Les différents traitements “hormonaux”
!L’orchidectomie bilatérale (ou castration chirurgicale,
ou pulpectomie). C’est la technique la plus ancienne.
Efficace et économique, elle permet de supprimer la sécrétion
des androgènes testiculaires. Elle entraîne, comme tous les
autres traitements hormonaux, une impuissance et une fémi-
nisation.
!
Les estrogènes. Le diéthylstilbestrol était utilisé à la dose
moyenne de 2 à 3 mg par 24 heures. Il est actuellement aban-
donné en première intention, en raison de la fréquence des
complications cardiovasculaires et thromboemboliques qu’il
entraînait, à tel point que, bien souvent, le patient décédait des
complications cardiovasculaires avant l’échappement du can-
cer de la prostate. Actuellement, les estrogènes (fosfestrol)
sont encore utilisés à forte dose en cas d’échappement de la
tumeur.
!Les agonistes de la LH-RH. Ils sont très utilisés en raison
de leur facilité d’emploi et de l’absence d’effets secondaires
cardiovasculaires. Les androgènes sont inhibés, après une
phase d’environ trois semaines au cours de laquelle se produit
une stimulation de la sécrétion des androgènes testiculaire et
surrénalien risquant d’aggraver le cancer (“flare-up”), réali-
sant une castration médicale aussi efficace que la castration
chirurgicale. Pour éviter la stimulation androgénique du début
de traitement, il est nécessaire de faire précéder la première
injection d’agoniste par une imprégnation antiandrogénique
d’environ deux semaines.
Les agonistes de la LH-RH peuvent être administrés men-
suellement ou trimestriellement par voie intramusculaire, ou
quotidiennement par inhalation nasale. Leurs effets sont
réversibles à l’arrêt du traitement.
!
Les antiandrogènes. Ils agissent au niveau des récepteurs
cellulaires androgéniques par inhibition compétitive.
Ils n’ont
pas les effets secondaires cardiovasculaires des estrogènes.
Deux classes d’antiandrogènes sont actuellement utilisées :
les antiandrogènes stéroïdiens et non stéroïdiens.
!Les corticostéroïdes. Ils n’ont qu’une action palliative et
sont utilisés en phase terminale de la maladie.
!Les antistéroïdiens. Ils inhibent la synthèse des androgènes
testiculaires et surrénaliens. Ce sont l’aminoglutamide et le
kétoconazole, mais leur toxicité les rend peu utilisables en
pratique.
!
La chimiothérapie. L’adénocarcinome prostatique est peu
accessible à la chimiothérapie, vraisemblablement en raison du
long temps de doublement des cellules néoplasiques. Le cyclo-
phosphamide et l’estramustine phosphate sont les drogues les
plus utilisées. Ces traitements ne sont prescrits qu’en seconde
ligne, au moment de l’échappement hormonal (4).
LES INDICATIONS DE CES DIFFÉRENTS TRAITEMENTS
De très nombreux facteurs influent sur la décision thérapeu-
tique, les principaux étant le degré de dissémination locale et
générale de la tumeur et l’âge physiologique (espérance de
vie) du patient (1).
Il est ainsi indispensable de distinguer les patients présentant
une tumeur intra- ou extracapsulaire et ceux dont l’espérance
de vie est supérieure ou inférieure à environ 10 ans (70 ans
d’âge physiologique).
En effet, une tumeur de petit volume asymptomatique peut
évoluer très lentement pendant de nombreuses années sans
mettre en danger la vie du patient. De même, si le patient pré-
sente une pathologie cardiovasculaire, celle-ci peut représen-
ter un risque vital plus important que la tumeur prostatique, et
d’autant plus qu’elle sera traitée agressivement (5).
Il est ainsi possible de distinguer plusieurs situations cli-
niques :
"Patient de moins de 70 ans d’âge physiologique, avec une
espérance de vie supérieure à 10 ans, présentant un adénocar-
cinome prostatique localisé, intracapsulaire sans métastase
décelable. Il s’agit du patient idéal, pouvant bénéficier d’un
traitement curateur en vue d’une guérison.
Deux méthodes thérapeutiques curatrices peuvent être discu-
tées : la prostatectomie radicale et la radiothérapie externe. La
prostatectomie semble donner les meilleurs résultats, avec
environ 80 à 90 % de survie à 10 ans.
Néanmoins, il faut insister sur le nombre important (20 à
50 % des cas selon les séries) de tumeurs sous-évaluées en
préopératoire qui se révèlent en fait avoir franchi la capsule
prostatique à l’examen anatomopathologique de la pièce opé-
ratoire. Ces traitements curateurs n’ont alors pas d’influence
sur l’évolution du cancer.
"Patient de plus de 70 ans d’âge physiologique, avec une
espérance de vie inférieure à 10 ans, présentant une tumeur
asymptomatique localisée, intracapsulaire, sans métastase
décelable. La prostatectomie radicale n’a pas sa place dans
cette situation.
En revanche, on peut envisager une radiothérapie pelvienne à
visée curatrice si le patient est en bon état général.
Dans le cas contraire, il ne faut proposer qu’une simple sur-
veillance ; un traitement à visée hormonale n’est utile que si
la tumeur devient symptomatique, ce qui ne survient souvent
qu’après plusieurs années d’évolution. Bien souvent, le
patient décédera d’une autre pathologie avant l’apparition de
symptômes en rapport avec le cancer de prostate.
"Patient présentant un cancer ayant franchi la capsule
prostatique, associé ou non à des métastases. Il n’y a pas lieu
de proposer un traitement curateur, quels que soient l’âge et
l’état général du patient, celui-ci n’entraînant pas d’améliora-
tion significative des résultats sur la survie. Le traitement, s’il
est nécessaire, est palliatif.
–Patient asymptomatique. Le choix se fait entre une simple
surveillance (qui permet d’éviter les effets secondaires du trai-
tement) ou un traitement immédiat à visée hormonale. Le trai-
tement immédiat ne semble pas améliorer de façon significa-
tive la survie de ces patients.
–Patient symptomatique. Un traitement à visée hormonale
entraîne une amélioration rapide mais temporaire (de
quelques mois à plus de 10 ans) des symptômes. Plusieurs
modalités thérapeutiques sont possibles :
58
La Lettre du Pharmacologue - Volume 13 - n° 3 - mars 1999
THÉRAPEUTIQUE