Professions Santé Infirmier Infirmière N° 64 • juin-juillet 2005
M
alades, soignants, cher
-
cheurs, professionnels
de l’information, en
harmonie avec la Mission inter-
ministérielle pour la lutte contre le
cancer (MILC), ont apporté une
contribution obstinée à l’atteinte
des ambitieux objectifs du Plan.
Une dimension nouvelle
La MILC fait justement remarquer
que l’axe prévention-dépistage a
pris durant ces deux ans une
dimension nouvelle. Sachant que
le “mieux-manger”, l’encourage-
ment à l’activité physique régulière,
la protection solaire estivale n’ont
pas été oubliés, une cible majeure
a néanmoins été privilégiée : la
consommation tabagique. Des
outils pédagogiques aux interdits
législatifs en passant par la création
de consultations de tabacologie ou
de sites spécifiques pour l’arrêt du
tabac
*
, tous les moyens de com-
munication et d’incitation au
sevrage ont été utilisés. À titre illus-
tratif parmi les nombreuses initia-
tives : le prix du tabac a augmenté
de 42 % en un an (janvier 2003-
janvier 2004) ; la vente est interdite
au moins de 16 ans ; 500 con-
sultations
de tabacologie hospita-
lières et non hospitalières sur tout
le territoire (dont 20 sans rendez-
vous) ; 15 000 volontaires affiliés à
la CMU vont bénéficier d’un se-
vrage nicotinique gratuit à titre
expérimental durant le premier
semestre 2005 ; un contrôle durci
de la loi Evin, en particulier pour les
interdictions de fumer dans les
lieux publics et une démarche
volontaire “entreprise sans tabac”
pour 30 % d’entre elles en Île-de-
France, liste, bien entendu, non
exhaustive.
Quant aux mesures d’accélération
du dépistage, les organes à haut
risque en ont largement bénéfi-
ciées.
Le sein
: 7 millions de femmes
(50-74 ans) convoquées tous les
2 ans pour une mammographie
gratuite ; une journée nationale de
dépistage le 1er octobre.
Le côlon : généralisation sur tout
le territoire pour 2007 (1/4 actuel-
lement) du dépistage organisé,
tous les 2 ans, du cancer colorec-
tal. Des consultations d’oncogéné-
tique dans toute la France de telle
sorte que 15 000 personnes à
risque de prédisposition génétique
ont déjà pu subir des tests spéci-
fiques ; en cas de frottis douteux,
remboursement intégral du test
HPV, etc.
La prise en charge des patients,
aussi bien médicale qu’environne-
mentale, n’a pas été en reste. Là
encore, la liste des innovations –
ou des améliorations – impres-
sionne. Parmi ces progrès : dispo-
sitifs “d’annonce de la maladie”
quasi généralisés de telle façon
que dès 2005 tous les nouveaux
patients puissent en bénéficier ;
augmentation du système de prise
en charge des malades par les
réseaux qui deviendront obliga-
toires en 2007 ; développement
progressif (plus 1 700 places d’ici
fin 2005) de l’HAD, l’objectif final
étant d’atteindre le chiffre de
8 000 sachant que 57 % revien-
nent aux malades atteints de can-
cers ; développement des chimio-
thérapies à domicile qui peuvent
désormais être délivrées par les
pharmacies hospitalières ; ouver-
ture aux patients cancéreux des
soins infirmiers à domicile, alors
qu’ils étaient jusqu‘alors réservés
aux patients de plus de 60 ans ;
191 structures antidouleur prévues
d’ici fin 2005 (178 fin 2004), tan-
dis que plus de la moitié du terri-
toire bénéficie d’un réseau de
soins palliatifs dont la forme “à
domicile” croît régulièrement.
Les moyens
Soignants, équipements, matériels
et médicaments, s’ils sont chroni-
quement considérés comme
insuffisants, ont néanmoins profité
de l’élan Plan cancer. Soixante-cinq
postes d’internes en cancérologie
ainsi que 22 postes de chefs de
clinique supplémentaires entre
2003 et 2004, 130 postes de psy-
cho-oncologues de plus depuis
2003, 70 en radiologie depuis
2004, 32 radiophysiciens en for-
mation pour l’année 2004, autant
d’atouts humains avec des outils
plus performants. Cent trente-sept
IRM et 183 scanners nouveaux en
2003-2004, 28 appareils de radio-
thérapie au cours de la même
période mis en service ; 40 mil-
lions d’euros en 2004 et autant
pour 2005 accordés aux médica-
ments coûteux et innovants ;
depuis février 2005, prise en
charge totale d’un modèle de pro-
thèse mammaire externe et dans
les mois à venir, de prothèses
capillaires.
Il faut y ajouter les apports maté-
riels, humains et financiers offerts
à la recherche, en particulier par le
biais des cancéropôles qui ont la
charge de 32 projets de recherche
avec un budget de 35 millions
d’euros pour 2 ans.
L’information
Dernier domaine sur lequel ont
porté les efforts du Plan cancer :
>>
>> DOSSIER
Mars 2003 : lancement du Plan cancer. Avril 2005 : à peine au milieu du gué puisque son
aboutissement est prévu pour 2007, on doit reconnaître que tous les acteurs partici-
pant à cette entreprise gigantesque ont déjà accompli un travail remarquable.
L’implication est générale. Mais au-delà des mots : le bilan.
Plan cancer
Le bilan après deux ans
CANCÉROLOGIE 21
l’information du malade. Parte-
naire incontournable, la Ligue
contre le Cancer a prêté son
concours pour la mise en place de
lieux privilégiés d’échanges aussi
bien dans les centres hospitaliers
(“Espaces Rencontre Information”
[ERI]) qu’en dehors des structures
de soins (“Kiosques Information
Santé”). Un million et demi de
guides d’information sur la
convention Belorgey ont été diffu-
sés par les organismes bancaires
et les associations de malades.
Des sites Internet (plancancer.fr,
fnclcc.fr – fédération nationale des
centres de lutte contre le cancer)
et des serveurs vocaux (Cancer
Info Service : 0810 810 821) per-
mettent un accès permanent à
toutes les sources de connais-
sance et de soutien concernant
leur maladie.
Au vu de ce qui a donc déjà été
entrepris, amélioré, confirmé de-
puis la mise en route du Plan can-
cer, malades et soignants peuvent
donc faire preuve d’un optimisme
raisonnable concernant la suite de
cette “grande cause nationale”.
Reste que 2007, terme prévu, ne
devra bien entendu pas marquer
la fin de la vigilance de tous les
acteurs de la cancérologie.
Gérard Mégret
* (www.tabac-info-service.com)
Il devient tous les ans plus
difficile de choisir les infor-
mations à retenir tant la
richesse de cette incontournable
réunion s’affirme.
En voici néanmoins un florilège.
Graisses et cancer du sein
On ne tarit plus d’éloges, et
depuis fort longtemps, sur les
bienfaits cardiovasculaires d’un
régime pauvre en graisses ali-
mentaires. Par ailleurs, le rapport
direct entre l’alimentation et l’ap-
parition de certains cancers
(digestifs et de sein en particu-
lier) fait l’objet de convictions de
plus en plus affirmées. Mais les
résultats de l’étude de R. Chle-
bowski (Institut de recherche bio-
médicale de Los Angeles) por-
tant sur le risque de récidive du
cancer du sein et sur le régime
alimentaire
vont encore plus loin :
2 437 fem
mes (48-79 ans) ayant
été opérées de leur cancer mam-
maire diagnostiqué précocement
ont été randomisées en deux
groupes. Toutes ont bien enten-
du bénéficié des thérapeutiques
habituelles pour leur cancer. Mais
le premier groupe, après “prise
en charge diététique”, a sensible-
ment diminué (environ 30 %) sa
consommation en graisses par
rapport au groupe “standard”.
Après 60 mois, le taux de réci-
dives chez les femmes sous régi-
me s’est révélé de 25 % plus
faible que chez celles n’ayant pas
modifié leur alimentation.
Quant aux hypothèses pouvant
rendre compte de cette améliora-
tion nette du risque sous régime
pauvre en graisses, elles seraient
en faveur d’une réduction de la
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production d’estrogènes endo-
gènes ainsi que de la densité
mammaire ; autant de facteurs
de risque importants de cancer
du sein. Ces résultats s’avèrent
suffisamment nets pour qu’il soit
désormais envisagé d’accompa-
gner le traitement global du can-
cer du sein de recommandations
diététiques visant à réduire l’ap-
port des graisses alimentaires.
Reste à se demander si l’on peut
aller jusqu’à conseiller ce type de
comportement alimentaire à titre
de prévention primaire du cancer
du sein. A. Mc Tiernan (Seattle)
n’est pas loin de le penser puis-
qu’elle rappelle que d’une part, la
surcharge pondérale en post-
ménopause représente un fac-
teur de surrisque d’environ 30 à
50 % et, d’autre part, certaines
études font penser que la réduc-
tion du poids permettrait de
réduire le risque.
Les statines contre certains
cancers ?
Avant d’y voir un véritable nou-
veau traitement (ou adjuvant ?)
anticancéreux, il faudra attendre
encore quelques études complé-
mentaires. Néanmoins, les résul-
tats d’un travail rétrospectif (cri-
tique qui lui est adressée) de
grande envergure présenté à
l’ASCO sur un rôle protecteur
éventuel des statines vis-à-vis de
certains cancers, ne manquent
pas de surprendre. Les “Vété-
rans” américains (anciens com-
battants) forment un groupe ré-
pertorié et suivi de 1 400 000 per
-
sonnes dont V. Khurana a extrait
près de
500 000 sujets dont
92 % d’hom
mes de 62 ans
d’âge
Infos ...
Mésothéliome :
un test
de dépistage
précoce
D’une part en
progression (4,7 %
chez l’homme et
6,8 % chez la femme
en 2000), d’autre part
de pronostic sévère,
car souvent découvert
tardivement et de
nombreuses années
après l’exposition
chronique à l’amiante,
le mésothéliome va
désormais disposer
d’un test sanguin de
dépistage précoce qui
permet de détecter
des protéines
anormales liées
à la mésothéline bien
avant que les
premiers signes
cliniques
n’apparaissent.
DOSSIER
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>>
>> DOSSIER
ASCO Digest
Quelles nouveautés ?
Chaque année, le congrès de l’ASCO (American Society of
Clinical Oncology) apporte son lot de grandes et petites
innovations. De la médecine expérimentale aux thérapies
médicamenteuses ou géniques en passant par l’épidé-
miologie...
Mieux que
la mammographie ?
On disposait de la mammogra-
phie classique, de l’échographie
et de l’IRM pour l’exploration de
la glande mammaire. Le PET-
scan (tomographie d’émission
par positron) vient de montrer –
sur un échantillon de 23
patientes – qu’elle peut détecter
de petites tumeurs malignes
avec de faibles doses de mar-
queur (18-FDG). Des perfor-
mances intéressantes qui
attendent une rapide confirma-
tion, afin de juger de sa sensibi-
lité et de sa spécificité à grande
échelle.
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