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vol VII/n°2 avr.
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Lu et entendu au 8e Congrès international
sur les traitements anticancéreux
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e 8e Congrès international sur les traitements anticancéreux, organisé conjointement par le service
d’oncologie médicale de la Pitié-Salpêtrière et le
MD Anderson Cancer Center de Houston, a eu lieu du 3 au
6 février 1998 à Paris.
Plus de 1 000 communications scientifiques y ont été présentées aux 5 000 spécialistes venus de 72 pays.
Dans ce forum de discussions et d’échanges, une place essentielle a été consacrée à la présentation de travaux nouveaux.
Cependant, la spécificité du congrès est de développer un certain nombre de thèmes tels que les problèmes de la prise en
charge psychologique des patients atteints de cancer et de celle
de leur famille, de la qualité de vie, et de leurs droits, qui apparaissent chaque jour plus fondamentaux.
Cette année, plusieurs thèmes importants se sont dégagés du
programme.
❏ Le thème “Agent infectieux et cancer : le cancer est-il une
maladie contagieuse ?” a permis une synthèse originale.
Holland (New York, États-Unis) a tout d’abord rappelé le rôle
potentiel du virus MMTV (Mouse Mammary Tumor Virus)
dans la genèse du cancer du sein chez la femme. Ce virus,
découvert chez la souris, transmissible par le lait, est maintenant parfaitement étudié. Sa séquence génétique est bien
connue. À partir de cette séquence génétique, les chercheurs de
l’équipe du Mount Sinai Hospital ont cherché à savoir si l’on
pouvait retrouver des séquences génétiques relativement
proches dans les cellules de cancer du sein chez la femme. Une
grande partie des séquences du patrimoine génétique du virus
MMTV est ainsi retrouvée dans 40 % des cancers du sein chez
les femmes américaines au moyen d’une technique de PCR.
Ces séquences génétiques constituent le patrimoine d’un virus
qui a été appelé HMTV (Human Mammary Tumor Virus). La
séquence de ce virus, appartenant à la famille des rétrovirus,
est semblable pour environ 90 % à celle de la séquence génétique du virus de la souris. Des applications en termes de diagnostic, de traitement, et, bien entendu, de prévention sont
envisageables.
Zur Hausen (Heidelberg, Allemagne) a ensuite décrit le rôle
des papillomavirus (HPV) dans les cancers humains. Ces HPV
sont connus de longue date comme responsables de certains
cancers du col chez la femme ; plus récemment, ils ont été
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impliqués dans les cancers de la vulve, du vagin, du pénis, de
l’anus et même les cancers ORL (20 % de cas) ou de l’œsophage. L’effet carcinogène de ce virus pourrait passer par
l’action de deux oncogènes appelés E6 et E7. Une vaccination
anti-HPV est actuellement à l’étude dans la prévention des
cancers du col de l’utérus.
Pour Hunt (Ontario, Canada), l’infection à Helicobacter pylori
expose à un risque de cancer de l’estomac plus élevé. Les
patients ayant une séropositivité pour H. pylori ont deux à trois
fois plus de risques d’avoir un cancer de l’estomac que les
patients séronégatifs. Certaines souches semblent plus virulentes. Pour des souches telles que cag-A+ ou vag-A+, le
risque peut ainsi être multiplié par dix. Une prévention par une
thérapeutique antibiotique simple peut ainsi laisser espérer une
baisse de la mortalité par cancer de l’estomac, notamment dans
les pays en voie de développement.
❏ L’autre point fort de ce congrès a été la controverse sur
l’intérêt du curage ganglionnaire dans les cancers du sein.
Au critère pronostique classique de l’envahissement ganglionnaire dégagé par ce curage sont en effet actuellement opposées
la morbidité (lymphœdème chez 5 à 10 % des femmes) et
l’idée que la chimiothérapie adjuvante peut être indiquée quel
que soit le statut ganglionnaire, comme semble le démontrer le
dernier essai du NSABP.
❏ Enfin, une grande place a été donnée à la défense des droits
des patients. Delaney (Rockville, États-Unis) a souligné les
victoires remportées ces dernières années par le mouvement de
soutien aux cancéreux :
- augmentation sensible des subventions allouées à la
recherche contre le cancer ;
- développement d’une législation contraignant les groupes
pharmaceutiques à intégrer les résultats de leurs essais cliniques dans des bases de données publiques regroupant également les résultats des études subventionnées par les pouvoirs
publics et accessibles aux cancéreux et à leur famille ;
- mise en place de bureaux d’études au plus haut niveau par
l’Institut américain contre le cancer, la FDA et le département
de la Défense, avec pour mission spécifique de traiter les questions soulevées par les associations ainsi que les initiatives
avancées par ces dernières.
J.F. Morère,
CHU Avicenne, Bobigny
La Lettre du Cancérologue - volume VII - n° 2 - mars-avril 1998
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