faveur d’une origine bactérienne, le recours aux
antibiotiques reste rare et n’a lieu d’être que
lorsque la diarrhée se prolonge et s’accom-
pagne d’une altération de l’état général en
dépit d’une bonne hydratation (2).
Infections ORL et respiratoires
Le diagnostic étiologique différentiel, notam-
ment entre virus et bactéries, est plus compli-
qué pour ce qui est des infections de la sphère
ORLet de l’arbre respiratoire, et ce d’autant
que l’infection n’est pas vue à un stade précoce
de son évolution. En effet, les lésions des
muqueuses induites par l’infection virale sont
le lit potentiel d’une surinfection bactérienne,
due à certaines souches des espèces bacté-
riennes qui colonisent les muqueuses de l’oro-
pharynx telles que : Streptococcus pneumo-
niae, Haemophilus influenzae, Branhamella
catharralis. Cette intrication virus/bactéries au
niveau des muqueuses respiratoires explique
certainement le fait que beaucoup d’antibio-
tiques prescrits en ville, notamment en France
(60 millions de prescriptions par an, ces der-
nières années), le sont pour traiter des infec-
tions ORL et respiratoires (40 millions de pres-
criptions par an) (3). La conséquence directe de
cette prescription massive a été la sélection, au
sein de la flore des muqueuses humaines, de
souches devenues plus résistantes aux antibio-
tiques. C’est notamment le cas de S. pneumo-
niae et de H. influenzae, dont la transmissibilité
est grande d’un individu à un autre de par sa
niche écologique, le rhinopharynx. Les goutte-
lettes de Pflügge et la salive, en effet, les trans-
portent aisément. Ainsi, comme le montre le
tableau IV, un isolat sur deux de pneumocoque
provenant d’enfants n’était plus, en 1999 et en
France, sensible à la pénicilline G, un sur trois à
l’amoxicilline et deux sur trois à l’érythromycine
(4).
Réduire la prescription d’antibiotiques dans le
cadre des infections ORL et respiratoires est
pour toutes les raisons citées, devenu une vraie
recommandation nationale (3), tandis que se
développent parallèlement des réseaux de sur-
veillance de la résistance aux antibiotiques.
ENPRATIQUE, EST-IL POSSIBLE DE RÉDUIRE LA
PRESCRIPTION D’ANTIBIOTIQUES EN VILLE ?
Pour répondre à cette question, il faut, semble-
t-il, tout d’abord planter le décor dans lequel
est prise la décision de prescrire ou de ne pas
prescrire un antibiotique.
Le médecin consulté est seul dans son cabinet,
bien qu’à quelques rues voisines d’autres
confrères exercent le même métier. Il n’en
demeure pas moins que, pour l’instant qui nous
concerne, il a été choisi, parmi les autres, par le
malade qui lui fait face. Le malade est un adulte
ou un enfant accompagné d’un parent. Les
symptômes, l’histoire de ces symptômes, sur-
venus à telle période de l’année, et l’examen
clinique laissent penser qu’il s’agit d’une rhino-
pharyngite d’origine virale.
L’adulte touché par le virus a, l’an passé, fait
une sinusite et redoute que cela ne recom-
mence. Aussi demande-t-il au médecin un traite-
ment antibiotique, car, l’an passé, la sinusite a
fait suite à un rhume. L’enfant touché par le
virus est gardé en crèche, et cet après-midi
après la sieste, il avait 39 °C de fièvre. Sa
maman peut s’arranger pour le garder à la mai-
son le lendemain mais pas le surlendemain. Il a
eu une otite il y a un mois, et la maman n’a pas
envie que cela recommence. À la crèche, ils
n’ont pas le temps de lui faire régulièrement un
rinçage du nez avec du sérum physiologique et,
de toute façon, ils ne le reprendront pas le sur-
lendemain s’il a encore de la fièvre... “Docteur,
faites quelque chose !” Et si le médecin ne fait
que dire : “C’est viral, alors il faut attendre que
ça passe. Il faut vous (le) moucher, drainer les
sécrétions. Si dans trois jours, cela ne va pas
mieux, téléphonez-moi ou revenez me voir, je
vous prendrai entre deux rendez-vous” ?
Le client suivant, puis le suivant encore, ont une
rhinopharyngite virale.
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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. II - 3eet 4etrimestres 2001
DOSSIER
DOSSIER
Origine Nombre Pourcentage de S. pneumoniae sensibles
PEN AMX ERY
Francea
Adultes 9 956 61 77 53
Francea
Enfants 4 222 49 69 35
Franceb203 37 – 42
Espagneb91 53 – 65
Allemagneb128 95 – 92
Belgiqueb103 82 – 74
Hong Kongb84 20 – 18
Kenyab214 52 – 99,5
États-Unisb685 59 – 67
Tableau IV. Sensibilité (%) de S. pneumoniae en 1999 dans différents
pays (d’après référence 4).
PEN : pénicilline G, AMX : amoxicilline, ERY : érithromycine.
aÉtude uniquement française. bÉtude multinationale.