JUIN 98 MEP 1 23/04/04 16:19 Page 3732 Revue de presse Synapse et schizophrénie Syndrome de la Tourette Albuquerque (Nouveau Mexique) New Haven (Etats-Unis) Les changements cyto-architecturaux liés à la schizophrénie ont été fréquemment décrits, mais nous en connaissons encore trop peu sur les mécanismes moléculaires sous-tendant cette pathologie cellulaire. La synaptogenèse et les vésicules synaptiques résultent d’une cascade de mécanismes mettant en jeu des protéines différentes. Parmi celles-ci, la SNAP-25 (synaptosonal associated protein 25 KD) se lie à d’autres protéines, aux membranes cytoplasmiques et aide à la stabilisation des vésicules. L’étude menée par P.M. Thompson et coll. (Altered levels of the synaptosomal associated protein SNAP-25 in schizophrenia. Biol. Psychiatry, 1998, 43 (4) : 239-43) compare des prélèvements, faits dans les 48 heures post mortem, de l’hémisphère droit de sujets masculins. L’étude porte sur 25 sujets schizophrènes et 31 contrôles (âge : 2372 ans). Le cortex des aires de Brodman suivantes est étudié : cortex temporal inférieur, cortex associatif préfrontal et cortex occipital. Par rapport aux sujets contrôles et à la zone “neutre” que constitue le cortex occipital, les taux de SNAP-25 sont abaissés ches les patients schizophrènes. La hiérarchie des taux entre zones temporale et frontale est modifiée par rapport aux sujets témoins. L’absence de cette protéine provoque chez les souris des anomalies non létales du système nerveux central. La SNAP-25 est impliquée dans la régulation neurodéveloppementale, la restructuration axonale... Ces anomalies sont au moins le reflet de la réaction cérébrale face à l’agression de la schizophrénie. Peut-être ontelles aussi une valeur étiologique ? M.S. Prendre en compte la comorbidité pour traiter plus efficacement. Ce syndrome est reconnu et traité de plus en plus précocement, même dans des formes atténuées. Le traitement des tics ne doit pas avoir d’effet négatif sur les capacités d’adaptation et d’évolution du patient (de l’enfant). L’éducation des familles permet de rappeler que la sévérité des tics n’est pas toujours reliée à un pronostic social ou affectif péjoratif. Il est important de prendre en compte les troubles associés : TOC, déficit de l’attention et hyperactivité, trouble de l’humeur, trouble anxieux généralisé, trouble du comportement. Pour B.S. Peterson et D.J. Cohen, la présence de ces troubles associés aggraverait l’expression des tics (The treatment of Tourette’s syndrome : multimodal developmental intervention. J. Clin Psychiatry, 1998, 59 (suppl. 1) : 62-72). La prise en compte du caractère de l’enfant et de sa famille est nécessaire pour développer les meilleures stratégies adaptatives face aux tics (travailler en réseau avec la famille et l’école). Cela est d’autant plus important que pour 2/3 des patients les tics s’atténuent à l’âge adulte. Il n’y a pas de pharmacothérapie qui supprime totalement les tics ; il faut commencer par des posologies basses et les augmenter progressivement. Dans la pharmacopée on note tout d’abord les antagonistes adrénergiques (clonidine) puis les antagonistes D2 (historiquement halopéridol et pimozide), mais pour ces derniers avec le risque de dyskinésies. La clozapine aggraverait les tics, la rispéridone serait, elle, bien tolérée (grâce à son effet sur les récepteurs D2 ?). Les auteurs attirent l’attention sur la pharmacothérapie des troubles associés. Traiter par psychostimulant un trouble attentionnel avec hyperactivité peut paradoxalement améliorer l’état de l’enfant Mots-clés : Protéine cérébrale, Neurotransmission, Schizophrénie. Act. Méd. Int. - Psychiatrie (15), n° 211, juin 1998 3732 même s’il a un peu plus de tics. L’humeur sera stabilisée avec des thymorégulateurs. Les TOC associés au syndrome de la Tourette sont traités par l’association ISRS et halopéridol (ou rispéridone) même si les ISRS seuls aggravent les tics. L’intérêt de cet article est de rappeler que dans ce trouble le traitement des tics se fait presque en deuxième intention, une fois la famille, l’école et les troubles associés pris en charge. M.S. Mots-clés : Syndrome Gilles de la Tourette, Comorbidité, Pharmacothérapie. Le droit des enfants La Convention relative aux droits de l’enfant a été adoptée le 20 novembre 1989. La France, qui l’a signée, l’a également ratifiée et publiée au Journal officiel. Il était donc légitime d’estimer, avec la majorité de la doctrine, que ses stipulations pouvaient produire des effets directs. Mais tel n’a pas été l’avis de la Cour de cassation (1ère ch. civ. en 1993, ch. soc. en 1994 et ch. crim. en 1997). Et le Conseil d’Etat, quant à lui, distingue selon que les stipulations de la Convention sont ou non auto-exécutoires. Cela l’amène à rejeter l’applicabilité de certains articles (art. 12, 14, 24-1, 26-1 et 27-1). En revanche, il retient l’invocation de l’article 16 (respect de la vie privée) celle de l’article 3-1 (considération primordiale de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les décisions le concernant) depuis le 22 septembre 1997. Il est étonnant de constater que, en matière d’incorporation du droit international au droit interne, le juge administratif se montre plus libéral que le juge judiciaire ; à suivre donc de très près. M.G. Imprimé en France - Differdange S.A. - 95110 e Sannois - Dépôt légal 2 trimestre 1998. © Décembre 1984 - Médica-Press International S.A. JUIN 98 MEP 1 23/04/04 16:19 Page 3733 Peut-on soigner sans formation à la communication soignant-soigné ? Berlin (Allemagne) A en croire H. Helmchen, l’avenir de la pratique médicale passerait par une réhabilitation de la qualité de la relation réciproque médecin-patient, notamment en psychiatrie, mesurée à l’aune de la réalisation du contrat thérapeutique où le savoir scientifique et l’art de la communication se rencontreraient (Mutual patient-psychiatrist communication and the therapeutic contract. Comprehensive Psychiatry, 1998, 39, (1) : 5-10). La spécialisation croissante induirait ici comme ailleurs incompréhension, anonymat, accroissement des risques de maniement des traitements modernes. La relation médicale vivrait une période charnière, quittant le modèle paternaliste elle se dirigerait vers l’élaboration conjointe du diagnostic et du traitement (modèle “professionnel-partenaire”) avec un patient informé et autonome, même au décours de rémissions incomplètes ou induisant des handicaps résiduels. La communication serait un prérequis de base pour traiter efficacement et il existerait un comportement thérapeutique de base incluant entre autres l’engagement du thérapeute ainsi que des échanges portant autant sur la maladie que sur les valeurs, souhaits et croyances de la personne. Le principal obstacle à une telle pratique serait la tendance moderne à la réification des concepts et des observations, à la systématisation, à la standardisation. L’enjeu de la communication serait d’éviter une relation de type commercial où le médecin ne ferait que vendre un savoir, pour plutôt chercher à faire son miel de l’écart entre la subjectivité du patient et les besoins d’objectivation du praticien. Des données obtenues sans accès à la parole du patient seraient d’une validité discutable. Et Helmchen de prendre des exemples d’obstacles actuels à la qualité de la communication médecin-malade (l’asymétrie, l’urgence et la maladie aiguë, le patient déficitaire ou diminué, les restrictions budgétaires et le coût apparent de la formation et de la pratique de la communication) en soulignant les bénéfices spécifiques d’une telle pratique (le consentement éclairé, l’observance, l’adhésion et l’alliance thérapeutiques). Il suggère enfin que des recherches soient entreprises sur le processus de communication soignante dans différentes spécialités médicales, sur l’effet de structures nouvelles ou différentes de systèmes de remboursement de la communication médecin-malade en somatique, et que la formation à la communication se centre sur l’apprentissage de la capacité à apprécier les valeurs et croyances et leurs effets pragmatiques... Mais où va-t-il chercher tout cela ! Peutêtre chez les théoriciens de la pragmatique de la communication qui ont déjà tout dit ou presque et depuis longtemps sur la question ? Que nenni, pas un n’apparaît dans ses références bibliographiques ! La médecine voudrait-elle à elle seule réinventer la communication ou ne souhaite-telle toujours pas communiquer avec des horsains ? L’article mérite tout de même le détour. Mots-clés : Communication, Formation, Contrat thérapeutique. Ch.L. Secret professionnel, expertise judiciaire et dossier médical Une mise au point intéressante vient d’être effectuée par le Pr M. Penneau en ce qui concerne la consultation du dossier médical par l’expert désigné par le juge (Rec. Dalloz 1996, n° 14, 182, note sous CA Rennes, ch. acc., 15 mai 1997). L’auteur rappelle que le secret professionnel est opposable au médecin, fût-il expert judiciaire, dès lors qu’il ne participe pas à la demande diagnostique ou thérapeutique au profit du patient (hormis le “secret partagé” avec le médecin-conseil de la sécurité sociale). Par ailleurs, il s’insurge contre l’opinion selon laquelle le médecin expert 3733 tirerait de sa mission un droit d’accès direct au dossier médical de la personne à expertiser. Il faut impérativement que cette dernière apporte son consentement, mais l’on ignore pas les difficultés concernant celui-ci en matière d’affections psychiatriques sévères. Naturellement, au pénal, l’expert peut toujours consulter le dossier que le juge aura fait préalablement saisir. En milieu pénitentiaire, le secret professionnel s’applique de la même façon qu’en milieu libre, et la loi du 18 janvier 1994 a confié au service public hospitalier la charge de l’ensemble des soins aux detenus, par le biais de l’établissement public de santé situé à proximité. Une démonstration convaincante qui est loin de faire l’unanimité chez les magistrats eux-mêmes. M.G. Dépression du post-partum : des effets plus perturbateurs sur l’adaptation scolaire des garçons des familles pauvres Reading (Grande-Bretagne) Dans une étude prospective et comparative longitudinale d’enfants de 5 ans nés (à terme et en bonne santé) de mères au postpartum euthymique ou dépressif, les psychologues D. Sinclair et L. Murray (Effects of postnatal depression on children’s adjustment to school. Brit. J. Psychiatry, 1998, 172 : 58-63) montrent que le niveau socio-économique et le sexe de l’enfant sont les variables les plus corrélées à la qualité de l’adaptation scolaire évaluée par les instituteurs (questionnaires) à la fin du premier trimestre de scolarisation. Les études sur l’impact de la dépression du post-partum sur l’adaptation sociale et émotionnelle des enfants s’appuient classiquement sur ce qu’en disent les mères. A cet égard la présente recherche apporte un plus méthodologique non négligeable et ses résultats divergent notablement de ceux des travaux antérieurs. Cinquante-quatre JUIN 98 MEP 1 23/04/04 16:19 Page 3734 Revue de presse enfants de mères ayant vécu un épisode dépressif dans les 6 semaines suivant l’accouchement ont pu être comparés à 38 enfants de mères n’ayant pas souffert cette expérience. Des évaluations de l’état psychique des mères ont été réalisées à 3 mois, 18 mois et 5 ans, permettant de déterminer la présence ou l’absence de dépression, la durée cumulée de l’exposition de l’enfant à la dépression maternelle, la date de début de cette exposition. D’autres évaluations, concernant la relation mère-père et l’implication éventuelle de l’enfant dans les conflits parentaux, ont aussi été effectuées. Les questionnaires adressés aux instituteurs (ignorant les véritables objectifs de la recherche) par un chercheur (ignorant l’état psychique des mères des enfants concernés) constituent une batterie valide, fiable et sensible pour la “quantification” de l’adaptation scolaire, du comportement social, du caractère, de la maturité et de la capacité à travailler en groupe. Résultats : la dépression maternelle n’a pas d’effet significatif sur le fait d’être prêt à la scolarisation. Toutefois, plus la dépression est récente et plus l’enfant est jugé immature, émotif, remuant (ce dernier point ne concernant que les garçons), labile quant à l’attention et inapte à s’occuper seul pendant les temps libres (surtout pour les garçons issus de familles de bas niveau socioéconomique). Des troubles du comportement à expression clinique notable et significative du type d’“hyperactivité” et labilité de l’attention sont trouvés surtout chez les garçons de bas niveau socio-économique dont la mère a présenté une dépression postpartale. Les filles s’adaptent plus facilement que les garçons en général, EFFEXOR NOIR WYETH Act. Méd. Int. - Psychiatrie (15), n° 211, juin 1998 3734 même lorsqu’elles ont été exposées longtemps et récemment à la dépression maternelle. Elles seraient même dans ce cas plus attentives, plus sociables et plus stables... Les mêmes causes ne produiraient donc pas les mêmes effets. Questions : les mères vivant une dépression postpartale s’occupent-elles différemment de leur bébé selon son sexe ? Le bébé réagit-il différemment à la dépression de sa mère selon son sexe ? D’un point de vue psychothérapeutique, faut-il considérer comme prioritaire la prise en charge de la dépression du post-partum des mères primipares de rejetons mâles et de milieu socio-économique faible ? Les différences mises en évidence par cette étude se retrouveraient-elles à l’adolescence ? Mots-clés : Dépression, Post-partum, Adaptation scolaire. Ch.L.