en rapport avec la dette de sommeil, qui dure habituellement
24 heures, la constipation, constante et doit être systématique-
ment prévenue par un traitement laxatif et surveillée, et les
nausées et/ou vomissements. Pour ces derniers, qui ne sont pas
systématiques et ne durent habituellement que quelques jours,
il faudra prescrire un traitement antiémétique sous forme lyoc
ou suppositoire à prendre en cas de nécessité.
Le risque de surdosage et de dépression respiratoire est très
rare chez un patient cancéreux douloureux régulièrement
réévalué et traité de façon continue. Toute réapparition inexpli-
quée d’une somnolence se majorant progressivement doit
conduire à interrompre temporairement le traitement morphi-
nique et à rechercher une insuffisance rénale, une potentialisa-
tion par des traitements associés (psychotropes et en particulier
benzodiazépine, alcool), une cause organique, une erreur de
dose. La naloxone (Narcan®) pourra être utilisée, tout en
sachant que sa durée d’action est très courte. La cause du sur-
dosage expliquée, le patient sera remis sous morphinique à une
dose adaptée.
Les coanalgésiques
Ce sont des traitements qui, associés aux antalgiques cités, ont
soit un effet antalgique dans certains types de douleur comme
les corticoïdes, les antidépresseurs tricycliques, les antiépilep-
tiques, soit un effet potentialisateur des antalgiques comme les
anxiolytiques, les neuroleptiques et les hypnotiques. Concer-
nant ces derniers, leur prescription ne doit pas être systéma-
tique et leur intérêt doit être évalué du fait du risque de poten-
tialisation de la somnolence.
TRAITEMENT DES DOULEURS NEUROGÈNES EN RAPPORT
AVEC L’ÉVOLUTION TUMORALE
Repérer les douleurs neurogènes ou mixtes
Les douleurs neurogènes “pures” sont essentiellement des
séquelles des traitements anticancéreux. Ce sont les douleurs
post-thoracotomie, les neuropathies douloureuses après chimio-
thérapie, les plexites postradiques... En cas d’évolution tumo-
rale, les douleurs sont souvent mixtes, par excès de nociception,
et neurogènes. Elles peuvent se retrouver à chaque fois qu’il y a
lésion, envahissement ou compression d’une structure nerveuse
périphérique ou centrale : compression du plexus brachial dans
le syndrome de Pancoast-Tobias, des nerfs intercostaux lors de
l’envahissement pariétal des tumeurs pulmonaires ou de la
plèvre, épidurite lors de métastases osseuses...
Les douleurs neurogènes sont repérées à l’interrogatoire du
malade par leurs caractéristiques (territoire neurologique ou en
rapport avec la cicatrice chirurgicale ; composante continue
souvent à type de brûlure pouvant être associée à une compo-
sante paroxystique, paresthésies) et à l’examen clinique, qui
retrouve des troubles de la sensibilité superficielle (hyperesthé-
sie, hypoesthésie...) dans le territoire douloureux.
Les douleurs mixtes nécessitent un traitement spécifique à un
moment de l’évolution de la maladie et/ou en cas de non-
contrôle lors de l’augmentation des morphiniques.
Traitements
Le choix du traitement sera guidé par l’existence de contre-
indications, le type de douleur prédominant. Observons que,
contrairement aux douleurs par excès de nociception, les dou-
leurs neurogènes sont plus difficiles à soulager et, pour trouver
la dose efficace de leurs traitements, du temps est nécessaire ;
cette efficacité est, en outre, souvent incomplète. En particu-
lier, les antidépresseurs tricycliques et la gabapentine deman-
dent une augmentation progressive des doses avec un effet
retardé. Il est nécessaire d’en avertir le malade.
Tramadol (Topalgic®, Zamudol®, Contramal®)
En cas de douleur légère à modérée, le tramadol est indiqué du
fait de son action mixte. Si le malade est déjà sous un antal-
gique de palier 2 pour d’autres douleurs, celui-ci peut être rem-
placé par le tramadol, soit seul, soit associé au paracétamol
(palier 1). Si le malade est sous morphinique, il est préférable
d’utiliser un autre traitement, bien qu’il n’existe pas d’effet
antagoniste. La dose initiale habituelle est de 100 mg LP matin
et soir. Il existe une forme à 50 mg qui peut être préférée au
début chez les malades âgés ou sensibles aux effets secon-
daires. La dose sera augmentée en fonction de la tolérance
jusqu’à 200 mg matin et soir.
Bien qu’il soit habituellement très bien toléré, la possibilité
non négligeable d’effets secondaires, à type de nausées
intenses et de vomissements, nécessite une information du
malade. L’augmentation progressive des doses, la prescription
des formes à libération prolongée ainsi que d’un antiémétique
à prendre en cas de besoin permettent d’améliorer la tolérance.
Antidépresseurs tricycliques
Les plus largement utilisés sont l’amitriptyline (Laroxyl®) et la
clomipramine (Anafranil®). Ils sont efficaces sur toutes les
composantes des douleurs neurogènes (composantes continue,
paroxystique et hyperesthésie). L’absence de contre-indica-
tions doit être systématiquement vérifiée avant leur prescrip-
tion (risque de glaucome, adénome de la prostate ou risque de
rétention d’urine, problème cardiaque). En cas de doute, un
avis spécialisé est conseillé.
Globalement, ce sont des traitements efficaces, mais dont les
effets secondaires peuvent être mal tolérés, particulièrement
chez les personnes âgées. Les doses devront être augmentées
progressivement en utilisant la forme buvable pour l’amitripty-
line et en prise unique le soir. Le malade sera prévenu que ce
traitement est un antidépresseur utilisé pour son action antal-
gique, qu’il a des effets secondaires possibles et que les effets
bénéfiques n’apparaîtront qu’au bout de plusieurs jours. La
dose maximale tolérable sera recherchée, sachant qu’elle varie
entre 30 mg et 150 mg, avec une moyenne de 75 mg/24 heures.
Les antiépileptiques
"Clonazépam (Rivotril®)
Cet antiépileptique est très largement utilisé dans les douleurs
neurogènes, pas toujours à bon escient. Il a tout à fait sa place
en présence d’une composante paroxystique importante ou mal
supportée, mais il n’a pas d’effet sur les autres composantes des
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La Lettre du Cancérologue - volume X - n° 5 - septembre-octobre 2001