par cet afflux. Les Allemands remplacent les
Italiens aux frontières et occupent l’Italie du
Nord, en réponse au débarquement des Alliés
au sud de l’Italie et au renversement d’alliance
du gouvernement royal. Ainsi, les réfugiés juifs
encore en France ne sont plus en sécurité et
fuient vers la Suisse : la Gestapo traque les Juifs
non-français et l’Allemagne fait pression sur l’ad-
ministration vichyste pour qu’elle accepte d’ar-
rêter les Juifs français. 17 000 Juifs sont ainsi
déportés de France en 19439. Des civils fran-
çais fuient également : les premiers collabora-
teurs craignant des représailles, des maqui-
sards et des résistants redoutant une arrestation
par la Gestapo… Durant cette même période,
une première vague de réfugiés atteint la fron-
tière valaisanne avec l’Italie. Des civils et de nom-
breux soldats italiens qui refusent un nouvel
engagement sous le drapeau allemand ou celui
de la RSI constitué par Mussolini parviennent
en Valais par les cols de la région de Gondo
et de Zermatt notamment.
Le troisième et dernier afflux de réfugiés a lieu
en 1944. De même que la vague précédente,
il n’est pas homogène. Dès la fin 1943, les
sabotages, les attaques, les règlements de comptes
et les répressions allemandes troublent la Haute-
Savoie. Cela s’intensifie durant l’été 1944 :
entre juillet et août, la Haute-Savoie est libé-
rée par ses maquis, notamment ceux de la val-
lée d’Abondance, de Chamonix et de Saint-
Gingolph. Les passages de la frontière valaisanne
par les maquisards sont donc fréquents. Des
collaborateurs tentent également de gagner la
Suisse. Quelques réfugiés juifs parviennent
encore à la frontière, fuyant les rafles et le
regroupement dans des camps effectués par
les Allemands10, mais ils sont minoritaires.
Quelques frontaliers français se réfugient pro-
visoirement en Suisse, pour échapper à des
persécutions et trouver un logement, tels les
habitants français de Saint-Gingolph lors de
l’incendie du village.
Peu après, à la frontière italienne, de nom-
breux civils et militaires du val d’Aoste et
d’Ossola cherchent l’asile en Valais. La région
tente de se libérer et les combats entre parti-
sans et les fascistes italiens sont fréquents et san-
glants. Les populations subissent la situation
dans l’angoisse et dans des conditions sani-
taires et d’approvisionnement lamentables.
Plusieurs milliers de civils italiens franchissent
la frontière durant cette période.
Ainsi, la frontière du Valais avec la France est
témoin de plusieurs vagues de réfugiés, liées aux
mouvements des armées, à la politique répres-
sive de Vichy ou des occupants envers les mou-
vements de résistance et à l’ampleur de la poli-
tique antijuive. Cette frontière avec la zone
libre est essentielle pour les réfugiés qui dési-
rent se rendre en Suisse, mais aussi pour les résis-
tants qui peuvent passer d’une zone à l’autre
sans franchir la ligne de démarcation et béné-
ficier d’un abri proche en cas de répression. Sous
l’occupation italienne, les Juifs de Haute-Savoie
sont moins persécutés, mais des camps de
maquisards se créent à proximité de la Suisse.
Ces groupes de résistants armés franchissent
régulièrement la frontière pour échapper à la
répression, chercher des renseignements, s’ap-
provisionner en armes, en nourriture et en
médicaments. L’occupation des Allemands est
une période sombre pour les Juifs qui se trou-
vent encore en France et pour les maquisards.
Finalement, au moment de la Libération, la fron-
tière attire aussi bien les résistants que les col-
laborateurs, les Juifs qui fuient les dernières dépor-
tations et les soldats blessés ou rendant les
armes. Des catégories de personnes très disparates
tentent de pénétrer en Suisse.
La frontière entre l’Italie et le Valais ne devient
une zone sensible dans le domaine de l’asile et
du refuge qu’à partir de l’automne 1943.
Jusqu’alors, elle avait surtout alimenté la chro-
nique, jamais abandonnée malgré les disposi-
tifs militaires, de la contrebande à travers les
Alpes pennines : trafics démantelés d’ampleurs
diverses, incidents, découvertes macabres à la
fonte des neige occupent encore les colonnes
régionales des journaux valaisans.
L’annonce par le gouvernement Badoglio de
l’armistice le 8 septembre 1943, le débarque-
ment allié au sud de Rome et l’arrivée dans la
Péninsule des troupes allemandes créent une
I
9KLARSFELD 2001b, p. 1645.
10 SANTSCHI 2000, p. 19.
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