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REPUBLIQUE DU MALI
Un Peuple Un But Une Foi
Rapport sur les Aspects Techniques et Economiques
De la Régénération Naturelle Assistée (RNA)
Préparé par :
Tidiani COULIBALY
Ingénieur des Eaux et Forêts
Septembre 2014
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Introduction
Au regard de la croissance démographique galopante au Sahel, les actions de reboisement
classique à elles seules seront incapables de renverser la tendance actuelle de
déboisement/déforestation et de perte généralisée du couvert forestier. Il faut certes des
investissements plus soutenus, mais aussi promouvoir des techniques qui soient, à la portée des
populations en terme de coût.
La régénération naturelle assistée (RNA) est une alternative dans les pays sahéliens qui est
définie comme une pratique qui consiste à protéger les jeunes pousses des espèces ligneuses
dans les champs de culture, afin de contribuer efficacement à la restauration du couvert végétal.
Elle est basée sur la gestion locale des essences d’arbres et d’arbustes déjà existantes. Lorsque
les conditions s’y prêtent, la RNA devrait être vue comme une méthode de reforestation rapide
et économique. Il est facile d’adopter la RNA et de l’adapter aux besoins locaux. La mise en
œuvre de la RNA est peu coûteuse et peut augmenter rapidement le couvert forestier sur de
vastes étendues, elle améliore également les sols, les cultures, contribue à l’alimentation des
bétails et l’environnement et profite aux communautés locales.
A. Aspects Techniques de la RNA
- A1) Description de la pratique :
La régénération naturelle assistée consiste à laisser au cours du défrichement (en saison che ou
en saison des pluies) un à trois (3) rejets issus des souches des différents arbres et arbustes (entre
80 à 150 pieds à l'hectare) pour qu'ils poursuivent leur croissance.
Les différentes étapes de la réalisation de la RNA sont:
- Repérage et sélection des rejets à protéger;
- Coupe des rejets non sélectionnés;
- Entretien et élagage des rejets sélectionnés chaque année;
- Exploitation raisonnée des branches issues des arbres régénérés en fonction des espèces et
des besoins (fourrages, bois, matière organique etc.).
- A2) Mise en œuvre de la technologie :
Visualisation
C’est le fait de repérer les jeunes pousses d’arbres dans les champs et jachères et de les rendre
visibles en les marquant par des signes distinctifs. Pour cela, soit on attache des tissus de couleur
vive aux jeunes arbres repérés, soit on plante un piquet de bois mort plus long que le jeune
arbre. Cette activité a pour objet essentiel d’épargner tous les arbres marqués qui sont rendus
visibles aux personnes qui labourent les champs.
Le facteur limitant au niveau de cette étape est l’absence de porte graine, c'est-à-dire l’absence
presque totale de jeunes pousses sur le terroir. Face à de telle situation, il s’agira d’amener les
déjections des animaux qui renferment des graines servant de semences qui auront un pouvoir
germinatif élevé du fait d’être prétraité à travers le tube digestif de l’animal
Démarier les rejets
Les activités de cette étape se font au moment de la préparation des champs et jachères en début
d’hivernage. Elles consistent à nettoyer la parcelle tout en prenant soin de sélectionner et
d’épargner un à deux rejets les plus vigoureux et selon une distance réglementaire. Les
avantages liés à ce niveau sont :
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Avoir un champ relativement propre et apte à supporter les cultures
Avoir une bonne densité d’arbres dans le champ
Favoriser la croissance des rejets épargnés en diminuant leur nombre par pied.
Entretien des arbres relativement grands:
Cet entretien se fait à travers les opérations suivantes :
Le pourtour des plants est constamment nettoyé en les débarrassant des herbes et feuilles
sèches. Cela évite que les plants soient brûlés en cas de feux de brousse.
Chaque année, les arbres relativement grands sont élagués. Cette technique a l’avantage
de favoriser le développement normal des cultures par l’apport de lumière indispensable à
leur croissance. En effet les branches sont coupées laissant passer les rayons solaires pour
les cultures. L’élagage permet d’avoir du bois d’énergie sans pour autant tuer l’arbre.
Les jeunes arbres épargnés qui sont beaucoup appétés par les animaux sont entourés de
protection (haie d’épine le plus souvent)
Il arrive que les paysans apportent de l’eau (arrosage) pendant la saison sèche aux arbres
qui ne supportent pas la longue sécheresse.
- A3) Contraintes d’ordres techniques
Une mécanisation non adaptée
La mécanisation de l’agriculture peut constituer un frein à l’expansion de la RNA
contrairement aux régions à faible mécanisation agricole. Il faudra certainement adapter la
technique en proposant des semis directs selon les lignes de façon à ne pas gêner le travail
mécanisé.
A cela il faut ajouter d’autres facteurs limitant à s’avoir:
Absence de porte graine, c'est-à-dire l’absence presque totale de jeunes pousses sur le
terroir ;
L'absence d'une réglementation forestière prenant en compte le statut de l'arbre régénéré
dans les champs ;
Le non respect de la propriété privée,
La coupe frauduleuse;
Des attitudes profondément enracinées (mutilations des arbres par les éleveurs) ;
Histoire et interactions ethniques ;
Facteurs climatiques (sécheresse) ;
Insectes ravageurs ;
B. Aspects Economiques
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- B1) Avantages agronomiques de la RNA
Les systèmes de production dans le cadre de la RNA sont plus complexes et plus productifs du
fait d’une intégration « agriculture, foresterie et élevage ». La plus grande disponibilité de
fourrage aérien autorise une gestion plus intensive du bétail. La quantité et la qualité de fumure
augmentent conséquemment, ce qui permet d’améliorer la fertilité des sols.
La plus grande disponibilité du bois de chauffe épargne la bouse de vache jadis utilisée comme
combustible par les paysans dans certaines localités du sahel. Ainsi, les résidus de récolte et les
bouses de vache utilisés comme combustibles pourront servir pour enrichir le sol et rehausser
le niveau de fertilité des sols.
Le paillage et les mulching effectués à partir des produits d’élagage et des brindilles permettent
de réhabiliter la fertilité des glacis en favorisant le travail des termites qui ameublissent le sol,
digèrent la matière organique et la retourne au sol sous forme d’éléments minéraux. Des
centaines d’hectares de terres peuvent être restaurés à travers cette méthode.
La présence des arbres protège contre le vent, atténue l’érosion, et l’évaporation et enrichit le
sol à travers la décomposition de la litière
- B2) Avantages environnementaux de la RNA
La pratique montre également que la RNA entraîne aussi une amélioration de la biodiversité à
partir des espèces locales adaptées aux conditions du milieu et qui avaient tendance à disparaître
du fait de la pression de prélèvements exercés sur elles. Ceci est particulièrement rifié dans
le cas où des ensemencements c’est-à-dire des apports de graines sont opérés.
En plus de ses avantages agronomiques, cette pratique comporte des avantages
environnementaux. La végétation supplémentaire dans les champs produit des dépôts plus
importants de limon riche en nutriments balayé par le vent. Le bétail passe plus de temps dans
les champs ayant une meilleure couverture arborée et y laisse son fumier comme engrais. Le
sol est enrichi avec de plus grandes quantités de matière organique provenant de la chute des
feuilles et de l’élagage.
- B3) Impacts sur la sécurité alimentaire et la réduction de la vulnérabilité des
ménages
Les résultats de l’Etude Sahel Niger (Toudou et al, 2006) montrent ainsi que les rendements
sont meilleurs sur des champs bénéficiant de la présence des ligneux. La présence des arbres
permet d’obtenir des rendements de mil variant de 100 à 370 kg/ha, pendant que les rendements
sur les champs témoins sans arbres sont de l’ordre 50 à 270 kg/ha. La présence de l’arbre permet
ainsi d’augmenter la production de 50 à 100 kg/ha.
Beaucoup d’espèces régénérées (Balanites aegyptiaca, Boscia senegalensis, Ziziphus spp,
Annona senegalensis, Sclerocarya birrea, Tamarindus indica, etc.) offrent des fruits et feuilles
couramment ou occasionnellement consommés par les populations. La RNA contribue ainsi à
améliorer la nutrition humaine par la diversification des sources et des qualités. La RNA
permet ainsi de réduire la vulnérabilité des ménages pendant les périodes difficiles.
- B4) La RNA contribue à améliorer la qualité de la vie
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En raison de la plus grande disponibilité de fourrage, les risques de conflit entre les bergers
nomades et les paysans sédentaires ont été significativement réduits.
La RNA contribue à l’allégement des tâches des femmes. Le temps consacré à la collecte de
bois a été sensiblement réduit grâce à la RNA. Elles en tirent également des revenus à partir de
la vente du surplus de bois.
- B5) Evaluation de la rentabilité économique
La RNA contribue significativement à l’économie locale grâce à la vente du bois et autres
produits forestiers non ligneux. Les revenus générés par la vente du bois deviennent de plus
en plus importants avec l’âge de la RNA.
Une équipe de chercheurs (Etude Sahel Niger 2006) fait ressortir une nette supériorité en
termes de rentabilité économique de la RNA comparée à des reboisements classiques. Les
plantations ne sont vraiment rentables que si l’accent est mis sur des espèces à haute valeur
économique telle que la gommeraie :
RNA : 31 %
Reboisement classique : 13 %
Reboisement à partir de gommeraie : 37 %
- B6) Quelques avantages de la RNA
En tant que technique contribuant à l’accroissement de la biodiversité dans les champs, la RNA
concourt également, de ce fait, à l’élargissement de la gamme de produits et services émanant
des arbres des champs. A cela il faudrait ajouter que la RNA :
contribue à la nutrition humaine ;
contribue significativement à l’économie locale ;
allège le problème de bois de feu et de construction et autres produits non ligneux (;
fourrage; feuille, médicaments, etc. )
contribue au maintien et/ou à la restauration de la fertilité du sol. (activité des termites,
fertilité du sol; meilleure infiltration de l’eau, brise-vent, dépôt de limon etc. ) ;
contribue à améliorer la qualité de vie (la vitesse du vent au niveau du sol et la fréquence
des tempêtes de poussière, protection contre les températures de 40 0C et plus) ;
augmente la diversité des espèces de plantes comestibles ;
échange d’expérience et de valorisation d’expertise paysanne
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