
Exposition au radon dans les habitations et risque de cancer
Hélène BAYSSON
Anses • Bulletin de veille scientifique n° 29 • Santé / Environnement / Travail • septembre 2016
e77e
2,26]) par rapport à celles résidant dans des maisons
individuelles (RR=1,05 , IC à 95% =[0,91; 1,20]). Les auteurs
concluent que leurs résultats sont en faveur d’une relation
statistiquement significative entre le risque de BCC et
l’exposition au radon. Néanmoins ils ne peuvent pas écarter
la possibilité d’un biais de confusion* résiduel relatif à
l’exposition solaire ni conclure à une relation causale entre
l’exposition au radon et l’incidence de BCC.
Commentaire
Les auteurs montrent une association statistiquement
significative entre l’exposition domestique au radon et
l’incidence de BCC (carcinome basocellulaire). Auparavant,
seules des études de type écologique avaient observé une
association entre l’exposition domestique au radon et le
risque de NMSC (cancers de la peau non mélanomes). Une
des forces de l’étude danoise est de croiser des données
issues de recensement nationaux permettant de retracer
l’historique résidentiel des participants, d’évaluer leur
exposition au radon et aux ultraviolets et enfin de connaître
l’incidence de cancers dans la population suivie. Du fait de
l’absence de mesures directes de la concentration de radon
dans les habitations présentes et passées des participants,
l’exposition au radon des participants a été prédite à partir
de modèles. L’évaluation rétrospective de l’exposition aux
ultraviolets est également peu précise. Il en est de même
pour l’évaluation par auto-questionnaire de la fréquence de
grains de beauté et de taches de rousseur. Il est d’ailleurs à
noter que cette étude de cohorte n’était pas spécifiquement
conçue pour étudier l’association entre exposition
domestique au radon et risque de cancer de la peau
puisqu’elle fait partie d’un projet de recherche plus large sur
le thème « Alimentation, cancer et santé ». Le nombre élevé
de relations statistiques étudiées a pu aboutir à une
association fortuite. Il est en effet attendu que les niveaux de
concentrations de radon soient moins élevés dans les
appartements que dans les maisons individuelles. Un biais de
confusion résiduel par rapport à la prise en compte de
l’exposition aux ultraviolets peut également limiter la portée
des résultats observés.
Exposition domestique au radon et
caractéristiques des cancers du poumon chez
les non-fumeurs.
Torres-Duran M, Ruano-Ravina A, Parente-Lamelas I.
Residential radon and lung cancer characateristics in never
smokers. International Journal of Radiation Biology 2015;91
(8):605-10.
Résumé
L’étude de Torres-Duran et al. vise à évaluer le risque de
cancer du poumon lié à l’exposition au radon pour différent
types histologiques de cancer et en fonction de l’âge au
diagnostic. Pour cela une étude cas témoins a été réalisée
chez les non-fumeurs dans les régions à fortes
concentrations de radon situées au Nord-Ouest de l’Espagne.
Les sujets non-fumeurs ont été recrutés au sein de différents
hôpitaux entre le mois de Janvier 2011 et Octobre 2013. Au
total 216 cas de cancers du poumon (histologiquement
vérifié) et 329 témoins ont été inclus dans l’étude. Les
participants ont été interviewés en face à face au sujet de
leur mode de vie, leurs occupations professionnelles, leur
alimentation, leur consommation d’alcool, et enfin leur
exposition au tabagisme passif. Des mesures de
concentration de radon ont été effectuées dans l’habitation
actuelle de chaque participant grâce à un détecteur passif
installé pendant au minimum trois mois. Les mesures de
radon ont été réalisées pour 92,1% des cas et pour 83,5%
des témoins. La durée médiane d’occupation de l’habitation
était respectivement de 30 années et 36 années chez les cas
et chez les témoins. La relation exposition / risque a été
étudiée au moyen de régressions logistiques avec
ajustement sur l’âge, le sexe et le fait d’avoir vécu avec un
fumeur pendant au moins 20 années. Les odd-ratios de
cancer du poumon chez les non-fumeurs exposés à plus de
200 Bq/m3 étaient le double de ceux observés chez les non-
fumeurs exposés à moins de 200 Bq/m3. Ces résultats étaient
observés quel que soit le type histologique de cancer du
poumon. Cependant les risques relatifs étaient
statistiquement significatifs seulement pour les cas de
cancers de type histologique adénocarcinome (OR= 2,19 IC
95% = [1,44 ; 2,33]. L’exposition au radon était plus élevée
chez les cas de cancers diagnostiqués avant 50-60 ans
comparativement aux cas de cancers diagnostiqués à un âge
plus avancé (différence non statistiquement significative).
Les auteurs concluent que l’exposition au radon est associée
à un risque de cancer du poumon chez les non-fumeurs quel
que soit le type histologique, bien que les résultats observés
ne soient significatifs que pour le type adénocarcinome. En
outre, Les auteurs suggèrent qu’une exposition à des
concentrations élevées de radon serait associée à un âge au
diagnostic plus faible, suggérant un « effet cumulatif » de
l’exposition au radon chez les non-fumeurs. Néanmoins, ils
soulignent que l’étude est confrontée à un manque de
puissance statistique (peu de cas non-fumeurs âgés de moins
de 60 ans et de type non adénocarcinome).
Commentaire
Dans l’étude de Torres-Duncan et al, les cancers du poumon
sont le plus fréquemment de type « adénocarcinome » ce
qui est concordant avec les caractéristiques observées dans
d’autres études épidémiologiques portant sur les facteurs de
risque de cancer du poumon chez les non-fumeurs. La
relation exposition au radon - risque est uniquement
statistiquement significative pour ce groupe histologique de
cancer probablement en raison du faible nombre de cas dans
les autres groupes histologiques. Dans l’étude conjointe
européenne (Darby, 2005) et dans l’étude conjointe nord-
américaine (Krewsky, 2006), les risques les plus élevés
étaient observés pour les cancers du poumon à petites
cellules mais ces études portaient à la fois sur des fumeurs et
des non-fumeurs. Dans l’étude de Torres-Duncan et al,
l’exposition au radon était plus élevée pour les cas de
cancers diagnostiqués avant 50 ans comparativement aux
cas de cancers diagnostiqués à un âge plus avancé, ce qui
laisserait supposer selon les auteurs que, chez les non-
fumeurs, le niveau de l’exposition au radon serait un facteur
de risque plus important que la durée d’exposition au radon.
A ce jour, cette hypothèse n’a pas été validée pas d’autres
études.