leur frayère. Remarquer un accouplement. Dans le Séran (Ain) 11 mai 1950, Robert Hainard 7 La petite lamproie ne va jamais à la L'auteur anglais a observé les « nids » mer, certains estiment même qu'elle n'est sous des ponts ou un peu en contrebas, à qu'une lamproie fluviatile confinée en eau l'ombre, en général juste à l'aval d'un douce. En tous cas ses larves sont rapide ou d'un barrage pouvant arrêter la indiscernables. remontée des reproducteurs. D'après cet Comme l'adulte ne semble guère auteur, les frayères sont établies sur fond survivre à la fraie, il est assez rare, du de gravier ou de sable, plus rarement sur moins ne le rencontre-t-on, mais alors en galets ou à même la roche par des fonds quantités, qu'en des endroits déterminés, de quelque 25 cm. pendant quelques semaines, au printemps, dès avril et en mai. Ces « nids » sont des fosses ovales de 15 à 45 cm, selon le nombre Certains prétendent qu'elle cons- des reproducteurs qui les occupent, truit une sorte de nid bordé vers l'aval bordés souvent vers l'aval de graviers d'un mur de gravier. Loman (1912) le déplacés par l'agitation des reproduc- conteste ; il semble avoir fait d'excel- teurs. Les individus arrivent sur les lentes observations dans un affluent du frayères dès avril, la ponte a lieu au Rhin, en Hollande. Il remarque que les milieu du mois dans une eau à 10° ou lamproies s'agitent tellement que les 12°. petits galets auxquels elles se fixent C'est au début de mars que les peuvent se détacher et glisser en contre- géniteurs quittent la vase, ils ne sont pas bas, le prétendu mur de galets ne serait encore mûrs, ils n'ont pas encore les alors que le résultat d'accidents. La fosse papilles génitales saillantes. Par une creusée sorte dans le sable résulte des de frétillement, les lamproies contorsions du ou des couples. Le mâle arrivent à détacher des graviers qu'elles se fixe d'habitude sur la nuque de la lâchent en contrebas ; il en résulte bien femelle et s'enroule plus ou moins autour une façon de mur, mais elles ne peuvent d'elle. Il est pourvu à ce moment d'une guère déplacer un caillou de plus de 2 papille génitale développée en une façon cm de diamètre. Sur la frayère, les de véritable accouplements sont fréquents, ils ont lieu copulation se produit qui dure quelques à plusieurs reprises, puis les lamproies secondes. La preuve, dit Loman, c'est inertes sont emportées sous les pierres que les femelles étant abandonnées alors en aval. Une femelle pond environ un dans un récipient, on voit bientôt grouiller millier les petits vers blancs que sont les larves (Hainard, ndlr) montre des lamproies à l'éclosion. Dans la nature, les femelles, sur leur frayère, observées dans le après la ponte, se cachent dans des Séran, près de Culoz, en mai 1950. anfractuosités Ces frayères abondaient dans les pénis en sorte pour qu'une mourir bientôt, comme les mâles. Les observations de Hardisty, en d'oeufs. Notre planche graviers, là où l'eau était ralentie par un seuil et assez peu profonde. Angleterre (1944) concordent avec celles de Loman. 8 Nous avons pu constater avec certitude les retenues, le plus souvent sous peu que le déplacement des graviers n'est d'eau pas fortuit, il arrive même que la lamproie limoneux. La croissance des larves est se trémousse et s'acharne sur un petit telle qu'à une année elles ont, dans les galet qui résiste à ses efforts. Hainard a rivières anglaises, environ 3,5 cm en fort bien vu l'accouplement sur la frayère, moyenne, à 2 ans, 7,5 cm, à 3 ans 10,5 je l'ai vu moi-même en aquarium. Nos cm, à 4 ans 14,5 cm. A ce moment se observations confirment les descriptions produit normalement la métamorphose ; de Hardisty sauf que les emplacements elle semble débuter en juillet et se de fraie sont répartis partout où la poursuit profondeur, la force du courant et un fond (Hardisty). D'autres auteurs donnent des de fin gravier offrent des conditions dimensions un plus différentes. Les favorables qu'on reconnaît assez vite en adultes suivant le cours d'eau. La taille des mesurent 10 à 14 cm environ ; moyenne adultes varie selon les lieux et selon les 11,5 cm, il n'y a pas de différence années pour un même endroit, entre 11 sensible entre les deux sexes qui m'ont cm et 15 cm en moyenne. On retrouve paru en nombre à peu près égal. près des bords jusqu'au du Séran, début près vaseux de de ou l'hiver Culoz, les larves en aval dans les calmes, dans Europe et Amérique du Nord. En Suisse, commune dans le bassin du Rhin en aval des Chutes. Elle manque dans le bassin du Léman, séparé du bassin inférieur du Rhône par la perte du Rhône à Bellegarde. La petite lamproie en grand danger (La Liberté 4.1.2017) Texte tiré de « Poissons d'eau douce » tome I, Emile Dottrens, Les Beautés de la Nature, Editions Delachaux & Niestlé, 1951, illustré d'aquarelles de Anne Dottrens et Robert Hainard 9 la petite lamproie La petite lamproie est la dernière représentante des lamproies encore présente en Suisse. Elle est donc un indicateur des modifications problématiques des habitats naturels, car elle a une capacité étonnamment faible à surmonter les obstacles, rappelle la Fédération Suisse de Pêche (FSP). Elles font partie des derniers survivants du groupe des animaux vertébrés les plus archaïques de notre planète, les agnathes (sans mâchoire) ou cyclostomes (bouche circulaire), qui remontent à plus de 500 millions d'années. La petite lamproie, qui n'a pas d'intérêt halieutique, est considérée comme « fortement menacée » selon la FSP. Ce statut se justifie par son aire de distribution qui s'est fortement réduite depuis le XIXe siècle. Les principales menaces sont : > Le déficit en matériel charrié qui engendre un manque de dépôt de sable dans les cours d'eau (milieu de la vie larvaire) - Présence de dessableurs - Disparition et banalisation des berges des cours d'eau et des lacs (manque d'espace au cours d'eau) - Mauvais entretien des berges qui perturbe la structure du lit et empêche la formation de bancs de sable Accélérateur de l'écoulement - Envasement par des nutriments issus de l'agriculture > Obstacles infranchissables > Les pollutions Une des actions de sauvegarde serait de prendre en considération les besoins de cette espèce sur les tronçons susceptibles de permettre sa reproduction et le développement de son stade larvaire, lors des revitalisations ou du rétablissement de la libre migration de la faune aquatique. Photos de lamproie et légendes pages 1,3,5 Remi Masson/Biosphoto, Philippe Clot, L'Illustré 02/17 Dessin animé, site internet Etat de Fribourg, la petite lamproie Infos dernière page : sites internet Etat de Fribourg, RTS info, La Liberté, Image de lamproie de rivière et disque bucal, encyclopédie, Petit Larousse Dossier Marie Madeleine Defago Paroz | Fondation Hainard | 25 janvier 2017 10 VOIR ET SAVOIR Nous étions allés, un groupe d'amis, tous naturalistes, observer la fraie des lamproies. La reproduction de ces curieux animaux, qui ne sont pas de vrais poissons, n'est pas parfaitement connue. L'un d'entre nous citait cette opinion, qu'il y a fécondation interne et que la lamproie met au monde des petits vivants. Peu après, je venais annoncer en triomphe à notre biologiste de profession : « J'ai vu un accouplement ! » - « J'ai vu un tel mouvement, me répondit-il froidement, mais j'ai pris quelques sujets, et l'examen microscopique révèlera s'il y a fécondation. » A ce moment, j'ai vraiment senti que nos intérêts divergeaient. Pour lui, voir n'était qu'un moyen de savoir. Et moi, j'avais lu beaucoup sur les mœurs des bêtes, et beaucoup observé. Tous ces renseignements, je les avais patiemment collectés et comparés avant tout pour arriver à voir la bête, ou telle scène de sa vie. La vraie connaissance, ce n'était pas pour moi le fait, l'explication, mais le spectacle. Or plus on sait, moins on voit. Tiré de « Défense de l'image » de Robert Hainard, Editions de la Baconnière, Neuchâtel, 1967 Anecdote Nous étions les deux les pieds dans l'eau mon père et moi pour voir les lamproies frayer et copuler dans les eaux du Vérans, à une heure de Genève, ce mois de mai 1950. Une expédition y avait rassemblé entre autres Emile Dottrens, directeur naturelle de du Genève, Muséum et d'Histoire Eugène Binder, conservateur.. J'y avais été amené (quelle fierté pour le gamin de presque 13 ans que j'étais) sur le siège arrière de la moto légendaire du directeur, une Sunbeam à moteur flottant ! Pour mon père les années 1949-50 ont été marquées par de nombreuses observations de poissons au bord de lacs et de rivières, pour l'illustration de l'ouvrage d'Emile Dottrens paru aux Editions Delachaux et Niestlé dès 1951. De même 1945-47 pour les chauvessouris dans les grottes, les charpentes et les clochers dont les portraits devaient être rassemblés dans ses « Mammifères sauvages d'Europe », 1947-48. J'ai bien profité de ces pérégrinations avec mon père. Pierre Hainard FH | Marie Madeleine Defago Paroz | 26 janvier 2017 11