Parcours de visite
La peinture des Primitifs à l'âge baroque
(évolution des techniques et des représentations)
Parcours réalisé par Eva Lando, Animatrice pédagogique, Service éducatif, Palais Fesch-musée des Beaux Arts
Mariage mystique de sainte Catherine, Niccolo di Tommaso
L’une des particularités des collections du Palais Fesch est de renfermer en leur
sein des œuvres représentatives de chaque siècle, pour une période allant de la fin du
XIVe siècle au début du XVIIIe siècle permettant, ainsi, au visiteur d’avoir un aperçu de
l’histoire de la peinture italienne, du Moyen Age jusqu’à la fin de l’époque moderne.
La Renaissance, en particulier, est donc largement représentée au Palais Fesch.
Peintures des Primitifs (second étage) :
Le nom de Primitifs est donné aux peintres actifs en Italie du XIIe jusqu’au XVe
siècle. Ce terme désigne des peintres qui travaillent sur des panneaux de bois et qui
n’utilisent pas ou peu la perspective.
Ils peignent des personnages très droits, raides, placés généralement devant un fond d’or
selon la tradition médiévale byzantine.
Mariage mystique de sainte Catherine , Niccolo di Tommaso
La technique de peinture des Primitifs est une technique particulière : le support
utilisé est le bois, notamment du peuplier, réputé pour sa résistance et très fréquent en
Italie. Avant de peindre et après avoir lissé le bois, les peintres doivent effectuer une
longue préparation constituée de superposition de couches de colle mélangée à une sorte
de plâtre : le gesso, afin que le bois n’absorbe pas la peinture qui est ensuite déposée.
Jusqu’au XVe siècle, on n’utilise pas la peinture à l’huile mais la tempera, c’est-à-dire de la
peinture à base de pigments naturels mélangés à de l’œuf qui sert de liant.
Le fond d’or quant à lui est obtenu en appliquant de la poudre ou de la feuille d’or (qui est
un matériau précieux qui vieillit très bien) sur une préparation à base d’argile rouge et de
blanc d’œuf : le bol d’Arménie, visible dans le présent tableau. Si le fond d’or permet de
mieux distinguer les décors dans les églises naturellement sombres, son caractère
précieux accentue également la divinité et le caractère sacré des personnages, en les
plaçant dans un cadre presque irréel, distinct de tout espace-temps identifiable. Le fond
d’or rappelle que Dieu est lumière.
Les thèmes abordés par les Primitifs sont, comme durant tout le Moyen âge où l’Église est
la première puissance politique et financière, des thèmes religieux. Les peintures,
essentiellement réalisées sur commande, sont destinées à orner les édifices religieux et
sont généralement réalisées pour s’intégrer facilement dans l’architecture existante (c’est
le cas pour le présent panneau dont la forme rappelle l’architecture de l’église). Pour
l’artiste médiéval, la maison de Dieu doit être une sorte de Paradis ; le fidèle doit y sentir
de toute son âme l’omniprésence de la divinité (fleurs, couleurs, éblouissements d’or).
A ce moment de l’histoire de l’art, l’important n’est pas de représenter les choses ou les
personnages en étant fidèle au réel, mais comme le clergé et le peuple doivent les voir :
divins et puissants.
Le caractère très figé des personnages procède des mêmes principes : s’ils sont aussi
hiératiques c’est pour mieux mettre de la distance entre eux et le monde des hommes.
Ces hommes et ces femmes, pour la plupart des saints, font le lien entre le monde des
hommes et le monde de Dieu ; ils sont dits « intercesseurs ».
Les images jouent donc un rôle extrêmement important au Moyen Age d’autant que la
majorité des gens ne sachant pas lire, c’est aux représentations picturales de les instruire
et de les aider à méditer.
Les personnages devaient donc être facilement identifiables. Pour les distinguer, on avait
pris l’habitude de les représenter avec des symboles, généralement des objets, liés à leur
histoire ou à leur rôle. Ces symboles prennent le nom d’ « attributs ».
Dans l’œuvre de di Tommaso, sainte Catherine est ainsi représentée avec un livre, car elle
était réputée pour être très érudite, mais aussi avec une bague que lui passe le Christ
comme symbole de leur engagement mystique / spirituel. Sainte Catherine est d’ailleurs
souvent représentée avec cet anneau. Sur le panneau de droite, saint Dominique est
aisément identifiable à sa robe noire et la fleur de lis qu'il porte dans la main gauche.
Triptyque de Rimini , Francesco da Rimini ( ?)
Cette suite de panneaux fonctionne comme une bande dessinée, bien qu’elle soit
vieille de près de sept cents ans, et est à ce titre très originale.
Il s’agit d’un triptyque qui raconte en trois images les moments importants de la vie de
Jésus : sa naissance, sa crucifixion, sa résurrection.
Ces trois panneaux ne présentent cependant que l’essentiel : les personnages et l’action ;
rien ne détourne l’œil du spectateur du sujet que l’on veut montrer.
La taille des personnages peut sembler assez surprenante dans la mesure tous les
personnages sont tous au même niveau. Cependant, elle procède d’une réelle volonté de
l’artiste ; à la fin du Moyen Age, il s’agissait moins de représenter la réalité telle qu’elle
était que de représenter les choses et les personnages tels qu’on se les imaginait. En fait,
plus les personnages étaient grands, plus cela signifiait qu’ils possédaient autorité et
pouvoir.
La peinture révèle donc à quel point la société médiévale était hiérarchisée, l’Église étant
située au sommet de la pyramide.
Peintures de la Renaissance (second étage) :
La Renaissance naît et se développe à Florence au XVe siècle, notamment sous
l’influence de la famille Médicis.
Alors qu’au Moyen Age tout était subordonné à la religion, la Renaissance se présente
comme l’appropriation du monde par l’Homme. La Renaissance c’est un état d’esprit mais
c’est aussi une doctrine : l’humanisme l’homme se découvre capable d’agir sur son
environnement.
On redécouvre les textes de l’Antiquité considérée comme l’âge d’or de l’humanité. La
Renaissance artistique fait suite à la Renaissance philosophique, notamment par le biais
de l’architecture, la révolution de la peinture n’intervenant qu’après, grâce à des évolutions
techniques comme la mise au point de la technique de la peinture à l’huile vers 1470
(frères Van Eyck). Elle permet aux artistes de se perfectionner dans le rendu des matières
(les tissus, la peau, les cheveux, la lumière puis l’ombre à partir de Masaccio) et de
peindre sur un support différent : la toile (sur laquelle ne pouvait tenir la peinture a
tempera), moins lourde que le bois et moins longue à préparer.
Tous ces facteurs techniques et le contexte historique font évoluer la manière de
représenter. Les artistes cherchent de plus en plus à donner l’illusion du réel.
Les images commencent donc à ressembler de plus en plus à la réalité ; la peinture se
met à la dimension de l’Homme et perd de son aspect surnaturel.
La médecine, notamment par le biais de l’anatomie, fait d’incroyables progrès.
L’observation de la nature et de ses détails, de l’être humain, de son corps et de ses
gestes donne envie de les reproduire fidèlement.
La Vierge et l’Enfant soutenu par un ange , Sandro Botticelli
Un peintre a marqué l’histoire de la peinture et le passage à la Renaissance :
Sandro Botticelli. Son nom était Sandro di Mariano Filipepi. Il est à Florence en 1445.
Le surnom de botticello (qui veut dire « petit tonneau ») lui a certainement été donné par
son frère aîné à cause de sa petite taille et de ses rondeurs de jeunesse.
C’est dans l’atelier du peintre Fra Filippo Lippi que Botticelli est initié à la peinture. Il ouvre
finalement son atelier dans les années 1470. C’est à ce moment-là que Sandro Botticelli a
peint le tableau du Palais Fesch. Il s’agit donc d’un des premiers tableaux du peintre.
Par la suite, Botticelli reçoit les commandes des familles riches de Florence, en particulier
de la plus puissante d’entre elles : les Médicis. Il continue d’améliorer sa technique, il
cherche à cadrer différemment ses images, à utiliser encore plus la perspective, mais
aussi à multiplier les personnages dans ses panneaux.
Dans cette partie du parcours, il peut être demandé aux élèves de donner les
éléments de comparaison entre le Mariage mystique de sainte Catherine et le
tableau de Botticelli qui lui fait face, pour mieux comprendre ce qui distingue l’art
pictural du Moyen Age de celui de la Renaissance.
La Vierge Marie est ici représentée debout, en pied et de profil. Elle n’est plus
assise sur un trône comme une reine (Vierge en majesté).
Elle ne nous regarde même pas, elle ne cherche qu’à apporter son amour de re à son
enfant. L’enfant Jésus ne s’occupe pas plus du spectateur, son regard est dirigé vers sa
mère. Nous voyons donc que, par rapport aux Primitifs, les peintres du début de la
Renaissance s’attachent davantage à retranscrire les sentiments humains en jouant sur
l’expressivité du visage. Les personnages ne sont plus figés mais témoignent d’une réelle
humanité.
Ainsi, l’enfant n’est plus un adulte en miniature, mais est un véritable bébé. Nous voyons
qu’il est lourd, et un ange adolescent (sans doute Jean Baptiste), reconnaissable à ses
ailes en plumes de paon rehaussées d’or, est venu le soutenir.
La construction n’est plus tout à fait pyramidale mais presque diagonale, ovale, se
rapprochant de la mandorle.
Le décor en arrière-fond est tout à fait novateur et quelque peu énigmatique. Ici, pas de
fond d’or ni de paysage comme dans les autres tableaux de la salle, mais un jardin muré,
généralement associé à la pureté, la virginité de Marie. Le livre posé sur une table derrière
l’ange, s’il témoigne d’une maîtrise encore imparfaite de la perspective, est cependant
assez moderne.
La guirlande placée au-dessus de la Vierge est, elle aussi, tout à fait originale. En fait, il
semblerait que cette guirlande soit inspirée des guirlandes représentées sur les
sarcophages anciens. Ce détail n’en est donc pas un puisqu’il montre l’intérêt que portent
les hommes de la Renaissance, les humanistes, à l’Antiquité.
Le travail des détails, notamment la fluidité des drapés et la transparence des tissus,
témoigne, enfin, de l’évolution dans les manières de peindre.
Tout cela concoure à faire de l’œuvre de Botticelli l’une des œuvres majeures du Palais
Fesch ; elle incarne le passage de l’art du Moyen Age à celui de la Renaissance, un
moment de l’histoire qui se préparait depuis déjà quelques années.
L’humanisme conduit les peintres à aborder des sujets plus proches des
préoccupations humaines, donc plus variés. En plus de la peinture religieuse, ils illustrent
des épisodes de la vie des dieux grecs et romains (mythologie), peignent des natures
mortes (fruits, fleurs et objets) et des allégories (personnages représentant des idées, des
saisons, des vertus …), font également des portraits. Ainsi, c’est à la Renaissance que
naissent ce que nous nommons les genres picturaux, qui sont par ordre décroissant
d’importance : la peinture d’histoire (dont la peinture religieuse fait partie), le portrait, le
paysage, la scène de genre (ou peinture de genre), la nature morte.
Peintures vénitiennes (second étage) :
L’Homme au gant , Tiziano Vecellio, dit Titien
Dans le portrait de l’Homme au gant de Titien, on peut apprécier les nouvelles
façons de montrer les choses et les gens. Le portrait, né à Florence au XVe siècle, devient
un art de cour au XVIe siècle. Titien s’impose comme un portraitiste exceptionnel : ses
portraits mettent en évidence la psychologie, la personnalité du sujet.
En suivant l’exemple de Léonard de Vinci, de sa célèbre Joconde et de son sourire, Titien
travaille surtout sur les regards et l’expression, ce qui rend le personnage presque vivant.
Ce portrait nous donne l’impression que les yeux du jeune homme nous suivent dans nos
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