Hy p er ten s ion artér iel le par intoxi cat ion à la ré gl isse “ L’ apop lexie de Stend ha l ” M. Brahimi*, B. Lesperres** (*hôpital Jean-Verdier, Bondy ; ** Cabinet médical Le Bourget) L’ intoxication par la réglisse a été soulevée par deux faits historiques : le premier est “Stendhal est mort d’apoplexie”, le deuxième est que Stendhal absorbait une grande quantité de réglisse. L’absorption d’importantes quantités de cette substance est une cause d’HTA devenue rare mais qui doit être systématiquement recherchée par l’interrogatoire chez tout patient hypertendu, particulièrement lorsqu’une hypokaliémie est présente. Comme toute intoxication, l’ingestion de grandes quantités de produits contenant de la réglisse entraîne les mêmes symptômes cliniques que les tumeurs de la corticosurrénale sécrétant un excès d’aldostérone (syndrome de Conn : hyperplasie bilatérale des surrénales) : fourmillements des extrémités, crises de tétanie, fatigue musculaire, voire paralysies, polyurie et polydipsie et HTA avec déplétion potassique. Depuis des temps immémoriaux, les humains utilisent la réglisse tant comme aliment que comme médicament. Les Grecs anciens l’avaient nommée Glycyrrhiza à partir des mots glukos, sucre et r i z a, racine. Jusqu’au X I I I e siècle, la réglisse provenait exclusivement de plantes poussant à l’état sauvage. C’est à cette époque que l’on a commencé à la cultiver en Europe méditerranéenne. la composition d’apéritifs, de liqueurs et de bières. On la trouve sous forme d’extrait ou en poudre dans les épiceries spécialisées. Tant en Asie qu’en Europe, la réglisse fait partie d’une multitude de préparations médicinales traditionnelles. En médecine traditionnelle chinoise, elle est utilisée pour “harmoniser” les différents ingrédients dans les formules médicinales et l’on dit qu’elle “tonifie” le Q i, soit l’ “Énergie vitale” selon les médecins chinois. En Occident, la réglisse fait encore l’objet d’un important commerce puisque l’on s’en sert pour aromatiser le tabac. À ne pas confondre avec l’anis, la réglisse est extraite des racines d’une plante vivace du sud de l’Europe. Très utilisée en confiserie, elle est utilisée pour la confection de toutes sortes de pastilles et de bonbons. Elle peut aussi être infusée. En Scandinavie et en Russie, elle entre dans Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. II - n° 2 - avril-mai-juin 2004 Nous retrouvons la réglisse dans de nombreux produits ingérés de façon régulière. Ainsi, dans certaines friandises (Zan), des boissons telles que le coco, l’Antésite, les alcools anisés du Sud (pastis, etc.) et surtout, depuis quelques années, dans un grand nombre de pastis sans alcool, dans les chewing-gums aidant au sevrage tabagique et dans un grand nombre de produits vendus pour donner bonne haleine. Le Zan, le coco, l’Antésite contiennent 14 g de glycyrrhizine (ou d’acide glycyrrhétinique) pour 100 g de substance ; il est donc facile d’atteindre des doses toxiques. En effet, pour avoir des effets délétères, il faut absorber plus de 0,5 g par jour de glycyrrhizine. L’arrêt de l’intoxication guérit l’HTA et permet la normalisation de la pression artérielle et de la kaliémie dans les semaines qui suivent l’arrêt. To u t e f o i s , sans aller jusqu’à l’intoxication, la consommation de réglisse ou d’extraits de suc de réglisse n’est pas souhaitable chez les patients hypertendus comme chez les patients présentant un syndrome du QT long congénital (hypokaliémie). 87