- le temps n'appartient à personne, tout le monde en dispose gratuitement et peut le
partager mais le salaire par unité de temps commercialise ce bien irremplaçable
Le salaire et l'activité comme communs
Le salaire est une forme de reconnaissance de la création de valeur économique. À ce titre, il est
d'emblée liée à la croyance commune dans ladite valeur économique et il est déterminé par par des
règles du jeu acceptées (de gré ou de force) par l'ensemble de la communauté.
Et ceci concerne aussi bien les salaires-prestations sociales qui conservent leur caractère commun
que les salaires individualisés. Ceci appelle une petite remarque: l'employeur sert d'intermédiaire
entre des clients qui paient le prix d'une marchandise et des producteurs sous salaires communs ou
individualisés. Mais cet intermédiaire va lui-même décider qui produit quoi et pour quoi. Il va
accaparer une partie de la valeur créée par les producteurs pour décider comment affecter les
investissements et une autre partie pour se rémunérer en tant que propriétaire lucratif. L'employeur
s'attribue le droit de reconnaissance de la valeur produite par les travailleurs alors que ce droit
découle, nous l'avons vu, au départ d'un commun. Heureusement, dans le cas des salaires par
cotisation-prestation, dans le cas des salaires communs, l'employeur est exclu de ce privilège
aberrant.
Mais le salaire organise en partie l'activité humaine. Bien des choses peuvent motiver une activité
mais, au départ, d'une façon ou d'une autre, de rendre le monde compatible avec l'existence de celui
ou celle qui mène l'activité. L'activité peut être vue comme une individuation, une singularisation
du monde. Les loisirs, la détente, l'activité sexuelle ou artistique, les activités domestiques ou
reconnues productives sont toutes des formes de transformation du monde qui permettent au sujet
individuel ou collectif qui les mène de poursuivre son existence - en s'attribuant du confort, de la
reconnaissance sociale, du plaisir, en se permettant d'étancher sa soif, sa faim ou de se chauffer - au
sein d'un univers.
L'ensemble des activités d'humanisation du monde constitue ce que nous appelons le travail concret
alors que la contrepartie économique éventuelle de ces activités est appelée travail abstrait. Nous
avons vu que le travail abstrait sous la forme de salaire était un commun accaparé par
l'employeur. Comme l'employeur décide qui fait quoi et comment, il accapare aussi une partie du
travail concret.