Chapitre II Surfaces et polyèdres Dans ce chapitre nous introduisons les objets principaux de notre étude : les surfaces discrètes ou polyédriques. Nous définirons les invariants géométriques, combinatoires et topologiques de base nous permettant de mieux comprendre et manipuler les surfaces, en prélude aux applications et constructions plus sophistiquées des chapitres qui suivent. Ces invariants s’avèrent remarquablement riches bien qu’élémentaires (notamment les courbures) comparés au cas des surfaces lisses, et leur compréhension ne requiert qu’une bonne vision dans l’espace et une connaissance de la géométrie euclidienne classique. Nous terminerons en traitant rapidement des problèmes de convergence et d’approximation. 1 Combinatoire des surfaces discrètes Définition 1. Une surface polyédrique abstraite ou surface discrète abstraite S (aussi appelée complexe cellulaire de dimension 2) est la donnée – d’un ensemble de sommets (vertices en anglais) V = V (S ) fini ou infini – d’un ensemble E = E (S ) d’arêtes (edges) formées de couples (non ordonnés) de sommets distincts, notées e = ( p 1 p 2 ) = ( p 2 p 1 ) ; cet ensemble est toujours supposé localement fini : tout sommet appartient à un nombre fini d’arêtes – d’un ensemble F = F (S ) de faces f = ( p 1 . . . p n ) où les p i sont des sommets distincts et ( p i p i+1 ) 2 E pour tout i = 1, . . . , n (avec la convention que p n+1 = p 1 de façon à obtenir une boucle 1 ) satisfaisant les conditions ci-dessous : en notant F p l’ensemble des faces contenant le sommet p, F e l’ensemble des faces contenant l’arête e et E p l’ensemble des arêtes contenant p, et |S | le cardinal d’un ensemble S , c-à-d le nombre de ses éléments, (A) tout sommet est l’extrémité d’au moins 3 arêtes (2 s’il est au bord) : |F p | 3 (|F p | 2 au bord) 1. Pour des raisons de simplicité on se limite aux faces simplement connexes, autrement dit polygonales, dont les arêtes du bord forment une seule courbe. 18 II. Surfaces et polyèdres (B) toute arête est incidente à 2 faces (une seule si l’arête est au bord) : |F e | = 2 (|F e | = 1 au bord) (C) toute face possède au moins 3 arêtes 2 (ou 3 sommets, ce qui revient au même) (D) pour tout sommet p, si les q i sont les sommets des faces contenant p ( p excepté) prises dans l’ordre, alors les arêtes ( q i q i+1 ) forment une courbe fermée, sauf quand p est sur le bord, auquel cas c’est la courbe formée des arêtes ( pq 1 ), ( q 1 q 2 ), . . . , ( q n°1 q n ), ( q n p) qui est fermée (E) les sommets et arêtes du bord forment une ou plusieurs courbes discrètes fermées. Définitions. Un sommet p est incident à une arête e ou une face f (noté p 2 e ou p 2 f ) si p est l’une des extrémités de l’arête e, ou l’un des sommets de f . De même une arête e est incidente à une face f = ( p 1 . . . p n ) si e est l’une des arêtes ( p i p i+1 ). On utilisera parfois appartenance pour signifier incidence. Deux sommets p, q sont voisins (ou adjacents) si ( pq) 2 E , ce qui est noté p ª q. Une courbe est une suite p 1 , . . . , p n de sommets voisins ; elle est dite fermée si elle forme une boucle, autrement dit si p n = p 1 . On parlera aussi de lacet. Cas particulier : une triangulation ou surface triangulée est une surface polyédrique dont les faces sont toutes triangulaires. Ce sont les surfaces les plus simples à obtenir et manipuler, mais pas nécessairement les plus simples géométriquement. Remarque 1. De même que la donnée des sommets ne suffit pas à déterminer une courbe discrète, les ensembles V et E ne suffisent pas à déterminer F . Par exemple, on peut retirer au cube (8 sommets, 12 arêtes, 6 faces) une face ou deux faces opposées, sans changer ni les sommets ni les arêtes (mais en créant des bords, voir ci-dessous). Note 1. On supposera que les surfaces considérées sont connexes, c-à-d que deux sommets quelconques de V peuvent toujours être reliés l’un à l’autre par un chemin (en général non unique). Si S n’est pas connexe, elle se décompose en plusieurs sous-parties connexes, elles aussi polyédriques, appelées composantes connexes. On partitionne naturellement V en sommets intérieurs/internes, dont l’ensemble sera noté V̊ , et sommets du bord ou externes/extérieurs, (ensemble V @ ) ; de même l’ensemble E des arêtes se compose des arêtes intérieures ou internes (sous-ensemble E̊ ) et des arêtes du bord ou externes (sous-ensemble E @ ). Une arête est intérieure si elle est incidente à deux faces, et extérieure si elle appartient à une seule. Un sommet p est intérieur (resp. extérieur) si |F p | = |E p | et extérieur si |F p | + 1 = |E p | ou, de façon équivalente, si p appartient à une arête externe. Le bord @S est constitué de la ou des courbe(s) polygonale(s) constitué des points de V @ reliés par les arêtes de E @ . La surface est un polyèdre si elle est finie et n’a pas de bord : @S = ?. 2. Cette hypothèse n’est pas cruciale, mais permet d’éviter certaines difficultés techniques, par exemple dans la définition de l’axiome (D). On verra des cas où elle n’est pas satisfaite, ce qui n’empêche pas la plupart des raisonnements. 1. Combinatoire des surfaces discrètes 19 q1 p1 p p2 q2 (a) (b) p3 q p1 p2 m q3 p q1 (c) q2 (d) F IGURE 1 – Exemples qui ne sont pas des surfaces discrètes. Dans (a) le sommet p contredit l’axiome A. Dans (b), les arêtes (p 1 q 1 ) et (p 2 q 2 ) sont respectivement incidentes à 0 et 1 face, ce qui contredit B, et p 1 , q 1 , q 2 contredisent A. Dans (c), que l’on doit imaginer en perspective dans l’espace, l’arête (pq) est incidente à 3 faces, contredisant B. La figure (d) représente deux tétraèdres tête-bêche, ce qui contredit D, car les sommets voisins de m forment deux courbes (p 1 , p 2 , p 3 ) et (q 1 , q 2 , q 3 ). On retrouve la notion habituelle de polyèdre avec la définition suivante : Définition 2. Une surface polyédrique de l’espace, dite aussi concrète, est la donnée d’une surface polyédrique abstraite et d’une application f : V ! R3 avec la condition suivante : les points d’une même face sont coplanaires et il existe dans ce plan un domaine borné polygonal connexe, d’aire non vide, dont le bord est l’union des arêtes ( f ( p i ), f ( p i+1 )) ; ce domaine sera identifié à la face. Les sommets de la face sont ceux du polygone, et de même pour les arêtes. L’idée derrière cette définition est que la surface de l’espace dicte la structure abstraite : les faces déterminent les sommets et les arêtes. Implicitement, cela exclut deux arêtes consécutives parallèles (c-à-d trois sommets consécutifs alignés), et à plus forte raison des arêtes de longueur nulle. De même, la face est d’aire non nulle pour éliminer les faces aplaties, et les arêtes ne se coupent pas. On se restreint souvent aux 20 II. Surfaces et polyèdres faces convexes, auquel cas chaque face est l’enveloppe convexe 3 de ses sommets. Le cas le plus connu de surface polyédrique concrète est celui des polyèdres convexes : ce sont les enveloppes convexes dans l’espace d’un ensemble fini de points (chaque face est convexe, mais on a mieux : le volume délimité par S est lui-même convexe). Pour une surface polyédrique de l’espace, la donnée des ensembles abstraits V , E , F est appelée la combinatoire de la surface, et elle détermine sa topologie, autrement dit sa structure à déformation continue près. Mais deux surfaces peuvent avoir une combinatoire identique et des géométries (aspects) très différentes. Il est intéressant de disposer d’une notion intermédiaire entre la surface abstraite et la surface concrète. Définition 3. Une immersion d’une surface abstraite S dans l’espace est une application f : V (S ) ! R3 , autrement dit prescrivant l’image P i de chaque sommet abstrait p i , telle que – l’image d’une arête ne soit jamais de longueur nulle : si ( p 1 p 2 ) 2 E alors P1 6= P2 ; – l’image d’une face ne soient jamais contenue dans une droite. En d’autres termes, f identifie les arêtes abstraites ( p 1 p 2 ) à des segments concrets de l’espace (P1 P2 ) qui ne doivent pas être de longueur nulle. Cela n’exclut nullement que f ( p 1 ) soit égal à f ( p 2 ) si p 1 et p 2 ne sont pas voisins, donc f peut ne pas être injective. La notion d’immersion tient compte des sommets et par conséquent des arêtes, mais oublie en partie les faces. De plus, rien ne garantit que les sommets soient coplanaires. Remarque 2. Les graphes sont des proches cousins des surfaces discrètes. Ils ne sont donnés que par un ensemble de sommets V et d’arêtes E , et a priori sans les conditions additionnelles que nous exigeons pour les surfaces. Par exemple, des sommets peuvent être isolés, deux sommets peuvent être reliés par plusieurs arêtes, voire un sommet relié à lui-même (si le graphe est réflexif). Les graphes englobent des situations beaucoup plus générales que les surfaces polyédriques, et ces dernières peuvent être vues comme des cas particuliers de graphes. Il n’y a pas par contre de notion immédiate de dimension car il n’y a pas de face 4 , par conséquent un grand nombre d’outils géométriques ou topologiques ne peuvent pas être définis à ce niveau de généralité (cf. le chapitre sur le calcul différentiel). De même les notions métriques (distance, angles, aires et courbures) sont moins naturelles 5 . Certains concepts présentés dans la suite seront applicables aux graphes (par exemple la caractéristique d’E ULER), d’autres seront spécifiques à la géométrie discrète, comme l’orientation. Enfin nous verrons comment parfois le raisonnement purement combinatoire de la théorie des graphes possède un équivalent géométrique, quand le graphe est une surface discrète munie d’une métrique appropriée dite métrique équilatérale. 3. L’enveloppe convexe d’un ensemble S est le plus petit convexe contenant S , c’est aussi l’ensemble des barycentres à coefficients positifs ou nuls de points de S . 4. Même si la notion de clique peut s’y substituer parfois. 5. On peut toutefois définir facilement une distance sur un graphe pondéré ou non, et des définitions pour la courbure ont été proposées (voir par exemple [LLY11, JL11]). On obtient logiquement des résultats plus généraux mais moins fins. D’une certaine façon, les graphes ressemblent aux espaces métriques (ce qu’ils sont d’ailleurs), là où les surfaces discrètes sont les analogues des surfaces différentielles. 2. Orientation et topologie 21 Nous utiliserons quelques définitions issues de la théorie des graphes : – Distance sur les graphes : la distance d ( p, q) entre deux sommets p, q d’un graphe est la longueur (c-à-d le nombre d’arêtes) du plus court chemin reliant p à q. Si le graphe est connexe, un tel chemin existe toujours, bien qu’il ne soit pas nécessairement unique. Deux sommets sont voisins s’ils sont à distance 1. – L’étoile d’un sommet p, notée star( p), est l’ensemble des arêtes et faces contenant p. – L’étoile d’une arête e est l’ensemble des faces et arêtes touchant e. – Si p est un sommet, son degré n (aussi appelé valence) est le nombre d’arêtes le contenant. – L’anneau en un sommet p de degré n est l’ensemble des n sommets situés sur les arêtes incidentes 6 à p ; l’anneau orienté est constitué des sommets rangés dans l’ordre induit par leur face commune avec p. Plus généralement l’anneau de p à distance d est l’ensemble des sommets situés à distance d de p, au sens de la distance des graphes. 2 Orientation et topologie Une arête e est un couple de sommets noté e = ( pq). Par convention, les couples ( pq) et ( q p) désignent la même arête e, mais si l’on prend en compte l’orientation (autrement dit le sens de parcours), alors on distinguera les deux arêtes orientées ( pq) et ( q p), ! = °° qui sont d’orientations opposées. Pour ce faire, on note l’arête ~ e=° pq q! p, ce qui correspond au vecteur le long de l’arête, quand S est une surface concrète. L’ensemble ~ . Selon le contexte, on utilisera des arêtes orientées ou des arêtes orientées est noté E non. On peut aussi orienter les sommets, simplement en leur affectant un signe positif ou négatif (ou ce qui revient au même une valeur +1 ou °1). Enfin une face est orientée par le choix d’un sens de parcours de ses sommets consécutifs ; il y a là encore deux orientations opposées possibles : ( p 1 p 2 . . . p n°1 p n ) et ( p n p n°1 . . . p 2 p 1 ), qui lui est opposée. ~ , celui des faces orientées F ~. L’ensemble des sommets orientés est noté V Une surface discrète S est dite orientée si 1. pour chaque face f , on s’est donné une orientation (parmi les deux possibles) ; l’orientation de f induit une orientation (un sens de parcours) sur chaque arête e de f ; 2. chaque fois qu’une arête e appartient à deux faces f 1 , f 2 (c-à-d toutes les arêtes sauf celles du bord), les deux orientations induites par f 1 et f 2 sont opposées. On dit alors que les orientations sur f 1 et f 2 sont compatibles. Une surface est orientable si elle possède une orientation (et donc forcément deux). On remarquera que l’orientation de S permet de choisir aussi un sens de parcours sur le bord de star( p). 6. Attention : si les faces ne sont pas triangulaires, l’anneau en p ne contient pas tous les sommets de l’étoile de p. 22 II. Surfaces et polyèdres p2 p2 p5 p3 p4 p1 p5 p3 p4 p1 (a) (b) F IGURE 2 – Orientations induites sur deux faces adjacentes. Dans le cas (a), les orientations (p 1 p 2 p 3 ) et (p 2 p 1 p 4 p 5 ) induisent deux orientations opposées sur l’arête (p 1 p 2 ), elles sont donc compatibles. Dans (b) au contraire, les orientations (p 1 p 2 p 3 ) et (p 1 p 2 p 5 p 4 ) = °(p 2 p 1 p 4 p 5 ) sont non compatibles. ! induit elle aussi une orientation sur les Remarque 3. Une arête orientée ~ e = ( pq) = ° pq deux sommets extrémités : par convention elle vaut +1 au point d’arrivée q et °1 au point de départ. L’interprétation de cette convention sera donnée dans le chapitre sur le calcul différentiel (§IV.1.1). Pour une surface polyédrique concrète de l’espace, l’orientation d’une face est ma~ orthogonal au plan de la face, et tel que le térialisée par un vecteur normal (unité) N nombre de rotation du bord de la face soit +1 (soit encore : la somme des angles de ! pointe vers l’intérieur ~ ^° rotation soit +2º). En pratique, il faut et il suffit que N p°i°p°i°+ 1 ° ° ° ° ° ! de la face, quelle que soit l’arête positivement orientée p i p i+1 . Notons que si la face est convexe (notamment un triangle), et p 1 , p 2 , p 3 sont trois points non alignés consécutifs ~ est un multiple positif de ° pris dans l’ordre, alors N p°1°p!2 ^ ° p°2°p!3 . Il faut se rappeler qu’il est très simple de construire des surfaces non orientables (discrètes ou continues), comme la plus célèbre, le ruban de M ÖBIUS (par contre, une surface non orientable ne pourra jamais border un solide de l’espace). Dans la suite toutes les surfaces considérées seront supposées orientées. Définition 4. La caractéristique d’E ULER de S est le nombre entier ¬ = |V |°|E |+|F |. Quand S est une surface sans bord, ¬ est paire, et on définit le genre comme l’entier g tel que ¬ = 2 ° 2 g. La caractéristique d’E ULER est un invariant combinatoire (ou topologique) de la surface polyédrique, au sens où il caractérise de façon très grossière la forme de la surface (abstraite). Deux surfaces ayant des invariants différents ne sont jamais équi2°¬ valentes 7 . Pour une surface sans bord, le genre g = 2 est le nombre de poignées de 7. Pour une définition rigoureuse il faudrait préciser de quelle équivalence il s’agit. Évidemment, deux combinatoires bijectives (c-à-d qu’il existe une bijection qui échange sommets, arêtes et faces) sont équivalentes, mais cette définition est trop restrictive. Une démonstration rigoureuse nous entrainerait trop loin, mais on peut au moins considérer que le raffinement d’une surface donne une surface équivalente : le découpage d’une 2. Orientation et topologie 23 cette surface, et plus généralement, pour une surface avec g poignées dont le bord se compose de r courbes, ¬ = 2 ° 2 g ° r . Une démonstration (partielle) de ce résultat est donnée en proposition IV.3. Noter que la caractéristique d’E ULER est aussi définie — différemment — pour les surfaces continues (voir [Mun84, Pha99], ainsi que http://www.ics.uci.edu/˜eppstein/junkyard/euler/ pour plus de détails). F IGURE 3 – Tétraèdre et cube. Leurs caractéristiques d’Euler respectives sont les mêmes : ¬ = 4 ° 6 + 4 = 2 et ¬ = 8 ° 12 + 6 = 2. Ce sont des polyèdres réguliers : le degré et le nombre de sommets par face sont constants, et la courbure combinatoire (voir ci-dessous) est constante égale à 1/2 pour le tétraèdre et 1/4 pour le carré. F IGURE 4 – Tore (genre 1 et caractéristique d’E ULER ¬ = 16 ° 32 + 16 = 0). Les faces sont toutes quadrilatérales et le degré des sommets est 4, donc la courbure combinatoire (voir définition 5) est constante égale à 0. Le premier invariant différentiel que l’on rencontre a été introduit par G ROMOV [Gro87] pour les graphes ; il s’applique donc aux surfaces polyédriques. Comme en géométrie continue, on retrouve un lien avec la topologie. face en plusieurs faces via l’ajout d’un sommet. Si la face de départ possède m côtés, alors V ! V + 1, E ! E + m et F ! F + m ° 1 (la face d’origine disparaissant), donc la caractéristique d’E ULER ne change pas. D’où l’idée de définir comme équivalentes des surfaces pouvant être raffinées jusqu’à posséder la même combinatoire. Clairement deux surfaces équivalentes doivent avoir la même caractéristique d’E ULER. Notons que l’opération inverse du raffinage (la fusion de deux faces adjacentes) ne change pas non plus la caractéristique d’E ULER. 24 II. Surfaces et polyèdres Définition 5. La courbure combinatoire en un point p d’une surface polyédrique est la grandeur d X 1 K ( p) = 1 ° + (1) 2 f 3p | f | où d est le degré de p, et la somme est prise sur toutes les faces f contenant p, | f | étant le nombre de côtés (ou de sommets) de la face f . Proposition 1. La somme des courbures combinatoires est égale à la caractéristique d’E ULER de la surface polyédrique. En particulier c’est un nombre entier. P P Démonstration. Clairement p2V 1 = |V | ; p2V d ( p) = 2|E | car chaque arête est comptée deux fois (une fois pour chaque extrémité). Enfin si l’on somme pour chaque sommet les faces adjacentes, chaque face va être comptée autant de fois qu’elle a des sommets, donc X X 1 X X 1 X = = 1 = | F |. | f | | f | p2V f 3 p f 2F p2 f f 2F Par conséquent X p2V K ( p) = X p2V 1° X X 1 1 X d ( p) + = |V | ° |E | + |F | = ¬(S ). 2 p2V p2V f 3 p | f | A priori, cette définition est purement combinatoire et non géométrique : elle n’utilise aucune notion de longueur, d’aire ou d’angle, et elle ne changerait pas si notre polyèdre concret était déformé en allongeant ou rétrécissant ses dimensions. Néanmoins il y a un lien avec la géométrie, voir la remarque 5 plus bas. Exercice 1. On dit qu’une triangulation est régulière si le degré est toujours égal à 6. Exprimer cette condition en fonction de la courbure combinatoire, et en déduire qu’il n’existe aucune triangulation de la sphère (¬ = 2) qui soit régulière : au moins un sommet est de degré inférieur à 6. Idem pour les quadrangulations (surfaces discrètes dont les faces ont toutes 4 côtés), qui sont régulières si le degré est 4. Exercice 2. Pour tout entier k, notons vk le nombre de sommets de degré k et wk le P P nombre de faces ayant k côtés. Alors |V | = k vk et |F | = k wk , donc la caractéristique d’E ULER est X X ¬ = vk ° |E | + wk . k k Montrer la formule de double comptage pour une surface sans bord : X k kvk = X k kwk = 2|E |. Elle est partiellement fausse si E @ 6= ? ; quelle est sa généralisation (en fonction de |E̊ | et |E @ |) ? 3. Géométrie intrinsèque : le défaut angulaire 25 En déduire que pour une surface finie sans bord dont les faces possèdent toutes n côtés, le degré moyen P k kv k d̄ = P k vk tend vers n2°n2 (qui n’est entier que si n 2 {3, 4, 6}), quand |V | tend vers l’infini. On notera que la formule est exacte (sans passage à la limite) quand ¬ = 0. En particulier on retrouve que le degré moyen pour une triangulation avec beaucoup de triangles est 6, et 4 pour une quadrangulation. 3 Géométrie intrinsèque : le défaut angulaire Munissons maintenant les surfaces discrètes d’une structure géométrique. Dans l’espace, les quantités géométriques naturelles, appelés invariants, d’une surface polyédrique sont les longueurs et les angles à l’intérieur des faces. Pour une surface concrète, ils se déduisent évidemment des positions des sommets et de la combinatoire ; néanmoins les positions ne sont pas invariantes par un déplacement isométrique (translation, rotation ou symétrie), contrairement aux longueurs et angles mesurés dans les faces. Ces derniers déterminent la géométrie intrinsèque de la surface : tout ce qui peut être mesuré sur la surface indépendamment de la façon dont elle se place dans l’espace (et qui peut même être défini pour une surface abstraite). Les angles diédraux (voir ci-dessous) au contraire expriment sa géométrie extrinsèque, à savoir la façon dont elle est positionnée dans l’espace. Notons que deux surfaces peuvent posséder la même géométrie intrinsèque — on dit qu’elles sont isométriques — sans pour autant être congruentes, c-à-d image l’une de l’autre par une isométrie de l’espace. On munit une surface polyédrique abstraite d’une géométrie intrinsèque, aussi appelée structure métrique ou simplement métrique, en identifiant chaque face à une face du plan. Par exemple une face à trois sommets ( p 1 p 2 p 3 ) est identifiée métriquement à un (vrai) triangle (P1 P2 P3 ) du plan, et hérite de ses invariants métriques : la longueur p 1 p 2 est égale à P1 P2 , l’angle ( p 1 p 2 p 3 ) est égal à (P1 P2 P3 ) etc. Naturellement, si la surface est en fait concrète (elle vit dans l’espace), cette identification entre faces est automatique (et implicite). Cette identification obéit à une seule exigence : la longueur d’une arête doit être la même dans les deux faces la contenant. Notons en passant qu’un triangle est entièrement déterminé par les longueurs de ses côtés 8 donc les angles aux sommets sont inutiles et il en va de même pour toute surface triangulée. Par contre ce n’est pas vrai pour des polygones plus généraux. Exemple 1. Dans la métrique équilatérale, chaque face est identifiée à un polygone régulier dont les arêtes sont de longueur 1. L’angle Æ f ( p) que fait la face f en le sommet p est par conséquent º ° 2nº si la face f possède n côtés (cf. corollaire A.1 en annexe). La distance induite par la métrique équilatérale est la distance des graphes, et cette métrique reflète essentiellement la combinatoire du graphe (voir plus bas la remarque 5). 8. À réflexion près, ce qui ne joue pas de rôle ici. 26 II. Surfaces et polyèdres Avec le concept de métrique arrivent aussi deux notions de distance 9 . Une première distance d ( p, q) entre deux sommets de V est définie comme la longueur du plus court chemin reliant p à q : si ∞ = ( p 0 , p 1 , . . . , p n ) est un chemin reliant p = p 0 à q = p n , alors la longueur de ∞ est la somme des longueurs p i p i+1 des arêtes successives : `(∞) = nX °1 i =0 p i p i+1 . Comme S est connexe un tel chemin existe toujours, et d ( p, q) est par définition la borne inférieure des longueurs de ces chemins. Quand S est finie, ou infinie mais localement finie et de longueur minorée, la borne inférieure existe et est clairement strictement positive (si p 6= q). Si S est infini, la distance est a priori un infimum, mais les hypothèses ci-dessus garantissent que l’infimum est atteint, bien que plusieurs chemins distincts puissent le réaliser (voir exercice 3 ci-dessous). Dans le cas de la métrique équilatérale, on retrouve la distance habituelle sur les graphes. On peut aussi définir une distance intrinsèque (non combinatoire) en considérant la surface S comme pleine, autrement dit en prenant aussi en compte les points à l’intérieur des faces. On peut alors encore tracer des chemins entre deux points p et q, qui ne sont plus nécessairement des sommets, constitués de courbes tracées successivement sur chaque face. La distance est alors l’infimum de des longueurs de tous ces chemins. On est alors dans le cadre de la géométrie riemannienne sur une surface localement plate à singularités coniques. Exercice 3. Montrer que si S est une surface discrète infinie munie d’une métrique, mais localement finie et dont les arêtes sont de longueur minorée, alors l’infimum de la distance entre deux sommets est atteint par un chemin. On supposera, par l’absurde, qu’il existe une suite (∞n ) de chemins de longueurs décroissantes avec `(∞n ) ! d ( p, q), et on montrera que l’on peut fixer le premier point du chemin (après p). Montrer alors que le nombre de sommets de ces chemins est majoré et conclure. Dès que S est munie d’une métrique, on peut calculer des longueurs et des angles à l’intérieur de chaque face par identification avec le plan. Il est aussi possible de travailler avec deux faces adjacentes : tout se passe comme si l’union des deux faces était un polygone du plan formé des deux polygones correspondants, quitte à déplacer l’un des polygones pour le recoller le long de l’arête commune 10 . C’est l’opération 9. Le lecteur notera l’ambivalence du mot « métrique », parfois synonyme de distance ; dans cet ouvrage, nous emploierons « métrique » comme en géométrie différentielle, comme une façon de mesurer les longueurs et les angles. 10. Deux problèmes se posent : (i) les polygones images recollés peuvent se superposer ailleurs que le long de l’arête commune et (ii) il peut y avoir plusieurs arêtes communes. Le dépliage donnerait alors une fausse image. Le cas (i) est visuellement gênant, mais ne change rien à la structure sous-jacente ; il se traite en considérant différemment un point selon qu’il est issu d’une face ou de l’autre (c’est le principe des immersions, et plus généralement des revêtements, cf. §IV.3.3). Le cas (ii) est visuellement cohérent, mais implique une combinatoire parfois plus complexe. On l’évite en imposant que la surface soit quasi-convexe : deux faces ne possèdent au plus qu’une arête commune. On peut écarter ces deux problèmes en ne travaillant qu’avec des faces convexes. 3. Géométrie intrinsèque : le défaut angulaire 27 dite de dépliage : voir la figure 5 pour un exemple de dépliage de trois faces d’un tétraèdre. Il faut noter qu’on ne peut pas en général déplier autant de faces que l’on veut et garder collées toutes les arêtes, sauf dans le cas trivial d’une surface plane. Ces obstructions au dépliage viennent de la topologie/combinatoire (un cylindre n’est pas dépliable globalement, bien qu’il soit plat) ou de la géométrie (un carré privé d’une face est topologiquement identique à un disque, mais la courbure de ses sommets empêche de le déplier). L’invariant géométrique mesurant l’obstruction locale au dépliage est la courbure gaussienne, incarnée par le défaut angulaire. Définition 6. Soit p un sommet, Æ1 , . . . , Æn les angles en p des faces contenant ce sommet (aussi notés Æ f ( p) pour la face f ). On suppose la surface orientée, donc ces angles sont mesurés par rapport à cette orientation. L’angle total au sommet p est la somme X X µ ( p) := Æ i = Æ f ( p) i f 3p et le défaut angulaire en p (vertex angle excess) est Æ( p) := p f3 Ω 2º ° µ ( p ) º ° µ ( p) si p est intérieur si p 2 @S Æ p Æ3 Æ3 Q Æ1 f1 f3 Æ2 f2 Æ1 f1 Æ2 f2 F IGURE 5 – Dépliage d’un tétraèdre (privé de sa face inférieure) autour du sommet p. La face f 3 est située derrière le tétraèdre. Le dépliage se fait le long des arêtes f 1 \ f 2 et f 2 \ f 3 et la découpe le long de l’arête f 1 \ f 3 (symbole Q). Au sommet p, le défaut angulaire Æ = 2º ° Æ1 ° Æ2 ° Æ3 mesure ce qui manque au tétraèdre déplié pour faire un tour complet. Le nom de défaut angulaire vient de ce que Æ = 0 si et seulement si la surface est plane en p ; on parle alors de sommet euclidien. L’étoile d’un sommet euclidien est dépliable à plat (et réciproquement). Si Æ < 2º (resp. Æ > 2º) le sommet est dit sphérique (resp. hyperbolique). Si par exemple la surface est strictement convexe alors Æ < 2º (mais la réciproque est fausse : attention aux plis), et si elle est en forme de selle, Æ > 2º. Par contre le défaut angulaire ne fait pas la différence entre angle rentrant et angle saillant (voir plus bas en page 34, l’angle diédral). 28 II. Surfaces et polyèdres f3 f2 f1 Æ1 µ f1 Æ2 Æ1 ∞ Æ2 ∞ q f2 Æ q F IGURE 6 – En un sommet q du bord ∞ d’un tétraèdre privé de sa face inférieure, on détermine les angles aux faces Æ1 , Æ2 et l’angle total µ = Æ1 + Æ2 en dépliant sur un plan le long de l’arête commune f 1 \ f 2 . Le défaut angulaire Æ = º ° µ mesure alors l’angle de rotation de la courbe par rapport à un trajet rectiligne, autrement dit la courbure géodésique. En géométrie différentielle continue, la courbure gaussienne classique est infinie au sommet (c’est un Dirac au sens de la théorie de la mesure), mais l’intégrale de la courbure est finie et est mesurée justement par le défaut angulaire. En ce sens, le défaut angulaire est une quantité intégrale et non une courbure ponctuelle. On obtient le défaut angulaire Æ comme mesure de la courbure gaussienne en appliquant la formule de G AUSS–B ONNET à star( p), dont le bord est la courbe ∞ passant par q 1 , . . . , q n . En effet, notons '° , '+ les deux angles en q i des bords de star( p), alors la face ( pq i q i+1 ) i i aura comme angles Æ i , '+ , '° . Le théorème de G AUSS–B ONNET A.6 appliqué à star( p) i +1 i donne Æ( p) = courbure totale de star( p) = 2º ° courbure géodésique totale de la courbe ∞ or ∞ est rectiligne par morceaux donc sa courbure ne vient que des changement de directions aux arêtes, qui valent chacun º ° '° ° '+ (pour s’en convaincre mettre les i i faces à plats : dans un plan la seule courbure est la courbure géodésique). Par conséquent Z X X X + + K = 2º ° (º ° '° (º ° '° Æi = Æ i ° ' i ) = 2º ° i °1 ° ' i ) = 2º ° star( p) i i i ce qui montre bien que le défaut angulaire est une quantité intégrale. Remarque 4. Le calcul ci-dessus est fait dans le cas où star( p) est composé de triangles, mais de fait la présence de polygones plus compliqués ne change rien. En effet on peut raffiner la triangulation en découpant chaque face contenant p en un triangle et une face complémentaire. L’apport de ces faces complémentaires à la courbure en p est nul. 3. Géométrie intrinsèque : le défaut angulaire 29 On peut alors définir la courbure gaussienne au sommet p comme K ( p) = 3Æ( p) aire(star( p)) (2) obtenant ainsi une quantité homogène de degré °2. Le facteur 3 est relativement arbitraire, et correspond au point de vue suivant, consistant à « diffuser » la courbure sur les faces, dans le cas d’une surface triangulée. En effet on peut dans ce cas définir une fonction continue K sur les faces par interpolation linéaire entre les valeurs fixées aux sommets par (2) aux sommets, alors le facteur 3 garantit que la formule de G AUSS– B ONNET reste vraie. On notera néanmoins que cette quantité n’est pas forcément cohérente avec le modèle continu, voir la section §6. Note 2. Le défaut angulaire est aussi appelé courbure concentrée ou distorsion discrète en un sommet (voir [MDFP08]), et peut se généraliser à des dimensions supérieures. Comme en géométrie continue, on peut énoncer un lien entre courbure locale et combinatoire (lien en fait historiquement antérieur). Théorème 1. (Formule de G AUSS–B ONNET simpliciale) Sur une surface polyédrique S finie Z X Æ( p) = K d A = 2º¬(S ) = 2º(|V | ° |E | ° |F |). S p2V De façon équivalente, en notant V @ l’ensemble des points du bord et V̊ = V ° V @ l’ensemble des sommets intérieurs, il vient donc, X X (2º ° µ ( p)) + (º ° µ ( p)) = 2º¬(S ) (3) p2V @ p2V̊ où µ ( p) l’angle total au sommet p. Démonstration. On peut évidemment se reporter au théorème de G AUSS–B ONNET A.6 mais une démonstration directe et plus élémentaire est possible. Supposons pour commencer que la surface S n’ait pas de bord, alors X X X X Æ( p) = (2º ° µ ( p)) = 2º|V | ° Æ f ( p) p2V p2V p2V f 3 p où Æ f est l’angle en p de la face f . Soit | f | le nombre de sommets (ou d’arêtes) de la face f , X X X X X Æ f ( p) = Æ f ( p) = (| f | ° 2)º p2V f 3 p P f 2F p2 f f 2F en utilisant le corollaire A.1. Enfin f | f | compte les arêtes deux fois (une pour chaque face). Par conséquent X X Æ( p) = 2º|V | ° (| f | ° 2)º = 2º|V | ° 2º|E | + 2º|F | = 2º¬(S ). p2V f 30 II. Surfaces et polyèdres Si maintenant S possède un bord, le raisonnement fonctionne à ceci près que les arêtes du bord n’appartiennent qu’à une face donc ne seront comptées qu’une fois. Notons donc E @ l’ensemble des arêtes du bord et E̊ = E ° E @ . Alors X p Æ( p) = X p2V̊ (2º ° µ ( p)) + X p2V @ (º ° µ ( p)) = 2º|V̊ | + º|V @ | ° X X = 2º|V̊ | + º|V @ | ° = 2º|V̊ | + º|V @ | ° (2|E̊ | + |E @ |)º + 2º|F | = f 2F p2 f (| f | ° 2)º X X p2V f 3 p Æ f ( p) 2º(|V̊ | ° |E̊ | + |F |) = 2º(|V | ° |E | + |F |) où l’on se sert deux fois du fait que |V @ | = |E @ |. Voir [Res93, PS06] pour plus de détails sur cette démonstration. Remarque 5. Il y a un lien fort entre le défaut angulaire et la courbure combinatoire définie plus haut (définition 5). En effet si l’on se donne une surface polyédrique abstraite, et que l’on fixe comme métrique la métrique équilatérale (définie en §1), alors la courbure Æ( p) combinatoire en p est égale à 2º . En effet, si une face f contenant p est un polygone régulier à | f | côtés, alors l’angle en p est º ° 2| fº| (corollaire A.1). Sommons en distinguant deux cas : – si p est un point intérieur, le nombre de faces en p est égal au nombre d’arêtes le contenant (autrement dit le degré) : |F p | = |E p | = d ( p) donc √ ! µ ∂ X 1 2º d Æ( p) = 2º ° µ ( p) = 2º ° º° = 2º 1 ° + = 2ºK combinatoire |f | 2 f 2F p | f | f 2F p X – si p est sur le bord, |F p | = d ° 1 et √ ! X 1 1 d °1 Æ( p) = º ° µ ( p) = 2º ° + = 2ºK combinatoire . 2 2 f 2F p | f | Dans ce cas (et dans ce cas uniquement) le défaut angulaire d’une surface polyédrique est égal à 2º fois la courbure combinatoire. La proposition 1 est donc une conséquence du théorème 1 et sa démonstration est en fait un cas particulier de celle du théorème. 4 Courbure géodésique La formule de G AUSS–B ONNET indique clairement que le bord de S joue un rôle particulier. Dans le cas continu (voir A.6) on fait la somme de l’intégrale (de surface) de la courbure gaussienne sur S et l’intégrale (curviligne) le long de la courbe @S du bord d’une quantité appelée courbure géodésique. Il est utile de généraliser cette courbure au cas d’une courbe ∞ tracée sur S (qui n’est plus nécessairement la courbe du bord). La courbure géodésique mesure la déviation de ∞ par rapport à la « ligne droite », le concept de ligne droite étant généralisé en géométrie différentielle par celui 4. Courbure géodésique 31 de géodésique, autrement dit, de plus court chemin entre deux points. Cette définition est claire et solide mais nécessite un bagage technique relativement important (qui peut néanmoins être simplifié pour les courbes et surfaces de l’espace, voir annexe §A.2.3). En particulier, il y a localement une unique géodésique entre deux points d’une surface. Dans le cas discret la situation est différente. On définit une courbe tracée sur une surface polyédrique S comme une suite d’arcs tracés chacun sur une face et recollés par continuité. Trois niveaux de généralité sont possibles, par ordre de simplification croissante : 1. la restriction de la courbe à chaque face est un arc régulier du plan reliant deux points du bord de la face, et la tangente à l’arc possède une limite aux extrémités ; 2. idem, mais l’arc est un segment (par conséquent la limite aux extrémités existe trivialement) ; 3. la courbe est composée d’une succession d’arêtes de S (cas d’un bord comme ci-dessus). L’étude de la courbe à l’intérieur d’une face relève de la géométrie différentielle plane classique (cf. annexe). On sait par exemple qu’un plus court chemin sera forcément rectiligne à l’intérieur d’une face, autrement dit ce sera un segment. La nouveauté en géométrie discrète vient des transitions entre faces. Deux possibilités existent, selon que le point de raccord se situe le long d’une arête ou en un sommet. Si la courbe traverse une arête entre les faces f ° , f + (mais pas un sommet), tout se passe comme si l’arête ~ ° le était dépliée. La courbe est alors dite rectiligne si sa version dépliée l’est. Notons T + ~ vecteur tangent limite sortant à la fin de l’arc ∞° = ∞ \ f ° et T le vecteur tangent limite entrant au début de l’arc ∞+ = ∞ \ f + . Alors on dira que la courbe se poursuit de façon ~ ° ,~e) et (T ~ + ,~e) sont identiques, où ~e est un vecteur directeur de régulière si les angles (T 11 l’arête (peu importe son sens) . De façon générale la courbure géodésique au point p où ∞ traverse l’arête est ~ + ,~e) ° (T ~ ° ,~e) ∑ g ( p) = (T ~ ° ,~e) soit positivement orienté dans et cette fois-ci le sens de ~ e est choisi de sorte que (T la face f ° . On peut aussi mesurer cet angle en prenant l’angle ' entre ∞° et ∞+ mesuré dans le dépliage, ou bien en additionnant les angle entre ∞° et les arêtes successives, jusqu’à ∞+ , en tournant dans le sens positif. Alors ∑ g ( p ) = ' ° º. Le point p de la courbe ∞ sera dit régulier si ∑ g ( p) = 0 et anguleux sinon. Si la courbe ∞ passe par un sommet p 2 V il devient délicat de définir la courbure géodésique car aucun dépliage ne convient (sauf dans le cas exceptionnel d’un sommet euclidien où Æ( p) = 0). Pour une courbe générique, passer par un sommet est rare (cela n’arrive presque jamais au sens de la mesure), mais à l’inverse, pour une courbe constituées d’arêtes, les sommets de la courbe sont systématiquement des sommets de la surface. Cette difficulté de définition entraine une réelle différence entre le cas discret 11. Remarquons que ce critère est bien intrinsèque, même si on peut l’appliquer à une surface concrète de ~ +, T ~ ° ,~e n’ont plus la même interprétation mais les angles sont inchangés. l’espace ; les vecteurs T 32 II. Surfaces et polyèdres et le cas continu : dans le cas discret, on perd l’unicité locale des plus courts chemins quand on passe par un sommet. Autrement dit (i) on n’a plus nécessairement un plus court chemin unique, reliant deux points à proximité d’un sommet et (ii) une ligne droite partant d’un point et passant par un sommet peut être prolongée par une infinité de lignes droites au delà du sommet (ce qui est impossible en géométrie différentielle classique). On peut résoudre en partie cette difficulté en séparant le concept de géodésique (au sens de ligne droite 12 ) de celui de plus court chemin, comme le proposent P OLTHIER & S CHMIES dans [PS06]. Ils définissent la courbure géodésique discrète de ∞ en un sommet p de la manière suivante. Soit µ l’angle total en p, et ' l’angle intrinsèque ~ ° ) et T ~ + , mesuré sur la surface en additionnant les angles successifs entre le entre (°T segment ∞° = ∞ \ f ° et les arêtes avoisinantes, jusqu’à ∞+ = ∞ \ f + . Il y a deux façons de faire le tour du sommet p, nous choisirons de tourner dans le sens positif autour de p, c-à-d en partant à droite de ∞ (par rapport à sens de ∞). Notons que la somme des angles dans l’autre sens est égale à Ø = µ ° ' par définition de l’angle total. Alors ∑ g ( p ) := µ ∂ 2º µ '° µ 2 est la courbure géodésique discrète. En particulier elle est nulle si ' = µ /2, autrement dit si ' = µ ° ' = Ø : l’angle (∞° , ∞+ ) est le même mesuré dans un sens ou dans l’autre. En ce sens, une courbe de courbure géodésique nulle adopte la position la plus symétrique possible. Si ∑ g s’annule, ∞ est dite régulière, sinon elle dite anguleuse, et l’on mesure alors sa déviation par rapport à la ligne droite, normalisée sur 2º. On récupère alors la propriété d’unicité du prolongement, mais on perd a priori toute notion de plus court chemin. Notons enfin aussi que si le point est euclidien, Æ( p) = 0, µ ( p) = 2º et l’on retombe sur le cas précédent : ∑ g ( p) = ' ° º. Remarque 6. Il faut noter que les courbures géodésiques définies ci-dessus sont en fait des quantités intégrales, comme c’est le cas pour les points anguleux d’une courbe du plan. Une définition plus rigoureuse et plus générale (mais abstraite) associerait à ∞ une mesure µ comprenant une partie densité ∑ g ( s)d s, égale à la courbure géodésique différentielle habituelle sur chaque face, sauf peut-être en quelques points anguleux, et des mesures de D IRAC en chaque point anguleux, qu’il soit à l’intérieur d’une face, sur une arête ou en un sommet. En intégrant il viendra donc Z ∞ µ= nX °1 Z p i+1 i =0 p i ∑ g ( s)d s + nX °1 i =1 ∑ g ( p i ). Dans la plupart des cas les courbes seront rectiligne à l’intérieur de chaque face, par conséquent il n’y aura aucune contribution de type intégral, mais seulement des sommes d’angles. 12. Appelée « géodésique la plus droite » (straightest geodesic) par P OLTHIER & S CHMIES, pour la distinguer des autres concepts de géodésiques. 5. Géométrie extrinsèque 33 Nous pouvons revisiter la formule de G AUSS–B ONNET en cherchant l’analogue plus précis du cas continu Z Z KdA + ∑ g d s = 2º¬(≠) ≠ @≠ dans le cas où ≠ est un sous-domaine strict. Cela permet de traiter le cas d’un domaine ≠ Ω S polyédrique union de faces de S . Son bord orienté @≠ sera représenté par une 13 courbe ∞ et on suppose que @≠ \ @S = ? (par exemple si @S = ?). La formule de G AUSS– B ONNET reste vraie en corrigeant le terme d’intégrale de la courbure gaussienne (autrement dit le défaut angulaire) près du bord de ≠, pour tenir compte de ce que le domaine d’intégration ne couvre pas toutes les faces de S mais seulement celles de ≠. On a alors [PS06] : Théorème 2 (Formule de G AUSS–B ONNET simpliciale avec courbure géodésique). Notons Æ≠ le défaut angulaire restreint à ≠ défini par Æ≠ ( p) = ( 2º ° µ ( p) Ø( p) (2º ° µ ( p)) µ ( p) ˚ si p 2 ≠ si p 2 @≠ où µ ( p) est l’angle total en p (lié à la géométrie de S ) et pour p 2 @≠, Ø( p) est la somme des angles en p des faces de ≠. Alors X p2≠ Æ≠ ( p) + X @≠ ∑ g ( p) = 2º¬(≠). Démonstration. La démonstration part de la formule de G AUSS–B ONNET (3) qui reste applicable à ≠ (indépendamment de S ). Pour la partie intérieure à ≠, Æ≠ = Æ donc les contributions sont identiques. Pour ce qui est du bord, ce qui dans (3) est l’angle total au bord µ ( p) est ici remplacé par Ø( p). Or Ø n’est autre que le complément de l’angle de rotation de la courbe bord ∞ : Ø = µ ° '. Il vient alors Æ≠ + ∑ g = µ ∂ 2º µ (2º ° µ ) + '° = º ° (µ ° ') = º ° Ø µ µ 2 µ°' ce qui est exactement le terme de bord dans (3). 5 Géométrie extrinsèque Nous allons maintenant analyser la façon dont une surface discrète concrète est positionnée dans l’espace (sa géométrie extrinsèque) et le lien entre cell-ci et sa géométrie intrinsèque, via le polygone de G AUSS. 13. On parle toujours du bord comme d’une seule courbe, mais il y peut y en avoir plusieurs. Le raisonnement ne supposant pas la connexité de ∞, peu importe en fait qu’il y ait une composante ou plusieurs, et une courbe de bord ou plusieurs. 34 II. Surfaces et polyèdres L’angle diédral Considérons une arête e = ( pq) appartenant à deux faces orientées ~ f1, ~ f 2 . À cause de la compatibilité, l’orientation de chaque face induit une orientation sur e, et ces deux ! et ~ orientations sont opposées : on les note ~ e1 = ° pq e 2 = °~ e1 = ° q! p. On peut aussi définir les vecteurs directeurs unitaires orientés des arêtes par ~ ui =~ e i /k~ e i k. Dans chaque face ~ f i on définit alors le vecteur conormal (ou conormale) ~ n i , perpendiculaire à ~ u i et orienté de telle sorte que (~ ui ,~ n i ) soit une base orthonormale directe de f i (en pratique on notera que la conormale ~ n i est orientée vers l’intérieur de la face, et ce, quelle que soit l’orientation de celle-ci). On définit par la même opération la normale (ou vecteur ~ i à la face ~ ~ i := ~ ~ i définit un normal) N f i par N ui ^ ~ n i . Réciproquement, la normale N sens de rotation dans la face (règle du tire-bouchon) donc un ordre sur les sommets, et ~ i ^~ ~ ni = N ui. ~1 N f1 q ~ n1 ~ n2 ~2 N p f2 ~ 1, N ~ 2 et les conormales F IGURE 7 – Deux faces adjacentes f 1 , f 2 , avec leurs normales N ~ n1 , ~ n 2 le long de l’arête commune. ~ 1, N ~2 Rappelons que l’angle diédral µ de deux plans orientés dont les normales sont N ~ 1, N ~ 2 ), donné par cos µ = N ~1·N ~ 2 (défini donc modulo 2º, mais au est l’angle non orienté ( N signe près). On définit de façon analogue l’angle entre deux faces adjacentes orientées, de mesure µ 2 [°º, º] avec µ = 0 si et seulement si les faces sont coplanaires. Mais dans ce cas, on donne à l’angle une orientation (c-à-d que µ donne une configuration différente de °µ ). L’angle sera choisi positif si le secteur est saillant (par rapport aux orientation des faces : les normales sont réputées partir vers l’extérieur 14 ) et négatif si rentrant. Une façon de calculer cela est de considérer sur l’arête e le vecteur directeur ~ u 1 orienté ~ 1 . Comme ~ ~1 par la première face f 1 , dont le vecteur normal est N u 1 est orthogonal à N ~ 2 , il définit une orientation sur le plan ( N ~ 1, N ~ 2 ), ce qui permet de donner un signe à et N ~ 1, N ~ 2 ). En pratique : l’angle ( N ~ 2 = cos µ N ~ 1 + sin µ~ ~1 N u1 ^ N ce qui équivaut à la réciproque ~ 1 = cos µ N ~ 2 ° sin µ~ ~ 2 = cos µ N ~ 2 + sin µ~ ~2 . N u1 ^ N u2 ^ N 14. Si on change l’orientation de la surface, les angles diédraux changent donc de signe. (4) 5. Géométrie extrinsèque 35 On voit immédiatement que cet angle (avec son signe) ne dépend pas de l’ordre dans lequel on prend les faces : l’angle diédral des faces f 1 , f 2 est le même que celui des faces ~ 1 et N ~ 2 sont échangés et ~ f2, f1 (N u 1 est remplacé par ~ u 2 = °~ u 1 ). ~1 N ~ n1 f1 µ ~ u1 ~2 N ~ n2 f2 ~2 N ~ n1 ~1 N ~ n2 µ f1 (a) f2 ~ u1 (b) F IGURE 8 – Deux cas de figure pour l’angle diédral : (a) saillant : µ > 0, (b) rentrant : ~ 1 et µ < 0. Les deux faces sont vues de profil, dans le plan contenant les normales N ~ 2 et les conormales ~ N n1 , ~ n 2 orientées vers l’intérieur des faces. Leur perpendiculaire commune, ~ u 1 est orthogonale au plan du dessin et fuyante. On peut aussi définir la normale le long de l’arête ~ ~ ~ ~ ~ e = N1 + N2 = N1 + N2 · N ~ ~ 2 cos µ2 k N1 + N2 k Remarquons que si les deux faces adjacentes ne sont pas coplanaires, le vecteur ~ u 1 est défini au signe près comme le vecteur directeur unité de la droite d’intersection des ~ ? et N ~ ?. plans N 1 2 Polygone de G AUSS On peut aussi comprendre la courbure gaussienne grâce au polygone de G AUSS qui est le polygone sphérique (voir annexe B) construit de la façon suivante. À chaque ~ f à la face ; deux points face f on associe le point de la sphère donné par la normale N ~ ~ N1 , N2 sur la sphère seront reliés par une arête (sphérique, c-à-d un arc de grand cercle), si les deux faces correspondantes sont adjacentes. (On peut aussi voir ce polygone comme un polyèdre sphérique dans l’espace, en rajoutant des faces : chaque face sphérique correspond à un sommet de la surface originelle. Voir pour cela la notion de graphe dual §IV.1.3). Comme nous travaillons localement, nous n’aurons besoin que du polygone de G AUSS P en un sommet p qui contient les normales aux faces de l’étoile de p. Pour simplifier les notations, nous allons supposer que les faces sont triangulaires, mais la construction s’étend sans difficulté à des faces quelconques. Soit q 1 , . . . , q n les sommets de l’anneau en p, pris dans l’ordre induit par l’orientation. On note ~ ai = ° °! pq i ° °!k k pq i les vecteurs unités ~ i le vecteur normal à la face orientée ~ partants de p le long des arêtes et N f i = ( pq i q i+1 ) ; ~ par conséquent (~ ai ,~ a i+1 , N i ) est direct. L’angle Æ i au sommet satisfait cos Æ i = ~ ai ·~ a i+1 36 II. Surfaces et polyèdres et plus précisément ~ i ^~ ~ a i+1 = cos Æ i ~ a i + sin Æ i N ai (5) ~ i+1 = cos µ i+1 N ~ i ° sin µ i+1~ ~i N a i+1 ^ N (6) tandis que la géométrie extrinsèque est décrite par où µ i+1 est l’angle diédral de l’arête ( pq i+1 ) (le signe négatif venant de ce que ~ a i+1 a l’orientation opposée à celle induite par f i ). ~2 N ~4 N ~1 N Æ4 ~3 N Æ1 p Æ2 Æ3 ~1 N ~4 N ~3 N O ~2 N ~ i à chaque face, F IGURE 9 – Étoile d’un sommet p de degré 4 avec vecteurs normaux N ~ et polygone de G AUSS associé, dont les sommets sont les vecteurs N i . Les angles Æ i que font les faces au sommet p se retrouvent comme angles de rotation du polygone sphérique. ~ iN ~ i+1 ) est exactement |µ i+1 |. On remarquera que la longueur de l’arc sphérique ( N ~ ~ Cet arc est la partie d’extrémités N i , N i+1 du grand cercle intersection de la sphère ~ i, N ~ i+1 ) = ~ unité avec le plan orienté (O, N a? . Enfin le polygone sphérique P est le bord i +1 2 d’une face de S (qui — contrairement à un polygone plan — ne peut être déterminée par la simple donnée du polygone). Cette face est fixée en demandant que chaque ~ ai ~ i°1 N ~ i ). L’angle de rotation au sommet N ~ i entre les pointe vers l’extérieur de l’arc ( N ~ i°1 N ~ i ) et ( N ~ iN ~ i+1 ) est mesuré par la rotation entre les plans ~ deux arcs successifs ( N a? i ? et ~ a i+1 , autrement dit l’angle (~ ai ,~ a i+1 ) dans le plan orienté par leur normale commune ~ i : c’est Æ i . (Accessoirement, on a donc que l’angle au sommet N ~ i est Ø i = º ° Æ i .) Le N ~ 1, . . . , N ~ n du polygone de théorème de G AUSS-B ONNET nous donne pour la face f p = N G AUSS : 2º = aire( f p ) + Par conséquent, X i Æi . Proposition 2. Le défaut angulaire en p est donc l’aire sphérique du polygone de G AUSS de l’étoile de p. De l’existence même de la surface polyédrique, on déduit une condition nécessaire pour construire localement une surface polyédrique : les longueurs |µ i | et les angles 5. Géométrie extrinsèque 37 au sommet Ø i sont liés, au sens où il faut pouvoir construire un polygone sphérique de longueurs et angles prescrits. Cette condition est compliquée en général, mais dans le cas d’un sommet de degré 3 (de type tétraèdre), le polygone de G AUSS est un triangle et de nombreuses relations sont connues sur les triangles sphériques. Ainsi la loi des cosinus donne-t-elle cos Ø2 + cos Ø1 cos Ø3 cos µ1 = · sin Ø1 sin Ø3 (Le lecteur trouvera plus de formules concernant la géométrie sphérique en annexe B ainsi que dans l’article Spherical Trigonometry de la CRC Concise Encyclopaedia of Mathematics de W EISSTEIN [Wei03].) Théorème de B ONNET On a vu ci-dessus que l’existence d’une surface discrète est soumise (localement) à des conditions nécessaires sur sa géométrie intrinsèque (longueurs des arêtes et angles entre les arêtes d’une face) et sa géométrie extrinsèque (angles diédraux). La question de savoir si ces conditions sont aussi suffisantes est donnée par le théorème de B ONNET. En géométrie classique, le théorème de B ONNET donne des conditions nécessaires et suffisantes pour qu’une surface donnée abstraitement par ses première et seconde formes fondamentales existe comme surface immergée (localement) dans l’espace euclidien. Afin d’énoncer son analogue discret, résolvons d’abord le problème local : si l’on considère uniquement un sommet p et son étoile, avec sa géométrie intrinsèque et des angles µ i pour chaque arête contenant p. Pour simplifier, on supposera aussi que les faces sont toutes triangulaires. Lemme 1. L’étoile en p d’une surface abstraite triangulée déterminée par ses angles aux sommets Æ i et angles diédraux µ i possède une image dans l’espace si et seulement s’il existe un polygone sphérique dont les longueurs sont µ i et les angles de rotation sont Æ i . Démonstration. On se place dans le cadre suivant : un sommet p appartenant à n arêtes e 1 , . . . , e n , dirigées par des vecteurs unités ~ a1 , . . . , ~ a n partant de p, n faces f i ~ i . La géométrie est donnée par contenant les arêtes e i et e i+1 , de vecteurs normaux N les angles au sommet Æ i sur la face f i et les angles diédraux µ i sur l’arête e i , ce qui fixe la configuration dans l’espace de proche en proche, dès que l’on a choisi un ~ a 1 et ~ i ^~ ~ i . On ~ 1 (avec ~ ~ 1) : ~ ~ i+1 = cos µ i N ~ i ° sin µ i ~ N a1 ? N a i+1 = cos Æ i ~ a i + sin Æ i N a i et N a i+1 ^ N retrouve les contraintes (5) et (6), et on construit ainsi les arêtes jusqu’à e n+1 . Le problème est de savoir si e n+1 = e 1 . Le problème est bien posé puisque la méthode ci-dessus est itérative, mais cette formulation repose sur des données extrinsèques (les ~ i ). Partons plutôt des données intrinsèques à savoir les angles Æ i , µ i . La donnée ~ a i et N des longueurs des arcs sphériques et des angles de rotations Æ i définit une courbe ~ i , unique à rotation près. Si l’étoile en p existe dans R3 , alors sphérique de sommets N cette courbe polygonale sphérique est le polygone de G AUSS autour du sommet p donc elle se referme (ce qui implique des conditions sur les angles). Réciproquement, on reconstruit l’étoile en p à partir de la courbe sphérique. En effet les ~ a i sont forcément ~ ~ les normales aux plans engendrés par N i , N i+1 et elles satisfont les équations (5) et (6). 38 II. Surfaces et polyèdres (Noter que le signe de ~ a i est déterminé par la seconde équation.) Si la courbe se referme, alors ~ a n+1 = ~ a 1 donc la condition de fermeture de la courbe polygonale sphérique est nécessaire et suffisante. Remarque : pour ce lemme, nul besoin de définir les faces exactement ni même les longueurs il suffit de considérer des secteurs angulaires orientés bordés par les demi-droites issues de p et dirigées par les arêtes. Nous pouvons maintenant énoncer le théorème de reconstruction de B ONNET. Théorème 3. Soit S = (V , E, F ) une surface polyédrique abstraite orientée, simplement connexe, munie d’une métrique donnée par (i) une métrique plate sur chaque face, autrement dit une bijection de la face vers une face du plan de même combinatoire et (ii) des angles µ e pour chaque arête e. Supposons qu’en chaque sommet intérieur de S , les angles des arêtes µ e et les angles au sommet Æ i déterminent un polygone sphérique, alors il existe une surface polyédrique concrète S 0 , de même combinatoire, dont les faces sont isométriques à la face correspondante de S , et telle que les µ e soient les angles diédraux. Cette surface est unique à isométrie de l’espace près. Démonstration. On supposera pour simplifier que la surface est triangulée et que les angles µ e ne sont jamais nuls. L’unicité à rotation près découlera de la nécessité de la construction. La construction d’une telle surface suit l’algorithme suivant. Choisissons une face triangulaire initiale dans S et un triangle orienté qui lui est isométrique dans R3 . Ce dernier est unique à isométrie de l’espace près. Les arêtes e de ce triangle initial qui ne sont pas sur le bord de S sont dites externes (au sens de cet algorithme), c’est-à-dire qu’une seule de deux faces incidentes à e a été construite. Considérons une face f 2 non construite adjacente à une face déjà construite f 1 . Par hypothèse, au moins une de ses arêtes est externe : e = f 1 \ f 2 . La question est de savoir si elle en possède une autre ou pas. Si elle n’en possède qu’une, on construit son image f 20 dans R3 de façon unique, en connaissant sa géométrie intrinsèque et en recollant grâce à l’angle diédral. On retire de la liste des arêtes externes l’arête e et on y rajoute les deux arêtes restantes de f 2 . Par contre si f 2 possède une deuxième arête externe ê déjà construite, il faut alors vérifier que l’image ê0 construite en recollant f 20 coïncide avec l’image existante. Cela revient à la construction de l’étoile en p = e \ ê, traitée dans le lemme. En effet f 2 doit être l’ultime face non construite de star( p), à moins que l’on ait laissé des trous dans la construction. Or par hypothèse, S est simplement connexe, donc les seuls trous possibles doivent être comblés par des triangles. Pour éviter cette situation, il suffira de construire en priorité les faces dès que surgissent deux arêtes externes adjacentes (autrement dit, en s’assurant que la partie de S traitée reste de genre zéro). On recommence tant qu’il reste des arêtes externes n’appartenant pas au bord (ce qui est un processus fini). Note 3. Le théorème de B ONNET donne deux ingrédients pour construire une surface polyédrique : les métriques sur les faces, ce qui détermine la métrique intrinsèque à S , 6. Convergence et approximation 39 à savoir les distances sur S , et les angles diédraux, qui sont une donnée extrinsèque, autrement dit détermine la façon dont la surface se déploie dans l’espace. Le théorème ajoute que ces deux quantités doivent être liées pour qu’une immersion soit possible. Par analogie avec le cas continu, les quantités intrinsèques correspondent à la courbure gaussienne dont on voit qu’elle est liée aux sommets (angles), tandis que les quantités extrinsèques correspondent à la courbure moyenne, qui est donc liée aux arêtes. On reviendra plus en détail sur cette dernière au chapitre III. 6 Convergence et approximation Pour définir des analogues discrets des quantités différentielles, nous avons jusqu’ici été guidés par leurs propriétés fonctionnelles, plutôt que par une transposition naïve des formules continues au discret. Si dans certains cas, la géométrie est purement discrète (polyèdres, graphes), dans d’autres, le discret est conçu comme une approximation d’un objet continu. Il est alors intéressant de voir dans quelle mesure les deux se rejoignent quand l’approximation s’améliore, par exemple quand le maillage de la surface devient plus fin. C’est le problème de la convergence. La réponse est, de façon surprenante, partiellement négative. Même en prenant des analogues sensés des courbures différentielles continues (sans parler des formules moins bien choisies), la convergence n’est pas très bonne. Les travaux de B ORRELLI, C AZALS & M ORVAN [BCM03] établissent la non-convergence a priori des mesures discrètes vers les mesures continues de courbure, avec des différences dépendant des types de maillage. Cela amène d’ailleurs C OHEN -S TEINER & M ORVAN ([CSM06, Mor08b]) à définir des notions de mesure de courbure pour énoncer des théorèmes de convergence corrects. De même X U, X U & S UN [XXS05] montrent un résultat encore plus surprenant : il n’existe aucune formule calculée à partir du k-anneau d’un point du maillage, qui converge vers la courbure gaussienne ou moyenne pour tous les maillages. Cela n’exclut pas néanmoins la convergence pour certains maillages, ce qui est d’ailleurs l’approche proposée par B AUER, P OLTHIER & WARDETZKY [BPW10a] (qui considèrent un maillage le long des lignes de courbures principales). Nous montrerons ci-dessous quelques-uns des problèmes qui surgissent. Notre espoir étant que le lecteur averti évitera d’accorder une confiance aveugle aux différentes formules de courbure qui abondent dans la littérature scientifique, et cultivera un sain scepticisme. 6.1 Influence du degré du sommet On prendra ici comme illustration la plus simple la sphère de rayon 1, que l’on suppose triangulée de façon régulière en un sommet, et on testera les valeurs limites des grandeurs définies plus haut, quand le pas du maillage devient de plus en plus petit. Cela revient à considérer des surfaces inscrites dans la sphère, ce qui est en soi un choix à discuter ; on pourrait aussi prendre des surfaces exinscrites ou semi-inscrites. On se place donc en un point p de la sphère unité, et on considère le polygone 40 II. Surfaces et polyèdres p ` a Ø º/3 p0 µ F IGURE 10 – Polygone régulier à 6 côtés centré en p, inscrit sur la sphère unité. La distance sphérique entre le centre p et un sommet est µ , la longueur de l’arête (droite) est ` = 2 sin µ2 . Les 6 sommets sont sur un cercle de centre p0 et forment un polygone régulier plan dans le plan de ce cercle. régulier de l’espace formés par n points de la sphère situés à une distance sphérique (donc angulaire) µ de p. Une arête issue de p aura comme longueur ` = 2 sin µ2 . Soit a la longueur de l’arête opposée à p. Les n points de star( p) forment un polygone régulier de l’espace (dont le centre n’est pas p mais un point p0 proche de p, situé à l’intérieur de la boule unité), de diamètre 2`0 où `0 = sin µ , d’où a = 2`0 sin ºn = 2 sin µ sin ºn . On en déduit Ø l’angle Ø en p de chaque triangle puisque a = 2` sin 2 d’où sin Ø 2 = sin º `0 n ` = sin º sin µ n 2 sin µ 2 = sin º n cos µ 2 · Enfin l’aire d’un triangle sera A = 12 `2 sin Ø = 2 sin2 µ2 sin Ø. En première approximation, quand µ est petit, il vient (en utilisant la parité) Ø= 2º µ 2 º ° tan + o(µ 3 ) n 4 n ce qui induit un défaut angulaire en p de Æ( p) = 2º ° nØ ª nµ 2 º tan 4 n tandis que l’aire est A (star( p)) = nA = 2 n sin2 µ 2 sin Ø ª nµ 2 2º sin 2 n 6. Convergence et approximation 41 la courbure gaussienne est donc K ( p) = 3Æ( p) ª A (star( p)) 3n 2 º 4 µ tan n nµ 2 2º 2 sin n = 3 tan ºn 2 sin 2nº = ¥ 3 3≥ 2º = 1 + tan . n 4 cos2 ºn 4 La courbure discrète K ( p) possède donc une limite quand µ tend vers zéro, mais celle-ci dépend du degré n en p ; en particulier, elle est différente de 1 quand n 6= 6. Enfin, si l’on force simultanément n à tendre vers l’infini, K ( p) tend vers 34 6= 1. Ce phénomène est analysé dans [BCM03] et illustré dans [Rus04]. Pour le calcul de la courbure moyenne sur une arête, il nous faut considérer le polygone de G AUSS (cf. §5), dont les sommets sont les normales aux faces. L’angle ' entre les normales et p est donné par sin ' = q tandis que sin µ2 1 ° cos2 µ2 sin2 ºn = µ + o(µ ) 2 sin ºn cos µ2 cos ºn µ2 cos ' = q = 1° + o(µ 3 ) . 2º 8 cos µ 2º 2 n 1 ° cos 2 sin n L’angle ' représente la distance sphérique entre les sommets du polygone de G AUSS, qui est régulier à n côtés, et son sommet. Soit ± l’angle diédral, autrement dit la longueur sphérique du côté de ce polygone : cos ± = cos2 ' + sin2 ' cos = µ ∂ 2 sin2 µ2 sin2 ºn sin2 µ2 2º 2º = 1° 1 ° cos = 1 ° n n 1 ° cos2 µ sin2 º 1 ° cos2 µ sin2 º 2 1 ° cos2 µ2 sin2 ºn ° 2 sin2 µ2 sin2 ºn 1 ° cos2 µ2 sin2 ºn 2 n = n ° ¢ 1 ° sin2 ºn 1 + sin2 µ2 1 ° cos2 µ2 sin2 ºn soit sin ± = µ tan ºn + o(µ ). Enfin la courbure moyenne en p est H ( p) = n` µ µ2 º sin ± cos ' = n sin sin ± cos ' ª n tan 2 2 2 n En divisant par la masse concentrée, il vient 2 ¥ 3 n µ2 tan ºn 3 tan ºn 3 H ( p) 3 3≥ 2º ª = = = 1 + tan . 2 aire(star( p)) n 2 cos2 ºn 2 sin 2nº n sin 2nº µ2 On retrouve la même dépendance en n, le degré de p. Remarque 7. Il est à noter que ce phénomène n’apparait pas en dimension 2. En effet si l’on considère trois points sur le cercle de rayon 1, p et ses deux voisins, situés à 42 II. Surfaces et polyèdres distances angulaires µ1 , µ2 et à distances cordales respectives ` i = 2 sin de rotation en p est µ1 + µ2 µ= 2 µi 2, alors l’angle et la courbure mesurée en divisant par la demi-aire de l’étoile en p est k= 2µ `1 + `2 µ1 + µ2 ¥ ª1. = ≥ 2 sin µ21 + sin µ22 Cette propriété est vraie pour toute approximation polygonale d’une courbe (de classe C 3 ou mieux), et converge plus vite si le polygone a ses côtés de même longueur [BCM03]. On peut aussi diviser par la longueur du segment reliant les milieux et on obtient encore une quantité équivalente à 1. De façon intéressante, cette longueur ne dépend que de µ et non de la répartition µ1 , µ2 , car c’est la moitié de la longueur de la corde reliant les deux voisins. 6.2 Le problème de l’approximation quadratique Dans leur article [XXS05], X U, X U & S UN répondent par la négative à la question posée par M EEK & WALTON [MW00], de savoir s’il existe une formule, dépendant des données géométriques, approximant la courbure (gaussienne ou moyenne) avec une précision croissante quand le maillage devient plus fin. Leur approche élégante revient à inverser le problème : plutôt que de fixer une surface et de changer le maillage pour montrer la non-convergence de la formule, ils fixent des points et font varier la surface (passant par ces points). Or toute expression dépendant du maillage restera constante puisque les points ne bougent pas. Par contre, on voit rapidement que les courbures vont changer, donc ne peuvent pas être égales à l’expression, quelle qu’elle soit. Plus précisément, soit S une surface donnée régulière (par exemple de classe C 2 ) passant par l’origine p = (0, 0, 0) avec un plan tangent horizontal. Elle est décrite localement comme le graphe d’une fonction f : 1 f ( x, y) = (ax2 + 2 bx y + c y2 ) + ≤ 2 où ≤ = o( x2 + y2 ) est l’erreur que l’on fait en approximant S par son développement limité à l’ordre 2. Les coefficients (constants) a, b, c se déduisent des dérivées secondes de f en (0, 0). Les courbures de S en p dépendent uniquement de a, b, c : la courbure gaussienne est K = ac ° b2 et la courbure moyenne a + c. Par conséquent, pour étudier les courbures, on peut négliger l’erreur ≤ et se contenter de la partie quadratique de f , autrement il suffit de considérer les paraboloïdes z = 12 (ax2 + 2 bx y + c y2 ), et on aura traité le cas général. On suppose aussi que p est un sommet d’un maillage de degré 4 en p, et on note q 1 , . . . , q 4 ses voisins. Pour cela on prend un pas h > 0 aussi petit que l’on veut et des 6. Convergence et approximation 43 coordonnées x1 , . . . , x4 , y1 , . . . , y4 et l’on pose µ ∂ h2 q i = h( x i , yi , z i ) = ( hx i , h yi , f ( hx i , h yi )) = hx i , h yi , (ax2i + 2 bx i yi + c yi2 ) . 2 On suppose enfin donnée une fonction © calculée à partir de l’anneau à distance 1 en p (qui serait la fonction courbure cherchée). L’idée de X U, X U & S UN est de faire varier a, b, c en laissant fixes les points p, q 1 , . . . , q 4 . En effet, si ces points sont donnés, les coefficients a, b, c satisfont le système suivant : pour tout i, ax2i + 2 bx i yi + c yi2 = 2 z i / h À q i fixé, le système possède une, plusieurs ou aucune solution selon les valeurs des x i , yi , z i . Nous nous intéressons au cas sous-déterminé, c-à-d quand le système possède plusieurs solutions (donc une infinité), autrement dit quand la matrice 0 2 1 x1 2 x1 y1 y12 B x2 2 x y y22 C B 2 C 2 2 B 2 C @ x3 2 x3 y3 y32 A x42 2 x4 y4 y42 est de rang 2, par exemple si les points sont opposés : x i+2 = ° x i , yi+2 = ° yi . Pour fixer les idées, choisissons par exemple ( x1 , y1 ) = (1, 0) et ( x2 , y2 ) = (1, 1). Les équations imposent a = 2 z1 / h, et b est determiné par tout choix de c : b = ( z2 ° z1 )/ h ° c/2. En faisant varier c, on obtient des surfaces distinctes, dont les courbures gaussienne et moyenne sont différentes, et qui pourtant passent toutes par les 5 points prescrits, et ont donc la même valeur de ©( p, q 1 , . . . , q 4 ). Et ce, même si l’on faut tendre h vers zéro. Notons quand même que ce raisonnement n’interdit pas a priori de calculer les courbures, si l’on a exclu les cas pathologiques comme ci-dessus. Ne pourrait-on croire alors que ces cas sont « rarissimes » (voire qu’ils résultent d’une construction mathématique abstraite qu’on ne rencontrerait jamais en pratique) ? Effectivement, il s’agit d’un cas non générique (c-à-d ayant lieu sur ensemble fermé de mesure nulle), comme l’est une division par zéro. Mais le problème lui est générique. En effet, quand on s’approche numériquement d’un de ces cas, les solutions a, b, c (même uniques) exhibent une sensibilité aux données initiales accrue (et tendent vers l’infini pour c par exemple). Autrement dit, de légères variations numériques induisent des changements importants pour ©. On a donc affaire à un vrai problème. 6.3 Lanterne de S CHWARZ (ou vénitienne) Rappelons enfin un contre-exemple classique en géométrie (dû à H. A. S CHWARZ en 1890), qui montre que la convergence en distance (en l’occurrence la distance de H AUSDORFF) n’implique pas nécessairement la convergence des aires. Soit C le cylindre centré d’axe (Oz), de hauteur h et de rayon r donné par © ™ C = x2 + y2 = r 2 , 0 … z … h . 44 II. Surfaces et polyèdres On considère la triangulation suivante, dépendant de deux entiers n, m : à chaque jh hauteur m on considère les sommets d’un polygone régulier à n côtés inscrit dans le cercle de rayon r , avec une rotation de ºn entre deux polygones successifs. À la ≥ ¥ jh hauteur jh/ m (pour 0 … j … m) on prend les points p i, j := r cos 2niº , r sin 2niº , m si j est ≥ ¥ jh pair, p i, j := r cos (2 i+n1)º , r sin (2 i+n1)º , m si j est impair. Les faces sont constituées des triangles suivants : ( p i, j p i+1, j p i, j+1 ) et ( p i, j p i, j°1 p i+1, j ) si j est pair, ( p i, j p i+1, j p i+1, j+1 ) et ( p i, j p i+1, j°1 p i+1, j ) si j est impair. La distance entre un triangle et le cylindre est ° ¢ majorée par r 1 ° cos ºn donc tend vers zéro, tandis que l’aire d’un triangle est A T = r sin º n s h2 2º + 4 r 2 sin4 n m2 et l’aire totale est ≥ A = 2 nmA T = 2 rh n sin º¥ n s 1+ 4r2 2 2º m sin4 °! 2º rh = aire(C ). 2 n n ! +1 h m fixe Mais un choix différent de raffinement de la triangulation, faisant changer simultanément m et n, donnera des résultats différents. On peut obtenir n’importe quelle valeur p de Ø = A / aire(C ) 1 en choisissant n, m ! +1 avec m/ n2 ! 8ºh2 r Ø2 ° 1, et même une aire tendant vers l’infini, si m/ n2 ! +1. Le chapitre 3 de la thèse de WARDETZKY [War06] explique plus en détails en quoi la lanterne de S CHWARZ illustre précisément ce qui empêche la convergence : la non-convergence des normales. C OHEN -S TEINER & M ORVAN [CSM06] présentent aussi ce contre-exemple 15 , et proposent une approche plus générale du problème de l’approximation et des données géométriques. 15. Modulo quelques erreurs de calcul.