Pigeard de Gurbert
Colles
Première Supérieure
Gay-Lussac
Cours commun / Oral
2012-2013
L’EVIDENCE
A l’évidence, on se rend….
Dans son roman Cent ans de solitude, Gabriel Garcia Marquez décrit
l’émerveillement des habitants du village de Macondo devant cette chose extraordinaire
d’où sort une voix, le téléphone : « C’était comme si Dieu avait résolu de mettre à
l’épreuve leur faculté de s’étonner […] tant et si bien qu’à la limite, nul ne savait déjà plus
de science certaine où commençait et où finissait la réalité. » On comprend bien que ce
n’est pas le téléphone en lui-même qui est réellement une chose étrange, mais qu’il semble
tel aux habitants de Macondo parce qu’ils n’en ont jamais vu. L’effet d’étrangeté est donc
produit non par la réalité du téléphone mais par l’ignorance de l’esprit. A partir de cet
exemple, on peut tirer une conclusion générale : face à quelque chose qui étonne la
pensée, celle-ci doit chercher à comprendre ce que c’est afin de sortir de son étonnement.
C’est cela qu’illustre parfaitement la fable de La Fontaine intitulée « Le chameau et les
bâtons flottants » (Fables, livre IV, fable X) :
« Le premier qui vit un chameau
S’enfuit à cet objet nouveau ;
Le second approcha ; le troisième osa faire
Un licou pour le dromadaire.
L’accoutumance ainsi nous rend tout familier.
Ce qui nous paraissait terrible et singulier
S’apprivoise avec notre vue. »
On peut ainsi dire de tout ce qui nous apparaît étrange, inconnu ou incompréhensible, en
un mot obscur, ce que La Fontaine dit de ses « bâtons flottants » : « De loin c’est quelque
chose, et de près ce n’est rien. »