Fonction rénale dans l’insuf-
fisance cardiaque chronique :
un facteur pronostique
majeur
Une créatininémie élevée est un fac-
teur pronostique indépendant chez les
sujets âgés, chez les patients souffrant
d’hypertension artérielle, et dans les suites
d’un accident vasculaire cérébral, d’un
infarctus du myocarde ou en postchirurgie
cardiaque. Au moins deux études avaient
suggéré un même rôle pronostique dans
l’insuffisance cardiaque chronique (1, 2),
mais une étude directement centrée sur
cette hypothèse et portant sur une large
population manquait. Cette hypothèse
vient d’être testée à partir des données de
l’étude PRIME-II (Second prospective
randomized study of ibopamine on morta-
lity and efficacy) (3). Rappelons que l’ibo-
pamine est un agoniste de la dopamine
dont l’originalité est de pouvoir être admi-
nistrée per os. Cette étude a porté sur
1906 patients souffrant d’insuffisance
cardiaque chronique modérée à sévère
(NYHA classe III-IV) avec dysfonction
ventriculaire gauche (fraction d’éjection
ventriculaire gauche : FEVG < 35 %). Le
taux de filtration glomérulaire (TFG) a été
calculé par l’équation proposée par
Cockcroft et Gault (4) et bien corrélé à la
clairance de la créatinine mesurée de
façon plus précise (5). Chez l’homme :
TFG (en mlmin) = [(140-âge) x (poids en
kg) – (72 x créatinine sérique en mgdl)].
Chez la femme, la formule précédente est
multipliée par 0,85. Le TFG s’est révélé le
plus puissant indice prédictif de mortalité,
devant la classe fonctionnelle NYHA et la
prise d’inhibiteurs de l’enzyme de conver-
sion de l’angiotensine. En termes de mor-
talité, les patients dans le quartile plus bas
(TFG < 44 mlmin) ont un risque multiplié
par trois comparativement aux patients du
quartile le plus élevé (TFG > 76 mlmin)
(risque relatif = 2,85 ; p < 0,001).
L’altération de la fonction ventriculaire
gauche appréciée sur la FEVG n’était que
très modestement prédictive (p = 0,053).
Dans un sous-groupe de 372 patients dont
les neurohormones plasmatiques ont été
dosées, le TFG était inversement relié au
peptide atrial natriurétique (ANP) N-ter-
minal (r = - 0,53 ; p < 0,001) et à l’ANP
(r = - 0,35 ; p < 0,001).
Il est ainsi suggéré que la fonction rénale,
qui dépend, à la fois de l’hémodynamique
cardiaque et de l’hémodynamique arté-
rielle périphérique, est le meilleur indice
pronostique au cours de l’insuffisance car-
diaque modérée à sévère. Les auteurs dis-
cutent une limitation importante de leur
étude : l’existence d’une surmortalité dans
le groupe ibopamine, la mortalité globale
de la population ayant ainsi été suréva-
luée, voire biaisée dans ses liens avec le
TFG. Une analyse statistique complémen-
taire ne met pas en évidence d’effet/ibo-
pamine, la surmortalité des sujets avec un
TFG bas étant significativement élevée,
que le patient prenne ou non de l’ibopa-
mine. Cependant, les conclusions de cette
étude méritent d’être confirmées sur une
large population plus représentative.
1. Feenstra et al. Risk factors for mortality in
users of ibopamine. Br J Clin Pharmacol 1998 ;
123 : 421-6.
2. Madsen BK et al. Prognostic value of plas-
ma catecholamines, plasma renin activity, and
plasma atrial natriuretic peptide at rest and
during exercise in congestive heart failure :
comparison with clinical evaluation, ejection
fraction, and exercise capacity. J Card Fail
1995 ; 1 : 207-16.
3. Hillege HL, Girbes ARJ, de Kam PJ et al.
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survival in patients with chronic heart failure.
Circulation 2000 ; 102 ; 203-10.
4. Cockcroft DW, Gault MH. Prediction of
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5. Ajayi AA. Estimation of creatinine clearance
from serum creatinine : utility of Cockcroft and
Gault equation in Nigerian patients. Eur J Clin
Pharamcol 1991 ; 40 : 429-31.
D.C.
La pravastatine réduit le
risque d’AVC chez les
patients en prévention
secondaire cardiovasculaire
Les études épidémiologiques ont
montré qu’un taux élevé de cholestérol était
un facteur de risque pour les AVC isché-
miques, alors qu’un taux inférieur à la nor-
male prédisposait aux AVC hémorragiques.
Le risque lipidique vient au cinquième rang
des FDR d’AVC, après l’HTA, la présence
d’une cardiopathie emboligène, le diabète et
le tabac. Malgré ce rang modeste, les études
interventionnelles utilisant des statines en
prévention secondaire ont montré un bénéfi-
ce net quant à la survenue des AVC isché-
miques ; ce bénéfice n’est pas établi à ce jour
en prévention primaire. Une analyse post hoc
de 4S montrait une diminution de 28 % des
AVC, alors que CARE, où l’AVC faisait par-
tie des paramètres spécifiés dans le dessin de
l’étude, montrait une diminution de 32 %.
L’étude LIPID rapportée ici a inclus 9 000
patients australiens et néozélandais, âgés de
62 ans en moyenne, dyslipidémiques (CT de
1,55 à 2,71 g/l et TG inférieurs à 4,45 g/l)
ayant déjà eu un IDM ou un épisode d’angor
instable, ce dernier paramètre d’inclusion
constituant l’originalité de LIPID. À l’inclu-
sion, 4 % des patients de chaque groupe,
assigné soit au placebo soit à 40 mg de pra-
vastatine, étaient déjà porteurs d’un AVC. À
l’issue d’un suivi de six ans, un total de 419
AVC (dont 309 AVC ischémiques) a été
observé chez 373 patients. La survenue
d’AVC (toutes causes confondues) a été
diminuée de 19 % ; IC = (0-34 %) ; p = 0,05
chez les patients sous statines ; de même, la
survenue d’AVC ischémique a été diminuée
de 23 % ; IC = (5-38 %) ; p = 0,02. La pra-
vastatine n’a pas modifié la survenue d’AVC
hémorragique. De manière intéressante, ni
les valeurs lipidiques à l’inclusion ni celles à
un an de traitement n’ont été prédictives de la
survenue d’AVC. Cela pourrait conforter
l’hypothèse de mécanismes d’action pro-
tecteurs des statines sur le système ner-
revue de presse
Denis Chemla, Sophie Gonbert, Xavier Girerd
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