FLASH MARCHÉS Quelle dynamique en France et en zone Euro ? Philippe Waechter, directeur de la recherche économique de Natixis Asset Management, fait le point sur la situation économique en France et en zone Euro. Quatre graphes sur la dynamique de la zone Euro Le PIB de la zone Euro a été quasi stable au 2ème trimestre (+0.2% en taux annualisé) après une hausse de 0.8% durant les trois premiers mois de l’année. Sur un an sa progression est de 0.7% et l’acquis de croissance pour 2014 à la fin du deuxième trimestre est de 0.6% (croissance moyenne de 2014 si le PIB, en niveau, aux troisième et quatrième trimestres restait égal à celui du deuxième trimestre. C’est une approximation utile). Le premier graphe présente le PIB en niveau et à prix constants. La ligne rouge représente la tendance calculée de 2000 au premier trimestre 2008 et prolongée jusqu’au deuxième trimestre 2014. L’écart entre le PIB actuel et cette tendance est de 12% ce qui est spectaculaire. La tendance en vert traduit le profil de l’activité durant la reprise du point bas de 2009 au premier trimestre de 2011. On constate ensuite une inflexion provoquée par la crise des dettes souveraines et la mise en place de politiques d’austérité. Par rapport au premier trimestre 2011 le PIB est actuellement en repli de 0.36% (-0.1% en taux annualisé). Depuis le début de l’amélioration au premier trimestre 2013 on constate que la progression de l’activité est très lente à 0.8% en taux annualisé. Le rythme de progression est toujours très loin du chiffre de 1.9% constaté en tendance de 2000 à T1 2008. www.nam.natixis.com Le deuxième graphique présente la croissance par trimestre au sein des pays de la zone. Le PIB global est en progression de 0.2% en taux annualisé après une augmentation de 0.8% sur les trois premiers mois de l’année. On ne dispose pas du détail permettant de comprendre l’origine de cette hausse. www.nam.natixis.com L’Allemagne est en repli de -0.6 % en taux annualisé. Le recul des exportations et de l’investissement sont au cœur de cette inflexion. La dynamique un peu moins vive des pays émergents (Asie notamment) mais aussi des principaux partenaires de l’Allemagne (France, Italie) explique cette moindre contribution des exportations. Le détail de l’investissement devrait permettre une analyse plus précise du repli de l’investissement. Il y a probablement un facteur fort lié à la construction dont la progression a été forte au premier trimestre en raison d’une période météorologique plus clémente. Cela affecte le deuxième trimestre en raison d’un démarrage des constructions plus précoce (on ne dispose que d’éléments non chiffrés pour l’instant). Les dépenses de consommation et du gouvernement ont eu une contribution positive. La France a un profil préoccupant sur les 4 derniers trimestres. La tendance est voisine de 0%. L’Italie est retombée en récession, si elle en était jamais sortie. Le PIB a reculé pour le deuxième trimestre consécutif de -0.8% après -0.4%. Le détail du PIB manque mais l’institut italien insiste sur le commerce extérieur comme facteur pénalisant. Cela signale aussi la fragilité de la demande interne incapable de le contrebalancer. En Espagne le PIB a progressé de 2.4% au deuxième trimestre après 1.5% lors des 3 premiers mois de l’année. Si l’on regarde la décomposition faite par la Banque d’Espagne il y a une dynamique interne et externe forte au deuxième trimestre. L’économie rebondit et renforce progressivement sa demande interne même si celle ci reste à un niveau très bas. Le rebond de l’économie néerlandaise est spectaculaire passant de -1.5% à +2.2%. Pourtant si la consommation est un peu plus solide, le reste de l’économie reste très fragile. L’investissement a reculé de 11% tirant vers le bas la demande interne. Celle-ci recule pour le deuxième trimestre consécutif et entraine avec elle les importations. En d’autres termes, malgré le rebond de la consommation la demande interne a toujours une allure médiocre réduisant de fait les importations. La hausse des exportations n’est pas suffisante pour se réjouir. Au Portugal, le rebond est marqué puisque sur le trimestre le PIB progresse de 2.5% après un recul de -2.2% sur les trois premiers mois de l’année. Cependant, en l’absence de détails sur la composition du PIB il est difficile de savoir ce qui a rebondi en raison de la volatilité extrême des données portugaises au premier trimestre: l’investissement avait chuté de 16% (taux annuel) et les exportations de 7.5% alors que la consommation progressait de 0.9%. Selon l’institut statistique portugais le point à relever est une hausse des exportations. On ne dispose pas de plus de détail. En Belgique l’activité a nettement ralenti passant de 1.5% cet hiver à 0.4% au printemps. On ne dispose d’aucune information sur le deuxième trimestre à l’exception de la variation du PIB. A l’exception de l’Espagne, les chiffres et le détail disponibles ne donnent pas un signal de robustesse de l’économie de la zone Euro. www.nam.natixis.com Le troisième graphique présente l’évolution annuelle du PIB et l’acquis pour 2014. On constate que les années 2012 et 2013 ont été médiocres dans tous les pays, y compris l’Allemagne. Les chiffres plus positifs observés en 2014 en Espagne, aux Pays-Bas, au Portugal et même en Belgique ne sont pour l’instant que des corrections à cette longue période de récession (sauf la Belgique). L’Italie entre dans la troisième année de contraction de son activité et la France dans sa troisième année consécutive de croissance à moins de 0.5%. Au regard des chiffres du premier trimestre et de ceux disponibles pour le deuxième, la source de cette fragilité conjoncturelle reflète une demande interne bien insuffisante, notamment du côté de l’investissement. Le risque de déflation ou d’inflation durablement très réduite ne va pas inverser cette tendance spontanément car les négociations salariales vont se faire sur des bases réduites ce qui n’améliorera pas les perspectives de demande interne. La voie de l’investissement reste la bonne pour créer une dynamique plus robuste. Le quatrième graphique visualise l’évolution en niveau du PIB depuis le début de la crise en 2008. J’ai pris ici comme référence le premier semestre 2008. Sur une métrique similaire, les Etats-Unis sont à 107 et le Royaume Uni à 100.6. La progression est donc limitée pour les quatre pays de tête (Allemagne, Autriche, Belgique et France) par rapport aux USA. L’amélioration observée en Espagne, au Portugal ou encore en Finlande est encore réduite au regard du gap considérable par rapport à 2008. C’est encore pire pour l’Italie. En Grèce, l’économie tend à se stabiliser comme le montre le graphe spécifique à ce pays. Rappelons simplement que le repli de son activité est proche de 25% depuis le point haut. www.nam.natixis.com www.nam.natixis.com La France stagne pour le deuxième trimestre consécutif Pour le deuxième trimestre consécutif l’activité de l’économie française mesurée par le PIB a stagné. Sur un an, ce PIB est en hausse de 0,1% et l’acquis de croissance est de 0,3% (croissance moyenne en 2014 si le niveau du PIB en T3 et T4 restait égal à celui de T2). Le gouvernement a affiché sa nouvelle prévision de croissance à 0,5%. Pour y arriver il faut un rebond de l’activité de 0,30% tant au troisième qu’au quatrième trimestre (soit 1,2% en taux annualisé). Une telle occurrence n’est pas arrivée depuis 2010. Pour l’instant on peut prendre ce taux de croissance de 0.5% comme plafond de la prévision pour 2014. Un tel changement de prévisions de la part du gouvernement valide, comme l’a évoqué Michel Sapin ce matin, l’abandon d’un objectif de déficit public à 3.8% pour 2014. Il sera supérieur à 4%. Le gouvernement a également annoncé une prévision de croissance de 1% l’an prochain. Après une croissance de 0,5% en 2014 cela suggère une progression de l’activité de 0.25% par trimestre. J’espère que ce n’est pas trop ambitieux. Le premier graphe présente le PIB en niveau et sa tendance, en rouge, calculée sur la période allant de 2000 au premier trimestre de 2008. Le taux de croissance associé à cette tendance est de 1,8%. Depuis le point bas du 1er trimestre 2009, le taux de croissance moyen n’a été que de 1,05%. L’écart entre le PIB et la tendance est de 9,1% à la fin du deuxième trimestre de 2014. Ce graphique permet de voir la rupture marquée de 2011 et ainsi l’impact de la crise des dettes souveraines en zone Euro et des politiques d’austérité prônées par Bruxelles qui ont emporté en récession l’Espagne, l’Italie et le Portugal notamment. www.nam.natixis.com Le détail des contributions permet de savoir d’où vient la progression de l’activité. C’est ce que montre le graphe suivant. Au cours du deuxième trimestre 2014, deux postes ont eu une contribution positive : la consommation des ménages et les dépenses gouvernementales. Les trois autres, l’investissement, le commerce extérieur et les stocks, ont tiré l’activité vers le bas. Le rebond de la consommation au deuxième trimestre n’est probablement que la compensation du repli constaté sur les trois premiers mois de l’année. Si l’on regarde dans le détail, le mouvement de rebond ne s’opère que sur les biens manufacturés et l’énergie. C’est ce que disaient déjà les chiffres mensuels. En revanche les services ont évolué au même rythme lent qu’au premier trimestre. Il s’agit donc davantage d’un rattrapage que d’un changement de trajectoire. Le point intéressant est celui des dépenses gouvernementales. Elles ont systématiquement une contribution positive. Cela montre bien leur importance dans la dynamique de la croissance française. Les réduire trop rapidement c’est prendre un risque alors que la demande privée reste sur une allure médiocre. Le problème majeur est le nouveau repli de l’investissement (barre lilas). Les deux graphiques ci-dessous traduisent bien les interrogations relatives à cet indicateur. Le premier est la décomposition de l’investissement entre entreprises non financières, ménages (logement) et investissement public. Les ménages n’investissent plus en net depuis 10 trimestres; pas étonnant que l’allure des prix de l’immobilier ne soit plus flamboyante. L’investissement public est neutre et ne crée pas d’impulsion sur l’activité. Enfin l’investissement des entreprises non financières repart à la baisse depuis deux trimestres après une année 2013 plus favorable. www.nam.natixis.com La question majeure reste celle de l’investissement productif dont l’objectif est d’alimenter la productivité et la croissance potentielle. Pour mesurer son évolution, le taux d’investissement est un indicateur intéressant. www.nam.natixis.com Après avoir progressé vivement à partir de 2005, ce taux d’investissement est stable depuis 2010. Les dépenses en biens d’équipement évoluent au même rythme que le PIB, c’est à dire pas très vite. C’est le facteur le plus préoccupant d’autant que la politique économique depuis la mise en place du CICE puis de l’annonce du pacte de responsabilités est centrée sur l’investissement. Il faut probablement dessiner un cadre de croissance plus stable pour l’activité économique et créer une impulsion via l’investissement public (à arbitrer avec des dépenses de fonctionnement). L’enjeu de la politique économique et de sa crédibilité est là. Une autre mesure préoccupante est celle de la croissance de long terme. Le graphe ci-dessous retrace la croissance sur 5 ans depuis 1950. On voit bien sur ce graphe les différentes périodes de l’économie française depuis le début des années 50. La période des 30 Glorieuses avec un taux de croissance de 5 à 6% en moyenne. L’économie française décollait et se reconstruisait. La période après le premier choc pétrolier et la fin du rattrapage du milieu des années 70 jusqu’au milieu de la première décennie des années 2000. La croissance moyenne est un peu supérieure à 2%. Depuis 2008 il y a une rupture et sur les 5 dernières années le taux de croissance moyen n’est que de 1%. Ce n’est pas suffisant et c’est pour cela que l’économie et son mode de fonctionnement doivent changer. Rédigé le 18/08/2014 www.nam.natixis.com Natixis Asset Management Société anonyme au capital de 50 434 604,76 € Agrément AMF n°GP 90 009 - RCS Paris n°329 450 738 21, quai d’Austerlitz - 75634 Paris cedex 13 - Tél. +33 1 78 40 80 00 Ce document est destiné à des clients professionnels au sens de la Directive MIF. Il ne peut être utilisé dans un but autre que celui pour lequel il a été conçu et ne peut pas être reproduit, diffusé ou communiqué à des tiers en tout ou partie sans le consentement préalable et écrit de Natixis Asset Management. Aucune information contenue dans ce document ne saurait être interprétée comme possédant une quelconque valeur contractuelle. Ce document est produit à titre purement indicatif. Il constitue une présentation conçue et réalisée par Natixis Asset Management à partir de sources qu’elle estime fiables. Natixis Asset Management se réserve la possibilité de modifier les informations présentées dans ce document à tout moment et sans préavis et notamment en ce qui concerne la description des processus de gestion qui ne constitue en aucun cas un engagement de la part de Natixis Asset Management. 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