ABSTRACTS
La Lettre du Cardiologue - n° 388 - octobre 2005
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Les critères d’inclusions étaient une insuffisance cardiaque
(ischémique ou non) stable en stade II ou III de la New York Heart
Association (NYHA), avec une fraction d’éjection ventriculaire
gauche inférieure à 35 %. Le critère de jugement principal était
la mortalité toutes causes confondues. Les patients étaient ran-
domisés en trois groupes : placebo, amiodarone, défibrillateur.
L’amiodarone et le placebo étaient administrés en double aveugle
avec une dose de charge par jour de 800 mg pendant une semaine,
puis de 400 mg pendant trois semaines. Le traitement journalier
était ensuite administré en fonction du poids (> 91 kg : 400 mg ;
entre 68 et 91 kg : 300 mg; < 68 kg : 200 mg). Le défibrillateur
était un simple chambre (Medtronic 7 223) réglé uniquement pour
exercer un choc électrique (maximal de 30 J) en cas de fréquence
cardiaque supérieure à 187 bpm/mn.
Résultats. Huit cent quarante-sept patients ont été randomisés
dans le groupe placebo, 845 dans le groupe amiodarone, et 829 dans
le groupe défibrillateur. L’âge médian était de 60 ans, la fraction
d’éjection médiane de 25 %, 70 % des patients étaient en stade II
de la NYHA, 30 % en stade III, et 52 % avaient une cardiopathie
ischémique. Le suivi médian était de 45,5 mois. À la fin de l’étude,
les patients du groupe défibrillateur recevaient significativement
plus de bêtabloquant que les deux autres groupes ; 244 décès ont
été observés dans le groupe placebo (29 %), 240 dans le groupe
amiodarone (28 %) et 182 dans le groupe défibrillateur (22 %).
Comparativement au placebo, le traitement par amiodarone ne
modifiait pas la mortalité toutes causes confondues (critère de
jugement principal) (p = 0,53), alors que le défibrillateur rédui-
sait le risque relatif de décès de 23 % (p = 0,007; IC95 : 97,5 %
[0,62-0,96]), soit une réduction absolue du risque de décès de
7,2 %. Deux cent cinquante-neuf patients ont reçu un choc élec-
trique, dont 68 % pour une tachycardie ventriculaire rapide ou une
fibrillation ventriculaire. L’analyse en sous-groupes ne révélait pas
de différence significative entre les trois groupes pour le type de
cardiomyopathie (ischémique ou non). À l’inverse, le défibrilla-
teur diminuait significativement la mortalité chez les patients en
classe II de la NYHA par rapport à ceux de la classe III.
Effets indésirables. Trente-deux patients (4 %) ont eu une abla-
tion de leur défibrillateur lors de l’étude. Lors de l’implantation
du défibrillateur, 5 % des patients présentèrent une complication,
et 9 % au décours (reprise chirurgicale ou hospitalisation). Le
traitement par amiodarone a été arrêté chez 269 patients (32 %)
et le placebo chez 189 patients (22 %). L’hypothyroïdie a com-
pliqué le traitement par cordarone dans 6 % des cas.
Conclusion. Chez les patients en insuffisance cardiaque en
classes II et III de la NYHA avec une FEVG inférieure à 35 %,
l’amiodarone n’exerce pas d’effet bénéfique sur la mortalité
globale, alors que le défibrillateur simple chambre, sans fonc-
tion de pace-maker, réduit la mortalité globale de 23 %.
Limite. L’effectif trop faible, dans les sous-groupes, ne permet
pas l’analyse de l’effet du défibrillateur en fonction du type de
cardiomyopathie et de la classe NYHA.
T. Damy, service de cardiologie 1,
hôpital européen Georges-Pompidou, Paris
Amiodarone or an implantable cardioverter-defibrillator for
congestive heart failure.
Bardy G, Lee K, Mark D et al.
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N Engl J Med 2005;352:225-37.
Risques cardiovasculaires des inhibiteurs sélectifs de la COX-2
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Les auteurs ont analysé les complications cardiovas-
culaires survenues lors de l’étude APC (Adenoma Pre-
vention with Celecoxib),dans le but d’étudier un possible rôle
préventif d’un inhibiteur de la COX-2 quant à l’apparition de
polypes colorectaux ; 2 035 patients ayant des antécédents d’exé-
rèses endoscopiques de polypes ont été randomisés en trois
groupes : 679 patients ont reçu un placebo, 685 du célécoxib
200 mg x 2/j, et 671 du célécoxib 400 mg x 2/j per os.
Les complications cardiovasculaires colligées (décès de cause
cardiovasculaire, infarctus du myocarde, accident vasculaire céré-
bral, insuffisance cardiaque) ont concerné 7 patients sous pla-
cebo (1 %), 16 patients sous célécoxib 200 mg x 2 (2,3 %), et
23 patients sous célécoxib 400 mg x 2 (3,4 %). Respectivement
pour chacun de ces groupes, un, trois et six décès sont de cause
cardiovasculaire. L’incidence annuelle des complications car-
diovasculaires est de 3,4 pour 1 000 patients-années dans le
groupe placebo, de 7,8 pour 1 000 patients-années dans le
groupe célécoxib 200 mg x 2, et de 11,4 pour 1 000 patients-
années dans le groupe célécoxib 400 mg x 2.
Les complications thromboemboliques veineuses sont également
plus fréquentes sous célécoxib (sans atteindre un seuil significatif).
En revanche, on ne constate pas de majoration des angors ins-
tables, des arythmies, des procédures invasives cardiovasculaires.
Conclusion. Lors de ce large essai randomisé et prospectif,
dévolu initialement à la prévention des polypes colorectaux,
la prise de célécoxib s’accompagne d’une majoration des
complications cardiovasculaires, ce qui a conduit à la sus-
pension de l’étude pour les patients encore concernés. L’ef-
fet nocif paraît dose-dépendant.
Dans ce même numéro du New England Journal of Medicine,
deux autres articles aboutissent aux mêmes conclusions : le pre-
mier concerne l’utilisation à court terme après pontages aorto-
coronaires du parécoxib intra-veineux et du valdécoxib per os
(Nussmeier NA et al. N Engl J Med 2005;352:1081-91),le second
le rofécoxib lors de l’étude APPROVe (Adenomatous Polyp Pre-
vention on VIOXX) réalisée dans une perspective similaire à celle
de l’étude APC (Adenoma Prevention with Celecoxib) (Bresalier
RS et al. N Engl J Med 2005;352:1092-102). Le rôle néfaste des
inhibiteurs de la COX-2 est attribué à un état prothrombotique
résultant du blocage de la production de prostacycline sans affec-
ter la synthèse de thromboxane A2.
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