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V. Bouilleret*
Fusion des données multimodales
L’évolution actuelle des différentes
modalités d’imagerie fonctionnelle va
dans le sens de la fusion (ou recalage)
des données, autrement dit, de la
superposition des images anatomiques, fonctionnelles ou d’activations. Le but n’en est pas seulement
esthétique. De tels recalages permettent d’affiner la localisation anatomique des modifications observées,
de comparer ces modifications en
fonction du marqueur utilisé et de
mieux comprendre les mécanismes
conduisant à de tels changements.
Ainsi, il est maintenant courant d’étudier les modifications de la perfusion
cérébrale lors d’une crise par la soustraction du SPECT critique au SPECT
intercritique et le recalage sur une
IRM 3D (SISCOM) (1). Un tel recalage permet de contourner le manque
de résolution spatiale du SPECT.
Selon le même principe, les données
des examens PET étudiant le métabolisme cérébral sont aussi recalées sur
l’IRM morphologique. Pour étudier
les corrélations entre les modifications de perfusion et les anomalies
métaboliques, il est tout a fait possible
de les comparer sur une même IRM.
Praticien hospitalier dans le service de
neurophysiologie clinique et d’épileptologie du Kremlin-Bicêtre. Ses centres
d’intérêt sont l’épileptologie de l’adulte
et de l’enfant (à travers la clinique, la
neurophysiologie, la neuro-imagerie
fonctionnelle anatomique) et les mécanismes physiopathologiques.
Une telle étude a fait l’objet d’un travail récent, comparant région par
région les patterns fonctionnels obtenus en SISCOM et en PET chez des
patients présentant une épilepsie temporale. Ce travail a permis de retrouver un taux de concordance élevé dans
les anomalies fonctionnelles observées entre ces deux examens dans les
lobes temporaux homo- et controlatéraux, dans le gyrus orbitofrontal et
dans le cortex insulaire (2). De la
même manière, la topographie des
régions activées en IRM fonctionnelle
est précisée grâce à la fusion de ces
données sur l’IRM morphologique.
Toutes les modalités de fusion
d’images sont théoriquement possibles (SPECT, PET, IRMf, spectro,
MEG, etc.). Il est donc possible d’étudier les intrications, au sein de la zone
épileptogène, dans les modifications
fonctionnelles observées, et de mieux
appréhender les mécanismes physiopathologiques conduisant à de tels
changements.
Quantification des anomalies
en imagerie
Obtenir des images a constitué une
première étape. Quantifier les modifications observées n’a pas été immédiat. Si la quantification en elle-même
n’est pas réellement une technique
nouvelle, les modalités de cette quantification ont terriblement évolué.
Initialement réalisée par régions d’intérêt, elle a maintenant évolué vers des
techniques beaucoup plus globales. En
effet, les régions d’intérêt ne permettaient de s’intéresser qu’à une ou
L
a survenue de crises
entraîne au sein des circuits
initiateurs des crises une
cascade d’événements moléculaires. La décharge épileptique se
propage à travers des circuits
spécifiques qui peuvent ne jouer
qu’un rôle passif ou, au contraire,
être comme les circuits initiateurs, le siège de phénomènes
de réorganisation et de plasticité,
constituant ainsi de véritables
réseaux épileptogènes. L’imagerie
fonctionnelle a complètement
transformé les stratégies d’investigation des épilepsies, en particulier celle des épilepsies temporales pharmacorésistantes. Elle
permet de mettre en évidence
différents types d’anomalies
fonctionnelles et structurelles,
parfois subtiles, sous-tendant les
tissus épileptogènes et de les
confronter aux données cliniques et électroencéphalographiques du patient.
Le but de ce bref article n’est pas
de reprendre les modalités, les
indications et les limites de chacune des explorations fonctionnelles du système nerveux central. L’objectif est simplement ici
de mettre l’accent sur un certain
nombre d’évolutions ponctuelles
et récentes dans le traitement
des données, sans chercher à
être exhaustif.
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Les actualités de l’imagerie
cérébrale dans l’épilepsie
V. Bouilleret
plusieurs régions données en fonction
d’une hypothèse a priori en étudiant
seulement, étant donné la lourdeur de
la technique, une région limitée du
cerveau. Actuellement, un certain
nombre de logiciels permettent une
telle quantification sur l’ensemble du
cerveau et sans hypothèse a priori, ce
qui limite le risque de biais. Le logiciel SPM (Statistical Parametric
Mapping) est l’un des plus utilisés.
L’analyse statistique est effectuée en
chaque point de l’image (voxel par
voxel). Chaque contraste donne ainsi
lieu à une carte statistique attribuant
une valeur statistique à chaque voxel.
Cette analyse nécessite une étape
préalable de correction des artefacts
de mouvements, de normalisation des
images dans un espace référentiel
(espace de Talairach), et de lissage
spatial et temporel du signal. Si ces
techniques ont une puissance étonnante et une accessibilité rapide, elles
ne sont pas dénuées de pièges, nécessitant toujours de retourner à l’image
native. La quantification des données
en IRM fonctionnelle a la première
utilisé ces logiciels qui sont maintenant valables aussi pour les données
PET (3, 4) et, plus récemment, pour
celles de SPECT (5). Entre autres, un
travail récent en PET, utilisant SPM
sur l’ensemble du cerveau, a montré
l’implication de l’insula dans les épilepsies de sa face interne avec, en particulier, sa participation à la symptomatologie clinique (6).
La multiplication des
différentes modalités d’IRM
Il est actuellement difficile de parler
d’imagerie fonctionnelle sans faire
une large place aux différentes techniques d’IRM. Cette modalité d’imagerie, qui n’utilise aucune radiation
ionisante ni aucun traceur, permet des
études répétées et se révèle, du fait de
sa grande sensibilité et de son excellente résolution spatiale et temporelle,
un instrument de choix pour l’étude
des réseaux neuronaux impliqués dans
les fonctions cognitives et l’éventuelle
plasticité induite par les crises.
IRMf
L’IRMf repose sur l’augmentation
locale transitoire du débit sanguin liée
à l’activation cérébrale. Ainsi l’IRMf
donne accès à la fois à la fonction et à
l’anatomie. Cette technique est d’autant plus séduisante que potentiellement accessible dans tous les centres
équipés d’une IRM, mais elle reste
limitée par le confinement dans l’aimant et la nécessité d’éviter tout mouvement. Dans un premier temps, seuls
les cortex primaires (visuel, sensorimoteur et auditif) ont été explorés. Par
la suite, l’IRMf a permis de détecter
les aires corticales impliquées dans les
processus cognitifs supérieurs comme
le langage, l’idéation ou l’imagerie
mentale. Ainsi, dans les épilepsies chirurgicales, l’IRMf du langage permet
de latéraliser le langage et devrait
donc, à moyen terme, remplacer les
procédures invasives utilisées, dont le
test de Wada qui repose sur l’injection
carotidienne de barbituriques ou le
placement d’électrodes sous-durales
préopératoires (7). Actuellement,
l’utilisation de stimulus unique (paradigme événementiel) offre la possibilité d’étudier des réponses individuelles et d’examiner l’origine des
différences de réponses cérébrales, en
d’autres termes des stratégies individuelles. Au-delà des processus
conscients, l’IRMf donne également
accès aux stimulations subliminales
(8). Ces derniers domaines d’exploration en sont encore au stade de la
recherche.
EEG sous IRM
Cette technique est apparue récemment. Elle consiste à enregistrer
l’EEG directement dans l’aimant, en
posant des électrodes amagnétiques
sur la tête du sujet. L’intérêt, ici, est de
Act. Méd. Int. - Neurologie (3) n° 8, octobre 2002
pouvoir combiner des signaux possédant une haute résolution temporelle à
une modalité d’imagerie de haute
résolution spatiale. Cependant, il
s’agit d’une technique très difficile du
fait des contraintes de l’IRM. Les
signaux EEG, très perturbés par les
gradients de champ magnétique, doivent être expurgés de nombreux artefacts avant de pouvoir être interprétés.
Néanmoins, les premières études
appliquées aux patients épileptiques
ont pu montrer qu’il était possible,
après détection des événements intercritiques sur l’EEG, de reconstruire en
IRMf un réseau épileptogène (9).
IRM de diffusion/tracking de
fibres
L’IRM de diffusion est une technique
non invasive et non traumatique, qui
permet de caractériser les mouvements browniens microscopiques des
molécules d’eau. Elle rend possible
l’étude in vivo de la diffusion de ces
molécules au sein de l’espace extracellulaire. Dans le cerveau, il existe
une orientation préférentielle de la diffusion due aux fibres de substance
blanche dont chaque faisceau possède
une orientation propre. Ainsi, l’eau
diffuse plus volontiers parallèlement
au grand axe des fibres que perpendiculairement. Cette caractéristique
définit l’anisotropie cérébrale. La
technique de tenseur de diffusion permet de mettre en évidence une direction
préférentielle de diffusion aqueuse,
donc de caractériser morphologiquement la direction des faisceaux de fibres
(tracking de fibres). Ainsi, la neuroplasticité entraînée par la répétition des
crises épileptiques devrait, à moyen
terme, être visualisée. Cette technique
reste du domaine de la recherche.
Diversification des marqueurs
Le traceur le plus utilisé en TEP est le
[18F]-désoxy-glucose (FDG) qui
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