É D I T O R I A L Le pneumologue aux urgences The pulmonologist and the emergency department ● S. Salmeron*, A. Ellrodt** armi les symptômes respiratoires, la dyspnée, la douleur thoracique et l’hémoptysie constituent des urgences médicales lorsqu’elles surviennent de manière aiguë. La diversité des maladies respiratoires aiguës dans lesquelles ces symptômes s’inscrivent explique leur fréquence élevée aux urgences hospitalières. Les maladies respiratoires aiguës sont très fréquentes et sont vues quotidiennement aux urgences. L’Observatoire régional des urgences de la région Midi-Pyrénées a montré récemment que les maladies respiratoires y figurent au tout premier plan, qu’elles représentent en effet 13 % des urgences médicales et que l’hospitalisation est indiquée dans près de 40 % des cas (1). Si la “séniorisation” des urgences, obtenue au cours des dernières années, a permis une nette amélioration de la prise en charge des patients, les appels des urgences au pneumologue ne semblent pas avoir diminué pour autant, en raison de la gravité potentielle des tableaux réalisés. Les équipes des urgences savent bien que le pneumologue est un partenaire privilégié et qu’il se déplace habituellement rapidement dans le contexte de l’urgence. Son avis clinique et radiologique précoce permet souvent d’optimiser les délais de prise en charge et la séquence des examens complémentaires dans l’intérêt du patient. Bien évidemment, le pneumologue hospitalier sait également qu’une grande proportion des malades admis dans son service proviennent des urgences et que cette intervention précoce sur les conditions d’admission a également un intérêt dans la gestion du service et l’organisation du travail. Si la préoccupation du médecin hospitalier est la qualité de la prise en charge médicale du patient, l’intérêt pour l’investigation clinique et l’amélioration des pratiques est largement partagé par les équipes hospitalières. Les difficultés rencontrées dans la réalisation de projets scientifiques résident toujours dans l’importante charge de travail et le manque de temps disponible, particulièrement aux urgences. Malgré cela, plusieurs pathologies font l’objet d’une collaboration scientifique étroite et régulière entre urgentistes et pneumologues, ce qui témoigne de l’investissement des équipes. Parmi elles, l’embolie pulmonaire et l’asthme aigu représentent deux situations fréquentes qui justifient une prise en charge standardisée et qui font l’objet d’études d’évaluation et d’amélioration des pratiques. La prise en charge de l’embolie pulmonaire a été considérablement transformée au cours des dernières années grâce à l’apport diag- P * Service de pneumologie, hôpital Saint-Joseph, Paris. ** Service des urgences, hôpital américain de Paris, Neuilly-sur-Seine. La Lettre du Pneumologue - Volume VIII - no 4 - juillet-août 2005 nostique de l’angioscanner spiralé et des D-dimères. Les études conduites aux urgences ont largement contribué à préciser sa place et à affiner les arbres décisionnels de prise en charge (2, 3). Ces dernières années, l’asthme a également fait l’objet d’une collaboration scientifique étroite entre pneumologues et urgentistes. L’étude ASUR, réalisée dans 40 services d’urgences grâce à une collaboration entre urgentistes et pneumologues, a permis de décrire la gravité de l’état des patients consultant aux urgences pour asthme aigu ainsi que les conditions de prise en charge ; elle a ainsi mis en évidence les points à améliorer (4). L’obtention aux urgences de plus de 4 000 dossiers d’asthme aigu très bien renseignés illustre bien la qualité du travail d’investigation clinique qui a été effectué. Les enseignements tirés de cette expérience ont permis de mener une étude sur l’intérêt de la standardisation de la prise en charge aux urgences et de la définition des critères d’hospitalisation. Cette deuxième étude a permis d’améliorer la prise en charge des patients, et de réduire de 40 % le taux d’admission. Cependant, le taux élevé de récidives au cours du mois suivant montre les limites de la prise en charge des maladies chroniques aux urgences en termes de santé publique (5). L’une des questions qui engage le futur celle de l’amélioration de la prise en charge des patients au décours de leur passage aux urgences dans le cadre de la continuité des soins, en particulier pour les maladies chroniques (6). Ainsi, les pathologies respiratoires devront faire l’objet d’une action concertée incluant l’éducation thérapeutique. Le pneumologue sera certainement à nouveau un partenaire privilégié pour aider les urgentistes dans cette ■ tâche. R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S 1. Observatoire régional des urgences Midi-Pyrénées. Rapport 2003. 2. Musset D, Parent F, Meyer G et al. Diagnostic strategy for patients with suspected pulmonary embolism: a prospective multicenter outcome study. Lancet 2002;360:1914-20. 3. Perrier A, Roy PM, Sanchez O et al. Multidetector-row computed tomography in suspected pulmonary embolism. N Engl J Med 2005;352:1760-8. 4. Salmeron S, Liard R, Elkharrat D, Muir JF, Neukirch F, Ellrodt A. Asthma severity and adequacy of management in accident and emergency departments in France: a prospective study. Lancet 2001;358:629-35. 5. Salmeron S, au nom du comité scientifique ASUR. ASUR-ASUR2 vers une standardisation de la prise en charge de l’asthme aigu aux urgences. Rev Mal Respir 2005;22:4S30-4S31. 6. Singer AJ, Camargo CA, Lampell M et al. Call for expanding the role of the emergency physician in the care of patients with asthma. Ann Emerg Med 2005;45:295-8. 139