OBESITE, DIABETE DE TYPE II ET CANCERS I. L'obésité, un fléau croissant A. Généralités 1. Définition Elle est définie pour un BMI ("Body Mass Index") ou encore IMC (Indice de Masse Corporelle) > 30. 𝑷𝒐𝒊𝒅𝒔 (𝒌𝒈) IMC = 𝑻𝒂𝒊𝒍𝒍𝒆² (𝒎) On considère que l’obésité est pathologique quand l'IMC > 40. L'obésité est de deux types: "Gynoïde" chez la femme (poire) "Androïde" pour l'homme (pomme) L'obésité est une accumulation de graisses de réserve (triglycérides) dans le tissu adipeux blanc. On a un stockage intracellulaire de triglycérides dans les adipocytes. Ce tissu adipeux est de consistance "semi-solide". 2. Triglycérides et tissu adipeux blanc Les triglycérides sont constitués d’une molécule de glycérol. Le tissu adipeux est présent partout (avec une répartition différente chez l’homme et la femme), mais celui qui a des conséquences pathologiques est le tissu adipeux viscéral. Sur le plan histologique, un adipocyte du tissu adipeux blanc contient une grosse vésicule unique, qui repousse le noyau en périphérie. Kevin CHEVALIER 1 3. Evolution de l'incidence dans les pays développés Par contre, l'obésité infantile a été multipliée par 5 depuis 1965 et plus de 3 fois depuis 1980. Ainsi, l'obésité infantile croit plus vite en France que l'obésité chez l’adulte. B. Principes de base : un peu de biochimie Tout déséquilibre positif entre apports alimentaires et besoins énergétiques favorise l'obésité. Les acides gras contenus dans les graisses alimentaires seront stockés dans le tissu adipeux sous forme de triglycérides (TG) constituant une réserve, en attendant une éventuelle demande en énergie. Les glucides présents dans l'alimentation, si en excès, peuvent être transformés en acide gras dans le tissu adipeux et stockés sous forme de triglycérides. Cela concerne les triglycérides mais aussi les glucides tous deux apportés pas l'alimentation. Les glucides alimentaires ont un rôle dits « pervers » dans l’obésité, car contrairement aux lipides ils sont responsables de la sécrétion d’endorphines (molécules du plaisir et de la satisfaction) au niveau cérébral donnant lieu à une addiction. Il est également plus difficile d’atteindre la satiété. Kevin CHEVALIER 2 C. Facteurs de rupture de la balance énergétique 1. Comportement alimentaire On a une élévation du niveau de vie, une variété d'offre "alléchante" (pub). Ceci est sous la responsabilité de la pub, des pouvoirs publics. On a aussi le changement des habitudes (travail/timing/loisirs). On a une tendance à "fractionner" les repas et à "grignoter". Ces deux facteurs entraînent un apport de glucides rapides qui sont très énergétiques mais peu rassasiants avec une tendance à l'addiction (gout sucré = plaisir). On a aussi la mise en jeu du niveau social : les bons aliments sont trop chers, on a donc des aliments "au rabais" avec des additifs cachés (sucres, graisses saturées, acides gras trans' pour la conservation, etc…) On a aussi des facteurs psychiques comme la boulimie de la dépression, l'envie de meubler le vide ou une addiction (nourriture = plaisir/sucres). 2. Sédentarité C'est bien entendu un facteur favorisant l'obésité ce d'autant que la diminution des besoins s'accompagne d'une augmentation des apports (exemple : grignotage/bière devant la télé). Le facteur social est important : un plus haut niveau social s'accompagne d'une activité physique plus intense et plus régulière. 3. Conclusion Au total, il ressort clairement de toutes les études qu'il existe une relation inverse entre le niveau socio-professionnel, la qualification (diplômes), le niveau de vie et l'obésité. L’obésité touche les classes les plus pauvres dans les pays les plus riches. 4. Facteurs génétiques L'influence de facteurs génétiques a été suspectée depuis longtemps (familles obèses), cependant : On a surement une influence polygénique : une dizaine de gènes ont été identifiés comme pouvant jouer un rôle dans l'obésité, et la plupart semblent influer sur des réactions métaboliques non décisives (autrement dit : certains en « profitent plus » que d’autres) On a trouvé un seul gène "signifiant" : celui de la leptine. La leptine est l'hormone de la satiété sécrétée par l'estomac (satiété) mais aussi par le tissu adipeux (plus tardivement). Kevin CHEVALIER 3 Sur des expériences animales sur la souris, si on mettait le gène de la leptine KO on avait une souris obèse. Par contre, en réalité chez l'Homme il n’existe que de très rares cas de mutations sur le gène Ob, ou encore sur le gène récepteur hypothalamique de la leptine (Ob-R) mais dans l'immense majorité des cas d'obésité on a (paradoxalement) une augmentation du taux de leptine. Chez l’Homme, on retiendra qu’il n’existe pas de prédispositions génétiques à l’obésité (du moins ça n’a jamais été prouvé). II. Obésité et morbi-mortalité A. Principales pathologies liées à l'obésité Les principales pathologies liées à l’obésité sont : les dyslipidémies et le diabète de type II. Ces deux pathologies augmentent considérablement le risque cardiovasculaire (athérosclérose /artériosclérose (=durcissement de la paroi des artères)). De plus, le diabète de type II conduit souvent à une insuffisance rénale qui entraîne une accumulation de toxines urémiques qui vont engendrer une calcification de la paroi artérielle :c’est l’artériosclérose, qui entraîne une perte de la compliance des artères. Les dyslipidémies et le diabète de type II engendrent aussi des problèmes visuels (le diabète de type II est la 1ère cause de cécité en France), des conséquences neurologiques et des conséquences infectieuses (pouvant entraîner des amputations des membres). L'obésité augmente aussi le risque de cancer (colon, sein, pancréas). B. Obésité et diabète de type II 1. Généralités Le tissu adipeux n'est pas une simple réserve inerte de triglycérides. C'est au contraire un tissu très actif métaboliquement produisant des hormones spécifiques (les adipokines). Il est de plus une source importante de radicaux libres toxiques (production d’espèces activées de l’oxygène par les macrophages) pour différents constituants cellulaires (protéines, ADN, lipides membranaires, etc…). Il y a donc création d’un stress oxydant. 2. Adipokines dans le diabète La résistine (hormone de résistance à l'insuline) et la leptine (hormone de la satiété) sont augmentées chez l'obèse. Par contre l'adiponectine, (adipokine anti-inflammatoire) est diminuée chez l'obèse. De plus, le tissu adipeux blanc produit des cytokines pro-inflammatoires : TNF-α, IL-1, et IL-6 produisant des espèces activées de l'oxygène. Kevin CHEVALIER 4 3. Epidémiologie Le diabète de type II apparaît souvent chez un sujet obèse de plus de 40 ans. On parle de diabète gras du sujet âgé. Le diabète de type II est un diabète "hyper-insulinique" c'est-à-dire qu'on a une résistance à l'insuline entraînant une hypersécrétion compensatoire. L'insuline étant moins efficace, on a une hyperglycémie avec des conséquences : Cardiovasculaires, rénales Des neuropathies Une cataracte Une diminution de la résistance aux infections… 4. Entrée du glucose dans les tissus "insulino dépendants" a. Physiologiquement Lorsque l'insuline se fixe sur son récepteur, elle active une cascade de signalisation passant par IRS, PI3K activant la PKB (ou Akt). C'est une protéine kinase qui va phosphoryler des protéines du cytosquelette, pour faire sortir les transporteurs du glucose : Glut-4 au niveau de la membrane. Ces transporteurs en l'absence d'insuline sont cryptiques, c'est-à-dire séquestrés dans la cellule. En se fixant, l’insuline va phosphoryler les tyrosines du récepteur. L’IRS ne reconnaît que les tyrosines phosphorylées du récepteur. Cette interaction va entrainer l’activation de l’IRS qui va à son tour phosphoryler ses tyrosines. Cette phosphorylation va permettre à la PI3 Kinase de s’ancrer à IRS. La PI 3-kinase va être activée en phosphorylant le phosphatidylinositol du feuillet interne de la membrane (via P110), entraînant l'apparition de phosphatidylinositol 3-Phosphate. Kevin CHEVALIER 5 Il va pouvoir recruter les protéines kinase B (PKB ou Akt), mais aussi PDK et PKC permettant la transduction du signal. En l’absence d’insuline, les protéines ne peuvent pas interagir avec le récepteur. b. Diabète de type II On a une diminution via la résistine, les cytokines pro-inflammatoires et le stress oxydant de l'activation de l'Akt. On aura donc moins de Glut-4 transportés vers la membrane. 5. Mécanismes du diabète a. La résistine (résistance à l'insuline) On voit bien que la résistine diminue l'expression du récepteur en présence d'insuline. La résistine stimule la synthèse d'un facteur SOCS3 inhibiteur de la PI3 kinase. La résistine active aussi PTEN une phosphatase qui va déphosphoryler IRS. Kevin CHEVALIER 6 b. Les cytokines pro-inflammatoires Le TNF-α diminue la sensibilité à l'insuline (A), en réduisant la phosphorylation de IRS 1 (B), via une augmentation de l'activité de la protéine-phosphatase PTP1B (C) c. Le stress oxydant La glucose oxydase (GO) génère un stress oxydant. En sa présence, on a une légère augmentation du niveau basal sans insuline mais on a surtout une diminution de la réponse à l'insuline. Le stress oxydant a un effet inhibiteur direct sur PKB Kevin CHEVALIER 7 6. Conclusion Récepteurs des AGE présent sur les macrophages Une glycation (≠ glycosilation) est une réaction du glucose et ses produits d’oxydation avec les protéines. C’est une réaction non enzymatique qui se fait spontanément. Ce processus aboutit à la formation d'AGES, qui sont reconnus par RAGES, ce qui restimule le stress oxydant. Les RAGES activeront via les macrophages, la production de cytokines pro-inflammatoires. C. Obésité et cancer 1. Rôle de la leptine Le lien entre l'obésité et le risque de cancer serait entre autre dû à la leptine (qui augmente en cas d'obésité). Des travaux récents montrent : Une forte expression des récepteurs à la leptine dans divers types de cellules tumorales (sein, colon, …) Un effet prolifératif et anti-apoptotique de la leptine sur les cellules tumorales La leptine stimule la prolifération de certaines cellules tumorales via l'activation des voies JAK/STAT et Erk1/Erk2. L'hyperleptinémie chez l'obèse n'est qu'un paradoxe apparent. Kevin CHEVALIER 8 On a le même problème que pour l'insuline : l'obésité induit une résistance à la leptine et donc une hypersécrétion réactionnelle. L'hyperleptinémie est non efficace en terme de satiété (récepteurs centraux différents des récepteurs périphériques) mais stimule la prolifération cellulaire au niveau périphérique notamment au niveau des cellules pré-cancéreuse et cancéreuse induisant en plus une résistance à l'apoptose. 2. Rôle du stress oxydant Mutations Résistance à la leptine Hyperleptinémie L'un des marqueurs type du stress oxydant et des dommages oxydatifs créés à l'ADN est le 8-OH-dG est augmenté en cas d'un régime hypercalorique. Quand on fait maigrir ces modèles animaux, le 8OH-Dg diminue. Kevin CHEVALIER 9