Concernant les différentes pathologies
proctologiques dues au grand âge (au-
delà de 75 ans), l’analyse de la biblio-
graphie n’a permis de retrouver que de
rares références spécifiques.
À 75 ans et plus, les affections procto-
logiques paraissent moins fréquentes
que chez l’adulte jeune. Pourtant, il
s’agit davantage d’une impression que
d’une réalité. En effet (2) :
– à domicile, l’autonomie du patient est
souvent réduite et ne lui permet pas de
consulter un spécialiste éloigné ;
– en institution, un consultant en proc-
tologie est souvent un luxe ;
– enfin, et surtout, de nombreuses
autres préoccupations médicales pren-
nent volontiers le pas sur les symp-
tômes proctologiques.
Les modifications anatomo-
pathologiques liées à l’âge
Le vieillissement est un phénomène
complexe et multifactoriel faisant inter-
venir de nombreux facteurs : géné-
tiques, biochimiques, immunitaires,
hormonaux (effets systémiques connus
de l’hypo-estrogénie de la ménopause) et
d’autres non encore élucidés (3).
Lors du vieillissement, les modifica-
tions vertébrales et le relâchement abdo-
minal entraînent une hyperlordose lom-
baire avec une saillie du promontoire,
une horizontalisation du sacrum et le
recul de la butée coccygienne. Ainsi, la
résultante de la pression abdominale va
se diriger plus en avant, vers la fente
vulvaire. De plus, on assiste à une perte
d’élasticité des fascias et des ligaments
susceptibles de se rompre et à une atro-
phie progressive de la musculature
pelvi-périnéale, en particulier du fais-
ceau puborectal du releveur, ce qui va
entraîner un effacement du cap anal.
Ainsi, progressivement, le vagin et le
rectum vont devenir verticaux et ce der-
nier n’aura plus d’assise postérieure
lors de la poussée abdominale (4).
L’influence de l’âge sur la fonction ano-
rectale est démontrée par plusieurs études
s’appuyant sur les différentes techniques
d’exploration des facteurs intervenant
sur cette unité fonctionnelle associant
l’appareil sphinctérien (et son innerva-
tion) et le rectum et sa sensibilité (5-7).
Sur le plan manométrique, l’amplitude de
la pression maximum de repos et de la
contraction volontaire diminue avec l’âge.
Les études écho-endoscopiques anales
ont montré que l’épaisseur du sphincter
interne augmente avec l’âge alors que
celle du sphincter externe diminue (8,
9). Les clichés de défécographie sont
en faveur d’une chute de la position du
périnée au repos et d’une augmentation
de la descente du périnée à la poussée.
Les études électromyographiques mon-
trent un allongement du temps de
latence du nerf pudendal. La sensibilité
ano-rectale, étudiée par électrosensibi-
lité muqueuse
et mesure des volumes
de seuils (volume
de première sensa-
tion, volume de sensation constante,
volume maximum tolérable), se dété-
riore progressivement, contribuant à
l’incidence croissante de l’incontinence
anale chez le sujet âgé. Cette évolution
des fonctions motrices et sensitives
ano-rectales liée à l’âge peut avoir plu-
sieurs origines : le vieillissement tissu-
laire, les lésions obstétricales et la
ménopause. En effet, plusieurs études
ont montré que ces modifications sont
plus marquées et plus rapides chez la
femme après la ménopause. De plus,
des études immunohistochimiques ont
démontré la présence, chez les femmes,
de récepteurs estrogéniques et proges-
tatifs au sein de la muqueuse malpi-
ghienne des cellules musculaires lisses
du sphincter interne et du tissu conjonc-
tif périmusculaire (5).
La muqueuse anale est souvent le siège
d’une parakératose, due essentiellement
à l’usage prolongé de laxatifs, respon-
sable d’une diminution de la sensibilité
anale, point de départ du réflexe exoné-
rateur (10).
Les modifications
de l’expression des pathologies
liées à l’âge
L’examen proctologique du sujet âgé se
déroule idéalement en salle de procto-
logie en décubitus latéral gauche, la
position génu-pectorale étant souvent
acrobatique. Les différents temps de cet
examen sont classiques : inspection de
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Le sujet âgé
Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n
os
8-9, nov.-déc. 2003
Les spécificités proctologiques
S. Sultan*, J. Sultan**
L’augmentation de l’espérance
de vie est un défi pour la
santé publique et un débat
pour notre société. En effet, l’espé-
rance de vie des Français a aug-
menté de 25 ans en un siècle, soit
d’un an tous les quatre ans (attei-
gnant, en 1998, 82 ans pour les
femmes et 74 ans pour les
hommes). L’enjeu est de bien vieillir,
c’est-à-dire de vieillir sans handicap
majeur, la prévention revêtant un
aspect capital pour l’économie de la
santé et l’exercice médical (1).
Le sujet âgé
* Service de proctologie médico-chirurgicale,
hôpital général des Diaconesses
et de la Croix Saint-Simon.
** Service régional d’acceuil des urgences,
CHU de Dijon.
la marge anale, toucher ano-rectal (toni-
cité, douleur, sang, tumeur, fécalome),
anuscopie ± rectoscopie, palpation des
aires ganglionnaires inguinales. Les
symptômes conduisant à consulter sont
les mêmes que ceux de l’adulte jeune
mais leur fréquence paraît se modifier
avec l’avance en âge : la pathologie
sphinctérienne et périnéale est en effet
au premier plan (suintement, pertes
fécales, glaires, faux besoins, pesanteur,
“boule anale”) alors que les hémorra-
gies, la douleur ou le prurit sont plus rares.
La constipation :
fréquence des fécalomes
La fréquence des fécalomes est plus
élevée chez les personnes âgées. La
symptomatologie est souvent atypique
ou insidieuse, voire trompeuse : consti-
pation rebelle, syndrome rectal (associant
faux besoins, ténesme, douleurs anales
ou abdomino-pelviennes), fausse diar-
rhée ou fausse incontinence anale ; la
prescription de ralentisseur du transit sans
avoir vérifié la vacuité du rectum ne pou-
vant qu’accentuer le trouble, syndrome
occlusif aigu ou de constitution pro-
gressive à bas bruit, troubles urinaires
(dysurie, incontinence ou rétention), voire
neuropsychiques (agitation, confusion).
Facile à diagnostiquer quand il est acces-
sible au toucher rectal ou palpable sous
la paroi abdominale, le fécalome n’est
parfois mis en évidence que sur une
radiographie de l’abdomen sans prépa-
ration (image colique granitée, arron-
die). De nombreux facteurs prédispo-
sent le sujet âgé au fécalome :
– l’alitement et la perte de mobilité ;
– l’accessibilité difficile des toilettes ;
– les troubles de la progression colique
(régime pauvre en fibres, hydratation
insuffisante) et fréquence de la dyschésie ;
– les difficultés intellectuelles ;
la prescription d’un médicament ralen-
tisseur du transit, notamment un antal-
gique de classe II ou III. Citons aussi les
antiacides à base d’alumine et de calcium,
les anticholinergiques, les antiépilep-
tiques, les antidépresseurs (dont les
IMAO) et les neuroleptiques, la colesty-
ramine, les diurétiques, les hypoten-
seurs, les sels de fer et les antiparkin-
soniens.
L’objectif du traitement du fécalome est
d’évacuer l’ampoule rectale. Le traite-
ment médicamenteux fait appel, chez
les sujets âgés, aux laxatifs osmotiques
(la déglutition des mucilages est sou-
vent difficile) ou à l’huile de paraffine
(avec précaution en cas de troubles de
la déglutition). Il faut souvent y asso-
cier un lavement (huileux ou hyper-
tonique sous faible pression en cas de
fécalome mou) ; la fragmentation ± l’éva-
cuation manuelle et/ou instrumentale
du fécalome peut s’avérer nécessaire
s’il est trop dur. Dans des situations
assez exceptionnelles, 10 à 12 cuillères
à soupe d’huile de ricin font parfois des
miracles, en sachant attendre un délai
d’efficacité de 48 heures. Dans les cas
difficiles, notamment pour traiter les
fécalomes abdominaux, il faut préconi-
ser des évacuations coliques par des
grands lavements (utiliser des solutions
à base d’eau non bouillie sans jamais
d’addition de savon ou d’eau oxygé-
née). La prévention du fécalome est
capitale, reposant sur la surveillance
objective du transit des personnes âgées
de 85 ans, puisque, dans 20 à 30 % des
cas, il y a une altération des fonctions
intellectuelles. On ne peut se fier à l’in-
terrogatoire, il faut donc pratiquer, à
intervalles réguliers chez ces malades
âgés, un toucher rectal.
L’incontinence anale
C’est un handicap très déstabilisant,
vécu comme une infirmité honteuse, qui
conduit souvent à l’isolement familial
et social. C’est un problème fréquent,
qui retentit de façon importante sur
l’équilibre physique et psychologique
des patients qui en souffrent (11).
Pour donner une estimation, selon les
résultats d’une étude épidémiologique
réalisée auprès de plus de 10 000 per-
sonnes âgées, l’incontinence fécale,
définie par la survenue d’au moins un
épisode d’incontinence par semaine,
concerne 30 % des personnes âgées
vivant en institution, 50 % des per-
sonnes ayant une perte d’autonomie
résidant, par exemple, dans un secteur
de psychogériatrie, et 90 % des per-
sonnes âgées démentes et grabataires (11).
Dans la population des personnes âgées
vivant au domicile, on estime la fréquence
de l’incontinence fécale entre 2 % et
4 %. Ce chiffre de prévalence est proba-
blement sous-estimé, compte tenu du
nombre de malades âgés ayant une incon-
tinence fécale dont ils nient l’existence.
Dans la population générale, chez les
sujets de moins de 75 ans, il y a une pré-
dominance féminine (deux tiers de
femmes) ; après 75 ans, la proportion
d’hommes incontinents est aussi élevée
que celle des femmes. Un quart des
incontinents urinaires ont aussi une
incontinence anale, et, après 75 ans, les
deux pathologies sont pratiquement
toujours associées (11).
Chez les femmes, l’accouchement cons-
titue une cause prédominante (rupture
sphinctérienne surtout, parfois neuro-
pathie périnéale) pouvant rester latente
plusieurs années, l’incontinence ne se
révélant qu’à la cinquantaine, favorisée
par le vieillissement naturel des tissus et
la carence en estrogènes. Une première
étude, ouverte, non randomisée, a
d’ailleurs montré une amélioration des
épreuves manométriques du sphincter
de l’anus après six mois d’estrogéno-
thérapie chez des femmes ménopausées
(12).
Chez les hommes, la cause est essentiel-
lement traumatique post-chirurgicale
proctologique. Chez les deux sexes, les
troubles du transit exposent à l’inconti-
nence (diarrhée aussi bien que fécalome).
En gériatrie, les pathologies neurolo-
giques centrales dues à la dégénérescence
ont comme conséquence des perturba-
tions du contrôle nerveux extrinsèque des
fonctions urinaires et ano-rectales, à
l’origine d’incontinence (13). De plus,
certaines circonstances cliniques sont
associées à la survenue d’une inconti-
nence fécale :
la perte d’autonomie, étroitement liée
aux compétences cognitives ;
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Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n
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8-9, nov.-déc. 2003
Le sujet âgé
– la dépendance (donc la restriction de
mobilité) ;
la préexistence d’une incontinence
urinaire (mécanismes physiologiques
communs ?) ;
les maladies neurologiques (accidents
vasculaires cérébraux, etc.).
La survenue simultanée d’une inconti-
nence anale et d’une diarrhée doit faire
suspecter un fécalome, systématique-
ment éliminé par un toucher rectal.
Le traitement médical des troubles du
transit paraît actuellement la cible pré-
dominante des efforts des soignants en
gériatrie pour prévenir et traiter l’incon-
tinence (13).
En effet, il faudra le plus souvent se
contenter d’un traitement médical symp-
tomatique : obtention de selles moulées
et fermes par un régime sans fibres,
ralentisseur du transit (antidiarrhéiques
classiques, voire codéine). À ce jour, il
n’existe pas de dispositif artificiel, validé,
tolérable, de prise en charge de l’incon-
tinence fécale alors que l’incontinence
urinaire peut bénéficier, par exemple,
de l’utilisation d’étuis péniens qui sont
efficaces s’ils sont bien adaptés. Les
techniques de rééducation périnéales et
exonératrices sont rarement possibles
à cet âge, rendant leur efficacité illu-
soire. En dehors du traitement du pro-
lapsus, la chirurgie de l’incontinence
anale (sphinctérorraphie, graciloplas-
tie électrostimulée, sphincter anal arti-
ficiel, stimulation électrique des nerfs
sacrés) ne peut être proposée aux patients
gériatriques sauf, dans de rares cas, une
colostomie définitive (14). L’utilisation
de protections en cas d’incontinence
anale quotidienne reste la mesure la plus
fréquente, les changes anatomiques à
usage unique devant être privilégiés.
Les troubles
de la statique rectale
Ils sont dominés par le prolapsus rectal
extériorisé. Le prolapsus du sujet âgé
touche essentiellement la femme ; il serait
secondaire à l’hyperpression abdomi-
nale, due aux accouchements, et à un
passé de constipation (avec efforts de
poussée défécatoire exagérés) favorisée
par l’altération du soutènement (hysté-
ropexie, hystérectomie, ménopause)
(15-16).
L’extériorisation du boudin rectal peut
être épisodique (habituellement après
la selle ou à la suite d’efforts, ou même
une station debout prolongée) ou perma-
nente avec des symptômes variables :
incontinence anale (30 à 60 % des cas),
sensation d’évacuation incomplète
(65 %), constipation (40 à 60 %) , diffi-
cultés d’évacuation fécale (25 %), plus
rarement douleurs (15-16). Les suinte-
ments, qu’ils soient séreux, sérosanglants
ou stercoraux, s’accompagnent d’une
irritation permanente de la marge
anale.
La complication majeure, heureu
se-
ment rare, est l’étranglement du pro-
lapsus qui entraîne un sphacèle du rec-
tum et une altération très rapide l’état
général ; c’est une véritable urgence
chirurgicale.
Du fait de l’infirmité qu’il occasionne,
le prolapsus extériorisé justifie un trai-
tement chirurgical (15-16). Les examens
paracliniques ne sont pas utiles au dia-
gnostic de prolapsus rectal extériorisé,
mais ils le sont plus pour le choix de la
technique opératoire (recherche d’une
élytrocèle par défécographie avec opa-
cification du grêle ou IRM dynamique,
état de l’appareil sphinctérien par écho-
graphie endoanale).
La rectopexie par voie abdominale, réa-
li
sable par abord cœlioscopique, est la
technique la plus efficace ; l’absence de
dissection des faces latérales du rectum
diminuerait le risque de constipation
post-opératoire. Le taux de récidive est
faible (de 0 à 6 %) et l’incontinence anale,
présente une fois sur deux, est amélio-
rée dans deux tiers à trois quarts des
cas, et parfois uniquement après un
délai de plusieurs mois. Les techniques
par voie basse (Delorme, en particulier
lorsque le tonus sphinctérien est de
bonne qualité) doivent être réservées
aux patients présentant un risque opé-
ratoire important ; la fréquence des
récidives après intervention de Delorme
varie de 5 à 30 %, et après résection
rectale par voie périnéale (type Alt-
meier, déconseillée en cas d’inconti-
nence qu’elle peut aggraver) de 0 à
60 % (15-16). Le cerclage de l’anus
n’est pratiquement plus conseillé, car il
est source de complications, en parti-
culier de suppurations ; de plus, il ne
guérit pas l’incontinence (10).
La pathologie tumorale
Le cancer anal représente 1,5 % des
cancers digestifs et son incidence aug-
mente régulièrement depuis trente ans.
Il se manifeste habituellement après 65 ans
et il existe une prédominance féminine
modérée avec un sex-ratio de 1/1,4. Il était
considéré initialement comme la consé-
quence à long terme d’une pathologie
proctologique bénigne. Il est maintenant
bien établi qu’il est lié à certains facteurs
de risque : infection à HPV, rapports
sexuels anaux, partenaires sexuels mul-
tiples, antécédents de cancers gynéco-
logiques (vulve, vagin, col utérin), immu-
nodépression, tabac (17).
Il s’agit, dans la majorité des cas, d’un
carcinome épidermoïde dont l’exten-
sion est principalement loco-régionale.
Il n’a pas de particularité clinique chez
le sujet âgé ; toute lésion indurée de la
marge anale doit être biopsiée pour ne
pas laisser évoluer une lésion curable
médicalement avec conservation de la
fonction sphinctérienne. Le traitement
des lésions localisées de moins de 4 cm
repose sur la radiothérapie exclusive à
forte dose. Dans les lésions évoluées,
la chimiothérapie se discute au cas par
cas en fonction de l’état général du
patient ; l’amputation abdomino-péri-
néale est devenue exceptionnelle chez
le sujet âgé (17).
Les tumeurs bénignes, en particulier
celles à composante villeuse, sont fré-
quentes chez la personne âgée, parfois
très étendue, planes et difficiles à per-
cevoir au TR. Elles sont hypersecré-
tantes, responsables d’un écoulement
anal important. Le traitement endosco-
pique est la règle (mucosectomie, laser
YAG, plasma argon).
166
Le sujet âgé
Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n
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8-9, nov.-déc. 2003
Le sujet âgé
La pathologie proctologique
“classique”
Les hémorroïdes
La prévalence de la maladie hémorroï-
daire est très difficile à apprécier,
variant de 4,4 à 86 % selon la popula-
tion étudiée et la définition retenue
(18). La prévalence est identique pour
les deux sexes, elle augmente avec l’âge
avec un pic d’incidence durant la sep-
tième décennie. Les poussées congestives
(“la crise hémorroïdaire”) sont peu fré-
quentes ; en revanche, prédominent les
procidences hémorroïdaires qui peuvent
parfois provoquer des hémorragies impor-
tantes. Ces procidences sont responsables
de suintements obligeant les malades à
utiliser des fournitures.
Le diagnostic est facile mais impose
toujours d’éliminer une pathologie asso-
ciée en cas de rectorragies ; la décision
d’une exploration du cadre colique par
endoscopie sera prise en fonction de
l’état général du patient. En l’absence
de corrélation anatomoclinique, seuls
les patients présentant des symptômes
cliniques doivent être traités.
Les récentes recommandations pour la
pratique clinique sur le traitement de la
maladie hémorroïdaire ne préconisent
pas d’attitude spécifique dans le cas
particulier du sujet âgé (18).
Les traitements médicaux (régulation
du transit, en particulier) et instrumen-
taux (sclérose, coagulation infrarouge,
ligature élastique ± cryothérapie) sont
les traitements de choix.
Les indications opératoires doivent res-
tées exceptionnelles en raison du risque
accru d’incontinence anale lié à l’exé-
rèse pédiculaire des hémorroïdes, inter-
vention de choix pour la plupart des
auteurs. L’anopexie par agrafage circu-
laire pourrait lui être préférée pour la
correction d’un prolapsus muco-
hémorroïdaire, car, d’une part, elle est
moins douloureuse (aussi bien en inten-
sité qu’en durée) du fait de la réalisa-
tion de la suture au-dessus de la ligne
pectinée et du fait de l’absence de plaie
(évitant également tout soin local), et,
d’autre part, elle n’entraîne pas de consé-
quence sur la continence (19, 20).
La fissure anale
La fissure anale ne se voit plus sous sa
forme hyperalgique associée à la contrac-
ture sphinctérienne. On rencontre plu-
tôt des fissures anciennes, atones, plus
ou moins infectées mais habituellement
indolores. Il faudra toujours se méfier
d’un carcinome épidermoïde à forme
pseudo-fissuraire, notamment en cas de
lésion non commissurale. Le traitement
n’a pas de particularité gériatrique.
Les abcès et fistules
La pathologie infectieuse classique est
tout à fait exceptionnelle (2) et ne pré-
sente pas de caractère particulier chez
les sujets âgés.
L’ulcération thermométrique
Chez ces sujets, souvent grabataires où
la température rectale est prise par une
tierce personne, de façon parfois bru-
tale, la pointe du thermomètre peut
entraîner des ulcérations rectales et des
hémorragies très graves. La lésion est
en général indolore et l’hémorragie sur-
vient une demi-heure à une heure après
la prise de température. Le diagnostic
repose sur la rectoscopie qui montre sur
la face antérieure du rectum à 4-5 cm de
la marge anale une ulcération muqueuse
en “sillon de labour” plus ou moins recou-
verte d’un caillot de sang. Il est souvent
nécessaire de faire une hémostase (élec-
trocoagulation ou point en X) (10). La
prise de température rectale doit donc être
bannie chez le sujet âgé.
Les affections ano-rectales du sujet âgé
peuvent être liées à la sénescence elle-
même, responsable d’affections en géné-
ral non graves, mais source d’ennuis et
d’infirmité très gênante. Elles peuvent
également s’observer à tout âge, mais
avec une fréquence et des particulari-
tés sémiologiques chez le vieillard. En
cas de découverte d’une lésion ano-rec-
tale, la stratégie thérapeutique doit tenir
compte de l’espérance de vie probable
et faire la juste part entre le désir de
guérir et celui d’obtenir une bonne qua-
lité de vie.
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