Université Joseph Fourier - MAT 231 - 2008-2009 Devoir à la maison n◦ 2 Ce devoir est à rendre en TD la semaine n◦ 43 (Lundi 20/10 - Vendredi 24/10). Exercice 1 Soit K un corps commutatif, et Mn (K) l’ensemble des matrices carrées d’ordre n à coefficients dans K. Soit A = (aij ) un élément de Mn (K). On rappelle que la trace de la matrice A est la n X aii . somme de ses éléments diagonaux : trace(A) = i=1 1. Montrer que l’application trace est une forme linéaire sur Mn (K). 2. Montrer que pour toutes matrices A et B de Mn (K) : (1) trace(AB) = trace(BA). 3. Montrer que deux matrices semblables1 ont même trace. 4. Montrer qu’il n’existe pas d’endomorphismes u et v d’un espace vectoriel E de dimension finie tels que u ◦ v − v ◦ u = IdE . 5. Montrer que les endomorphismes de K[X], u : P 7→ P ′ et v : P 7→ XP satisfont l’égalité précédente : u ◦ v − v ◦ u = IdK[X] . 6. Montrer que les formes linéaires sur Mn (K) vérifiant (1) sont de la forme λ trace, avec λ ∈ K. Problème On considère la suite de polynômes (Pn )n∈N dans R[X] définie par : P0 = 1, et ∀n ∈ N, Pn+1 = 2XPn − 1 (1 + X 2 )Pn′ . n+1 1. (a) Calculer P1 et P2 . (b) Montrer que pour tout entier naturel n, deg(Pn ) ≤ n. On note an le coefficient de X n dans Pn . n+2 an . En déduire que an = n + 1. (c) Montrer que pour tout entier naturel n, an+1 = n+1 Que dire alors du degré de Pn ? 2. Montrer que pour tout entier naturel n, Pn (−X) = (−1)n Pn (X) ; que dire alors de la parité du polynôme Pn ? ′ 3. (a) Montrer que pour tout entier naturel n, Pn+1 = (n + 2)Pn . (b) Montrer que pour tout entier naturel n, P2n+1 (0) = 0 et P2n (0) = (−1)n . (c) Déduire de ce qui précède que : ∀x ∈ R, Pn+1 (x) = Pn+1 (0) + (n + 2) Z Calculer ainsi P3 et P4 . x Pn (t)dt. 0 4. (a) Montrer que pour tout entier naturel n, Pn+2 − 2XPn+1 + (1 + X 2 )Pn = 0. 1 Deux matrices A et B de M (K) sont dites semblables s’il existe une matrice P dans M (K), inversible, telle n n que B = P −1 AP . (b) Soit x ∈ R et un = Pn (x). Exprimer un en fonction de n et x. (Indication : considérer le sous-espace vectoriel de CN des suites complexes vérifiant un+2 = 2xun+1 − (1 + x2 )un , et en chercher une base composée de deux suites géométriques.) 1 (X + i)n+1 − (X − i)n+1 . (c) En déduire que pour tout entier naturel n, Pn = 2i 5. (a) Montrer que le polynôme Pn admet n racines réelles (que l’on déterminera). (b) Factoriser le polynôme Pn (dans R[X]). (c) Calculer la somme et le produit des racines de Pn (on discutera suivant la parité de n.) Université Joseph Fourier - MAT 231 - 2008-2009 Devoir à la maison n◦ 2 - Corrigé Exercice 1 Pour cet exercice, il faut essentiellement connaître les deux résultats suivants sur les matrices : l'expression du terme P générique d'une matrice produit : si A = (aij ) et B = (bij ), alors n AB = (cij ) avec cij = k=1 aik bkj . le produit de deux matrices élémentaires. La matrice élémentaire Eij est la matrice dont tous les éléments sont nuls, sauf celui qui se trouve sur la ligne i et la colonne j . L'ensemble des matrices élémentairesP Eij , i = 1 . . . n, j = 1 . . . n, est la base canonique de Mn (IK). Si A = (aij ), bien sûr : A = i,j aij Eij . En notant δij le symbole de Kronecker déni par δij = 0 si i 6= j , δii = 1, on obtient : Eij Ekl = δjk Eil . 1. On rappelle qu'une forme linéaire est une application linéaire d'un IK -espace vectoriel sur le corps de base IK . Ici, Mn (IK) est un espace vectoriel sur IK , avec les opérations suivantes : l'addition (loi de composition interne) : si A = (aij ), B = (bij ), alors A + B = (dij ) avec dij = aij + bij ; la multiplication par un scalaire (loi externe) : si A = (aij ) et λ ∈ IK , alors λ · A = (fij ) avec fij = λaij . Nous devons donc prouver que l'application trace est une application linéaire de Mn (IK) dans IK . Par dénition, trace(A) ∈ P P PIK . Et : trace(λ·A+µ·B) = ni=1 λaii +µbii = λ ni=1 aii +µ ni=1 bii = λtrace(A)+µtrace(B). Conclusion : trace est bien une forme linéaire sur IK . P P 2. Notons AB = (cij ) et BA = (dij ). Alors : cii = nk=1 aik bki et dii = nk=1 bik aki . Donc : trace(AB) = n X cii = n X n X i=1 i=1 k=1 aik bki = n X n X k=1 i=1 bki aik = n X dkk = trace(BA). k=1 3. Supposons que les matrices A et B sont semblables. Soit P une matrice inversible telle que B = P −1 AP . D'après la question précédente : trace(B) = trace(P −1 AP ) = trace(AP −1 P ) = trace(AIn ) = trace(A). 4. Supposons qu'il existe un espace vectoriel E de dimension nie, et deux endomorphismes u et v de E tels que u ◦ v − v ◦ u = IdE . Soit B une base de E . Notons A la matrice de u dans la base B et B la matrice de v dans la même base B. Alors AB est la matrice de u ◦ v et BA celle de v ◦ u. On aurait donc : trace(AB − BA) = trace(IdE ) = n. Or, l'application trace étant linéaire, trace(AB − BA) = trace(AB) − trace(BA) = 0. On aboutit à une contradiction. 5. Soit P ∈ IK[X]. On calcule : (u ◦ v − v ◦ u)(P ) = u(v(P )) − v(u(P )) = (XP )0 − XP 0 = XP 0 + P − XP 0 = P. On a donc bien : u ◦ v − v ◦ u = IdIK [X] . Les deux questions précédentes ne sont pas en contradiction : IK[X] est un espace vectoriel de dimension innie ! 6. C'est dans cette question que l'on va utiliser les matrices élémentaires. D'abord il est évident que toute application de la forme λtrace (λ ∈ IK ) est une forme linéaire sur IK vériant (1). Réciproquement, soit ϕ une forme linéaire sur IK vériant (1). ϕ(Eij Ekl ) = δjk ϕ(Eil ) = ϕ(Ekl Eij ) = δli ϕ(Ekj ). On en déduit que pour tout i 6= l, ϕ(Eil ) = 0 et que pour tout i, j , ϕ(Eii ) = ϕ(Ejj ) (prendre i = l et j = k dans l'égalité précédente). On notera λ la valeur commune des ϕ(Eii ). Ainsi : ϕ(A) = ϕ( X aij Eij ) = ij Conclusion : ϕ = λtrace. X ij aij ϕ(Eij ) = n X i=1 aii ϕ(Eii ) = λ n X i=1 aii = λtrace(A). Problème 1. (a) On a P1 = 2XP0 − (1 + X 2 )P00 = 2X et P2 = 2XP1 − 21 (1 + X 2 )P10 = 4X 2 − (1 + X 2 ) = 3X 2 − 1. (b) on démontre par récurrence sur n la propriété : deg(Pn ) ≤ n. En eet, deg(P0 ) = 0, et si deg(Pn ) ≤ n pour un entier n, alors deg(Pn0 ) ≤ n − 1 donc deg((1 + X 2 )Pn0 ) ≤ n + 1 ; d'autre part, deg(2XPn ) ≤ n + 1, donc deg(Pn+1 ) ≤ n + 1. Conclusion : ∀n ∈ IN, deg(Pn ) ≤ n. (c) Le terme en X n dans Pn est an X n , donc le terme en X n+1 dans 2XPn est 2an X n+1 et le nan 1 1 terme en X n+1 dans − n+1 (1+X 2 )Pn0 est − n+1 nan , par conséquent an+1 = 2an − n+1 = n+2 a . Comme a = 1 , on en déduit par récurrence sur n que a = n + 1 , pour tout n n 0 n n+1 dans IN. On sait que deg(Pn ) ≤ n et on vient de montrer que le coecient de X n est non nul, donc deg(Pn ) = n (et son coecient dominant est n + 1). 2. On démontre par récurrence la propriété : Pn (−X) = (−1)n Pn (X). La propriété est vraie pour n = 0. Supposons qu'elle soit vraie pour un certain entier n : Pn (−X) = (−1)n Pn (X). En dérivant cette égalité, on obtient : −Pn0 (−X) = (−1)n Pn0 (X). D'où : 1 (1 + (−X)2 )Pn0 (−X) n+1 1 = (−1)n+1 2XPn (X) − (1 + X 2 )(−1)n+1 Pn0 (X) n+1 = (−1)n+1 Pn+1 (X). Pn+1 (−X) = 2(−X)Pn (−X) − Conclusion : le polynôme Pn a même parité que l'entier n. 0 = (n + 2)Pn . 3. (a) On démontre par récurrence sur n la propriété : Pn+1 0 Pour n = 0, P1 = 2 = 2P0 : la propriété est vraie. 0 = (n + 2)Pn . Supposons que la propriété soit vraie pour un certain entier n : Pn+1 0 Pn+2 = ³ ´0 1 0 2XPn+1 − (1 + X 2 )Pn+1 n+2 ³ ´0 2XPn+1 − (1 + X 2 )Pn on a utilisé l'hypothèse de récurrence = = = = 0 2Pn+1 + 2XPn+1 − 2XPn − (1 + X 2 )Pn0 2Pn+1 + 2X(n + 2)Pn − 2XPn − (1 + X 2 )Pn0 2Pn+1 + (n + 1)(2XPn ) − (1 + X 2 )Pn0 2Pn+1 + (n + 1)Pn+1 = (n + 3)Pn+1 . = encore l'hypothèse de récurrence 0 = (n+2)Pn . Conclusion : on a établi par récurrence que pour tout entier natureln, Pn+1 (b) En évaluant en 0 la relation de récurrence dénissant la suite Pn , on obtient : Pn+2 (0) = − 1 P 0 (0). n + 2 n+1 0 Utilisant la question précédente, on remplace Pn+1 (0) par (n + 2)Pn (0). Donc Pn+2 (0) = −Pn (0). Comme P1 (0) = 0, on en déduit (récurrence immédiate) : P2k+1 (0) = 0, ∀k ∈ IN. De même, comme P0 (0) = 1, on en déduit (récurrence à peine moins immédiate) : P2k (0) = (−1)k , ∀k ∈ IN. Rx 0 0 (c) On a : ∀x ∈ R, Pn+1 (x) = Pn+1 (0) + 0 Pn+1 (t)dt, puis on remplace Pn+1 par (n + 2)Pn pour obtenir la formule demandée. Rx Rx Ainsi : ∀x ∈ R, P3 (x) = P3 (0) + 4 0 P2 (t)dt = 0 (3t2 − 1)dt = 4(x3 − x). Cette égalité entre fonctions de la variable réelle entraine l'égalité des polynômes formels : P3 = 4(X 3 − X) (Justication : le polynôme P3 − 4(X 3 − X) a une innité de racines réelles, donc il est nul).R Rx x De même : P4 (x) = P4 (0) + 5 0 P3 (t)dt = 1 + 20 0 (t3 − t)dt = 1 + 5x4 − 10x2 , donc P4 = 5X 4 − 10X 2 + 1. 0 4. (a) il sut de remplacer Pn+1 par (n + 2)Pn dans la dénition par récurrence de Pn+2 . (b) Soit x ∈ R et un = Pn (x). Soit E = {u ∈ Cl IN , un+2 = 2xun+1 − (1 + x2 )un }. On vérie facilement que E est un sous-espace vectoriel de Cl IN , de dimension 2 (pour cela, montrer que l'application de E dans Cl 2 qui à u ∈ E associe le couple (u0 , u1 ) est un isomorphisme : une suite dans E est entièrement déterminée par ses deux premiers termes). On cherche deux suites géométriques (non nulles) dans E . Soit v une telle suite, de raison r (6= 0), de premier terme v0 = 1, de sorte que vn = rn . v ∈ E ssi ∀n ∈ IN, rn+2 = 2xrn+1 − (1 + x2 )rn , ssi r2 − 2xr + (1 + x2 ) = 0 (ce que vous connaissez peut-être sous le nom d'équation caractéristique). Cette équation a deux racines distinctes dans Cl : r1 = x + i, r2 = x − i. On dispose donc de deux éléments particuliers dans E : les suites géométriques v et w dénies par vn = r1n et wn = r2n . Montrons qu'elles forment une famille libre dans E . En eet, soient λ et µ deux nombres complexes vériant λv + µw = 0. Cela signie : ∀n ∈ IN, λvn +µvn = 0. En particulier, pour n = 0 : λv0 +µw0 = 0, soit encore λ+µ = 0. Pour n = 1 : λv1 + µw1 = 0, soit λr1 + µr2 = 0. On peut voir ces deux équations comme un système de deux équations linéaires à deux inconnues λ et µ : ³ 1 r1 1 ´³ λ ´ = 0. r2 µ Le déterminant de la matrice associée à ce système est r2 −r1 . Comme les deux racines r1 et r2 sont distinctes, le déterminant est non nul, donc le système a pour unique solution λ = µ = 0. On a prouvé que la famille {v, w} est libre dans E . Comme son cardinal (2) est égal à la dimension de E , on en déduit que la famille est une base de E . Par conséquent, c'est une famille génératrice de E . De ce fait, la suite u qui nous intéresse va s'écrire comme combinaison linéaire des suites v et w. Nous cherchons donc λ et µ dans Cl tels que u = λv + µw. Pour cela, il faut et il sut que u0 = λv0 + µw0 et u1 = λv1 + µw1 . D'où le système : ³ 1 1 ´³ λ ´ ³ 1 ´ = . r1 r2 µ 2x On trouve : λ = 1−ix et µ = 2 D'où l'expression nale : un = 1+ix 2 . ´ 1 − ix 1 + ix 1³ (x + i)n + (x − i)n = (x + i)n+1 − (x − i)n+1 . 2 2 2i (Contrairement aux apparences, cette expression est réelle pour x réel . . . ) ³ ´ 1 (c) Posons Rn = Pn − 2i (X + i)n+1 − (X − i)n+1 . D'après ce qui précède, tout réel x est racine du polynôme Rn , donc ce polynôme est nul. D'où l'égalité des polynômes formels : ´ 1³ Pn = (X + i)n+1 − (X − i)n+1 . 2i 5. (a) Soit z ∈ C. l Pn (z) = 0 ssi (z + i)n+1 = (z − i)n+1 . Comme i n'est pas solution, cette ³ ´n+1 z+i z+i équation équivaut à z−i = 1, c'est-à-dire ∃k ∈ IN, 0 ≤ k ≤ n, z−i = exp( 2ikπ n+1 ) (les exp( 2ikπ )+1 n+1 . racines n + 1èmes de l'unité), ou encore ∃k ∈ IN, 1 ≤ k ≤ n, z = i exp( 2ikπ n+1 )−1 Ce qui donne comme racines du polynôme Pn les réels : zk = kπ cos( n+1 ) kπ sin( n+1 ) = cotan( kπ ), n+1 pour 1 ≤ k ≤ n. (b) Le polynôme Pn est de degré n et admet n racines réelles, il est donc produit des facteurs linéaires X − zk , à la multiplication près par un réel non nul. On détermine ce facteur grâce au coecient dominant. Finalement : n Y kπ )). Pn = (n + 1) (X − cotan( n+1 k=1 (c) Notons ak le coecient de X k dans le polynôme Pn . Alors : la somme des racines est égale − an−1 an , et an−1 = 0 (parité de Pn ), donc : n X cotan( k=1 kπ ) = 0. n+1 n (0) le produit des racines est égal à (−1)n aan0 = (−1)n Pn+1 . Donc : n Y k=1 kπ cotan( )= n+1 ( 0 (−1)n/2 n+1 si n est impair si n est pair