Les expériences des uns... D

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Les expériences des uns...
Traitement hormonal substitutif de la ménopause chez les patientes
traitées pour un cancer du sein. Préférence des patientes
● Alain Brémond*
L
es données dont nous disposons actuellement sont
insuffisantes pour recommander sans arrière-pensée
la prescription d’un traitement hormonal substitutif
de la ménopause chez les patientes traitées pour un cancer du
sein. Néanmoins, cette absence de données peut être interprétée
d’une façon symétrique. Face aux risques de complications de
la ménopause pour lesquels on connaît les effets positifs du
THS, ne doit-on pas reconsidérer une position trop catégorique ?
Entre les deux positions extrêmes que sont la négation d’un
risque éventuel et l’interdiction absolue, il existe une troisième
voie en cours d’exploration. Nous avons délibérément choisi
une démarche d’analyse de la préférence des patientes.
LA PRÉFÉRENCE DES PATIENTES
Cette approche nouvelle fait appel à une méthodologie émergeante dans le domaine de la cancérologie qui consiste d’abord
à rassembler les données scientifiques sur le sujet, puis à les
rendre compréhensibles pour les patientes. Cette démarche
exclut les simplifications excessives, l’édulcoration de données
jugées “insupportables” pour les patientes ainsi que toute
démarche de type paternaliste. Les incertitudes sont clairement
exprimées. La présentation du problème est ensuite standardisée,
puis testée et validée. Elle doit être le plus neutre possible afin
que la patiente puisse faire un choix personnel. Un temps de
réflexion lui est laissé. Une nouvelle consultation permet
d’expliquer les points mal compris et de recueillir le choix de
la patiente. Il s’agit d’un protocole d’évaluation comprenant un
suivi des patientes. Celles-ci sont informées de leur entrée
dans une étude de surveillance et donnent leur accord pour y
participer (loi Huriet).
*Centre Léon-Bérard, Lyon.
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LA SÉLECTION DES PATIENTES
Nous appliquons cette démarche à des patientes sélectionnées
selon deux groupes.
Le premier groupe est constitué de patientes opérées d’un cancer du sein, sans envahissement ganglionnaire et avec un recul
supérieur ou égal à cinq ans. Il n’y a pas de signe de rechute au
moment de l’inclusion.
Le second groupe concerne des patientes à haut risque de complications osseuses du fait d’une ostéoporose souvent mal corrigée par des traitements non hormonaux. Ces patientes sont
adressées par des confrères rhumatologues. Dans ce cas, les
critères carcinologiques sont moins stricts ; seule l’absence de
signe d’évolution est requise.
LA DÉMARCHE D’INCLUSION
L’information qui est donnée aux patientes rappelle d’abord
l’absence de données scientifiques sur le risque d’évolution du
cancer du sein. On aborde ensuite l’hormonosensibilité de ces
cancers (risque théorique), puis le bénéfice établi du THS.
Elles ne prennent pas de décision lors de cette première
consultation. Elles sont invitées à réfléchir et à revenir plus
tard en consultation pour préciser leur choix. Un traitement
sera alors proposé, qu’il s’agisse du THS ou de traitements
alternatifs.
CONCLUSION
Cette démarche semble répondre aux besoins actuels de nos
patientes. Face à l’incertitude, le médecin doit souvent agir. Il
choisit le plus souvent en fonction de ses convictions, qu’il
impose alors à ses patientes. À l’opposé, laisser aux patientes
l’entière responsabilité du choix n’est probablement ni une
attitude réaliste ni celle qu’elles attendent. La décision partagée est probablement une voie intéressante partout où existent
des avantages et des inconvénients à une pratique médicale.
La Lettre du Sénologue - n° 2 - octobre 1998
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