dans 85 % des cas de SMLE. Ces canaux ioniques sont, pour
certains de leurs sous-types, communs aux neurones et aux
cellules cancéreuses, et la pathogénie apparaît donc clairement
expliquée par cette immunité croisée. Il est possible ainsi,
contrairement aux autres SP à expression neuro, de reproduire
la maladie chez l’animal par transfert passif. Les anticorps blo-
quant la transmission de l’influx nerveux au niveau de la ter-
minaison axonale, il s’agit d’un trouble présynaptique, au
contraire de la myasthénie, dans laquelle c’est la partie post-
synaptique de la jonction neuro-musculaire qui est attaquée.
Cliniquement, la confusion n’est en fait guère possible. Il s’agit,
certes, d’une fatigabilité musculaire, mais celle-ci est essentiel-
lement proximale, et ne touche que rarement les muscles oculo-
moteurs ou bulbaires. Elle s’associe à une aréflexie tendineuse
des membres inférieurs, et fréquemment à une dysautonomie
(sécheresse de bouche, anomalies pupillaires). Une particularité
du SMLE réside dans le phénomène de facilitation : la poursuite
de l’effort peut améliorer transitoirement le déficit et l’aréflexie.
C’est surtout à l’examen électrique que cela pourra être mis en
évidence, avec un incrément des potentiels d’action lors de la
stimulation à haute fréquence (laquelle est assez mal tolérée),
contrastant avec un décrément à basse fréquence. L’élément dia-
gnostique majeur est en fait constitué par l’élévation du titre des
anti-VGCC. On doit également rechercher l’anti-Hu, qui est par-
fois associé, avec ou sans signes cliniques évocateurs.
Sur le plan thérapeutique, l’intérêt des immunoglobulines
intraveineuses semble démontré. Il est également possible
d’améliorer les symptômes par un médicament agissant sur les
canaux ioniques, la 3-4 diaminopyridine, disponible dans les
pharmacies hospitalières.
Cette liste de syndromes et d’anticorps n’est pas limitative. On
décrit ainsi des rétinopathies paranéoplasiques très sévères,
également associées au CBPC, par atteinte des photorécep-
teurs, dues à des anticorps (anti-CAR, pour cancer associated
retinopathy) qui se lient à une protéine intervenant dans la
phototransduction. La dermato-polymyosite est un autre
exemple classique, même si elle n’est paranéoplasique que
dans 10 % des cas environ (davantage si les signes cutanés
sont présents). Enfin, la liste d’anticorps s’allonge régulière-
ment (anti-Ta, anti-Ma, anti-amphiphysine, anti-CV2), en
même temps que se compliquent les associations à divers
sièges néoplasiques.
DIAGNOSTIC
Lorsque le SP à expression neuro est révélateur, la tâche du
neurologue n’est pas toujours aisée, mais on est désormais
grandement aidé par le dépistage des anticorps.
Chez un patient porteur d’un cancer connu, la difficulté varie
selon le SP à expression neuro présenté. Ainsi, il est relativement
aisé de rattacher un syndrome cérébelleux à une métastase de la
fosse postérieure par un scanner avec injection (l’IRM étant
généralement superflue, sauf pour de rares cas de méningite car-
cinomateuse non visualisée au scanner). Le SMLE est en
revanche souvent méconnu, s’il est noyé dans l’altération de
l’état général, ou si l’aréflexie est attribuée aux drogues neuro-
toxiques. Celles-ci peuvent donner un tableau proche d’une NSS,
mais l’intensité de l’ataxie et l’asymétrie des troubles sont des
éléments d’orientation ; surtout, la NSS se développe rarement en
cours de chimiothérapie et de réduction de la masse tumorale.
ASPECTS THÉRAPEUTIQUES
Jusqu’à présent, seuls une minorité de patients ont tiré bénéfice
des thérapies immuno-suppressives mises en œuvre, qu’il s’agisse
des médicaments classiques, des plasmaphérèses ou des immuno-
globulines intraveineuses (11). On postule que les lésions neuro-
nales sont déjà irréversibles au moment du diagnostic. La préco-
cité du traitement (IgIV par exemple) apparaît d’ailleurs comme
un facteur important du succès possible de ces thérapeutiques.
Leur danger potentiel serait cependant de déprimer aussi l’immu-
nité de lutte antitumorale, les options du neurologue risquant
d’aller à l’encontre de celles du cancérologue. Citons cependant
le cas de l’opsoclonus-myoclonus, qui justifie une corticothéra-
pie, peut-être du fait d’une intense réaction inflammatoire.
Un traitement agressif du cancer apparaît prioritaire, d’autant
que, comme il a été dit, certaines données suggèrent un
meilleur pronostic lorsqu’un cancer est associé à un SP à
expression neuro.
Chez les sujets anti-Hu symptomatiques gardant un bilan néo-
plasique négatif, on peut observer une survie prolongée si le
nursing permet d’éviter les conséquences de la neuronopathie
ou de l’encéphalite.D’ores et déjà, des essais de vaccination
anti-Hu sont envisagés chez l’homme, après des résultats posi-
tifs sur la croissance tumorale chez l’animal (8).■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Méd Chir Neurologie. Elsevier, Paris 1998 ; 17-162-A-10, 6 p.
2. Voltz R.D., Posner J.B., Dalmau J., Graus F. Paraneoplastic encephalomye-
litis : an update of the effects of the anti-Hu immune response on the nervous
system and tumour. J Neurol Neurosurg Psychiatry 1997 ; 63 : 133-6.
3. Darnell R.B. The importance of defining the paraneoplastic neurologic disor-
ders. New Engl J Med 1999 ; 340 : 1831-3.
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sory neuronopathy from lung cancer. Neurology 1995 ; 35 : 538-43.
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J.Y. Cell-mediated autoimmunity in paraneoplastic neurological syndromes with
anti-Hu antibodies. Ann Neurol 1999 ; 45 : 162-7.
6. Dalmau J.O., Furneaux H.M., Cordon-Cardo C., Posner J.B. Detection of
the anti-Hu antibody in the serum of patients with small cell lung cancer – a
quantitative Western blot analysis. Ann Neurol 1990 ; 27 : 544-52.
7. Dalmau J., Graus F., Cheung N.K. et coll. Major histocompatibility proteins,
anti-Hu antibodies, and paraneoplastic encephalomyelitis in neuroblastoma and
small cell lung cancer. Cancer 1995 ; 75 : 99-109.
8. Carpentier A.F., Rosenfeld M.R., Delattre J.Y., Whalen R.G., Posner J.B.,
Dalmau J. DNA vaccination with HuD inhibits growth of a neuroblastoma in
mice. Clin Cancer Res 1998 ; 4 : 2819-24.
9. Dalmau J.O., Graus F., Rosenblum M.K., Posner J.B. Anti-Hu-associated
paraneoplastic encephalomyelitis/sensory neuronopathy : a clinical study of
71 patients. Medicine 1992 ; 71 : 59-72.
10. Dalmau J.O., Posner J.B. Paraneoplastic syndromes. Arch Neurol 1999 ;
56 : 405-8
11. Blaes F., Strittmatter M., Merkelbach S et coll. Intravenous immunoglobulins in
the therapy of paraneoplastic neurological disorders. J Neurol 1999 ; 246 : 299-303.
MISE AU POINT
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La Lettre du Pneumologue - Vol. II - n° 5 - octobre 1999
Adresses des deux principaux laboratoires en France recherchant les anti-
corps paranéoplasiques
•
•Laboratoire Inserm U495 (Pr Delattre, Dr Benyahia), La Salpêtrière, 47,
boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris.
•
•Laboratoire Inserm U433 (Dr Honnorat), Hôpital neurologique, 59, boule-
vard Pinel, 69394 Lyon Cedex 3.
Prélèvements sur tube sec 7-10 ml, envoi non express, température ambiante