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La Lettre du Cancérologue - Volume XIII - n
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3 - mai-juin 2004
C
A N C E R S D U S E I N
L’équipe du MD Anderson a comparé deux technologies diffé-
rentes de puces à ADN pour prédire par un profil génétique la
réponse histologique complète à la chimiothérapie néoadjuvante
(Stec J et al., abstract 504). Ces résultats font suite à la présenta-
tion l’année dernière en séance plénière par L. Pusztai et al. ( P r o c
ASCO 2003, abstract 1). Le matériel a été obtenu par cytoponction-
aspiration de la tumeur avant chimiothérapie néoadjuvante chez
3 3 patientes. La chimiothérapie consistait en une séquence de pacli-
taxel hebdomadaire suivie d’une association de type FAC. Les
investigateurs ont comparé la plate-forme Affymetrix GeneChip
(U133A) (Affy) et la plate-forme Millenium cDNA arrays (cDNA)
(sur membrane nylon). La valeur prédictive de la réponse à la chi-
miothérapie du profil génétique a été comparée d’une plate-forme
à l’autre. L’analyse des séquences géniques de chacune des plates-
formes montre déjà que seules 30 % des sondes géniques sont com-
munes aux deux. Un profil de 182 gènes permet de prédire à 91 %
la réponse sur Affy. En utilisant les mêmes gènes (166), le résultat
est seulement de 45 % de prédiction sur Millenium (cDNA). À
l’inverse, un profil de 45 gènes permet de prédire à 91 % la réponse
sur cDNA. Le résultat tombe à 79 % en utilisant ce profil sur Affy
( 4 2 gènes). Entre ces 182 gènes sur Affy et 45 sur cDNA, seuls 17
sont communs, et leur identification n’est pas connue.
En conclusion, la reproductibilité des résultats d’une plate-forme
à l’autre est actuellement médiocre. L’utilisation de la technique
des puces à ADN pour prédire la réponse au traitement nécessite
des améliorations technologiques importantes.
Lors de la discussion, R. Simon, du NCI, a insisté sur l’absence
de validation des résultats actuellement obtenus avec cette tech-
nologie. Les collaborations entre les statisticiens, les biologistes
et les cliniciens pour utiliser ces profils géniques, étant donné leur
complexité, ne permettent pas à l’heure actuelle de répondre à des
questions cliniques pertinentes. Les conditions de validation de
ces études ne sont pas vraiment connues. De nombreux résultats
sont actuellement publiés, mais la difficulté de compréhension des
résultats restreint le nombre de r e v i e w e r s capables d’une véritable
analyse critique. Les risques de biais statistiques possibles en rai-
son du volume de données sont particulièrement importants.
L . Gianni a présenté les résultats d’une étude par RT-PCR mul-
tiple pour prédire la réponse à la chimiothérapie néoadjuvante
(abstract 501). Il s’agit d’une analyse rétrospective sur des échan-
tillons de biopsies tumorales fixées en paraffine, prélevées avant
une chimiothérapie néoadjuvante pour un cancer du sein locale-
ment avancé. Les patientes recevaient une association d’adriamy-
cine 60 m g / m
2
et de paclitaxel 200 m g / m
2
toutes les 3 s e m a i n e s
pendant 3 cycles suivis de 4 cycles de CMF tous les 28 jours. L’ana-
lyse a pu être pratiquée chez 89 des 93 patientes sélectionnées. Le
taux de réponse histologique complète était de 12,4%. Les 86g è n e s
dont le niveau d’expression est modifié en fonction de la réponse
histologique complète ont été identifiés. On constate que les
tumeurs qui présentent une réponse surexpriment des gènes impli-
qués dans la prolifération cellulaire et la réponse immune et que,
en revanche, l’expression des gènes en rapport avec la réponse aux
estrogènes est sous-exprimée. En conclusion, cette étude retrouve
la notion déjà connue que les patientes ayant une prolifération
tumorale élevée et une tumeur hormonorésistante sont celles qui
répondent le mieux à la chimiothérapie néoadjuvante.
Lors de la discussion, D. Sgroi (Massachusetts General Hospital)
a fait remarquer que la technique de RT-PCR pouvait constituer
un pas en arrière par rapport aux techniques de puces à ADN.
Cette technique est cependant bien plus robuste et reproductible,
et elle permet d’utiliser un matériel fixé en paraffine qui est plus
souvent disponible que des biopsies congelées ou fraîches. En
recherche, les puces à ADN pourraient permettre d’identifier
de nouvelles cibles ou de nouvelles associations de gènes, donc
une signature génétique pronostique ou prédictive, tandis que la
RT-PCR serait un outil plus adapté à la pratique clinique.
Pharmacogénomique
Le polymorphisme génétique peut être également un outil de pré-
diction de la réponse au traitement. L’aromatase est un complexe
enzymatique essentiel, responsable de la synthèse d'estrogènes à
partir d'androgènes par décarboxylation du C(19) et aromatisation
du cycle A du stéroïde, caractéristique des estrogènes. C'est une
enzyme de la superfamille des cytochromes P450 et le produit du
gène CYP19, porté par le chromosome 15q21-2. Des variants de
CYP19 ont été décrits. B. Lloveras et al. (abstract 520) ont étudié
le polymorphisme de ce gène par la technique des Single Nucleo-
tide Polymorphisms (SNPs). Ils ont montré que dans une série
de 69 patientes ménopausées, hormonosensibles, la présence de
variations dans l’extrémité 3’ (UTR) du gène CYP 19 était asso-
ciée à une augmentation de la survie sous traitement par létrozole.
Cellules circulantes
Le suivi prospectif des cellules tumorales circulantes dans le sang
périphérique a été évalué dans le cadre d’un essai multicentrique
par D.F. Hayes (abstract 509). Cent soixante-dix-sept p a t i e n t e s
commençant une nouvelle ligne de traitement pour un cancer du
sein métastatique ont été incluses dans cette étude. La technolo-
gie employée pour la détection des cellules a été détaillée dans le
poster présenté par W.J. Allard et al. (abstract 9552). La persis-
tance d’un nombre de cellules circulantes supérieur à 5, 3 à
4 semaines après le début du traitement, est fortement pronostique
d’une évolution péjorative à très court terme (2 mois de survie sans
progression contre 7). En analyse multivariée, ce paramètre était
indépendant et le plus significatif sur la survie sans progression.
CHIRURGIE
L'étude ALMANAC, essai randomisé britannique, a comparé le
curage ganglionnaire au ganglion sentinelle (Mansel RE et al.
abstract 506). Cette étude portant sur 1 0 3 1 p a t i e n t e s a démontré
les avantages nets du ganglion sentinelle en termes de morbidité,
complications infectieuses, durée d'hospitalisation, qualité de
récupération, risque de lymphœdème, rapidité de reprise d'une
activité professionnelle.
TRAITEMENT NÉOADJUVANT
Chimiothérapie néoadjuvante
Une étude randomisée du MD Anderson avait pour but principal
d’évaluer si l’adjonction de trastuzumab hebdomadaire pouvait
augmenter le taux de réponse histologique complète après une