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Correspondances en pelvi-périnéologie - n° 2, vol. III - avril/mai/juin 2003
consultation. Au contraire, en cas de consulta-
tions successives suivies d’un staff, le dossier est
discuté en l’absence du malade.
Pourtant, cette discussion “en privé” au cours du
staff semble donner les meilleures garanties
d’objectivité aux patients car il est facile de faire
part de ses désaccords, sans la retenue qu’im-
pose la présence du malade, qui autorise de
“confronter” ses points de vue, mais pas de “s’af-
fronter” en cas de désaccord.
Une lettre commune après le staff fournit au
patient l’information nécessaire. Afin que le
malade n’ait pas le sentiment de ne pas être tenu
au courant de ce qui se dit entre les différents
consultants qu’il voit successivement, nous lui
donnons son dossier entre chaque consultation.
Il peut ainsi lire tout ce qu’écrivent à son sujet les
différents médecins qu’il rencontre.
D
IALOGUE VERSUS INTERROGATOIRE
La consultation qui réunit un médecin et un
patient aboutit à un dialogue entre les deux
acteurs, ciblé sur la demande exprimée par le
patient au début de la consultation.
La communication avec le patient au cours d’une
consultation simultanée est parasitée par un phé-
nomène de dynamique de groupe qui transforme
le dialogue médecin-malade en un interrogatoire.
Sauf à laisser s’installer un dysfonctionnement
dans ce groupe formé par les consultants et le
malade, qui consisterait à laisser s’établir une
discussion entre l’un des médecins et le malade
(mais alors, pourquoi une consultation simulta-
née ?), la dynamique de groupe ne permet pas un
véritable dialogue.
La dynamique de ce petit groupe :
– vise à atteindre un objectif qui n’a pas été fixé
par le patient mais par le consultant qui lui a pro-
posé ce rendez-vous ;
– limite la discussion avec le malade à un interro-
gatoire par chaque consultant qui cherche à obte-
nir les éclaircissements nécessaires pour
atteindre l’objectif formulé par l’un de ses col-
lègues ;
– conduit le patient à un rôle de spectateur des
échanges entre les médecins.
L
E
“
TOUT SOMATIQUE
”
Tous les consultants sont d’accord sur les diffé-
rentes composantes de la douleur – soma-
tiques, émotionnelles, psychologiques, symbo-
liques, et s’accordent à souligner la nécessité
de prendre en compte toutes ces composantes
dans l’appréciation de la prise en charge du
patient.
Bien entendu, les médecins qui participent à des
consultations simultanées connaissent parfaite-
ment ces données fondamentales de la prise en
charge de la douleur.
Mais parce qu’il est extrêmement difficile d’envi-
sager ces différentes composantes au cours
d’une consultation simultanée, son objectif est
réduit à la composante somatique de la douleur.
Au pire, les examens complémentaires du malade
donneraient presque l’impression d’être au
centre de cette consultation pour ceux qui vien-
draient là en observateurs non informés des diffi-
cultés de ce type d’exercice médical !
C
ONCLUSION
❒La douleur anopérinéale chronique nécessite
souvent une prise en charge multidisciplinaire.
De ce fait, la mise en œuvre de consultations
polydisciplinaires est à encourager, qu’elles
soient simultanées ou successives.
❒Seules des raisons de faisabilité justifient que
le malade rencontre simultanément tous les
consultants dans une même salle de consulta-
tion.
❒Mais :
– pour éviter le “tout somatique” ;
– pour privilégier le dialogue plutôt que l’interro-
gatoire ;
– pour permettre d’affronter ses points de vue et
ne pas se limiter à les confronter au cours d’un
échange courtois de points de vue, “policés” en
raison de la présence du patient ;
– pour tenir compte du ressenti de la douleur du
malade par chaque consultant ;
– pour ne pas se contenter d’une prestation de
service de nature technique en donnant son inter-
prétation d’un examen (sinon, pourquoi déranger
le patient ?) ;
❒une seule solution peut être envisagée, qui
consiste à offrir aux patients la possibilité de ren-
contrer individuellement tous les spécialistes
dont ils ont besoin dans un même lieu et dans
une même plage horaire. ■
Expérience
Figure. Consultation
polydisciplinaire.
Le malade est représenté sous forme
d’un ballon. La partie supérieure de la
figure illustre la consultation indivi-
duelle, et la part inférieure, une
consultation simultanée (la flèche
indique la position du ballon).