DOSSIER
Sommaire
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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. II - 3eet 4etrimestres 2001
omme leur nom l’indique, les antibiotiques
sont des molécules anti-vie. De quel
meurtre sont-ils coupables ? De celui des bac-
téries et seulement d’elles. Ce meurtre est col-
lectif (les souches bactériennes d’une espèce
donnée vivent en groupe et se comptent en
puissance de 10 : par exemple, 105d’Escherichia
coli par ml d’urine) et procède de façon particu-
lière, puisqu’il empêche spécifiquement la
reproduction des bactéries. Qui dit reproduc-
tion dit hérédité, qui dit hérédité dit génétique,
et qui dit génétique dit mutation.
Par mutation ou par acquisition de nouveaux
gènes, les bactéries vont inéluctablement résis-
ter aux antibiotiques. En effet, comme tous les
êtres vivants, les bactéries ont des principes de
survie au regard de l’environnement qui leur est
délétère. La concrétisation de ces principes
peut mettre plus ou moins de temps à émerger,
mais elle finit toujours par se faire.
Un des effets secondaires des antibiotiques
est de sélectionner les souches bactériennes
qui savent résister à un antibiotique donné,
voire à plusieurs antibiotiques d’une même
famille (résistance croisée).
Prescrire un antibiotique, c’est en fait déclarer
la guerre de l’homme aux bactéries. Qui des
deux gagnera ? L’avenir nous le dira, mais,
étant du côté de l’homme, il s’agit pour l’heure
de circonscrire les situations médicales dans
lesquelles utiliser les antibiotiques. Le mot
d’ordre actuel dans le monde entier est de
faire bon usage des antibiotiques.
L
ES BACTÉRIES EN SITUATION INFECTIEUSE
Bien que les bactéries soient nos compagnes de
vie de tous les instants et de tous les lieux
(notre peau et nos muqueuses en sont cou-
vertes, notre environnement en regorge), nous
ne nous occupons d’elles qu’en situation infec-
tieuse, et donc seulement lorsqu’elles nous font
souffrir. La souffrance résulte du conflit engagé
entre notre corps (réaction inflammatoire) et
certaines espèces bactériennes (bactéries dites
pathogènes”), ou n’importe quelle espèce bac-
térienne mais présente sur des sites anato-
miques particuliers ou dans certaines circons-
tances lésionnelles particulières (surinfection
d’ulcère, ou otite externe à Pseudomonas aeru-
ginosa). Néanmoins, la réactivité inflammatoire
de notre corps n’est pas synonyme d’infection
bactérienne, puisqu’elle a aussi lieu face aux
virus, aux parasites, aux champignons, voire à
d’autres corps étrangers. Le recours aux antibio-
tiques ne devant avoir lieu que lorsque l’infec-
tion est bactérienne, force est de différencier les
infections bactériennes des autres infections.
T
RI ÉTIOLOGIQUE DES INFECTIONS ET PRISE
DE DÉCISIONS THÉRAPEUTIQUES
La façon la plus radicale de faire le tri entre les
agents microbiens qui peuvent être respon-
sables d’une infection, c’est d’isoler l’agent du
lieu de l’infection. En pratique de ville, le
recours à l’analyse biologique d’un prélève-
Antibiotiques en 2001 :
prescriptions en ville
!
!
M.H. Nicolas-Chanoine*
Ce dossier a été soumis à un comité de lecture
composé de médecins généralistes,
de spécialistes universitaires et libéraux.
* Hôpital Ambroise-Paré, 9, avenue Charles-
de-Gaulle, 92100 Boulogne-Billancourt.
dossier
DOSSIER
L
ES BACTÉRIES EN SITUATION
INFECTIEUSE
T
RI ÉTIOLOGIQUE DES INFECTIONS
ET PRISE DE DÉCISIONS
THÉRAPEUTIQUES
E
NPRATIQUE
,
EST
-
IL POSSIBLE
DE RÉDUIRE LA PRESCRIPTION
D
ANTIBIOTIQUES EN VILLE
?
RÉDUCTION DE LA CONSOMMATION
DES ANTIBIOTIQUES OUTRE
-
A
TLANTIQUE
M
ESURES D
ACCOMPAGNEMENT
POUR LE BON USAGE
DES ANTIBIOTIQUES
EN PRATIQUE DE VILLE
F
ORMATION
,
INFORMATION
EN VILLE SUR LES ANTIBIOTIQUES
ET LA RÉSISTANCE
AUX ANTIBIOTIQUES
C
GRAND PRIX ÉDITO-
RIAL DU SNPM
Notre groupe de presse VIVACTIS
MEDIA a participé au Grand Prix
Éditorial 2001 organisé par le Syn-
dicat National de la Presse Médi-
cale (SNPM), le 4 octobre dernier.
“Correspondances en médecine” a
obtenu le prix du Meilleur article
de formation médicale pour le dos-
sier “Vieillissement
cérébral” écrit par
Marie Sarazin
(2000 ; I (1) : 43-
55).
Un grand bravo
à l’auteur pour
cette distinction.
ment issu d’un foyer infecté est rare. Cette atti-
tude est, à juste titre, fondée sur les symp-
tômes mais surtout sur l’épidémiologie de
l’étiologie des principales infections prises en
charge en ville. Toutefois, pour prescrire des
antibiotiques, des données d’épidémiologie de
la résistance aux antibiotiques doivent être
couplées aux données étiologiques, car la fré-
quence de résistance aux antibiotiques recom-
mandés pour traiter telle ou telle infection varie
selon l’espèce bactérienne en cause.
Infections urinaires
L’infection de l’arbre urinaire est essentielle-
ment bactérienne et due à E. coli (tableau I). Ce
fait justifie que la majorité des infections uri-
naires soient traitées en ville sans analyse bac-
tériologique des urines. Toutefois, comme la
sensibilité de la souche de E. coli aux antibio-
tiques varie en fonction de multiples facteurs,
notamment (tableaux II et III) dans le cas de
l’infection urinaire récidivante, de la prise d’an-
tibiotiques récente pour une autre infection,
d’antécédents récents d’hospitalisation (1), il
est indispensable d’interroger la patiente sur
ses antécédents d’hospitalisation et de prises
d’antibiotiques. Le choix de l’antibiothérapie
sera donc fait non seulement sur la base de
données médicales (fièvre ou non, douleur de
la fosse lombaire ou non, etc.), mais également
sur la base de données épidémiologiques. Ces
facteurs expliquent aussi qu’il est licite de faire
l’analyse bactériologique des urines quand l’in-
fection urinaire est récidivante, puisque, dans
un tel contexte, la prise d’antibiotiques, elle
aussi récidivante, a pu sélectionner dans le
tube digestif de la patiente, réservoir des bac-
téries urinaires, une population de E. coli plus
résistante aux antibiotiques.
Infections cutanées
Comme les infections urinaires, les infections
cutanées sont fréquemment bactériennes
(Streptococcus pyogenes, Staphylococcus
aureus). Mais selon le site cutané infecté, on
pensera aussi aux champignons (pieds, cuir
chevelu). On distinguera les lésions cutanées
dues au développement même de la bactérie
(impétigo par exemple) des plaies surinfectées.
Dans le premier cas, il est licite d’utiliser en
règle générale des antibiotiques par voie géné-
rale, alors que, dans le deuxième, une désinfec-
tion de la plaie sera le plus souvent suffisante.
En cas de recours aux antibiotiques utilisables
localement, il faut tenir compte du fait que, si
l’inoculum bactérien est important, certains
antibiotiques sont plus à même que d’autres de
sélectionner des mutants résistants, et ce chez
certaines espèces. Ainsi, l’acide fusidique est
plus à même que la pyostacine de sélectionner
des mutants résistants chez S. aureus.
Infections intestinales
L’infection intestinale à type de diarrhée aiguë
est, selon l’âge, la saison, le mode de vie, plu-
tôt virale ou plutôt bactérienne. Quand les don-
nées épidémiologiques et/ou l’aspect des
selles (par exemple, séro-sanglantes) sont en
dossier
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dossier
Espèce AFORCOPI-BIO EPIVILLE
n = 828 n = 915
Escherichia coli 67,9* 76,6**
Proteus mirabilis 4,3 5,1
Klebsiella 3,3 2,8
Enterobacter, Serratia 2,3 1,9
Pseudomonas, Acinetobacter 1,7 1,2
Enterococcus 84,3
Streptococcus 2,3 2,4
Staphylococcus 8,1 5
Autres 1,8 0,5
Tableau I. Espèces (%) responsables d’infections urinaires :
laboratoires de ville (1996-1997) d’après http://www.onerba.org.
Intervalle de confiance (5 %) : * 64-72 %, ** 72-80 %.
Facteur Risque d’avoir
Une autre espèce que E. coli E. coli résistant aux antibiotiques
Âge non non
Sexe oui non
Sondage urinaire oui oui
Antécédent
–traitement oui oui
infection urinaire non oui
hospitalisation oui oui
Tableau II. Facteurs de risque dans l’infection urinaire prise en charge en ville (d’après
référence 1).
Antibiotique Pourcentage de souches sensibles selon ATCD IU P
<6 mois 6 mois-1an >1 an non
(n = 168) (n = 51) (n = 138) (n = 99)
Amoxicilline 39 51 57 63 <0,01
Amoxicilline-
acide clavulanique 48 55 63 69 <0,01
Acide nalidixique 84 90 94 97 <0,01
Ciprofloxacine 93 94 98 99 <0,05
Cotrimoxazole 51 61 63 71 <0,01
Tableau III. Sensibilité (%) de E. coli en fonction des antécédents (ATCD) d’infection
urinaire (IU) (d’après référence 1).
faveur d’une origine bactérienne, le recours aux
antibiotiques reste rare et n’a lieu d’être que
lorsque la diarrhée se prolonge et s’accom-
pagne d’une altération de l’état général en
dépit d’une bonne hydratation (2).
Infections ORL et respiratoires
Le diagnostic étiologique différentiel, notam-
ment entre virus et bactéries, est plus compli-
qué pour ce qui est des infections de la sphère
ORLet de l’arbre respiratoire, et ce d’autant
que l’infection n’est pas vue à un stade précoce
de son évolution. En effet, les lésions des
muqueuses induites par l’infection virale sont
le lit potentiel d’une surinfection bactérienne,
due à certaines souches des espèces bacté-
riennes qui colonisent les muqueuses de l’oro-
pharynx telles que : Streptococcus pneumo-
niae, Haemophilus influenzae, Branhamella
catharralis. Cette intrication virus/bactéries au
niveau des muqueuses respiratoires explique
certainement le fait que beaucoup d’antibio-
tiques prescrits en ville, notamment en France
(60 millions de prescriptions par an, ces der-
nières années), le sont pour traiter des infec-
tions ORL et respiratoires (40 millions de pres-
criptions par an) (3). La conséquence directe de
cette prescription massive a été la sélection, au
sein de la flore des muqueuses humaines, de
souches devenues plus résistantes aux antibio-
tiques. C’est notamment le cas de S. pneumo-
niae et de H. influenzae, dont la transmissibilité
est grande d’un individu à un autre de par sa
niche écologique, le rhinopharynx. Les goutte-
lettes de Pflügge et la salive, en effet, les trans-
portent aisément. Ainsi, comme le montre le
tableau IV, un isolat sur deux de pneumocoque
provenant d’enfants n’était plus, en 1999 et en
France, sensible à la pénicilline G, un sur trois à
l’amoxicilline et deux sur trois à l’érythromycine
(4).
Réduire la prescription d’antibiotiques dans le
cadre des infections ORL et respiratoires est
pour toutes les raisons citées, devenu une vraie
recommandation nationale (3), tandis que se
développent parallèlement des réseaux de sur-
veillance de la résistance aux antibiotiques.
ENPRATIQUE, EST-IL POSSIBLE DE RÉDUIRE LA
PRESCRIPTION DANTIBIOTIQUES EN VILLE ?
Pour répondre à cette question, il faut, semble-
t-il, tout d’abord planter le décor dans lequel
est prise la décision de prescrire ou de ne pas
prescrire un antibiotique.
Le médecin consulté est seul dans son cabinet,
bien qu’à quelques rues voisines d’autres
confrères exercent le même métier. Il n’en
demeure pas moins que, pour l’instant qui nous
concerne, il a été choisi, parmi les autres, par le
malade qui lui fait face. Le malade est un adulte
ou un enfant accompagné d’un parent. Les
symptômes, l’histoire de ces symptômes, sur-
venus à telle période de l’année, et l’examen
clinique laissent penser qu’il s’agit d’une rhino-
pharyngite d’origine virale.
L’adulte touché par le virus a, l’an passé, fait
une sinusite et redoute que cela ne recom-
mence. Aussi demande-t-il au médecin un traite-
ment antibiotique, car, l’an passé, la sinusite a
fait suite à un rhume. L’enfant touché par le
virus est gardé en crèche, et cet après-midi
après la sieste, il avait 39 °C de fièvre. Sa
maman peut s’arranger pour le garder à la mai-
son le lendemain mais pas le surlendemain. Il a
eu une otite il y a un mois, et la maman n’a pas
envie que cela recommence. À la crèche, ils
n’ont pas le temps de lui faire régulièrement un
rinçage du nez avec du sérum physiologique et,
de toute façon, ils ne le reprendront pas le sur-
lendemain s’il a encore de la fièvre... “Docteur,
faites quelque chose !” Et si le médecin ne fait
que dire : “C’est viral, alors il faut attendre que
ça passe. Il faut vous (le) moucher, drainer les
sécrétions. Si dans trois jours, cela ne va pas
mieux, téléphonez-moi ou revenez me voir, je
vous prendrai entre deux rendez-vous” ?
Le client suivant, puis le suivant encore, ont une
rhinopharyngite virale.
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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. II - 3eet 4etrimestres 2001
DOSSIER
DOSSIER
Origine Nombre Pourcentage de S. pneumoniae sensibles
PEN AMX ERY
Francea
Adultes 9 956 61 77 53
Francea
Enfants 4 222 49 69 35
Franceb203 37 42
Espagneb91 53 65
Allemagneb128 95 92
Belgiqueb103 82 74
Hong Kongb84 20 18
Kenyab214 52 – 99,5
États-Unisb685 59 67
Tableau IV. Sensibilité (%) de S. pneumoniae en 1999 dans différents
pays (d’après référence 4).
PEN : pénicilline G, AMX : amoxicilline, ERY : érithromycine.
aÉtude uniquement française. bÉtude multinationale.
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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. II - 3eet 4etrimestres 2001
Ils quittent tous le cabinet médical sans pres-
cription d’antibiotique, voire sans ordonnance,
et doivent prendre leur mal en patience. Le
feront-ils ? Iront-ils voir le médecin d’à côté ?
Ces questions sont sensées, en dépit du fait que
le médecin n’a fait qu’appliquer les recomman-
dations de l’agence du médicament (encadré).
La surinfection bactérienne d’une OMA initiale-
ment virale chez l’enfant peut être suspectée
quand la fièvre persiste au-delà de 3 ou 4 jours.
Si l’OMA est douloureuse, on évoque le pneu-
mocoque ; si elle s’accompagne d’une conjonc-
tivite, on évoque l’Haemophilus. Le traitement
antibiotique qui peut être donné est amoxicil-
line-acide clavulanique, à raison de 80 mg/
kg/jour en 3 prises, ou cefpodoxime-axétil, à
raison de 30 mg/kg/jour en 2 prises, pendant
8 à 10 jours, voire 5 jours chez les enfants de
plus de 2 ans.
La sinusite aiguë survient le plus souvent au
décours d’une rhinopharyngite traînante
(>7jours). Elle s’accompagne d’une douleur
faciale et de la présence de pus au méat moyen.
Les bactéries le plus fréquemment en cause
sont le pneumocoque, l’Haemophilus influen-
zae, d’où les traitements antibiotiques suivants
en première intention : amoxicilline-acide cla-
vulanique, à raison de 2 g/jour en 2 prises, ou
céfuroxime-axétil 500 mg/jour en 2 prises, ou
cefpodoxime-proxétil 400 mg/jour en 2 prises
pour une durée de 8 à 10 jours. Antalgique et
corticoïde (en cure courte) sont souvent asso-
ciés aux antibiotiques dans les sinusites
aiguës.
R
ÉDUCTION DE LA CONSOMMATION DES ANTI
-
BIOTIQUES OUTRE
-A
TLANTIQUE
Une expérience américaine a été faite pour
réduire la prescription des antibiotiques dans le
cadre des rhinopharyngites virales de l’enfant.
Mais, pour ce faire, un nouveau décor avait été
planté. En effet, tous les pédiatres de l’État
américain où a eu lieu l’expérience ont adhéré
au projet. Une brochure explicative et destinée
aux parents a été largement distribuée dans
tout l’État, l’information contenue dans la bro-
chure a été diffusée par la télévision. Par
ailleurs, en lieu et place de l’ordonnance était
donné en fin de consultation, à la personne
ayant amené l’enfant chez le médecin, le
double du questionnaire que le médecin avait
rempli et qui se concluait par la mention “pas
d’antibiotique” si pour les n questions posées,
la réponse avait été n fois négative.
L’affaire était donc à la fois sur la place
publique, dans le cabinet non pas d’un
pédiatre mais de tous les pédiatres et dans un
très grand nombre de familles. Cette façon de
faire a permis qu’une directive, “Ne plus pres-
crire d’antibiotiques dans les rhinopharyn-
gites”, passe à l’état de règle de conduite :
“Personne ne prescrit d’antibiotiques dans les
rhinopharyngites.”
Cet exemple montre clairement que la conduite
à tenir en matière médicale ne peut s’abstraire
de la pratique médicale ou, autrement dit, du
cadre dans lequel s’exerce la médecine. En
ville, bien que nombreux, les médecins sont
non seulement seuls mais en concurrence les
uns avec les autres dans leur pratique quoti-
dienne. Ils dispensent des soins à l’unité, et
chaque unité est une singularité, une demande
dossier
La rhinopharyngite aiguë
La rhinopharyngite est une atteinte inflam-
matoire de l’étage supérieur du pharynx
(cavum) à laquelle vient s’associer, de façon
variable, une atteinte nasale. Elle est le plus
souvent d’origine virale.
Le caractère purulent de la rhinorrhée et
l’existence d’une fièvre (dans les délais nor-
maux d’évolution de la rhinopharyngite) ne
sont pas des signes ni des facteurs de
risque d’infection ou de surinfection bacté-
rienne.
1. Le traitement antibiotique n’est pas justi-
fié en cas de rhinopharyngite aiguë non
compliquée, chez l’adulte comme chez l’en-
fant. En effet, l’intérêt de l’antibiothérapie
n’est démontré ni sur la durée de la rhino-
pharyngite aiguë ni sur la survenue de com-
plications.
2. Les patients, notamment ceux qui présen-
tent des facteurs de risque de complica-
tions (otite moyenne aiguë [OMA] récidi-
vante [plus de 3 OMA par an] ; présence
d’une otite séreuse), seront avertis de la
nécessité de recontacter le praticien en
présence de signes évoquant la survenue
d’une complication bactérienne (OMA, sinu-
site) (accord professionnel).
3. Seules les complications avérées, suppo-
sées bactériennes (OMA, sinusite) sont justi-
ciables d’une antibiothérapie curative.
particulière. C’est l’addition de ces demandes
et les réponses apportées qui les font vivre. Les
antibiotiques sont, depuis 50 ans, une pièce
maîtresse de leur arsenal. Il leur est maintenant
demandé de moins et de mieux les utiliser.
Toutefois, les mesures d’accompagnement
pour aller dans ce sens sont encore rares.
M
ESURES D
ACCOMPAGNEMENT POUR LE BON
USAGE DES ANTIBIOTIQUES EN PRATIQUE DE
VILLE
Test de diagnostic rapide pour l’angine
L’angine aiguë due au streptocoque ß-hémoly-
tique du groupe A ne représente que 25 à 40 %
des angines de l’enfant et 10 à 25 % des angines
de l’adulte. Aucun signe ou score clinique n’a
de sensibilité ni de spécificité suffisantes pour
affirmer l’origine streptococcique d’une angine
(5, 6). Aussi, pour tenter de diminuer la pres-
cription d’antibiotiques dans le cadre des
angines, des tests de diagnostic rapide du
streptocoque (TDR), que le médecin réalisera
au cabinet pendant la consultation du malade,
sont en développement. Un test positif signera
l’origine streptococcique de l’angine et autori-
sera la mise au traitement par antibiotiques. Un
test négatif n’autorisera pas la mise au traite-
ment par antibiotiques, sauf si des arguments
cliniques ou épidémiologiques laissent penser
que l’origine est bactérienne (anaérobie :
angine de Vincent), mais pas streptococcique.
Une réflexion est en cours avec les pouvoirs
publics sur le mode de prise en charge de ces
tests (codification, remboursement). Une étude
pilote a été menée en France (octobre 1998-
mars 1999), où les TDR (n = 900) ont été prati-
qués par des médecins formés en une seule
journée à leur usage. L’usage de ce test a per-
mis de réduire de plus de 50 % (38 % de pres-
criptions au lieu de 82 %) la consommation
d’antibiotiques chez les patients inclus qui
souffraient d’angine (7). La mise à disposition
des TDR sera sans aucun doute une véritable
aide pour les médecins de ville.
En attendant cette aide, il reste d’usage de trai-
ter les angines aiguës selon les recommanda-
tions suivantes (3) :
Traitement de 10 jours : pénicilline V, aminopé-
nicilline, céphalosporines de 1re génération ou
macrolides. Certains traitements antibiotiques
de durée plus courte sont possibles. À ce jour,
seules l’amoxicilline pendant 6 jours et l’azi-
thromycine pendant 5 jours ont fait l’objet d’au-
torisation de mise sur le marché en traitement
court.
Facteurs de risque et données épidémio-
logiques
La mise à disposition et l’accessibilité de don-
nées portant (i) sur les facteurs de risque à
prendre en compte pour traiter par antibio-
tiques les différentes pathologies infectieuses
et (ii) sur l’épidémiologie de la résistance bac-
térienne devraient aider en temps réel les
médecins de ville dans leur prise de décision
Ainsi, à l’adresse http://www.agmed.sante.gouv.fr,
dans la rubrique “Documentation et publication”,
au chapitre “Recommandations de bonne pra-
tique” et au paragraphe “Antibiothérapie par
voie générale en pratique courante”, vous trou-
verez la conduite à tenir en cas de bronchite
aiguë et de pneumonie chez l’adulte.
En cas de bronchite aiguë, si votre patient a une
pathologie respiratoire chronique ou une
comorbidité associée (insuffisance cardiaque,
rénale, pathologie néoplasique, immuno-
dépression, cirrhose hépatique) ou s’il est âgé
et a un mauvais état général, vous lui donnerez
d’emblée des antibiotiques. Pour les autres
malades, vous leur demanderez de vous tenir
au courant de l’évolution de leur bronchite qui,
comme l’origine a de grandes chances d’être
virale, devrait être favorable. Néanmoins, en
cas de persistance de la toux et d’une expecto-
ration purulente au-delà du 7ejour, vous pour-
rez prescrire des antibiotiques, surtout si le
patient est un fumeur chronique.
Dans ce contexte, les cyclines et les macrolides
(pour une durée de 5 à 8 jours) sont des anti-
biotiques bien venus car ils agissent sur les
bactéries colonisatrices des muqueuses respi-
ratoires et possiblement en cause dans la sur-
infection bactérienne, mais aussi sur les bacté-
ries dites “intracellulaires” (Mycoplasma et
Chlamydia), dont la fréquence semble plus
importante que ce qui était jusqu’ici imaginé.
En cas de pneumonie, il faut impérativement
s’assurer que le patient ne présente aucun
signe de gravité et aucun facteur de risque de
mortalité (encadré).
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