La Lettre du Rhumatologue - n° 242 - mai 1998
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SYMPOSIUM
Evans et coll. (5) ont réparti par randomisation 252 patients lom-
balgiques (aigus, en grande majorité) dans quatre groupes de trai-
tement :
a. repos (4 jours au lit) ;
b. exercices physiques et éducation ;
c. exercices physiques, éducation et repos ;
d. groupe contrôle (médicaments antalgiques).
Les patients n’ont pas respecté les consignes et se sont tous repo-
sés : en moyenne 9 jours dans les deux groupes comportant du
repos et 5 jours dans les deux autres groupes. Dans cette étude,
tous les patients se sont améliorés, et les différents traitements
prescrits n’ont pas semblé modifier l’évolution. Toutefois, chez
les patients appartenant au groupe “repos au lit”, le retour aux
activités normales était plus long (+ 42 %) et, chez les patients du
groupe exercice/éducation, la consommation d’antalgiques était
stoppée plus rapidement.
Deyo et coll. (6) ont évalué, chez 203 patients souffrant d’une
lombalgie aiguë ou chronique, avec ou sans irradiation sciatique,
la prescription de deux jours ou de sept jours de repos au lit. À la
troisième semaine, aucune différence n’est observée entre ces
deux groupes, hormis la durée d’absence au travail, plus longue
dans le groupe des patients auxquels on avait prescrit sept jours
de repos au lit. On remarque également, dans cette étude, que les
patients n’ont pas parfaitement respecté les consignes concernant
le repos : les patients du groupe “deux jours” se sont reposés un
peu plus (en moyenne 2,3 jours) ; les patients du groupe “sept
jours” se sont reposés en moyenne 3,9 jours.
Malmivaara et coll. (7) ont comparé trois options thérapeutiques
chez 186 patients souffrant d’une lombalgie évoluant en
moyenne depuis cinq jours : repos au lit pendant deux jours,
rééducation et exercices, maintien des activités ordinaires (en évi-
tant le repos au lit). À la troisième et à la douzième semaine de
traitement, l’évolution s’est avérée meilleure dans le groupe qui
avait maintenu ses activités, tant en termes de durée et d’intensi-
té de la douleur que de flexion lombaire, de capacité à travailler
et de durée de l’arrêt de travail.
Enfin, Indahl et coll. (8) ont réparti 975 patients lombalgiques, en
arrêt de travail depuis 8 à 12 semaines, dans deux groupes théra-
peutiques : (a) traitement conventionnel ; (b) information répétée
du patient sur l’absence de lésion rachidienne sévère, le rôle des
muscles dans la genèse des douleurs et l’effet thérapeutique d’une
reprise d’activité modérée, privilégiant les efforts en extension.
Après 200 jours de suivi, 60 % des patients sont encore en arrêt de
travail dans le groupe “traitement conventionnel”, contre seule-
ment 30 % dans le groupe “information et reprise des activités”.
VERS UNE NOUVELLE PRISE EN CHARGE DE LA LOMBALGIE ?
Il faut interpréter ces résultats avec beaucoup de prudence.
D’une part, il paraît clair que les patients les plus douloureux,
incapables de tenir debout, n’ont pas été inclus dans ces essais cli-
niques. D’autre part, les populations étudiées ne sont pas toujours
homogènes ; le caractère aigu ou subaigu de la lombalgie et l’in-
clusion ou non de patients souffrant d’une authentique sciatique
sont des facteurs susceptibles de modifier les résultats. Il ne faut
pas, enfin, sous-estimer l’influence des conditions socio-écono-
miques du pays dans lequel ces études sont réalisées et l’influence
du statut des patients inclus (type de profession, assurances
sociales, possibilité d’indemnisation...). Il paraît ainsi possible
que des résultats obtenus, par exemple, aux États-Unis ne soient
pas transposables dans les pays européens, en raison des diffé-
rences culturelles et sociales.
Les résultats de ces essais cliniques semblent cependant conver-
gents. Ils montrent que la prescription d’un repos au lit “obliga-
toire” dans la lombalgie aiguë n’est pas utile, et que la reprise
rapide des activités de la vie quotidienne favoriserait la guérison
et limiterait la durée de l’arrêt de travail. Ils suggèrent également
que, dans la lombalgie subaiguë, l’information du patient et la
reprise des activités pourraient diminuer le risque de passage à la
chronicité.
CONCLUSION
Il existe indiscutablement des arguments scientifiques sérieux
pour inciter nos patients à la reprise rapide de leurs activités, au
décours d’une lombalgie aiguë. Mais cette stratégie thérapeutique
ne pourra s’avérer efficace que si elle est associée à d’autres
mesures :
1. un diagnostic initial de qualité, prenant en compte le contexte
social, professionnel et psychologique ;
2. l’abandon définitif de l’imagerie inutile (tomodensitométrie
dans la lombalgie commune) ;
3. l’information précise et rassurante du patient ;
4. enfin, l’utilisation optimale des antalgiques, préalable indis-
pensable à la reprise d’activité. ■
Bibliographie
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