La Lettre du Rhumatologue - n° 308 - janvier 2005
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PR – PHYSIOPATHOLOGIE, ÉPIDÉMIOLOGIE ET IMAGERIE
Rémission de la PR : un objectif à la portée des trai-
tements modernes
Depuis quelques années, les essais contrôlés montrent qu’il est
possible d’obtenir une rémission de la PR chez certains patients.
Hors des essais, dans des populations de patients moins sélec-
tionnés, la fréquence de telles rémissions était moins claire.
Au sein d’une cohorte hospitalière américaine de 331 PR – 118
(36 %) étant traitées par anti-TNFα–, la fréquence des rémissions
était globalement de 18,3%, plus élevée chez les patients sous
anti-TNFα
α(25,2 %) (Liang,371). Dans une seconde étude, issue
d’un registre épidémiologique norvégien rassemblant 2 125 PR –
dont 382 (18 %) traitées par anti-TNFα–, cette fréquence était
globalement de 15,3 % et de 13,3 % chez les patients sous anti-
TNFα(Kvien,973). Après ajustement sur l’âge, le sexe, l’an-
cienneté de la PR, sa gravité et les traitements antérieurs, les deux
études montraient que les patients sous anti-TNFαavaient envi-
ron trois fois plus de chances d’être en rémission que ceux trai-
tés par des traitements conventionnels (tableau III).
B. Fautrel
IMAGERIE DE LA POLYARTHRITE
RHUMATOÏDE
Le bilan radiographique fait partie des examens indispensables au dia-
gnostic et à l’évaluation structurale des patients atteints de PR. C’est
un examen de réalisation facile qui permet d’analyser en quelques
minutes l’évolution de la maladie. Le score de Sharp modifié par
D. Van der Heijde fait office de score de référence pour juger l’action
structurale des traitements de fond utilisés dans la PR. Cependant, ce
score ne permet pas de dépister les signes d’inflammation présents dès
le début de la maladie. L’imagerie par résonance magnétique (IRM)
et, plus récemment, l’échographie permettent le diagnostic de syno-
vites et de ténosynovites et la mise en évidence d’érosions dont le
nombre est deux à trois fois plus important qu’en radiographie. Ces
examens présentent donc des avantages incontestables pour établir le
diagnostic précoce de rhumatismes inflammatoires. Cependant, et pour
des raisons différentes, ces moyens d’imagerie ne sont utilisés qu’en
seconde intention. En effet, l’IRM pèche par son accessibilité limitée,
l’absence de véritables consensus pour suivre les patients, et des dif-
ficultés à avoir un score reproductible suffisamment sensible aux chan-
gements pour qu’elle soit utilisée à la place du bilan radiographique.
L’échographie permet un examen en temps réel du patient, une appré-
ciation de l’inflammation articulaire, mais réclame un temps d’exa-
men important et souffre d’un déficit de reproductibilité. De plus,
aucun consensus n’est actuellement défini pour déterminer quelles
articulations doivent être ciblées aux mains et aux pieds. Ce congrès
a permis d’apporter quelques éléments de réponse. En effet, Ejbjerg
et al.
(322)
ont montré, chez 35 sujets atteints de PR et 9 sujets contrôles
évalués à t = 0 et à un an, qu’une approche IRM restreinte (étude d’une
main avec une séquence pondérée T1 et injection de gadolinium) ou
multi-articulaire (étude avec des séquences pondérées T2 des mains
et des poignets ainsi que de l’un des pieds) permettait de dépister 2,7
à 3 fois plus de sujets progresseurs que le score de Sharp. Epsen et al.
(324)
ont par ailleurs montré que l’analyse de clichés IRM du poignet
et des mains, pour la synovite, les érosions et l’œdème spongieux, par
des lecteurs rompus à cette technique, permettait d’établir un score
RAMRIS (score proposé par l’OMERACT) reproductible, dont la dif-
férence minimale détectable (smallest detectable difference :SDD) est
de 2,92 pour la synovite, de 4,92 pour les érosions et de 3,62 pour l’œ-
dème. Cette SDD est inférieure ou égale à celle du score de Sharp
(SDD = 5). En échographie, une étude intéressante a été présentée par
Scheel et al.
(326)
qui ont démontré chez les patients atteints de poly-
arthrite que l’examen du versant palmaire permettait de retenir le dia-
gnostic de synovite dans près de 86 % des articulations inflammatoires
en ultrasons. Les auteurs confirment qu’une approche semi-quantitative
est préférable à une approche quantitative de mesure de la synovite, et
montrent que l’atteinte prédomine sur les articulations métacarpo-
phalangiennes
(MCP) par rapport aux articulations interphalangiennes
proximales (IPP). Un seuil de significativité de 0,6 mm d’épaisseur
pour le diagnostic de synovite est par ailleurs retenu. Pour finir, Scheel
et al. ont montré que parmi six combinaisons testées et comparées à
un examen IRM, l’étude du versant palmaire des articulations MCP
et IPP des doigts II-IV était la plus fiable et la plus performante. Fina-
lement, ces auteurs ont confirmé que l’IRM bas champ (0,2 Tesla) et
l’échographie permettaient de suivre l’efficacité des traitements par
anti-TNF (adalimumab) sur de petites articulations en démontrant une
diminution d’épaisseur de la synovite (Scheel,980) (figure 8).
D. Loeuille
Bibliographie
1. Doran MF, Pond GR, Crowson CS, O’Fallon WM, Gabriel SE. Trends in inci-
dence and mortality in rheumatoid arthritis in Rochester, Minnesota, over a forty-
year period. Arthritis Rheum 2002;46:625-31.
Tableau III. Fréquence des rémissions de la PR en pratique courante
(Liang, 371 ; Kvien, 973).
Fréquence Tous DMARD Anti-TNFαOR ajusté [IC
95
]
des rémissions Anti-TNFα
versus autres
DMARD
États-Unis (critères de Pinals) 18,3 % 25,2 % 2,7 [1,4-5,3]*
Norvège (DAS 28) 15,3 % 13,3 % 3,0 [1,7-5,4]**
Figure 8. Réduction de la synovite à 3 mois en IRM et en échographie.
Score IRM de synovite Score US de synovite
24
20
16
12
8
4
0
24
20
16
12
8
4
0
À l’inclusion À 3 mois
À l’inclusion À 3 mois
*Ajustement sur l’âge, le sexe, l’ethnie, la durée de la maladie, les traitements antérieurs.
** Ajustement sur l’âge, le sexe, la durée de la maladie, le DAS initial, les FR, le caractère
érosif, les traitements antérieurs.