La Lettre du Cardiologue - n° 365 - mai 2003
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MÉTABOLISME
Les traitements médicamenteux
Le traitement pharmacologique de l’obésité ne doit être envisagé
qu’en cas d’échec des mesures précédentes, pour les patients dont
l’IMC est supérieur à 30 kg/m2,ou chez ceux ayant un IMC com-
pris entre 25 et 30 kg/m2,mais qui présentent une anomalie cli-
nique ou un risque de morbidité élevé en rapport avec l’excès de
poids.
Ces dernières années, si la fenfluramine a été retirée du marché
(en raison du risque de survenue d’une hypertension artérielle
pulmonaire primitive), deux nouvelles molécules (la sibutramine
et la tétrahydrolipstatine) sont apparues, dont l’efficacité a été
prouvée lors d’études randomisées versus placebo sur une période
de plus d’un an.
La poursuite du traitement au-delà du troisième mois n’est à envi-
sager que chez les patients répondeurs (perte de poids supérieure
à 5 % de leur poids initial) au cours de la phase initiale de pres-
cription.
■La sibutramine a des effets satiétogènes (renforcement de la
sensation de satiété) dus à son action noradrénergique et séroto-
ninergique, inhibant la recapture neuronale de la noradrénaline
et de la 5-hydroxytryptamine, qui module l’appétit (4). En asso-
ciation avec un programme d’amaigrissement, la sibutramine (une
gélule de 10 à 15 mg/j) est indiquée dans le traitement de l’obé-
sité (IMC 30 kg/m2) et du surpoids (IMC 27 kg/m2) quand
celui-ci est associé à d’autres facteurs de risque liés à l’obésité,
tels qu’un diabète de type 2 ou une dyslipidémie, après échec
d’un régime mené pendant au moins trois mois.
Les études cliniques menées versus placebo chez des patients
obèses suivant un régime restrictif ont montré (5)pour les patients
sous sibutramine 10 à 15 mg/j pendant 2 à 6 mois :
–une perte moyenne de 5 à 10 kg (versus 2 à 4 kg sous placebo),
–une perte de poids > 5 % chez 50 à 70 % des patients (versus
25-30 % dans le bras placebo),
–une perte de poids > 10 % chez 30 à 40 % des patients (versus
<10% sous placebo).
Chez des patients présentant un surpoids (IMC 27 kg/m2) et un
diabète de type 2 traité par antidiabétiques oraux, la sibutramine
administrée sur une période de 6 mois a permis une perte de poids
deux fois plus importante que dans le bras placebo (– 4,5 kg ver-
sus – 1,7 kg,p<0,001) (6).
Concernant le maintien de la perte pondérale à moyen terme,
l’étude multicentrique européenne STORM (7) a randomisé en
deux groupes une population initiale de 605 patients dont l’IMC
était compris entre 30 et 45 kg/m2et qui avaient perdu au moins
5% de leur poids corporel au terme de 6 mois d’un traitement
par sibutramine associé à un régime. Ces deux groupes devaient
recevoir soit la sibutramine, soit un placebo pendant 18 mois. Les
résultats à la fin de la période de suivi montrent que 43 % des
patients du groupe sibutramine ayant complété la période de
l’étude ont stabilisé leur poids (versus 16 % dans le groupe pla-
cebo, p < 0,001).
Si le profil de tolérance cardiovasculaire de la sibutramine appa-
raît globalement satisfaisant (8), il est cependant indispensable
d’en respecter les contre-indications (hypertension artérielle
insuffisamment contrôlée, c’est-à-dire supérieure à 145/90 mmHg,
antécédents de pathologie coronarienne, d’insuffisance cardiaque
congestive, de tachycardie, d’artériopathie oblitérante des
membres inférieurs, d’arythmie ou de pathologie vasculaire céré-
brale) et de surveiller attentivement la pression artérielle et la fré-
quence cardiaque chez l’ensemble des patients (tous les 15 jours
pendant les trois premiers mois, puis tous les mois entre le 4eet
le 6emois, puis à intervalles réguliers ne dépassant pas trois mois).
Une étude récente (9) a par ailleurs montré qu’un traitement de
6 mois par la sibutramine n’avait pas eu d’impact négatif au niveau
valvulaire, au niveau du ventricule gauche ou sur les variables
électrocardiographiques.
■L’orlistat, inhibiteur des lipases digestives, réduit l’absorption
des graisses en diminuant l’hydrolyse des triglycérides alimen-
taires (10). Il est indiqué en association à un régime hypocalo-
rique dans le traitement de l’obésité (IMC 30 kg/m2) et du sur-
poids (IMC 28 kg/m2) associé à des facteurs de risque. Ce
traitement ne doit être entrepris que si un régime seul a précé-
demment permis une perte de poids d’au moins 2,5 kg en
4semaines consécutives. La posologie recommandée est d’une
gélule à 120 mg avant, pendant ou jusqu’à une heure après cha-
cun des principaux repas. Le patient doit suivre un régime modé-
rément hypocalorique, bien équilibré sur le plan nutritionnel et
contenant environ 30 % de l’apport calorique sous forme de
graisses. Les résultats combinés de cinq études menées sur deux
ans ont montré qu’après un an de traitement associé à un régime
hypocalorique, 20 % des patients sous orlistat avaient perdu au
moins 10 % de leur poids (versus 8 % des patients sous placebo).
La différence moyenne de perte de poids entre le groupe traité et
le groupe placebo était de – 3,2 kg (11). Les effets indésirables
sont principalement d’ordre gastro-intestinal (traces de graisses
anales, gaz avec suintements, selles impérieuses, selles
grasses/huileuses, émissions de graisses, augmentation de volume
des selles, incontinences fécales) (11, 12).
■Une revue récente (13) s’est intéressée à ces nouveaux agents
anti-obésité dans le traitement du diabète de type 2. Plusieurs
études contrôlées versus placebo montrent que ces deux médi-
caments favorisent la perte de poids chez les sujets obèses avec
diabète de type 2 traité par régime seul, sulfamides, metformine
ou insuline. Cet amaigrissement plus marqué par rapport au pla-
cebo s’accompagne d’une réduction significative des taux d’hé-
moglobine glycosylée et/ou des doses des agents hypoglycé-
miants classiques, en particulier chez les patients répondeurs,
c’est-à-dire ayant perdu au moins 10 % de leur poids initial. De
plus, les facteurs de risque cardiovasculaires sont également dimi-
nués après amaigrissement, plus spécifiquement les dyslipidé-
mies avec l’orlistat. Ces agents anti-obésité peuvent également
contribuer à retarder ou à prévenir la progression de la diminu-
tion de la tolérance au glucose vers le diabète de type 2 avéré chez
des individus obèses à risque.
La chirurgie de l’obésité
Mesure exceptionnelle dont l’indication relève du spécialiste, la
chirurgie de l’obésité (pose d’un anneau gastrique) est obliga-
toirement pratiquée par un chirurgien formé dans ce domaine (et
au sein d’une équipe entraînée à l’anesthésie et à la surveillance
médicale périopératoire des patients présentant une obésité mas-
sive). Elle ne doit être envisagée que pour des obésités résistantes