Professions Santé Infirmier Infirmière N° 64 • juin-juillet 2005
On ne répétera jamais
assez la nécessité d’une
prise en charge précoce
des cancers cutanés.
Prendre en charge
précocement
S’il convient d’éviter le diagnostic
alarmiste par excès, il en va de
même pour un attentisme dange-
reux devant des lésions cutanées
qui sont évocatrices d’un cancer
débutant ou qui sont suspectes.
Car ce sont souvent des lésions
non spécifiques récidivant sur le
même site malgré un traitement
approprié. Les premiers signes
d’un cancer cutané traduisent la
désorganisation du renouvelle-
ment épidermique, et dans un
deuxième temps, l’extériorisation
de la lésion tumorale possède
des aspects cliniques qui sont
d’autant moins spécifiques que le
temps d’évolution est court.
Analyse histologique
La sélection des lésions cutanées
nécessitant une biopsie exérèse
(avec la section passant sur tous
les plans en tissu sain) est primor-
diale puisque l’analyse histolo-
gique apporte le diagnostic de
certitude. Il est acquis qu’un can-
cer non invasif reste intrader-
mique ou bien s’il dépasse la
membrane basale épidermique, il
est limité au derme papillaire.
Comme le rappelle le Dr M. Lar-
règue, « la définition clinique d’un
cancer débutant est difficile, et
plus une lésion est vue à un
stade précoce, moins l’aspect cli-
nique est caractéristique. À quel-
ques exceptions près, lorsqu’on
affirme cliniquement le cancer
cutané et son type – basocellu-
laire ou spinocellulaire – l’épithé-
liome comporte déjà des signes
d’extension ». Une lésion minime
cutanée suspecte peut être négli-
gée par le malade qui s’habitue à
sa lésion malgré sa lente crois-
sance. Elle peut passer inaperçue
par le médecin ou elle peut être
enlevée incomplètement ; dans
ce dernier cas, une reprise chirur-
gicale est nécessaire puisque
dans cette situation il y a 20 % de
récidive in situ. Entre le moment
où les cellules mutées forment
une lésion néoplasique et celui
de l’apparition clinique du cancer,
se passe un délai plus ou moins
long, de l’ordre de quelques mois
(épithélioma induit par les agents
physiques) à plusieurs années
pour la transformation d’une kéra-
tose solaire.
Aspects cliniques précoces
Quels sont les aspects cliniques
précoces des cancers cutanés ?
D’abord, l’aspect des lésions
minimes, seulement larges de
quelques millimètres, peut être
évocateur des cancers cutanés
débutants, à savoir : une papule
perlée à surface lisse rosée pou-
vant être pigmentée par hémorra-
gie intralésionnelle (plusieurs
papules peuvent être groupées
autour d’une plage centrale éro-
sive croûteuse ou atrophique), ou
une papule dont le sommet est
centré par une kératose prenant
parfois la morphologie d’une
petite corne. Ensuite, il faut savoir
qu’une lésion dermatologique
non spécifique est susceptible
d’être en rapport avec une lésion
néoplasique ou un cancer à
minima lorsqu’il s’agit d’une
lésion croûteuse recouvrant une
érosion sur une ulcération persis-
tante. Les traitements réalisés sur
une kératose solaire, une verrue
ou une corne (cryothérapie, élec-
trocoagulation, etc.) n’entraînent
pas la guérison, ou si la lésion est
effacée, elle récidive au même
endroit.
On comprend alors l’importance
d’une surveillance médicale
régulière, en particulier des sujets
ayant un risque accru de déve-
lopper des cancers cutanés. Il
s’agit de sujets porteurs d’une
dermatose précancéreuse, telle
que la cicatrice de brûlure, la
radiodermite, la cicatrice sur une
zone insolée, la kératose solaire.
À noter le nombre croissant des
individus aux antécédents de
photo-exposition répétitive qui
ont un long espoir de vie.
D’autres sujets sont à risque bien
que sans dermatose particulière,
comme ceux qui sont atteints
d’un syndrome de Gorlin (trans-
mis de façon autosomique
dominante et caractérisé par l’ap-
parition de cancers basocellu-
laires en peau saine principale-
ment sur les zones ensoleillés),
ceux qui ont été exposés aux
hydrocarbures ou à des inges-
tions d’eau arsenicale ainsi que
les malades greffés subissant un
traitement immunodépresseur,
et les patients ayant reçu une chi-
miothérapie antitumorale ou une
photochimiothérapie (en fonc-
tion des doses reçues). Enfin, la
peau pathologique des sujets
atteints de Xéroderma pigmento-
sum ou d’épidermodysplasie ver-
ruciforme favorise l’apparition
d’un cancer.
Ludmila Couturier
Entretiens de Bichat 2004
>> DOSSIER
Le diagnostic des cancers cutanés au début de leur évolution, c’est-à-dire à un stade
préinvasif est capital, vu que la guérison définitive avec des moyens simples est pos-
sible. S’il convient d’éviter le diagnostic par excès, il en va de même pour un attentisme
dangereux devant des lésions cutanées.
Les cancers cutanés
Nécessité d’un diagnostic précoce
CANCÉROLOGIE 25
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