Le théorème des zéros de Hilbert
Université Pierre et Marie Curie Année académique 2011-2012
Préparation à l’agrégation externe
Leonardo Zapponi
En couverture : David Hilbert (1862–1943) et Amalie Emmy Noether (1882–1935).
Le théorème des zéros de Hiblert
Introduction
Cette note est le résumé d’un cours de préparation à l’agrégation externe orga-
nisé par l’université Pierre et Marie Curie durant l’année académique 2011/2012.
L’objectif est de présenter une démonstration du célèbre théorème des zéros de
Hilbert. Ce résultat a été un moteur majeur dans le développement de la géomé-
trie algébrique au début du vingtième siècle. Étant un sujet largement étudié et
documenté, plusieurs choix d’exposition auraient été envisageable. Il existe par
exemple des démonstrations récentes assez courtes et simples ou encore des ré-
sultat plus généraux tout à fait accessibles pour un candidat à l’agrégation. Nous
avons préféré une présentation plus fidèle à l’original, dans le contenu ainsi que
dans les techniques utilisées. L’exposition est organisée de la manière suivante :
le premier paragraphe est un préambule algébrique nécessaire pour pouvoir entre-
prendre la démonstration du théorème des zéros. Les résultats présentés sont clas-
siques et tournent autour de la notion de dépendance intégrale. Les démonstrations
ne sont pas complexes et illustrent parfaitement le type de raisonnement propre à
l’algèbre commutative classique. Le deuxième paragraphe est entièrement dédié
au lemme de normalisation de Noether. Ce résultat général a été lui-aussi fonda-
mental dans le développement de la géométrie algébrique, c’est d’ailleurs une des
raisons qui nous ont poussés à l’incorporer dans l’exposé. Il permet entre autre
d’introduire la notion de dimension d’un variété algébrique (aspect qui ne sera
toutefois pas abordé dans cette note). La démonstration présentée ici est pratique-
ment identique à celle originale, si ce n’est pour un argument de Nagata permet-
tant de ne pas se borner au cas d’un corps infini. Un des corollaires immédiats du
lemme de normalisation affirme qu’un corps finiment engendré sur un corps est
une extension algébrique de ce dernier ; cet énoncé est un ingrédient crucial de
la démonstration du théorème des zéros. Le troisième paragraphe est une courte
et très incomplète introduction à la géométrie algébrique, et plus particulièrement
4
à la notion d’ensemble algébrique. C’est un passage obligé si l’on veut pouvoir
entrevoir la portée du théorème des zéros de Hilbert, énoncé et démontré dans le
quatrième et dernier paragraphe. L’exposé se termine avec deux applications clas-
siques. L’une d’entre elles, établissant une bijection entre l’ensemble des points
d’un ensemble algébrique et l’ensemble des idéaux maximaux de son anneau de
fonctions régulières, a été une source majeure d’inspiration pour l’introduction
des schémas, objets fondamentaux de la géométrie moderne.
1 Préliminaires algébriques
Définition. Soient ABdeux anneaux. Un élément de Best entier sur As’il
est racine d’un polynôme unitaire à coefficients dans A. On dit que Best entier
sur A, ou que Best une extension entière de Asi tout élément de Best entier sur
A.
Exemple. Si Aest un corps, une extension entière n’est autre qu’une extension
algébrique.
Lemme 1. Soient ABdeux anneaux. Pour tout élément xB, les conditions
suivantes sont équivalentes :
1. L’élément xest entier surA.
2. Le A-module A[x]est de type fini.
3. Il existe un A[x]-module Mcontenant A[x]et de type fini sur A.
4. Il existe un A[x]-module fidèle 1Mde type fini sur A.
Démonstration. On va montrer les implications 12341.
(1 2) Soit f=Xn+an1Xn1+· · ·+a0A[X]un polynôme ayant xpour
racine. Le A-module A[x]est alors engendré par les éléments 1, x, x2, . . . , xn1.
Il est donc de type fini.
(2 3) Il suffit de poser M=A[x].
(3 4) Le A-module A[x]étant contenu dans M, on a en particulier la
relation 1M. En particulier, étant donné un élément aA, la relation aM = 0
entraîne l’identité a·1 = a= 0. On en déduit que Mest fidèle.
1. Un module Msur un anneau Rest findèle si, pour tout xR, l’identité xM = 0 est
équivalente à x= 0.
Préliminaires algébriques 5
(4 1) C’est le point le plus délicat de la démonstration. Fixons des généra-
teurs m1, . . . , mnde M. Pour tout i∈ {1, . . . , n}on a alors les relations
xmi=
n
X
j=1
ui,j mj,
avec ui,1, . . . , ui,n A. En considérant la matrice U= (ui,j )Mn(A), on obtient
alors la relation
(x·1U)
m1
.
.
.
mn
= 0
dans Mn. En multipliant à gauche par la transposée de sa matrice des cofacteurs
de x·1U, on en déduit alors l’identité
det(x·1U)m= 0
pour tout mM. Par fidélité de M, on obtient donc la relation det(x·1U) = 0,
le terme de gauche étant un polynôme unitaire en xà coefficients dans A.
Corollaire 2. Soient ABdeux anneaux. Si deux éléments x, y Bsont
entiers sur Aalors il en est de même pour x+yet xy. En particulier, l’ensemble
des éléments de Bqui sont entiers sur Aest un sous-anneau de B.
Démonstration. Soient met nles degrés de deux polynômes non nuls de A[X]
s’annullant respectivement en xet en y. Les A-modules A[x+y]et A[xy]sont
tous deux contenus dans le A-module A[x, y], qui est de type fini, engendré par
les éléments xiyjpour 0imet 0jn. Le lemme précédent affirme
qu’ils sont alors entiers sur A.
Corollaire 3. Soient ABCtrois anneaux. Si xCest un élément entier
sur Bet Best une extension entière de Aalors xest entier sur A.
Démonstration. Considérons le sous-anneau D=A[b0, . . . , bn1]de B, où f=
Xn+bn1Xn1+· · · +b0B[X]est un polynôme ayant xpour racine. Par hy-
pothèse, l’anneau Best entier sur A; il s’en suit que Dest un A-module finiment
engendré. Il en est alors de même pour le A-module D[x]. En effet, si m1, . . . , mr
sont des générateurs de Dsur A, alors les éléments mixjengendrent D[x]. Le
lemme 1permet alors de conclure.
1 / 12 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !