R Manipulations vertébrales “on line”

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Manipulations vertébrales “on line”
● T.
Schaeverbeke, P. Germain*
R
echercher des informations concernant les manipulations
vertébrales sur l’Internet nécessite de l’opiniâtreté : avec
les moteurs de recherche généralistes, le croisement des
termes “spine” et “manipulations” aboutit à la sélection de plus de
10 000 pages (quelques centaines si l’on s’en tient aux sites francophones) ! Ostéopathie, chiropraxie, médecine manuelle... La confusion est à la hauteur de la profusion de sites consacrés à ces pratiques. À les parcourir, on peut constater que le rachis n’est pas seul
à faire l’objet de manipulations. Une très forte majorité des pages
que nous avons parcourues relève des médecines dites alternatives,
ou de la “patamédecine”, selon le qualificatif proposé par Kahn ! Il
n’est cependant pas inintéressant de comprendre comment se sont
développées ces pratiques, et ce qu’elles recouvrent véritablement.
Petit voyage au pays des cyber-manipulations.
L’histoire des manipulations
La majorité des sites consacrés aux manipulations vertébrales
(notamment ceux figurant dans notre sélection) propose des références historiques plus ou moins lointaines, sources de la légitimité de ces thérapeutiques manuelles.
L’origine des manipulations vertébrales remonterait à la nuit des
temps. Des papyrus datant de plus de 5 000 ans avant J.C. feraient
état de telles pratiques ; Hippocrate décrit lui-même quelques manipulations dans son traité. Le Moyen Âge voit la séparation de la
médecine et de la chirurgie : les gestes chirurgicaux sont abandonnés aux barbiers et les manipulations aux rebouteux ! Ainsi se développe une pratique de la manipulation en marge de l’exercice médical. Jusqu’au XIXe siècle, le manque de médecins fait la part belle
aux rebouteux en France et les “bonesetters” font florès en GrandeBretagne. Déjà, Sir Paget conseille à ses confrères “d’apprendre et
d’imiter ce qui est bon, et d’éviter ce qui est mauvais chez les
rebouteux”. La pratique des manipulations n’est pas propre à
l’Occident : on la retrouve dans l’arsenal des médecines traditionnelles en Asie, ou chez les Mayas. Il est finalement certain que, de
tout temps et partout, on a dû proposer de remettre en place des os
ou des nerfs déplacés.
L’ostéopathie et la chiropraxie :
le dilemme américain
Comme le rappelle J.L. Garcia dans ce même numéro, c’est au
milieu du XIXe siècle que naissent aux États-Unis les deux courants
qui vont aboutir à l’ostéopathie et à la chiropraxie, deux pratiques
dont se recommande la grande majorité des sites Internet anglosaxons consacrés aux manipulations vertébrales.
En consultant ces sites nord-américains, vous retrouverez la référence historique aux fondateurs des deux courants de l’ostéopathie
et de la chiropraxie : A.T. Still et D.D. Palmer. Vous verrez transparaître des querelles anciennes qui ressemblent à s’y méprendre à
des guerres de religion ! Certains de ces sites font une publicité
outrancière de leur technique, exposant des dossiers cliniques
improbables de sujets miraculés par quelques mobilisations vertébrales après un parcours pathologique de plusieurs années.
* Service de rhumatologie du Pr Dehais,
Groupe hospitalier Pellegrin, 6, place Amélie-Raba-Léon,
33076 Bordeaux Cedex.
E-mail : [email protected]
[email protected]
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La Lettre du Rhumatologue - n° 270 - mars 2001
Les sites francophones consacrés
aux manipulations
C’est en Belgique que l’on trouve le plus de pages en langue française consacrées aux manipulations vertébrales. Plusieurs écoles
d’ostéopathie, de médecine manuelle et de médecine orthopédique
sont représentées, toutes scindées en sections francophone et flamande... Les sites québécois sont le miroir francophone des sites
anglo-saxons d’Amérique du Nord.
Les sites français ont plus naturellement retenu notre attention.
Une intéressante analyse critique des manipulations vertébrales est
proposée sur le site de T. Boyer. Il apparaît qu’en France le
Dr Lavezarri fut le premier à se recommander de l’ostéopathie et
fonda la première école française d’enseignement des manipulations ostéo-articulaires. Le pragmatisme du Français lui permit de
s’éloigner de la philosophie originelle de l’ostéopathie pour se rapprocher d’une orthopédie médicale. Maigne reprit ce concept et
créa un enseignement réservé aux médecins, basé notamment sur la
notion du dérangement intervertébral mineur qui provoquerait une
irritation de la branche postérieure du nerf rachidien.
Cependant, une pratique plus conforme à l’esprit initial de l’ostéopathie existe également en France, comme en attestent les différents sites nationaux de sociétés d’ostéopathie et les nombreuses
pages personnelles de médecins français pratiquant l’ostéopathie.
Là encore, la publicité affleure souvent sous l’information.
Les kinésithérapeutes français revendiquent également leur investissement dans ce domaine, investissement qui serait même antérieur à
celui des médecins. Bien que, juridiquement, les kinésithérapeutes
n’aient pas le droit dans notre pays de pratiquer les manipulations
vertébrales, la consultation de plusieurs sites de kinésithérapie laisse clairement entendre que l’utilisation de ces manipulations par les
kinésithérapeutes ostéopathes français n’est pas exceptionnelle. Le
site du Syndicat national des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs consacre un intéressant dossier à ce problème.
Une réflexion sur les pratiques ostéopathiques et chiropraxiques,
notamment sur les problèmes soulevés par la responsabilité juridique de la pratique de ces actes par des médecins et des non-médecins, a été conduite par une commission créée à la demande du
secrétariat d’État chargé de la Santé et de l’Action sociale en 1989,
et dirigée par le Pr Nicolas. Des extraits des réflexions de cette
commission sont disponibles sur le site “osteopathie-France.net”.
Dans l’ensemble, nous avons regretté le peu d’explications pratiques fournies sur les sites que nous avons consultés. Très peu
d’explications sont fournies sur les pathologies auxquelles s’adressent réellement les thérapeutiques manuelles, la réalisation pratique des gestes, la nature réelle ou théorique de l’effet de la manipulation ou encore les complications potentielles de tels gestes.
Que pourront penser nos patients s’il leur arrive, par mégarde, de
consulter l’Internet à la recherche de renseignements sur les manipulations vertébrales ? S’il nous est impossible de répondre à cette
question, il est facile de concevoir que la connaissance des fondements de certaines pratiques devrait permettre à chacun de développer un regard plus critique. Espérons que nos malades sauront
laisser de côté les pratiques relevant d’une philosophie pour le
moins simpliste pour ne conserver que le geste de la manipulation
qui, effectué par un professionnel compétent, a certainement sa
■
place dans des indications bien déterminées.
Quelques adresses :
L’Académie américaine d’ostéopathie : http://www.aao.medguide.net/
L’Association américaine d’ostéopathie médicale :
http://www.aacom.org/
La chiropraxie : http://www.dallastexas.net/chiropractors/
Groupement belge de médecine manuelle : http://www.gbmm.be/
L’Académie internationale d’ostéopathie : http://www.iao.be/
L’ostéopathie en France : http://www.osteopathie-france.net/
http://www.osteopathie-fr.com/
http://www.osteopathie.org/
http://www.medecins-osteo.org/
http://www.academie.osteopathie.org/
http://www.snmkr.fr/osteo.html
L’étude critique des manipulations vertébrales :
http://perso.wanadoo.fr/thierry.boyer./Manipulations.html
Les nouvelles de
L’effet structural des nouveaux traitements de la polyarthrite va rendre de plus en
plus nécessaire une évaluation précise des dégradations radiologiques. Les scores
radiologiques utilisés dans la très grande majorité des études sont disponibles
dans les fiches pratiques de la médiathèque de Rhumato.net.Vous pouvez même
les télécharger au format PDF.
http://www.rhumato.net
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