Sida Selon les chercheurs, un vaccin possible... dans quelques années « eulement 5 à 10 millions de dollars sont affectés à la recherche sur un vaccin dirigé contre tous les sous-types viraux prévalents dans les pays du Sud », déplore Michèle Barzach, membre du conseil scientifique de l’IAVI, organisation non gouvernementale, créée en 1996 et nommée en 1998 centre collaborateur de l’ONUSIDA. La majorité de la communauté scientifique estime possible la mise au point d’un vaccin contre le VIH. Mais le réalisme oblige à constater que ce dernier ne pourra pas être finalisé avant une dizaine d’années. Encore faut-il que tous les pays se sentent concernés par la recherche, de même que les laboratoires pharmaceutiques, souvent montrés du doigt pour leur manque de dynamisme à cet effet. Parce que les chercheurs doivent prendre en compte la variabilité génétique du VIH à l’échelle mondiale, un consensus éthique satisfaisant doit être défini pour tous. Car l’extension de la maladie est dramatique dans les pays en voie de développement. Ceux-ci ont un accès très faible aux nouvelles thérapeutiques antirétrovirales alors qu’ils enregistrent 95 % des 16 000 nouveaux cas qui se déclarent chaque jour dans le monde. S Une recherche difficile Le défi est difficile. Au moins dix sous-types génétiques du virus ou “clades” ont été identifiés. La nature même du virus impose une nouvelle façon de concevoir le vaccin par rapport au principe habituel. En effet, la recherche vaccinale traditionnelle tente de reproduire la gué- 8 Sur quatre milliards de dollars dépensés chaque année dans le monde pour la recherche sur le sida, 50 à 75 millions le sont pour la recherche vaccinale. Et moins de 1 % des crédits est affecté à la mise au point d’un vaccin adapté aux pays en voie de développement. Un colloque organisé par l’IAVI a fait le point sur l’état des recherches. rison naturelle. Or, il n’y a jamais eu de guérison spontanée de l’infection du VIH. Le virus est protégé par les boucles hypervariables V1, V2 et V3 de la protéine d’enveloppe gp 120, qui empêchent l’accès des anticorps. Le virus reste caché dans les cellules mémoire qui échappent également au système immunitaire. Il se multiplie de façon excessivement rapide dans les CD4, provoquant leur mort directement ou indirectement, par aptoptose. Autre difficulté rappelée par le Pr Girard de l’Institut Pasteur : « On ne sait pas fabriquer un vaccin qui induit une barrière au niveau des muqueuses et il n’y a pas de bons modèles d’animaux pour l’expérimenter ». Quelques progrès Certains progrès sont pourtant réalisés, notamment grâce à une meilleure connaissance de l’histoire de la maladie. La piste de certains vaccins à base de vecteurs vivants atténués, capables d’induire une réponse cellulaire essentielle à la protection antiVIH paraît intéressante. On peut citer les vaccins à base de pox-virus, d’alphavirus, ou les vaccins à base de bactéries atténuées. Les vaccins à base d’ADN sont, eux, prometteurs chez la souris, mais moins chez le primate. La combinaison de ces deux approches attire d’ailleurs l’attention des chercheurs. Des essais de phase I sont en cours. L’action sur les protéines de régulation (tat et rev) est une voie expérimentée depuis peu chez le macaque. En phase II, la combinaison primeboost semble la plus avancée. Mais le taux de réponse n’excède pas 50 %. En phase III, on ne connaît que des vaccins sous unités à base d’antigènes purifiés de la gp 120 ou de la gp 160 dont on connaît les limites. Les axes de recherche se multiplient. Mais, pour illustrer les propos de Michèle Barzach, ils se limitent généralement à un VIH de sous-type B, surtout présent en Europe et aux ÉtatsUnis. Alors l’IAVI soutient particulièrement les rares projets de vaccin contre le sous-type A, prépondérant en Afrique, là où, justement, la maladie est exponentielle. Pour Michèle Barzach, « il serait souhaitable que soit défini un certain nombre de règles éthiques au niveau mondial. Il faut être inflexible sur le respect de certains principes touchant aux droits de l’homme, et s’opposer à l’instauration d’un double standard, l’un dans les pays riches, l’autre dans les pays pauvres. » A.-L. P. D’après la conférence de presse IAVI, juin 1999.