A ctualités sciences Actualités sciences > Proceedings of the Royal Society of London (Biological Sciences) > J Neurosciences > Proceedings of the National Academy of Sciences USA > News Cornell > Physical Reviews > Biological psychiatry > Science > Nature > Current Opinion in Neurobiology > Nature Neuroscience > Journal of Clinical Investigations Somatisation et symptômes psycho-somatiques REVUE de presse #Coordonnée par E. Bacon, Inserm et clinique psychiatrique, Strasbourg. La somatisation pose un problème majeur en santé générale, aussi bien qu’en termes de classification des maladies. Si on la considère au sens large, lorsqu’aucune pathologie somatique n’est évidente, on constate que la somatisation est largement répandue, et représente près de 50 % de toutes les consultations médicales primaires. Néanmoins, si l’on prend en compte le sens strict des troubles de somatisation tel que le définit le DSM-IV, les études épidémiologiques révèlent alors que seulement 0,3 % de la population serait affectée par ce type de troubles. Dans le groupe de personnes consultant un médecin pour des problèmes de ce genre, qui représente donc de 50 % à moins de 1 % des consultations, un grand nombre de patients souffrent de pathologies non organiques ou “fonctionnelles”. Ces patients reçoivent des diagnostics que les praticiens nomment sous des termes divers, qui peuvent aller du plus précis au plus vague, comme “trouble neurovégétatif”, “petite hystérie”, “stress”, “syndrome de fatigue chronique”, “somatisation”, etc. Tous ces termes sont non seulement susceptibles de décrire des conditions médicales très différentes, mais ils expriment en outre une profonde imprécision de la terminologie, comme des conceptions. > Avila L. Somatisation or psychosomatic symptoms? Psychosomatics 2006;47:163-6. La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007 81 Actualités sciences A ctualités sciences > Proceedings of the Royal Society of London (Biological Sciences) > J Neurosciences > Proceedings of the National Academy of Sciences USA > News Cornell > Physical Reviews Troubles psycho-somatiques dans les pays en voie de développement. État des lieux et enjeux pour le futur O Bangalore (Inde) REVUE de presse L’ 82 > Biological psychiatry > Science > Nature > Current Opinion in Neurobiology > Nature Neuroscience > Journal of Clinical Investigations esprit et le corps s’influencent l’un l’autre. Ce concept est pris en compte depuis longtemps par la médecine ayurvédique indienne. La notion de l’existence de liens entre le corps et l’esprit est également présente dans la littérature occidentale et se reflète dans le développement de la médecine psycho-somatique. Mais le terme “psycho-somatique” est souvent utilisé dans la grande presse pour décrire des maladies d’une manière péjorative. L’emploi de ce terme implique souvent que l’affection n’est pas importante ou qu’elle est imaginaire, simulée, signe de faiblesse de caractère ou de folie. Il est clair, par ailleurs, que les maladies transmissibles constituent un enjeu majeur dans les pays en voie de développement pour les 10 à 15 prochaines années. Toutefois, il semble bien que la fréquence des maladies non transmissibles augmente dans les pays émergents. Par exemple, l’obésité ne peut plus être uniquement considérée dans ces pays comme le signe de la richesse économique des individus. On peut citer aussi l’exemple des médecins débordés qui, après un entretien avec leurs patientes – souvent moins long et moins poussé que celui avec leurs patients –, prescrivent allègrement aux femmes des médicaments pour qu’elles “ne se fassent pas trop de soucis”. On ne peut que constater la faible prise de conscience des maladies psycho-soma- tiques par les médecins généralistes dans ces pays. L’évolution en cours des scénarios de santé dans les pays en voie de développement semble devoir conduire à une “épidémie” de maladies non transmissibles, alors même que les programmes visant à contrôler les maladies transmissibles n’ont pas encore rempli leurs objectifs. La médecine psycho-somatique a clairement un rôle à jouer pour circonscrire cette épidémie à venir. Les études consacrées aux troubles psycho-somatiques dans les pays en voie de développement sont encore rares. La plupart sont publiées dans des journaux médicaux non psychiatriques et sont surtout des études exploratoires. Les médecines traditionnelles et complémentaires comme la médecine ayurvédique jouent déjà leur rôle dans le domaine du traitement des maladies psycho-somatiques dans les pays en voie de développement. Dans ces pays, le rôle et les responsabilités des psychiatres sont en train de changer, et évoluent du traitement des maladies mentales graves vers la prévention et le traitement des pathologies psycho-somatiques. Sur ce point, l’auteur indien de cette revue estime que les pays développés ont des responsabilités à assumer, et qu’ils doivent s’efforcer de répondre aux défis posés par la formation des personnels médicaux et paramédicaux, la coordination avec les médecines alternatives, et la mise en place de réseaux avec les responsables des organismes gouvernementaux, pour combattre les dangers de l’épidémie imminente de maladies non transmissibles. E.B. > Chandrashekar C, Math S. Psychosomatic disorders in developing countries: current issues and future challenges. Current Opinions in Psychiatry 2006;19:201-6. Deux facettes de la gêne causée par des sensations corporelles : sensibilité anxieuse et alexithymie chez les patients psycho-somatiques O Würzburg (Allemagne) L a sensibilité anxieuse (anxiety sensitivity) dénote des différences individuelles dans la peur ou l’anxiété, et dans les croyances des individus à propos des conséquences personnelles que peut avoir le fait de ressentir de l’anxiété. Une personne présentant une sensibilité anxieuse élevée craint les sensations corporelles reliées à l’anxiété et croit que l’expérience anxieuse a des implications négatives, voire catastrophiques comme les attaques de panique, la maladie, la gêne, ou la perte de contrôle. L’alexithymie constitue une autre construction, et décrit un ensemble de caractéristiques affectives et cognitives, qui inclut la difficulté à identifier les sensations et à distinguer les sensations physiques de l’agitation émotionnelle, la difficulté à décrire les sensations, la pauvreté de l’imagination, et un style cognitif lié au stimulus et orienté vers l’extérieur. Ces deux troubles présentent des caractéristiques communes si l’on se réfère aux sensations corporelles qui les accompagnent. En outre, ces deux entités sont empiriquement reliées à l’anxiété de trait et à l’affectivité négative. Ce qui suggère que ce sont des constructions très proches. Deux chercheurs allemands ont cherché à préciser si ces deux pathologies se superposent ou si elles constituent des entités distinctes. Pour ce faire, La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007 ils ont rassemblé un échantillonnage de 204 patients psycho-somatiques. Après avoir réparti les patients dans des groupes de forte ou faible sensibilité anxieuse, ils ont analysé les scores d’alexithymie, et les corrélations entre les deux constructions. Les résultats montrent que les deux pathologies sont certes reliées, mais qu’elles constituent néanmoins des entités distinctes, puisque les deux groupes diffèrent, et notamment dans leurs scores à l’échelle d’alexithymie de Toronto. Il semble donc important de les diagnostiquer séparément. E.B. > Mueller J, Alpers G. Two facets of being bothered by bodily sensations: anxiety sensitivity and alexithymia in psychosomatic patients. Comprehensive Psychiatry 2006;47:489-95. Plaintes concernant la santé chez les enfants présentant un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité O Stockholm et Uppsala (Suède) L e trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) constitue l’un des troubles psychiatriques les plus communs chez les enfants. Ainsi, en Suède, il affecte 3 à 5 % des enfants d’âge scolaire, et ce chiffre atteint jusqu’à 7 % si l’on y ajoute les enfants présentant des symptômes moins sévères. Les principaux symptômes, à savoir l’inattention, l’impulsivité et l’hyperactivité, sont souvent accompagnés de problèmes dans les relations interpersonnelles et de difficultés scolaires. La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007 Les enfants de milieux socio-économiques défavorisés sont plus souvent diagnostiqués comme porteurs de cette pathologie. Par ailleurs, chez tous les enfants, les plaintes subjectives relatives à leur santé désignent des symptômes qui sont parfois, mais pas toujours, susceptibles de constituer un diagnostic précis. Ainsi, des syndromes douloureux comme les maux de tête ou des douleurs abdominales récurrentes, le mal de dos, mais aussi des symptômes de nature plus psychologique comme l’irritabilité, la nervosité, les troubles du sommeil et la fatigue diurne, figurent parmi les plaintes les plus fréquentes chez les enfants et sont souvent responsables d’absentéisme scolaire. Des analyses récentes d’enfants suédois âgés de 10 à 18 ans ont démontré que les perturbations des relations avec les pairs ou les parents, ainsi que l’existence d’un stress économique au sein de la famille, sont des facteurs de risque pour les plaintes relatives à la santé chez les enfants. À partir de ces observations, des chercheurs suédois ont suspecté que les plaintes subjectives de santé pourraient être plus fréquentes chez les enfants présentant un TDAH. Ils ont testé cette hypothèse auprès de 577 écoliers âgés d’une dizaine d’années, originaires d’une banlieue de Stockholm. À partir d’entretiens menés auprès des parents et des enseignants, les chercheurs ont évalué le comportement et l’attention des enfants. Les enfants présentant des scores élevés à ces échelles ont fait l’objet d’évaluations cognitives et cliniques ultérieures. Les informations concernant les plaintes relatives à la santé ont été recueillies auprès des enfants eux-mêmes, par un question- Actualités sciences A ctualités sciences naire proposé en salle de classe. Les analyses finales incluaient les données de 516 enfants. Les résultats montrent que des douleurs abdominales récurrentes, des problèmes de sommeil et de fatigue sont plus souvent invoqués par les enfants souffrant de TDAH. Néanmoins, ces enfants ne décrivaient pas plus fréquemment souffrir de maux de tête. Les plaintes de santé des enfants TDAH sont susceptibles d’aggraver encore leurs problèmes scolaires et leur absentéisme. Il semble donc important que les stratégies de traitement de ces enfants incluent l’évaluation et la prise en compte des plaintes et des signes psycho-somatiques. Par ailleurs, les recherches futures devront se focaliser aussi sur la clarification des mécanismes responsables de telles associations. E.B. > Holmberg K, Hjern A. Health complaints in children with attention-deficit/hyperactivity disorder. Acta Paediatrica 2006;95:664-70. Corrélations entre le syndrome d’épuisement et les symptômes psychologiques et psycho-somatiques chez des enseignants O Fribourg et Potsdam (Allemagne) L a situation des enseignants n’a cessé de se dégrader depuis près de 30 ans, en France comme en Allemagne. En Allemagne, le nombre élevé (près de 50 %) de départs en préretraite, a généré un mouvement de pression publique et initié un grand débat 83 > Proceedings of the Royal Society of London (Biological Sciences) > J Neurosciences > Proceedings of the National Academy of Sciences USA > News Cornell > Physical Reviews REVUE de presse Actualités sciences A ctualités sciences 84 > Biological psychiatry > Science > Nature > Current Opinion in Neurobiology > Nature Neuroscience > Journal of Clinical Investigations politique sur le sujet. Parmi les motifs de départ prématuré en retraite, les diagnostics psychiatriques ou psychosomatiques arrivent largement en tête avec un taux de 52 %. Les symptômes d’une grande part de ces diagnostics, comme la dépression, les troubles liés au stress, la fatigue extrême, se superposent en partie avec les symptômes du syndrome de dépression d’épuisement (burnout syndrome). Ce syndrome a été décrit en premier par Freudenberger comme affectant principalement les personnes au travail ayant des responsabilités sociales et éthiques importantes. Depuis, ce syndrome a fait l’objet de nombreuses recherches. Des études menées en Allemagne ont montré que le taux de syndrome d’épuisement chez les enseignants avoisine les 30 %, voire plus. Une équipe allemande a donc entrepris de mesurer le taux de syndrome d’épuisement et de relier la psychopathologie clinique à ce syndrome dans un groupe d’un peu plus de 400 enseignants du secondaire. Les chercheurs ont constaté que 32 % des enseignants du groupe présentaient une dépression d’épuisement (de type B), 18 % une tension nerveuse sévère (type A), que 36 % avaient un style de vie sans ambition (coping style), alors que 14 % seulement montraient un style ambitieux et sain. La dépression d’épuisement était plus particulièrement marquée chez les femmes, les divorcés, et les enseignants à temps partiel. Les enseignants interrogés désignaient les comportements agressifs et destructeurs des élèves comme le principal facteur de stress. Vingt pour cent des personnes de l’échantillon présentaient des symptômes psychologiques ou psycho-somatiques sérieux. Chez les enseignants allemands, le syndrome de dépression d’épuisement, une entité qui dérive de la psychologie et de la médecine professionnelle, est corrélé de façon significative aux symptômes psychologiques et psycho-somatiques. Par comparaison avec d’autres travailleurs dont la profession implique un certain dévouement interpersonnel, comme les médecins, les travailleurs sociaux, ou les infirmières, ce sont les enseignants qui paient le plus lourd tribut à cette maladie. Ces observations sont généralisables aux autres pays d’Europe, où l’on relève des taux de 25 à 35 % de dépression d’épuisement dans le corps enseignant. Les enseignants pourraient sans doute bénéficier de mesures précliniques destinées à améliorer leur résilience. Mais elles ne seront efficaces que si elles sont accompagnées de mesures visant à améliorer la santé et le comportement des élèves, et aussi les effectifs d’encadrement et l’équipement des écoles… E.B. > Bauer J, Stamm A, Virnich K et al. Correlation between burnout syndrome and psychological and psychosomatic symptoms among teachers. Int Arch Occup Environ Health 2006;79:199-204. La médecine psychosomatique et la préparation à la biodéfense. Un nouveau rôle pour l’American Psychosomatic Society O gique ou contre l’utilisation d’armes de destruction massive se sont focalisées sur l’amélioration de la biosurveillance et sur les capacités des hôpitaux à répondre à des surplus d’admissions. Cependant, que se passerait-il si une arme biologique invisible ou une bombe étaient lâchées sur un grand centre urbain, ou si la grippe aviaire mutait pour se transmettre aisément à l’homme ? Pour S. Locke, président de l’American Psychosomatic Society, de telles situations nécessiteraient de combiner les efforts de la médecine psycho-somatique et de la médecine générale, pour pouvoir faire rapidement le tri entre les patients non exposés aux symptômes somatiques et ceux présentant des séquelles médicales à la suite d’expositions dangereuses. Il considère donc que les experts de la médecine psychosomatique ont un rôle important à jouer dans la planification de la défense biologique. Il révèle que la Société de psycho-somatique a proposé des systèmes qui devraient faciliter le screening, le tri et la gestion des patients consécutifs à d’éventuelles expositions mystérieuses ou à des épidémies. E.B. > Locke SE. Psychosomatic medicine and biode- fense preparedness-a new role for the American Psychosomatic Society. Psychosomatic Medicine 2006;68:698-705. Boston (États-Unis) A ux États-Unis, les actions de préparation visant à se défendre contre une éventuelle attaque biolo- La Lettre du Psychiatre - Vol. III - n° 5-6 - mai-juin 2007