3.c) Les rejets de phosphates
En Europe, il est estimé qu’un individu engendre un rejet de 4 g de phosphore par jour. Cette
estimation est à l’origine de la notion d’Equivalent Habitant phosphore (EqH). Les eaux usées
domestiques ont des teneurs en phosphore généralement comprises entre 10 et 25 mg.L-1.
Les phosphates excrétés par l’urine représentent environ 25 à 50 % des rejets ménagers de
phosphore. Dans les urines, le phosphore est présent majoritairement sous forme de
phosphates inorganique (Petry et al., 2002). Dans les eaux usées, la part de ces rejets humains
ne représente que 30 à 50 % du P total, le reste provenant des produits de nettoyage (Rodier et
al., 1996). En effet, de nombreux détergents contiennent des phosphates. La teneur en
tripolyphosphates de sodium (TPPS) de certains détergents peut dépasser 50 %. En Europe,
les détergents contenant des phosphates sont les lessives textiles et produits vaisselle. La
consommation moyenne de détergent est très inégale au sein des divers pays Européens. Dans
les pays méditerranéens où l’eau est plus dure, la consommation de détergents est plus
importante (Fox et al., 2002). La consommation moyenne de détergent par individu en
Finlande, Suède et Norvège est inférieure à 4 kg.an-1 alors qu’elle dépasse 10 kg.an-1 en
Espagne, France, Grèce, Italie et Portugal. Par conséquent, à cause de la présence de TPPS
dans ces détergents, les rejets de phosphore sont plus importants dans les pays du sud de
l’Europe. Des mesures de remplacement du TPPS par la Zéolite ont été initiées dans de
nombreux pays Européens depuis 1990. En France, les mesures entreprises alors ont consisté
à abaisser la teneur en TPPS dans les détergents à 20 % en 1991. Le TPPS est interdit ou non
utilisé dans divers pays : Canada (depuis 1973), Italie (1989), Japon (non interdit mais non
utilisé), Suisse (1986) et certains états des USA (depuis 1970) (UE, 2002).
Si un effort a été effectué dans de nombreux pays pour limiter l’usage du TPPS dans les
lessives textiles, le phosphate est toujours très utilisé dans les détergents pour lave-vaisselle.
Une étude récente menée par la Commission Internationale Pour les Eaux du Léman (CIPEL,
2005) montrait que parmi 46 produits lave-vaisselle achetés en commerce de grande
distribution en France, tous contenaient des phosphates. Selon le produit testé, chaque cycle
lessiviel vaisselle conduisait à un rejet de 1,7 à 4,4 grammes de phosphore. En Suisse, la
législation limite la teneur en phosphore dans les détergents pour lave-vaisselle de telle sorte
que les rejets de phosphore n’excèdent pas 2,5 g par lavage. Lorsque l’usage du TPPS n’est
pas réglementé et que celui-ci n’est par remplacé par la zéolite par exemple, il contribue à
plus de 50 % de l’apport de phosphore véhiculé par les eaux usées domestiques (UE, 2002).
Pour six pays de la communauté européenne (France, Grèce, Portugal, Espagne, Hongrie,
Pologne, République Tchèque), plus de 50 % des détergents utilisés contiennent encore du
TPPS.
La déphosphatation des eaux usées nécessite des traitements coûteux et rarement employés.
Les traitements primaire, secondaire et tertiaire ont des rendements d’extraction du P de
respectivement 20, 40 et 85 %. En France, une étude rapportée par la communauté
Européenne (UE, 2002) montrait que sur 66 grandes agglomérations, seules six étaient
équipées de traitements tertiaires.
4) Effets connus sur l’environnement
Comme l’azote, le phosphore est un constituant essentiel de la matière organique et est un
nutriment indispensable pour les organismes vivants. Cependant il doit être considéré comme
un polluant lorsqu’il est présent à de fortes concentrations dans l’environnement. Des teneurs
dans l’eau supérieures à 0,5 mg.L-1 doivent constituer un indice de pollution (Rodier et al.,
1996). Les rejets de phosphore dans les écosystèmes aquatiques constituent l’un des plus
sérieux problèmes environnementaux car ils contribuent à accélérer l’eutrophisation de ces