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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005
thyroïde. Plusieurs semaines après l’interruption du trai-
tement par antithyroïdien de synthèse, le bilan hormonal
retrouve une élévation du taux des hormones thyroï-
diennes qui contraste avec la normalité du taux de TSH.
Il persiste donc une sécrétion inappropriée de TSH, ce qui,
en dépit de l’existence d’une exophtalmie, est incompa-
tible avec le diagnostic de maladie de Basedow. Profitant
de l’arrêt de tout traitement, un certain nombre d’inves-
tigations étiologiques sont réalisées. La TSH, à 2,8mU/ml
à l’état de base, subit une ascension à 38 après adminis-
tration de TRH. Un traitement par T3 (Cynomel®75 µg
par jour pendant 3 jours) permet d’abaisser le taux de
TSH basal à 1 mU/ml et de réduire la réponse à la TRH,
qui n’atteint plus que 8 mU/ml. La sous-unité ,des hor-
mones glycoprotéïques, à taux normal à l’état de base,
suit une évolution parallèle à celle de la TSH. Le choles-
térol total est à 5,2 mmol/l et le taux de TeBG à 42nmol/l,
pour une norme féminine comprise entre 37 et 74. En
dépit de l’absence d’autre cas similaire dans la famille,
l’affinité de l’albumine pour la T4 a été évaluée et s’est
révélée normale. Enfin, la recherche de la présence d’an-
ticorps anti-T4 s’avère négative.
Cette jeune patiente est-elle réellement hyperthyroï-
dienne ? Beaucoup d’arguments s’inscrivent contre cette
hypothèse : la pauvreté du tableau clinique et la normalité
de paramètres biologiques comme le cholestérol ou le taux
de TeBG. Au demeurant, la seule hypothèse plausible où
s’associent sécrétion inappropriée de TSH et hyperthyroï-
die serait celle d’un adénome thyréotrope. Les profils de
réponses aux tests dynamiques (TRH, frénation par la T3)
sont tout à fait en défaveur de ce diagnostic, puisque les
adénomes thyréotropes sont parfaitement insensibles à ces
modulations pharmacologiques. La normalité du taux de
sous-unité libre des hormones glycoprotéiques va dans
le même sens. Enfin, l’IRM de la région pituitaire, réali-
sée dans le cadre du bilan étiologique, retrouve une hypo-
physe de morphologie et de volume normaux. Cette
étrange hyperthyroïdie n’en est donc pas une. Comment
alors expliquer le tableau biologique, d’une part, et
l’exophtalmie, d’autre part ?
L’hypothèse d’une hyperthyroxinémie dysalbuminémique
familiale n’est pas plausible. Il n’y a pas d’antécédent
familial, le taux de T3 est élevé (ce qui n’est pas un stig-
mate d’hyperthyroxinémie dysalbuminémique) et l’affi-
nité de l’albumine pour la T4 est tout à fait normale. De
la même manière, l’hypothèse de la présence d’un anti-
corps anti-T4 venant interférer dans la mesure de T4 libre
a été écartée par l’inflation associée de la T3 et de l’absence
d’anticorps anti-T4 décelable. La seule hypothèse dia-
gnostique compatible avec l’ensemble des données cli-
niques, biologiques et d’imagerie est donc celle d’une
résistance aux hormones thyroïdiennes. L’euthyroïdie cli-
nique et la normalité du taux de TSH plasmatique sont en
faveur d’une forme généralisée de résistance, la résis-
tance exclusivement pituitaire donnant un tableau
d’hyperthyroïdie, alors que les résistances périphériques
sont responsables d’une symptomatologie inverse (figure 4).
La preuve définitive de la résistance aux hormones thy-
roïdiennes repose sur l’identification d’une mutation inac-
tivatrice du gène codant le récepteur des hormones thyroï-
diennes. Dans le cas de cette jeune fille, cette recherche a
été pratiquée, mais n’a pas permis de retrouver de muta-
tion. Elle s’inscrit donc dans les 10 % de résistance aux
hormones thyroïdiennes pour lesquelles aucune anomalie
du gène codant le récepteur des hormones thyroïdiennes
n’a été identifiée. Compte tenu du diagnostic final, l’atti-
tude pratique adoptée a été celle d’une simple surveillance,
sans reprise d’aucun traitement. Enfin, l’exophtalmie, qui
ne fait pas partie du tableau des résistances aux hormones
thyroïdiennes, s’explique tout simplement, dans ce cas pré-
cis, par l’existence d’une macrophtalmie myopique.
Depuis l’arrêt de tout traitement, cette jeune fille va bien
et mène une vie tout à fait normale. Elle est désormais
avertie du caractère inopportun de la relance d’investiga-
tions sur le constat d’un taux élevé de T4 et d’une sécré-
tion inappropriée de TSH.
Cas clinique
Cas clinique